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juillet 08, 2015

ÉGALITARISME la pensée unique qui tient tête en socialie Vs ÉGALITÉ

L'Université Liberté, un site de réflexions, analyses et de débats avant tout, je m'engage a aucun jugement, bonne lecture, librement vôtre. Je vous convie à lire ce nouveau message. Des commentaires seraient souhaitables, notamment sur les posts référencés: à débattre, réflexions...Merci de vos lectures, et de vos analyses.


Sommaire:

A) Le délire égalitaire - par Jacques Garello - Aleps

B) Les "faites ce que je dis, pas ce que je fais" de l’État - Bertrand Nouel - IFRAP

C) Égalité de Wikiberal

D) 1984 d'Orwell n'était pas censé être un manuel de philosophie - Par Damien Theillier - la tribune.fr

 
 
A) Le délire égalitaire
 
Après le « rapport » Picketty, voici maintenant l’OCDE qui propose un classement sur les inégalités sociales, qui place la France en mauvaise position : le pays où les pauvres s’appauvrissent parce que les riches s’enrichissent.

Il est indispensable de voir de l’inégalité partout, les médias et la classe politique s’en régalent. En voici dans l’école, et c’est pourquoi il faut faire la réforme des collèges : « les fils d’ouvriers sont aujourd’hui pénalisés », a-t-on argumenté. En voilà dans le pouvoir d’achat : au lieu d’imposer l’austérité, dont seuls souffrent les ménages déshérités, il faut revenir à une redistribution plus généreuse et faire supporter les sacrifices à ceux qui ont les moyens. En voilà encore dans les relations entre hommes et femmes : pourquoi des écarts de salaires de cette importance, pourquoi des discriminations suivant le « genre », alors que le mariage et l’enfant doivent être pour tous ? En fait, l’égalitarisme est une excellente façon de lutter contre le système économique et contre la société injuste qu’il engendre. C’est aussi un prétexte pour procéder à des réformes de nature à déstructurer le pays, à détruire la famille, la justice, la propriété, l’enseignement.

Finalement, on comprend bien le savant équilibre que recherche le gouvernement : d’un côté, pour calmer les classes moyennes et Bruxelles, quelques réformes économiques de façade – la loi Macron est présentée comme une inflexion spectaculaire de la politique ; d’un autre côté, pour apaiser la gauche et les frondeurs, le sale travail de déstructuration. C’est Taubira et Vallaud Belkacem plus Macron et Valls.


Or l’égalitarisme est une fable tragique. C’est une fable puisque la mesure des inégalités est faite d’artifices. Picketty lui-même a battu sa coulpe et a reconnu les erreurs de sa magistrale démonstration. Les chiffres de l’OCDE ne sont pas significatifs quand ils comparent des choses qui ne sont pas comparables : ignorance du « coin fiscal » (écart entre nominal et net), des aides en nature (accès au logement, allocations diverses, etc.), de la structure des familles. Enfin, le projecteur braqué sur les inégalités oublie deux choses fondamentales.

La première est que ce n’est pas l’inégalité qui importe, mais la promotion. Il y aura toujours des riches et des pauvres, mais l’essentiel est de savoir quelles chances ont les pauvres de devenir riches ; que l’ascenseur social soit bloqué en France et que des millions de Français aient perdu l’espoir de vivre mieux, c’est plus important que de savoir s’il y a aujourd’hui des riches et des pauvres. Il n’y a plus chez nous l’équivalent du « rêve américain », cette puissante impulsion qui a poussé des millions d’étrangers (comme mes grands parents italiens) à émigrer vers la France. Une éducation qui travaille au nivellement par le bas, une fiscalité qui ruine ceux qui réussissent et épargnent, une redistribution qui subventionne l’absentéisme, la tricherie, et qui enracine le peuple dans l’assistanat : voilà de quoi créer de nouveaux pauvres. L’inégalité ne peut se déduire de mesures statiques.

La deuxième chose est que l’inégalité n’est pas a priori une tare. Hayek l’a fortement souligné (Le mirage de la justice sociale) : les riches sont souvent porteurs d’innovation, parce qu’ils peuvent se permettre d’explorer des voies hors de portée de la plupart des gens, Aux Etats Unis, les gens qui se sont enrichis sont des entrepreneurs, des créateurs : leur promotion vient des services rendus à la communauté. C’est ainsi que le capitalisme permet d’engendrer le progrès social : le profit prend son sens et sa légitimité parce qu’il crée de la richesse pour tous.

Mais il s’agit du vrai capitalisme, fondé sur la libre entreprise et le libre échange. Or en France c’est souvent l’argent public qui enrichit, chez nous règne le capitalisme de connivence, né de l’alliance du monde des affaires et de la classe politique, qui assure des rentes et privilèges injustifiés. Bastiat le disait : « Je ne crois pas que le monde ait tort d’honorer le riche ; son tort est d’honorer indistinctement le riche honnête homme et le riche fripon. » Chez nous les fripons sont nombreux, comme dans tout régime étatisé. L’égalitarisme se nourrit de cette tare. Ainsi naît l’idée que l’économie est un jeu à somme nulle, les uns ne gagnant qu’aux dépens de ceux qui perdent – une idée en phase avec la propagande marxiste qui sème la haine contre les possédants, les patrons et les actionnaires.
Notre devoir est de lutter contre cette propagande, de faire connaître la vérité sur les vraies et les fausses inégalités, d’éviter l’affrontement généralisé, d’arracher l’envie du cœur d’un peuple qui ne cesse de regarder dans « le jardin du voisin » (Fourastié en écho de Tocqueville). Je salue comme une première étape de cette croisade l’initiative de Bernard Zimmern et de son Institut qui tiendra à Paris prochainement un colloque sur « L’imposture Picketty : les riches sont-ils le problème ou la solution ? ». Politiquement corrects s’abstenir.

par Jacques Garello - Aleps

B) Les "faites ce que je dis, pas ce que je fais" de l’État

Dans la série « Faites ce que je dis, pas ce que je fais », l’État et la sphère publique en général ne sont jamais à court de nouveautés. Pourquoi se font-ils prendre la main dans le sac, si l’on ose dire, si régulièrement ? Parce que, particulièrement dans la règlementation du travail, ils ne se considèrent pas comme des employeurs ordinaires, à l’abri d’un statut spécifique, survivance d’un passé qui n’a pas de raison d’être. En tout cas, cette situation n’est alternativement ni du goût des salariés du secteur privé, ni de celui des salariés du secteur public. Une disparité de statut que rien ne justifie plus. Nous passons en revue les cas du CDD, des dividendes, du smic, de la pénibilité, du temps de travail, des 35 heures et de la gestion des RTT. Bien sûr, il y a d’autres exemples, que nos lecteurs pourront à loisir signaler.

Les CDD

D’utilisation sévèrement limitée pour le secteur privé, les CDD vont pouvoir être renouvelés deux fois en application de la future loi Macron. Mais attention ! la durée totale ne pourra toujours pas excéder les 18 mois déjà applicables. Le cadeau, si cadeau il y a, est donc fort limité. Mais chez les fonctionnaires, le CDD peut être conclu pour trois ans, renouvelable une fois. Six ans contre 18 mois…Et lorsque La Poste emploie des salariés dans les termes du droit commun, on ne compte pas les condamnations qui pleuvent sur l’établissement pour requalification des CDD en CDI.

Les distributions de dividendes

Le CICE, on le sait, doit être exclusivement utilisé par les entreprises pour certains objets délimités et surtout pas permettre de distribution de dividendes, encore moins lorsque l’entreprise supprime des postes. Nous avons souvent eu l’occasion de mentionner que l‘État fait tout le contraire dans les entreprises qu’il contrôle. Récemment, Michel Sapin a fait très fort. Interrogé par un média sur l’éventuelle remise en cause du CICE dans sa forme actuelle, et sur le fait notamment qu’en accorder le bénéfice à La Poste – encore elle – ne paraissait pas conforme à l’objectif que se proposait le gouvernement, le ministre s’est exclamé pour dire en substance que les suppressions de postes qu’a connus l’établissement auraient été bien plus importantes si La Poste n’avait pas bénéficié de ce crédit d’impôt. Les journalistes n’ont pas eu la présence d’esprit de lui rétorquer que depuis deux ans…le montant du CICE sert à distribuer des dividendes à l’État. Il fallait avoir le toupet (euphémisme) du ministre pour le dire !

Le smic et les rémunérations des fonctionnaires

Une fois de plus, les augmentations du smic mettent l’État dans l’embarras, car les rémunérations des fonctionnaires ne suivent pas, et ceux de ces fonctionnaires qui sont en catégorie C et B sont payés en-dessous du smic. Le smic ne leur est pas directement applicable, mais le statut des fonctionnaires prend soin de prévoir que les rémunérations publiques ne peuvent pas être inférieures à ce smic. Le secteur public verse donc aux fonctionnaires concernés une « indemnité différentielle » permettant d’atteindre la valeur du smic.

Mais l’État ne se conduit pas comme le secteur privé, qui fait évoluer les rémunérations supérieures au smic en conservant une échelle de salaires relativement progressive. 

L’écrasement des salaires publics est devenu un véritable scandale, relevé par exemple dès 2011 par l’Humanité : «  On peut donc parler d’une véritable « smicardisation » de la fonction publique. Avec le gel du point d’indice trois années de suite et la reprise de la hausse des prix, cette tendance risque de s’accélérer. Elle est déjà très spectaculaire. Les chiffres officiels montrent (voir le tableau) qu’un agent des services hospitaliers, par exemple, (catégorie C sans concours) qui débutait sa carrière à 115% du Smic en 1983, la commence aujourd’hui à 98% du Smic (avant l’octroi de l’indemnité différentielle). Une secrétaire dans une administration d’État (catégorie C, entrée sur concours) débutait en 1983 avec 123% du Smic. Elle commencerait au Smic aujourd’hui. Un technicien d’une collectivité territoriale (catégorie B) débutait à 133% du Smic en 1983. Sa rémunération de départ équivaudra aujourd’hui à 103% du Smic. Pour la catégorie A, celle des cadres ou des enseignants, la rémunération de départ de carrière, qui représentait 175% du Smic en 1983, n’en représente plus que 116% ».

Les choses ne se sont pas améliorées depuis 2011, au contraire. Et voici Marylise Lebranchu, la ministre de la Fonction publique, contrainte de relever le salaire en début de carrière… au prix d’accentuer encore l’écrasement des salaires en milieu de carrière (mais pas en fin de carrière puisqu'une revalorisation expresse vient de leur être accordée). Il est vrai que Jean-Claude Mailly (le patron de FO), plaide en ce moment pour que le smic atteigne 80% du salaire médian. Ses vœux sont donc en passe d’être exaucés. Sûrement pas ceux des fonctionnaires, ni de l’Humanité semble-t-il. Allons bon, c’est curieux, il y aurait des divergences de vue chez ceux qui se réclament d’un marxisme égalitaire ?

La pénibilité

On vient comme chacun sait d’instituer le « C3P », autrement dit le compte personnel de prévention de la pénibilité, que les entreprises dénoncent comme une coûteuse usine à gaz. Ici non plus la C3P n’est pas applicable chez les fonctionnaires, qui disposent déjà de dispositions concernant la retraite anticipée. Sauf que jamais la liste des métiers censée être établie par décret en Conseil d’État n’a été établie. Résultat, la règlementation est antédiluvienne et ne correspond pas aux métiers actuels. C’est un peu comme la prime d’escarbille chez les cheminots. En particulier, rien pour les agents hospitaliers. Aïe, ce n’est pas le sujet du moment à aborder à l’hôpital. Si l’on comprend bien, la question sera abordée pour les fonctionnaires par la ministre de la Fonction publique, cependant que pour le secteur privé le même sujet relève du ministre du Travail. Logique, non ?

Le temps de travail

Dans le secteur privé, les 35 heures ont fait l’objet d’intenses négociations au moment de leur mise en œuvre. Au moins les accords sont-ils respectés, et des négociations peuvent-elles être menées à bien en vue de leur amélioration comme on l’a vu chez Renault. Dans le secteur public, rappelons qu’à l’origine Lionel Jospin n’avait pas prévu d’appliquer les 35 heures, faute d’argent. Position qui n’a évidemment tenu que quelques semaines mais qui en dit long. L’État les a donc appliquées, mais il a fait n’importe quoi, sous la pression des syndicats dont la gauche au pouvoir se devait d’accepter les revendications. Dans la fonction hospitalière, les salariés ont en effet obtenu jusqu’à 28 jours de RTT. Le résultat, longtemps mis sous le boisseau comme la poussière sous le tapis, se fait jour actuellement avec une désorganisation complète et un impossible redressement dont le désaveu apporté par la ministre de la Santé aux efforts tentés par Martin Hirsch en est la lamentable traduction. Des RTT qui s’accumulent sans pouvoir être utilisés ni payés. S’y ajoute encore un absentéisme record. La situation est encore pire dans les collectivités locales, où les 35 heures elles-mêmes ne sont qu’un rêve, avec une durée de travail ridicule, à laquelle s’ajoute un absentéisme record : laxisme généralisé et aucune surveillance de la part des employeurs publics.


Conclusion

Il y a quand même dans cette histoire une morale qui n’est pas difficile à deviner. L’État se conduit en ignorant les règles qu’il demande au secteur privé d’appliquer ; c’est désastreux pour sa crédibilité et son autorité. Et cette mauvaise conduite est souvent masquée par la spécificité du statut qu’il s’applique. C’est contre cette spécificité qu’il faut lutter. Dans chacun des exemples que nous avons pris, quelle justification y a-t-il d’établir des règles différentes pour le secteur public et le secteur privé ? Aucune.

Commençons par unifier le statut des salariés du public et ceux du privé – en clair, supprimer le statut de la fonction publique -, et nous aurons déjà une base plus solide pour que l’État respecte une règlementation devenue unique. Plus fondamentalement, entre les entreprises et les établissements tant publics que privés, il peut y avoir des différences tenant à l’existence éventuelle d’une mission de service public, étant entendu qu’une entreprise privée peut être investie d’une telle mission et que c’est d’ailleurs le cas bien souvent en vertu d’un droit administratif qui a plusieurs siècles d’existence en France. Mais il n’y a plus, depuis longtemps, aucune raison pour que de cette mission découle un statut spécifique applicable aux agents et salariés qui sont amenés à la remplir, qu’il s’agisse d’entreprises, d’établissements de l’État ou d’entreprises du secteur privé investies de délégations de service public.

Bertrand Nouel
IFRAP


C) Égalité

L'égalité du point de vue du libéralisme est l'affirmation que tous les individus sont égaux en droit (principe d’isonomie). Le droit dont il est question ici est le droit naturel, et non l'ensemble des « faux droits » octroyés par l'État, qui précisément favorisent les uns aux dépens des autres, et donc accroissent les inégalités. Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits (article premier de la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen de 1789). Pour un libéral, toute distinction fondée sur la naissance (Ancien régime, société de castes, société raciste), le présumé « intérêt général » (collectivisme), l'intérêt de quelques-uns (oligarchie), ou la « tyrannie de la majorité » (démocratie) aboutit à l'injustice et au mépris des droits de l'individu. On obtient donc une définition négative de l'égalité : chaque individu a un droit égal à ne pas être agressé dans sa liberté ni dans sa propriété.
La définition de l'égalité rejoint celle de la justice : rendre à chacun ce qui lui est dû (suum cuique tribuere, selon le vieux principe du droit romain). C'est ce qui distingue l'égalité de l'égalitarisme : l'égalité tient compte de la nature de chacun, c'est aussi un « droit à la différence » et un respect de l'autre, alors que l'égalitarisme tend à nier toute différence (physique, intellectuelle, économique). Comme Friedrich Hayek l'a bien expliqué:
Alors que l'égalité des droits dans un gouvernement limité est possible en même temps qu'elle est la condition de la liberté individuelle, la revendication d'une égalité matérielle des situations ne peut être satisfaite que par un système politique à pouvoirs totalitaires.
Ainsi, ce que le collectivisme ou la social-démocratie entendent par « égalité » sociale, c'est une « justice » distributive, l'égalité économique, l'égalitarisme, sous divers prétextes (partage des fruits du travail, solidarité, cohésion sociale, etc.). L'idéal visé, plus ou moins avoué, est celui de l'égalité économique parfaite, selon le principe communiste apparemment généreux de « à chacun selon ses besoins », principe qui, outre son caractère immoral et coercitif, fait totalement fi de la réalité de la vie humaine, qui est celle d'un monde de rareté, dans lequel seuls le travail, l'épargne, l'investissement, l'action, peuvent créer des biens.

Égalité des chances

Cette expression, typiquement française (même si elle rappelle l'equal opportunity anglo-saxonne), est pernicieuse. Désigne-t-elle l'égalité en droit, exigence libérale, ou bien un droit à bénéficier des bienfaits de l'État-providence redistributeur ? Dans cette dernière acception, on tend à développer l'assistanat et à récuser la liberté et la responsabilité des individus :
De fil en aiguille, on en est finalement venu à l'égalité des conditions, à l'égalité des résultats, quelles que soient les actions individuelles, quels que soient les mérites ou les vices de chacun. La chance porte un nom nouveau : l'État Providence. L'égalité des chances, c'est l'égalité devant les bienfaits de la société. Dans cette logique, l'échec n'est pas admissible, l'inégalité est scandaleuse. Aujourd'hui l'égalité des chances est une forme d'envie (avoir tout ce qu'ont les autres), une forme d'incurie (avoir tout sans rien devoir à personne, faire n'importe quoi), une forme de folie vengeresse (« les ratés ne vous rateront pas », disait Céline). (Jacques Garello)
La plupart des libéraux rejettent la notion d'égalité des chances, car elle est intrusive et coercitive. Certains libéraux de gauche, tels John Rawls, soutiennent cependant que "personne ne mérite ses capacités naturelles supérieures ni un point de départ plus favorable dans la société" et voient comme injuste la répartition inégale des talents. Les structures d'une société juste devraient faire en sorte d'atténuer au maximum les différences. Ainsi Rawls ajoute au principe d'égale liberté pour tous ("chaque personne doit avoir un droit égal à la plus grande liberté fondamentale avec une liberté semblable pour tous") un second principe ainsi défini :
Les inégalités sociales et économiques doivent être arrangées de telles sortes qu'elles soient :
- liées à des emplois et à des postes, accessibles à tous, dans des conditions d'égalité impartiale des chances (principe d'égalité des chances) ;
- pour le plus grand profit des plus désavantagés (principe de différence).
Pour la plupart des libéraux (tel Nozick qui critique les conceptions de Rawls) le "droit" à l'égalité des chances n'en est pas un, puisqu'il doit respecter le droit de propriété avant de s'appliquer. Le "principe de différence" de Rawls permet de justifier les mesures les plus coercitives : revenu maximum (Rawls affirme qu'il y a "un gain maximum autorisé pour les plus favorisés"), redistribution par l'impôt (possible théoriquement jusqu’à ce qu’elle ait tellement d’effets désincitatifs que les plus favorisés produiraient beaucoup moins, et ce aux dépens des individus les plus désavantagés), etc. Bien que Rawls se défende d'être utilitariste, sa théorie a un défaut majeur, qui est l’hypothèse de comparabilité des préférences individuelles. L'idée que la répartition inégale des talents puisse être injuste et doive être "corrigée" mène directement à l'égalitarisme et au totalitarisme


Erreur courante : égalité et égalitarisme

La critique la plus courante, venant le plus souvent de la gauche (encore qu'elle existe aussi à droite), est que le libéralisme aurait une notion restrictive de l'égalité : en effet, il n'envisage que l'égalité en droit et non l'égalité matérielle. Les inégalités économiques que l'on peut constater entre les individus ne le touchent pas : loin de les condamner, il les conforterait. Il mènerait donc au conservatisme le plus rétrograde.
La réponse à cette objection est que l'égalité en droit a un sens, alors que l'égalité matérielle ou économique n'en a absolument aucun, à moins que tous les hommes soient absolument identiques, interchangeables et "bâtis" sur le même modèle, ce qui n'est pas le cas. Dès lors que les hommes sont différents, il est impossible de réaliser l'égalité matérielle ou économique, car les capacités de chacun, les aspirations, les besoins, sont différents. L'égalitarisme n'est pas autre chose qu'une révolte contre la nature : il est "injuste" qu'un autre soit plus beau, plus grand, plus jeune, plus intelligent ou plus riche que moi. Le droit à la différence est vu comme un faux droit. C'est la nature qui est jugée injuste, et la société des hommes devrait réparer toute "injustice", si besoin (et il est impossible que ce soit autrement) par la coercition et la violence. [1]
Une société égalitariste se détruirait elle-même par sa recherche pathologique du nivellement par le bas. L'expérience historique montre qu'en réalité elle réintroduit des inégalités non pas sur la base des capacités, aspirations et mérites différents (comme c'est le cas dans la société libérale idéale) mais sur des bases politiques d'allégeance à un leader ou au parti au pouvoir, illustration de l'anomie conduisant à la loi du plus fort.
Ceux qui croient aux vertus de l'égalitarisme, plutôt que de chercher à asservir ceux qui n'y croient pas, devraient faire la preuve par l'exemple, en créant des communautés pratiquant l'égalité matérielle la plus complète (la famille n'est-elle pas une communauté de ce type ?). Comme le dit Christian Michel :
Le communisme est un bel idéal. Que les communistes s'organisent dans leurs communes et phalanstères, qu'ils affichent leur bonheur d'y vivre, et ils seront rejoints par des millions et des milliards de gens. (...) Ce qu'il faut combattre n'est pas le communisme, ni aucune autre idéologie, mais la traduction politique de cette idéologie.
Malheureusement, l'égalitarisme n'est le plus souvent pas autre chose qu'une traduction idéologique de la jalousie sociale : l'égalitariste, qu'il soit libertaire, communiste ou socialiste, veut seulement prendre aux plus riches que lui. Il n'est pas question pour lui de partager avec ceux qui sont plus pauvres que lui : c'est de la solidarité à sens unique.
Quant au prétendu conservatisme que le libéralisme entérinerait en ne remettant pas en cause les positions sociales, il n'existe pas, en réalité. Le libéralisme dénie toute légitimité à toute position sociale qui serait contraire aux droits des individus. Loin d'être conservateur, le libéralisme (plus particulièrement le libertarisme) est révolutionnaire car il entend souligner les injustices et y porter remède. Il reconnaît qu'il existe bel et bien une lutte des classes entre les dominants et les opprimés, entre ceux, étatistes, politiciens, qui violent perpétuellement le principe de non-agression en imposant l'arbitraire étatique par l'impôt et la loi, et ceux qui sont victimes de cette forme d'esclavage. Les inégalités existent bien : l'ennemi n'est pas le riche ou le capitaliste (du moins, tant qu'ils se limitent à pratiquer l'échange libre dans le respect du droit d'autrui), c'est celui qui me vole (qui prend ma propriété sans mon consentement) ou qui m'impose injustement sa volonté (qui attente à ma liberté). On retrouve l'exigence d'égalité libérale : l'obligation de respecter le droit de chacun, sa liberté et sa propriété. 


Citations

  • « Je pense que les peuples démocratiques ont un goût naturel pour la liberté ; livrés à eux-mêmes, ils la cherchent, ils l’aiment, et ils ne voient qu’avec douleur qu’on les en écarte. Mais ils ont pour l’égalité une passion ardente, insatiable, éternelle, invincible ; ils veulent l’égalité dans la liberté, et, s’ils ne peuvent l’obtenir, ils la veulent encore dans l’esclavage. Ils souffriront la pauvreté, l’asservissement, la barbarie, mais ils ne souffriront pas l’aristocratie. »
(Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique)[2]
  • « Il y a toutes les différences du monde entre traiter les gens de manière égale et tenter de les rendre égaux. La première est une condition pour une société libre alors que la seconde n'est qu'une nouvelle forme de servitude. »
(Friedrich August von Hayek, Vrai et faux individualisme)
  • « L’égalité proclamée dans la déclaration des droits de l’homme de 1789, est une égalité de condition sociale qui rend possible une justice équitable. La loi est la même pour tous, c’est ce que ça veut dire. L'État idéologique a transformé cette égalité de droit en égalité de moyen, ce sont les clauses de moyens introduites dans la déclaration des droits de l’homme des constitutions de 1946 et 1958. L’Egalité n’est plus seulement la promesse que la justice ne tiendra pas compte du statut social des personnes comme sous la monarchie, mais qu’elle devient aussi une égalité matérielle des conditions. C’est mettre à mort l’équité dont le premier principe est " à chacun selon ses mérites " pour produire un principe contraire, le principe égalitaire qui est " ce qui est juste, c’est ce qui est égal ".  »
(Claude Lamirand – 7 Décembre 2004)
  • « La justice s’applique à la conduite des individus, pas aux conséquences économiques de leurs actions. Elle est affaire de règles, pas de résultat. Dans une société libre, c’est seulement les décisions des acteurs que nous avons le droit de juger. Si un avantage est acquis par la tromperie ou la violation d’une loi justement applicable à tous, nous le déclarons injuste. Mais si quelqu’un n’a bénéficié d’aucune entorse pour obtenir le même avantage, il n’y a aucune raison d’être critique à son égard. Lorsque tu participes à un jeu, tu ne demandes pas à l’arbitre de déclarer vainqueur le joueur le plus méritant. Il importe seulement que la partie soit jouée loyalement, que les règles soient respectées. »
(Christian Michel)
  • « L'inégalité des revenus et des fortunes est un caractère inhérent de l'économie de marché. Son élimination détruirait complètement l'économie de marché. Les gens qui réclament l'égalité ont toujours à l'esprit un accroissement de leur propre pouvoir de consommation. Personne, en adoptant le principe d'égalité comme postulat politique, ne souhaite partager son propre revenu avec ceux qui en ont moins. Lorsque le salarié américain parle d'égalité, il veut dire que les dividendes des actionnaires devraient lui être attribués. Il ne suggère pas une réduction de son propre revenu au profit des 95 % de la population mondiale qui gagnent moins que lui. »
(Ludwig von Mises, l'Action humaine)
  • « L'inégalité [véritable] consiste à s'enrichir par ses relations, à gagner sans rendre service, à extorquer sous la menace, à créer une classe privilégiée de décideurs non responsables sur leurs biens mais sur celui des autres. »
(Prégentil)
  • « À partir du moment où quelqu’un s’enrichit plus vite que vous, une inégalité surgit. Sauf à contrôler la vie de tout le monde, l’inégalité est le résultat, à un instant donné, d’un processus de développement qui est par nature dynamique. Comme la croissance repose sur la libération des énergies et des potentiels de chacun, il en découlera nécessairement des trajectoires de revenus différentes. »
(Jean-Louis Caccomo)
  • « Le libéral combat les inégalités vraiment injustes, c'est-à-dire celles qui profitent aux hommes politiques et aux fonctionnaires, et les inégalités qui résultent du vol ou de la coercition, qui sont souvent le fait de l'État, ou le fait que l'État ne fait pas son travail. Le socialiste, lui, recherche l'égalité de résultat, et c'est ainsi que dans ce pays tout est fait pour encourager celui qui ne veut rien faire, et tout est fait pour mettre des bâtons dans les roues à celui qui entreprend. C'est ainsi que l'Éducation Nationale, n'ayant pas réussi à uniformiser les résultats des élèves par le haut, s'est résigné à les uniformiser par le bas. »
(Jacques de Guenin)
  • « L'égalité la plus fondamentale entre les hommes est sans doute liée au fait qu'ils sont des êtres humains, et que par nature ils ont une dignité et une vocation que ne possède aucune autre espèce. (...) Cette égalité fondamentale et personnelle prend corps avec l'égalité des droits. Ce qui sépare une société barbare d'une société civilisée, c'est que des règles sociales sont établies et respectées pour garantir les droits individuels qui permettent à l'homme de vivre dignement. »
(Jacques Garello)
  • « L’égalité est un état artificiel qui demande à être constamment entretenu d’une manière artificielle. Les hommes ne sont pas égaux par définition. »
(Vladimir Boukovski)
  • « Les hommes n’étant pas dotés des mêmes capacités, s’ils sont libres, ils ne seront pas égaux, et s’ils sont égaux, c’est qu’ils ne sont pas libres. »
(Alexandre Soljenitsyne)
  • « La France a toujours cru que l’égalité consistait à trancher ce qui dépasse. »
(Jean Cocteau, Discours de réception à l’Académie française, 1955)
  • « Tous les êtres de toutes les Galaxies sont égaux devant la Grande Matrice, indépendamment de leur forme, du nombre de leurs écailles ou de leurs bras, et indépendamment même de l'état physique (solide, liquide ou gazeux) dans lequel il se trouve qu'ils vivent. » (humour)
(Umberto Eco)



D) 1984 d'Orwell n'était pas censé être un manuel de philosophie



Le libéralisme classique ne se confond ni avec l'hédonisme, ni avec une indifférence à l'égard du bien ou du mal et encore moins avec le socialisme. Par Damien Theillier, professeur de philosophie et président de l'Institut Coppet 
 
Rappelez-vous les trois slogans qui régissent la dictature orwellienne :

La guerre, c'est la paix.
La liberté, c'est l'esclavage.
L'ignorance, c'est la force.
Guillaume Bernard, maître de conférences à l'ICES, vient d'en inventer un quatrième :
« Le libéralisme, c'est le socialisme » !
Comment peut-on arriver à confondre la liberté et la folle idéologie qui réglemente nos vies jusqu'aux plus petits détails ? 

Notre maître de conférence a réussi ce tour de force dans un article paru dans Valeurs Actuelles fin mai 2015, intitulé Malentendus courants sur le libéralisme. Tout part d'une équation par amalgame: le libéralisme serait une philosophie libertaire hédoniste et relativiste... ce que serait également le socialisme.
De là, le libéralisme, c'est le socialisme.

Un malentendu sur le libéralisme

L'auteur entretient un malentendu sur le libéralisme, habituellement entendu à gauche : celui-ci postulerait ou fonderait ses arguments sur l'hypothèse d'individus égoïstes, matérialistes et auto suffisants, affranchis de toute norme morale, de toute espèce d'ancrage dans une réalité morale naturelle. Cette idée répandue dans le clergé, y compris au plus haut sommet de sa hiérarchie (comme le montre encore une fois la dernière encyclique du Pape François), est une idée fausse.

À l'encontre de cette caricature, le libéralisme classique ne se confond ni avec l'hédonisme, ni avec une indifférence à l'égard du bien ou du mal et encore moins avec le socialisme.


Une philosophie du pouvoir limité

La plupart des libéraux s'accordent avec la tradition occidentale issue de la philosophie grecque pour dire qu'il existe une rationalité morale et que le bien et le mal ne sont pas des notions arbitraires, relatives à l'opinion ou à l'époque. Ainsi le vol détruit le principe de la propriété, fondée sur le travail c'est-à-dire sur le libre exercice de nos facultés. 

Pour les libéraux, à la différence des socialistes, il existe donc un droit antérieur à la formation de l'État, un ensemble de principes généraux que la raison peut énoncer en étudiant la nature de l'homme.

Ce droit s'impose au pouvoir, qui doit dès lors le respecter. Les lois édictées par l'autorité politique n'ont force obligatoire que selon leur conformité au droit naturel. Et si les citoyens possèdent par nature certains droits fondamentaux, ces droits ne peuvent être ni octroyés, ni supprimés par la loi.

Le libéralisme, pas une théorie morale complète

Mais le libéralisme, contrairement au socialisme, n'a jamais eu la prétention d'être une théorie morale complète, ni une philosophie de la vie ou du bonheur. Guillaume Bernard se trompe en affirmant que « le libéralisme est un tout », c'est-à-dire une sagesse globale. Il est seulement une théorie politique, incluant une morale politique, qui traite du rôle de la violence et des limites du pouvoir. Puisque les hommes ont des penchants criminels (ce qui rejoint l'idée chrétienne de péché), il faut les empêcher de nuire. Mais il est également nécessaire de limiter le pouvoir et d'empêcher la tyrannie. Si tous les hommes étaient bons, l'État serait superflu. Mais si, à l'inverse, comme le reconnaissent les libéraux et les conservateurs, les hommes sont souvent malveillants, alors on doit supposer que les agents de l'État eux-mêmes, qui détiennent le monopole de la violence, constituent une menace potentielle. C'est Locke contre Hobbes, Constant contre Rousseau.

Par conséquent, ce qu'un individu n'a pas le droit de faire : voler, menacer, tuer, un État n'a pas le droit non plus de le faire. Si le fait de spolier autrui est immoral pour un individu, cela vaut également pour ceux qui exercent l'autorité politique. Les libéraux pensent que le commandement biblique « Tu ne voleras pas » s'applique à tous sans exception. Il s'agit d'une éthique universelle qui s'applique également aux institutions sociales. Un vol reste un vol, même s'il est légal.

L'individu, seul agent moral

Il faut également entendre la défense libérale de l'individu en ce sens que celui-ci est le seul agent moral. Les notions de bien et de mal moral, de droits et de devoirs n'ont de sens que pour des personnes singulières, non pour des collectivités abstraites. Seul l'individu humain agit, pense, choisit, seul il est sujet de droit. Ainsi parler de « droits des homosexuels » n'a pas de sens, pas plus que de parler de « droits des catholiques ». L'égalité des droits ne peut être fondée que sur l'appartenance à l'espèce humaine et non sur l'appartenance à une communauté ou à un groupe collectif.

Enfin et surtout, il n'est pas possible de comprendre l'essence de la philosophie politique libérale, si on ne comprend pas qu'elle a toujours été historiquement définie par une rébellion authentique contre l'immoralité de la violence étatique, contre l'injustice de la spoliation légale et du monopole éducatif ou culturel.

Une anthropologie réaliste
Mais ce qui différencie les libéraux des utopistes c'est qu'ils n'ont pas pour but de remodeler la nature humaine. Le libéralisme est une philosophie politique qui affirme que, en vertu de la nature humaine, un système politique à la fois moral et efficace ne peut être fondé que sur la liberté et la responsabilité. Une société libre, ne mettant pas de moyens légaux à disposition des hommes pour commettre des exactions, décourage les tendances criminelles de la nature humaine et encourage les échanges pacifiques et volontaires. La liberté et l'économie de marché découragent le racket et encourage les bénéfices mutuels des échanges volontaires, qu'ils soient économiques, sociaux ou culturels.

Quiconque a lu un peu les libéraux, anciens ou modernes, Turgot, Say, Bastiat, Mises ou Hayek, sait en effet, que pour eux 1° l'intérêt personnel ne peut se déployer librement que dans les limites de la justice naturelle et 2° le droit ne se décide pas en vertu d'un contrat, mais se découvre dans la nature même de l'homme, animal social, doué de raison et de volonté. On est alors très loin de la caricature donnée par l'article de Guillaume Bernard.

Les entrepreneurs anticipent les besoins des consommateurs

Les libéraux, il est vrai, accordent à l'intérêt une large place dans le développement de ce monde. Mais ils voient en lui le plus puissant et le plus efficace des stimulants lorsqu'il est contenu par la justice et la responsabilité personnelle. Le fait que les entrepreneurs soient avant tout guidés par leur intérêt, loin de conduire à l'anarchie, permet de canaliser les intérêts. Cela les oblige à prendre en compte et à anticiper les besoins des consommateurs. Pour réussir il faut être à l'écoute des besoins de la société. 

En revanche, l'un des objectifs principaux des socialistes est de créer (en pratique par des méthodes violentes) un homme nouveau acquis au socialisme, un individu soumis dont la fin ultime serait de travailler au service du collectif. Pour les socialistes, en effet, les hommes ne sont que des matériaux inertes qui ne portent en eux ni principe d'action, ni moyen de discernement.

Partant de là, il y aura entre le législateur et l'humanité le même rapport qu'entre le potier et l'argile. La loi devra façonner les hommes en fonction d'une idéologie imposée d'en haut. Comme le dit bien Jean-Paul II, « Là où l'intérêt individuel est supprimé par la violence, il est remplacé par un système écrasant de contrôle bureaucratique qui tarit les sources de l'initiative et de la créativité. » (Jean-Paul II, Centesimus Annus, 1991).

De fait il y a beaucoup plus d'avidité et de cupidité dans le socialisme que dans le libéralisme. Dans une économie socialiste, il n'y a que deux moyens d'obtenir ce qu'on désire : le marché noir, ou la combine politique. Dans une économie de marché libre, la façon la plus efficace pour les personnes de poursuivre leur amour de la richesse est de servir les autres en proposant des biens utiles et à bon prix.


La propriété privée c'est la protection des plus faibles

La propriété est d'abord une condition nécessaire à ce que le philosophe Robert Nozick appelle « l'espace moral » de la personne. La nature morale de l'être humain exige que la liberté de choix soit protégée pour que chacun puisse exercer pleinement son jugement et ses responsabilités. Et cet objectif de protéger cet espace moral de choix individuel, est mieux servi par une société de libre marché, qui respecte la propriété. Notre tâche principale est d'agir de façon optimale, c'est-à-dire à réaliser notre nature humaine, aussi complètement que possible dans les circonstances de notre vie. Et seule une société libre, qui protège le droit de propriété, peut permettre d'atteindre cet objectif. 

La propriété est aussi ce qui permet un comportement « prudent » (au sens de la vertu morale) vis-à-vis du monde naturel et social. Enfin et surtout, elle bénéficie aux pauvres car elle leur permet d'utiliser leurs dons et leurs compétences dans un marché ouvert à la concurrence. 

Dans le christianisme, l'homme est appelé à servir les autres, spécialement les plus faibles. Or la meilleure façon, la plus productive et la plus juste, d'aider les pauvres est précisément la liberté pour chacun d'exercer la profession ou l'activité de son choix. Une société libre est une société dans laquelle chacun est libre d'utiliser les informations, même imparfaites, dont il dispose sur son environnement pour poursuivre ses propres fins.

Des possibilités très grandes de sortir de la pauvreté

Certes, dans une société libre, les revenus sont inégaux, mais les possibilités qu'ont les gens de se sortir de la pauvreté extrême sont très grandes parce qu'on peut gagner en servant les intérêts d'autrui et que la richesse des uns bénéficie, à terme, aux autres. Le libre marché est un formidable mécanisme naturel de redistribution des richesses car c'est un jeu à somme positive, l'échange est gagnant-gagnant quand il est consenti. 

Enfin, l'économie de marché libre est un système qui permet de ce fait à la philanthropie de s'exercer mieux que dans tout autre système. Chaque être humain a une obligation morale d'assistance à l'égard de ceux qui sont atteints par le malheur. Mais on ne donne que ce qui est à soi. C'est le respect du droit de propriété qui rend possible la charité.

L'égoïsme dans la nature humaine

En conclusion, l'égoïsme n'est pas dans le libéralisme, comme semble le croire Guillaume Bernard, il est dans la nature humaine. Le libéralisme explique seulement que l'intérêt personnel, canalisé par le droit, peut servir le bien commun de façon plus efficace et plus juste que la contrainte de la loi.

En effet, le principe qui a été découvert progressivement au cours de l'histoire occidentale et qui a été mis en lumière par les penseurs libéraux classiques, c'est que la liberté individuelle est créatrice d'ordre, mieux que n'importe quelle solution bureaucratique imposée d'en haut par la coercition. Et cela est vrai, non seulement sur le plan politique mais aussi sur le plan économique. L'allocation des ressources par le libre jeu de l'offre et la demande est la réponse la plus productive et la plus efficace aux besoins humains. Mais c'est aussi le seul système économique compatible avec une vision morale et religieuse de l'homme, fondée sur le droit naturel, c'est-à-dire sur l'idée que les gens ont, par définition, du fait même de leur présence sur terre, des droits qu'il est immoral et injuste pour quiconque de violer.

L'État moderne, grand prédateur

Libre à chacun bien sûr de renvoyer dos-à-dos libéralisme et socialisme, comme le fait Guillaume Bernard. Mais encore faudrait-il ne pas tomber dans la vision caricaturale et fausse qu'il fait du libéralisme. Car il est trop facile de fabriquer un homme de paille pour mieux le rejeter ensuite comme quelque chose de vulgaire et d'immoral. 

L'État moderne, qu'il soit de droite ou de gauche, est devenu « le grand prédateur », le grand confiscateur des libertés et des moyens financiers, promoteur d'un moralisme sans fondement, le tout au profit d'une mafia de rentiers de la politique. Or seuls les libéraux ont pu, dans le passé récent s'opposer à cette croissance apocalyptique. Et ce ne sont pas les chrétiens sociaux, ni les réactionnaires, tous tentés par la forme moderne de socialisme qu'est l'étatisme, qui ont pu s'opposer à cette croissance.



 

juillet 03, 2015

Immigration du pour du contre, et la Liberté ?

L'Université Liberté, un site de réflexions, analyses et de débats avant tout, je m'engage a aucun jugement, bonne lecture, librement vôtre. Je vous convie à lire ce nouveau message. Des commentaires seraient souhaitables, notamment sur les posts référencés: à débattre, réflexions...Merci de vos lectures, et de vos analyses.

Sommaire:

A) L’immigration ne fait pas échec à l’Etat Providence - Alain Madelin - Libre échange

B) La France peine toujours à intégrer ses immigrés selon l'OCDE - Eric Wattez - Capital.fr

C) Cazeneuve veut attirer les talents étrangers - Joel Cossardeaux / Chef de service adjoint Les Échos

D) Immigration en France : ce qu’il faut savoir -

E) L’histoire de l’immigration en France - Le film : deux siècles d'histoire de l'immigration en France - Musée de l'histoire de l'immigration
L’histoire de l’immigration en France L’histoire de l’im
F) Immigration : pour en finir avec 5 idées reçues - Par Alexis Orsini L' Obs

G) Immigration : une seule issue, ouvrir les voies légales - Anthony Végat - Le site de l'auteur

H) Immigration de Wikiberal



 A) L’immigration ne fait pas échec à l’Etat Providence

Dans les pages « Idées » du magazine Le Point du 20 novembre 2014, Alain Madelin répond au britannique David Goodheart qui développe une critique de gauche de l’immigration qui ruinerait l’Etat Providence et minerait même l’idée de solidarité.

« Ainsi donc les immigrés sont trop nombreux, trop différents de nous et trop coûteux pour notre économie et notre État-providence. Cette thèse n’a rien de bien neuf. Partout elle rencontre un fort écho populaire et alimente des partis xénophobes.

Ce qui mérite l’attention, c’est qu’exprimée ici par un représentant de l’intelligentsia de gauche britannique, David Goodhart, cette version « progressiste » de la « préférence nationale » trouve une nouvelle respectabilité.

Pour sauver l’Etat-Providence et l’idée même de la solidarité, il faudrait donc restreindre les flux migratoires, y compris à l’intérieur de l’union européenne élargie ; réserver le travail le logement ou les prestations de l’État-providence aux vrais citoyens ; mettre fin au « laissez-faire multiculturaliste » qui permet aux musulmans de faire passer avant leur citoyenneté une identité religieuse dont certains principes ne s’accordent pas avec nos sociétés libérales.

Si les problèmes soulevés sont bien réels, il me semble que l’on se trompe ici de diagnostic et de remède.

Ce n’est pas l’immigration qui fait échec à l’État-providence. Ce sont les échecs de l’État-providence qui compliquent les solutions aux problèmes de l’immigration.
C’est l’échec en France d’un Etat trop lourd, trop étouffant qui pèse sur l’activité économique, la croissance et l’emploi.

Or, le premier facteur d’intégration, c’est le travail. Dans dans une économie de marché qui fonctionne, les économistes considèrent l’immigration comme globalement positive et d’ailleurs il est facile d’observer comment les pays sont entrés en compétition pour attirer les talents, ou comment, aux Etats-Unis par exemple, le dynamisme entrepreneurial et innovateur se nourrit de l’immigration.

C’est l’échec de notre urbanisme collectif qui enferme une part de notre jeunesse dans des cités ghettos, qui secrètent une culture de violence et de délinquance, en rupture avec notre société.
L’échec des écoles ghettos de ces cités ghettos où les enfants sont assignés à résidence.
L’échec de l’Etat à faire respecter la loi et à assurer la sécurité.
Les quartiers dits « sensibles » ne sont le miroir grossissant des échecs de notre Etat-Providence.
Reste la difficile question des prestations sociales.
Leur générosité joue assurément – même s’il n’est pas déterminant – un effet d’appel pour les candidats à l’émigration.
Les jeunes émigrés célibataires privilégieront les pays qui offrent des perspectives de travail quand les familles chercheront le meilleur filet de protection sociale.
Cela dit, les marges de manœuvre restent étroites même si elles ont une importance symbolique pour des milieux populaires qui ont le sentiment d’une sorte de « préférence étrangère » dans les hôpitaux ou l’attribution de logements.
Ecartons les prestations d’assurance – assurance-maladie, assurance-chômage, assurance vieillesse – qui ne sont que les contreparties des cotisations des immigrés au travail.

Restent les prestations de solidarité dont il n’est pas choquant de vouloir limiter l’accès, ce qui est le cas en France pour le RSA ou le minimum vieillesse. En revanche – sans même parler des textes européens qui y font obstacle – on ne voit guère comment, d’un point de vue humain et social, on pourrait exclure des enfants souvent nés sur le sol français ayant vocation à devenir français.

Pas plus qu’on ne pourrait trop limiter l’aide médicale ouverte aux étrangers qui répond – au-delà des considérations humaines – à des exigences de santé publique.
Les quelques modifications qui pourraient être apportées, le renforcement de la lutte contre les abus ne sauraient être des remèdes miracles.
Il est plus important de réformer profondément l’Etat-Providence pour tous que de chercher à le réserver aux seuls français.
Reste la grande question de L’écart culturel.
Trop de diversité tue la solidarité. Il y a du vrai dans cette affirmation.

Il serait absurde de nier les problèmes d’une coexistence difficile avec des étrangers, ou des jeunes issus de l’immigration, au comportement parfois agressif et arrogant. Seulement, cette diversité multiculturelle est inséparable des libertés dans une société ouverte.

Assurément il y a un déficit de savoir-vivre ensemble. Il ne suffit pas de respecter les lois, il faut aussi respecter les us et coutumes du pays qui vous accueille.

Ce savoir-vivre et cette civilité ont besoin de tuteurs sociaux.
Je sais qu’il est de bon ton de condamner le communautarisme et sans doute a-t-on raison s’il s’agit de communautés qui enferment et à plus forte raison de communautés dotées de droits spéciaux qui instituent l’apartheid. En revanche, je pense que des communautés peuvent être de puissants facteurs d’intégration, d’interface des cultures, d’apprentissage des règles de respect d’un savoir vivre ensemble.

Il est facile d’aller à la rencontre d’une opinion qui vit l’immigration comme un fardeau et une menace. Il est plus difficile d’apporter des réponses concrètes et humaines aux questions posées par l’immigration. »



Alain Madelin
Article initialement paru dans Le Point du 20 novembre 2014 - Libre échange


Immigration : la solution libérale avec Contrepoints

Nation et immigration avec Contrepoints

 



B) La France peine toujours à intégrer ses immigrés selon l'OCDE

Ce matin par l’OCDE*, la France n’est décidément pas un modèle d’intégration pour les populations d’origine immigrée. Le point avec Jean-Christophe Dumont, directeur de la Division des Migrations Internationales de l’OCDE.

Capital.fr : Comment sont définis les immigrés dans cette étude ?  
Jean-Christophe Dumont : Il y a un premier groupe d’émigrés qui sont les personnes nées à l’étranger et qui vivent dans un autre pays. Nous nous intéressons aussi aux enfants d’immigrés qui, eux, sont soit nés à l’étranger avant de partir s’installer ailleurs en suivant leurs parents ou ceux qui sont nés dans le pays où leurs parents se sont installés. Dans ce dernier groupe qu’on appelle aussi la « seconde génération » certain n’ont qu’un seul parent émigré. Enfin, il existe un troisième groupe : les étrangers ressortissants de pays non européens. En France, 12% de la population est immigrée proprement dite, pour 10% en moyenne dans l’OCDE. Il y aussi 13% de la population  constituée d’enfants nés en France de deux parents émigrés ou de parents « mixtes » (un émigré et un Français), pour une moyenne de 8% dans l'ensemble de l'OCDE. Bien sûr, chez les enfants d’émigrés nés en France, nombreux sont ceux qui ont la nationalité française. L’Hexagone est loin d’être le pays où il y a le plus d’immigrés ou d’enfants origines d’émigrés. Elle vient notamment après l’Autriche, la Belgique, la Suisse ou encore le Canada et Israël. Mais, compte tenu de son histoire migratoire, elle a une proportion d’enfants immigrés importantes et ça vaut la peine de regarder comment cette population s’en sort.

Capital.fr : Que se passe-t-il sur le marché du travail pour cette population ?  
Jean-Christophe Dumont : On fait un double constat. Les immigrés arrivés récemment rencontrent de grandes difficultés. Leur insertion sur le marché du travail est particulièrement difficile et leur taux d’emploi est inférieur de 25 points de pourcentage à celui de la moyenne nationale. En revanche, les progrès sont très nets pour ceux qui ont 5 ans ou plus de résidence dans le pays, pour qui le taux d’emploi est plus élevé de 10 points de pourcentage que pour ceux récemment arrivés. La France n’a évidemment pas le monopole de ce genre de situation.

Capital.fr : Qu’en est-il des plus jeunes ?
Jean-Christophe Dumont : Là non plus, les constats ne pas trop réjouissants. Selon l’enquête Pisa sur les jeunes de 15 ans, les enfants d’immigrés nés à l’étranger et vivant en France ont un score en littératie  (ndlr, capacité à comprendre l'information écrire dans la vie courante) sensiblement inférieur à celui des personnes nées dans le pays. Cela correspond environ à une année et demi d’études de retard. Plus inquiétant peut-être, les enfants d’immigrés nés en France ne font pas tellement mieux. Le plus souvent par ce qu'ils sont issus de milieux défavorisés et peu éduqués. En revanche, si l’un de ses deux parents est lui né en France, l’enfant fait niveau presque égal avec celui des natifs. L’écart entre les immigrés et les natifs n’est toutefois pas une fatalité : au Canada, les enfants d’émigrés sont au même niveau que les autres. Mais les immigrés ont été sélectionnés et le marché du travail y est plus flexible. Je remarque aussi que plus l’enfant arrive tard en France, plus il a de difficultés sur plusieurs générations. Cette situation rend impérative une action de politique éducative. La réforme en cours dans les collèges a en partie pour objet de remédier à ce problème.

Capital.fr : Le constat n’est pas brillant !
Jean-Christophe Dumont : La France se monte a son avantage au moins sur un point : l’accès à l’éducation de la petite enfance qui concerne la quasi-totalité des enfants de 3 à 6 ans. Le système est en France très égalitaire dans ce domaine et les résultats sont là. On remarque que les enfants d’émigrés qui démarrent leur scolarité à cet âge s’en sortent nettement mieux que les enfants qui arrivent plus tard. On peut en déduire qu’il n’y a aucun intérêt à retarder le regroupement  familial, bien au contraire, plus les enfants d’émigrés arrivent jeunes en France plus ils ont de chance d’y réussir leur scolarité.

Capital.fr : Les enfants d’immigrés vivant en France se sentent-ils victimes de discrimination ?
Jean-Christophe Dumont : Paradoxalement, les enfants d’immigrés nés en France ressentent plus fortement la discrimination que leurs parents. Ce n’est pas tant qu’ils soient plus discriminés que leurs parents, c’est surtout que leurs attentes vis-à-vis de la société différent. Ils ont la nationalité, ils parlent français et ils sont allés à l’école, du coup le sentiment de discrimination leur est a priori insupportable. Là encore, ce n’est pas une fatalité : au Canada, aux USA ou en Nouvelle Zélande, les enfants d’immigrés se sentent moins discriminés que leurs parents. En tout cas, ce n’est pas une question de racisme : ce sentiment révèle l’écart entre les attentes de ce groupe et la réalité de leur position dans la société. Attention, si on ne résorbe pas cet écart, on risque une fracture durable, voire une faille dans la cohésion sociale. On ne peut pas se permettre de négliger cette question dans nos politiques publiques. Il faut faire un effort supplémentaire en matière d’intégration et d’accès au marché du travail pour les jeunes issus de l’immigration. J’espère que la publication de ce rapport aura l’effet d’un « wake up call » pour les autorités.

Eric Wattez
* "Trouver ses marques. Les indicateurs de l’OCDE sur l’intégration des immigrés en 2015” (juin 2015, OCDE)
© Capital.fr




C) Cazeneuve veut attirer les talents étrangers

Le projet de loi, qui institut un « passeport talent » pour les étrangers, a été examiné mercredi à l'Assemblée.

Le projet de loi sur le droit des étrangers en France refait surface. Ce texte, qui vise à simplifier les formalités d'accueil des personnes séjournant de façon régulière en France, est arrivé mercredi en commission à l'Assemblée. Il doit être discuté à partir du 20 juillet par les députés en séance plénière. Il était temps : le projet de loi avait été présenté il y a presque un an en Conseil des ministres ! 

L'exécutif, empêtré dans des controverses à répétition sur la gestion des demandeurs d'asile (traitée dans un autre texte en discussion au Parlement) et sur le traitement de l'immigration clandestine venue d'Afrique, a longtemps redouté d'ouvrir un nouveau front polémique en lançant le débat parlementaire sur ce projet de loi. 

Cette crainte n'a pas complètement quitté le ministre de l'intérieur, Bernard Cazeneuve, qui a fustigé, mercredi, devant les députés, le « manque de sérénité et de rationalité » du débat sur l'immigration.

Titres de séjour pluriannuels

Le projet de loi, qu'il était venu défendre devant la commission des lois de l'Assemblée, va créer des titres de séjour pluriannuels, d'une durée de deux à quatre ans, qui seront délivrés à l'issue d'un premier titre d'un an. Les demandeurs n'auront plus à revenir tous les ans faire la queue dans les préfectures. Ce titre pourra conduire ensuite à demander la carte de résident dont la validité est de 10 ans. En aucun cas il ne la remplacera, a tenu à préciser Bernard Cazeneuve. 

L'objet de la réforme n'est pas seulement de mettre un terme, autant que faire se peut, à toutes ces tracasseries administratives. Il est aussi de faciliter l'installation en France d'étrangers à fort potentiel, qu'ils y aient été formés ou qu'ils l'aient choisie pour réaliser leur projet professionnel. C'est la vocation du « passeport talents », qui sera notamment réservé aux chefs d'entreprise, aux artistes et aux sportifs. Ce titre unique de quatre ans pourrait concerner « jusqu'à 10.000 personnes par an », selon le ministre, par ailleurs conscient de risques d'abus. Le dispositif pour faciliter le changement de statut entre étudiant et salarié sera « réservé aux meilleurs », jure-t-il.
Joël Cossardeaux, Les Echos

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  • D) Immigration en France : ce qu’il faut savoir
     
    Jean-François Copé a déclaré que l’UMP présenterait d’ici à la fin de l’année une proposition de loi réformant le droit du sol.
    Cependant, les idéologies et le ressenti de la population créent des distorsions qui contredisent le plus souvent la réalité des phénomènes migratoires. De quoi parle-t-on quand on parle d’immigration ? État des lieux.
    François Hollande avait voulu allier fermeté et humanité. Une tentative qui ne suscite plus aujourd’hui, à tort ou à raison, que des critiques. 70 % des Français estiment qu’il y a trop d’étrangers en France. Au sein même de la majorité gouvernementale, la question de la régularisation a créé une fracture avec les écologistes, quand les voix discordantes appelant à une autre politique ne sont pas venues du PS lui-même. 
    Et à l’UMP, Jean-François Copé a annoncé mardi 22 octobre pour la fin de l’année une proposition de loi réformant le droit du sol et prévoyant la fin de l’acquisition automatique de la nationalité pour les enfants nés en France de parents étrangers. Pourtant, la politique de l’immigration et les politiques menées pour la réguler ont peu évolué ces dernières années. Tour d’horizon.

    Des flux stables, des origines variables

    L’immigration est communément présentée de manière statique, avec un nombre d’entrants sur le territoire, plus précisément par le nombre de premiers titres de séjour délivrés (193 000 en 2012, 191 346 en 2011, 189 360 en 2010…). Or, le phénomène migratoire est un flux à deux sens, avec des arrivées, mais aussi des départs. S’il est vrai que depuis 20 ans, la France accueille chaque année, avec assez peu de variation, environ 200 000 migrants, on oublie souvent de préciser que 100 000 repartent dans leur pays dans le même temps.
    Il faut donc considérer qu’environ 100 000 étrangers viennent s’ajouter à la population chaque année. Cette situation est loin de faire de la France un très grand pays d’immigration, puisque la plupart des pays comparables en Europe font plus : 400 000 entrées par an pour la Grande-Bretagne, 220 000 pour l’Italie, l’Espagne, ou l’Allemagne.
    En revanche, les migrants, eux, ont changé. Aujourd’hui, plus d’un immigré sur deux est une femme alors qu’avant 1974, elles ne représentaient que 16 % des flux. Ces dernières sont très souvent accompagnées d’enfants, qui une fois en France bénéficient du même niveau de protection que les nationaux. Les pays d’origine ont considérablement varié, même si ceux historiquement liés à l’Hexagone sont encore bien représentés. Ainsi, en 1982, l’Espagne, le Portugal et l’Algérie étaient les mieux représentés. Aujourd’hui, ce sont l’Algérie, le Maroc et la Chine qui occupent la tête du classement. Parallèlement, la grande précarité touche une part grandissante des migrants. Les étrangers sont désormais majoritaires parmi les appelants au 115 et près de 17 000 ressortissants européens de culture rom vivent aujourd’hui dans des bidonvilles.

    L’immigration familiale, la plus importante

    C’est de loin le premier motif d’admission au séjour. Avec 86 500 titres délivrés en 2012, l’immigration familiale (incluant principalement le regroupement familial et le rapprochement de conjoints) représente 40 % des entrées. Une grande part de ce chiffre est due à la mondialisation et à la multiplication des mariages transnationaux. En effet, l’an dernier, 51 556 rapprochements de conjoints ou d’enfants du couple ont eu lieu du simple fait que l’un des membres de la famille était français. Cette part est jugée quasiment incompressible, puisqu’il s’agit du droit des nationaux à vivre avec leurs proches. En outre, 18 440 titres ont été accordés pour les liens personnels et familiaux autres.
    16 576 titres ont été accordés l’an dernier pour « regroupement familial ». Ils peuvent être demandés par tout étranger résidant depuis au moins 18 mois en France de façon régulière. Il s’agit très largement d’un héritage de la France post-coloniale mis en place en 1945 par ordonnance afin que les étrangers participant à l’effort de reconstruction du pays puissent faire venir leur famille. Cette possibilité a été inscrite dans la loi en 1976 par Valéry Giscard-d’Estaing.
    Depuis 2003, où ce droit a concerné 23 000 personnes, des restrictions ont été apportées. Tout d’abord, les familles polygames en ont été exclues. La carte de séjour accordée n’est plus automatiquement de 10 ans. La durée de résidence minimale pour le demandeur a été allongée. Les normes de confort et de connaissance de la langue ont été renforcées, et la gauche n’entend apparemment pas revenir là-dessus.

    L’immigration de travail, à la marge

    Alors que les motivations des migrants pour changer de pays sont largement économiques, la part de visas professionnels délivrée reste faible. En 2007, ils ne représentaient 7 % de l’ensemble des admissions au séjour, contre 9 % aujourd’hui. La politique d’« immigration choisie » voulue par Nicolas Sarkozy, reprise aujourd’hui par la gauche avec un débat annuel sans vote au parlement consistant à fixer une ligne en fonction du marché du travail et des intérêts économiques de la France, n’a donc pas fait ses preuves.
    Ces chiffres doivent toutefois être relativisés du fait de la bonne intégration sur le marché du travail des migrants venus en France pour un motif personnel. Selon la Commission pour la libération de la croissance présidée par Jacques Attali en 2008, les trois quarts des migrants familiaux trouvent un emploi, mais essentiellement dans les secteurs les moins qualifiés.
    La France gagnerait donc à attirer certains profils professionnels, ou à former les étrangers dans certains domaines. Car les difficultés de recrutement existent, même en temps de crise. Ces difficultés touchent aujourd’hui 40,4 % des projets d’embauche, selon Pôle emploi. Les entreprises évoquent même une pénurie de main-d’œuvre concernant les ingénieurs, informaticiens et cadres d’étude (embauche difficile dans 67 % des cas), les aides à domicile (65 %), les cuisiniers (60 %), les personnels de ménage (55 %) ou encore les aides-soignants (43 %). Dans une loi sur l’immigration prévue en 2014, le gouvernement voudrait créer un titre de séjour de trois ans pour faciliter la vie des salariés, mais aussi des étudiants.

    Un étudiant sur dix est étranger

    De 2001 à 2011, le nombre d’étudiants étrangers a progressé de 46 %, passant de près de 200 000 à environ 290 000. Cette augmentation explique à elle seule pour moitié la hausse des effectifs de l’enseignement supérieur. En France, aujourd’hui, plus d’un étudiant sur dix est étranger. Parmi les nationalités les plus représentées, on trouve les Marocains, suivis des Chinois, dont le nombre a doublé durant les années 2000. Si les profils varient, notamment en fonction des zones d’origine, les étudiants étrangers suivent plutôt des cursus de niveau élevé. Ainsi, 43 % d’entre eux sont inscrits en master. Et quatre doctorants sur dix viennent d’ailleurs.
    Dans ce contexte, le précédent gouvernement avait cherché à limiter, avec la circulaire Guéant, les possibilités données aux diplômés étrangers de débuter leur carrière professionnelle en France. Une erreur, avaient dénoncé de concert la Conférence des présidents d’université et la Conférence des grandes écoles, soucieuses de préserver l’attractivité de l’enseignement supérieur français. Selon elles, les jeunes étrangers qui étudient et commencent à travailler ici constituent ensuite de formidables ambassadeurs de la France, susceptibles notamment d’aider les entreprises tricolores à pénétrer de nouveaux marchés.
    À son arrivée au pouvoir, la gauche a abrogé la circulaire Guéant. Elle a aussi créé des titres pluriannuels de séjours, correspondant aux cycles universitaires. Il faut dire que sur le « marché » très dynamique et de plus en plus mondialisé de l’enseignement supérieur (les familles aisées des pays émergents envoient de plus en plus leurs enfants se former à l’étranger), la compétition est grande. Et en dix ans, la France est passée du 2e au 5e rang en termes d’accueil d’étudiants étrangers.

    L’immigration clandestine, cette inconnue

    Il s’agit là d’une zone grise où, par définition, peu de données existent. Les estimations passent du simple au double. En 2004, la Direction centrale du contrôle de l’immigration et de la lutte contre l’emploi clandestin (Diccilec) avançait le chiffre de 200 000 étrangers en situation irrégulière. Le Bureau international du travail estimait à la même époque qu’ils étaient 400 000. Aujourd’hui, le seul indicateur fiable mesurant le nombre de clandestins est le recours à l’Aide médicale d’état (AME) qui leur est réservée et qui s’élevait, fin 2011, à 208 974 bénéficiaires. Mais tous ne la demandent pas. Parmi ces personnes, peu sont en réalité entrées en France clandestinement. Près de 90 % sont venues en toute légalité et se sont maintenues sur le territoire après que leur droit au séjour a expiré (un visa touristique par exemple). Par ailleurs, plus de 40 000 déboutés du droit d’asile se retrouvent chaque année en situation irrégulière.
    Face à cette situation, là encore, la continuité politique est de mise. Sous la majorité de François Hollande qui, pendant la campagne présidentielle, avait promis une « lutte implacable contre l’immigration illégale et les filières de travail clandestin », la France, avec 36 822 expulsions en 2012, a même dépassé le précédent record établi par la droite en 2011 (32 912 éloignements en 2011). De chaque côté de l’échiquier politique, la « régularisation de masse » est exclue. En 2012, 36 000 personnes en situation irrégulière ont ainsi obtenu un droit au séjour, soit guère davantage que l’année précédente. Cela ne devrait pas considérablement changer cette année.
    La « circulaire Valls » du 28 novembre 2012 assouplit bien l’admission au séjour pour les clandestins, notamment pour les familles dont les enfants sont scolarisés, mais à la marge. Cela étant, il s’agit bien d’un changement de posture pour un gouvernement socialiste. À l’arrivée de François Mitterrand au pouvoir en 1981, 131 000 étrangers avaient été régularisés, et Lionel Jospin avait admis 80 000 clandestins au séjour en 1997. La politique actuelle a l’avantage d’être plus en phase avec l’opinion publique, comme le montre le niveau de popularité du ministre de l’intérieur, Manuel Valls. Mais elle accentue les ruptures au sein d’une gauche, qui a pourtant besoin d’unité pour gouverner.

    L’asile, une migration pas comme les autres

    Lié à l’exercice des droits de l’homme et à la convention de Genève, l’asile se distingue d’une simple stratégie de migration économique ou familiale. C’est en principe la contrainte qui pousse à le demander. Y est admissible, en France, toute personne « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ».
    Toutefois, chaque année, parmi les 60 000 demandes effectuées, seul un quart obtient une réponse positive. Les 45 000 déboutés se retrouvent soumis à la même obligation de quitter le territoire français que n’importe quel migrant clandestin.
    On parle souvent de « ni-ni » à propos de ces déboutés, car beaucoup se retrouvent « ni régularisables », puisque déboutés, « ni expulsables », du fait qu’ils sont venus en famille.




     
    E) L’histoire de l’immigration en France - Le film : deux siècles d'histoire de l'immigration en France 

    Le Film:

    Riche de 350 photographies et documents d’archive, ponctué d’extraits sonores, ce film retrace en quarante minutes deux siècles d'histoire de l’immigration en France.

    Cette seconde version du film sur « L’histoire de l’immigration en France » est en ligne depuis juillet 2006. Ecrite par des historiens membres du comité scientifique du Musée, riche de 350 photographies et documents d’archive, ponctuée d’extraits sonores, elle retrace en quarante minutes deux siècles d’immigration : les vagues successives d’arrivées d’immigrants et de réfugiés, la mise en œuvre des politiques publiques et les questions de nationalité, les réactions de l’opinion publique entre xénophobie et solidarité, le travail et les métiers de l’immigration, les combats menés en commun en temps de paix comme en temps de guerre, les modes de vie et les questions culturelles. Outil résolument pédagogique, destiné au plus large public, le film concilie les exigences de l’histoire avec l’attrait et la convivialité du multimédia.

    Vous pouvez approfondir les différentes périodes et thématiques traitées en consultant des dossiers thématiques plus détaillés. Confiés à des chercheurs, ces dossiers apportent des éclairages sur différents aspects de l’histoire de l’immigration : groupes nationaux, modes de vie, événements fondateurs, culture, luttes, travail etc. Des liens sont proposés avec les différentes séquences du film.


    Crédits du film "Deux siècles d'histoire de l'immigration en France"




     
    F) Immigration : pour en finir avec 5 idées reçues

    "La France accueille plus d'immigrés que ses voisins", "les immigrés n'ont aucune qualification"... Retour sur cinq idées reçues

    "Canalisation qui explose", "misère du monde"... En matière d'immigration, les idées reçues sont d'autant plus nombreuses qu'elles sont régulièrement alimentées par les discours politiques. Quelle est la part réelle d'immigrés dans la population française ? La France est-elle vraiment un des premiers Etats d'Europe à accueillir les migrants ? Réponses à quelques a priori en infographie.

    1. "La France est envahie par les immigrés"


    En 2011, selon le recensement de l'Insee, les immigrés (personnes nées à l'étranger mais résidant en France, qui peuvent être de nationalité française) représentaient 8,4% de la population française et les étrangers (personnes résidant en France - et qui ont pu y naître - sans en posséder la nationalité) 5,8%. 
    Depuis 1982, la part d’immigrés sur l’ensemble de la population a donc augmenté de 1,2% (passant de 7,2% à 8,4%) tandis que la part d’étrangers a un peu moins diminué (passant de 6,3% à 5,8%). Selon l'Insee, entre 2004 et 2012, la population immigrée a augmenté d'environ 90.000 personnes par an, pour aboutir à un total de 5,8 millions d'immigrés début 2013.

    On est donc bien loin de la théorie du grand remplacement brandie régulièrement par l'extrême droite. 

    2. "La France est l'un des premiers pays d'accueil des demandeurs d'asile"

    En 2014, la moyenne d'acceptation de demandes d'asile au sein de l'Union européenne s'élève à 45,2%. Avec ses 14.905 demandes acceptées sur un total de 68.535 décisions rendues, la France affiche pour sa part un taux d'acceptation de 21,7%, bien inférieur à celui de nombreux voisins européens.

    L'hexagone est en effet loin derrière certains pays, aussi bien en terme de demandes reçues (202.645 pour l'Allemagne) que d'acceptation (76,8% pour la Suède ou encore 58,4% pour l'Italie). Mais aussi devant de bien plus mauvais élèves, comme la Grèce (1.970 acceptations sur 13.305 décisions rendues).

    http://infogr.am/demandes_dasile-4

    3. "Les migrants en situation irrégulière sont de plus en plus nombreux à s'installer en France"

    La tendance observée ces deux dernières années témoigne au contraire d'une augmentation du nombre de départs de migrants en situation irrégulière en France vers l'étranger.

    Les départs spontanés se sont en effet considérablement multipliés, comme en témoigne la hausse de 41,3% entre 2013 et 2014.

    En cumulé avec les éloignements forcés et spontanés, les départs annuels restent donc stables, avec une légère hausse (de presque 2%) sur un an : les sorties du territoire s'élevaient ainsi à 27.606 personnes en 2014, contre 27.081 personnes en situation irrégulière l'année précédente.
    Un phénomène de migration qui s'explique notamment par le fait que de nombreux migrants passent seulement en transit par la France, afin de rejoindre d'autres pays européens, comme l'Allemagne ou la Suède. 

    4. "L'immigration coûte plus qu'elle ne rapporte"

    Cette affirmation prête à débattre depuis des années, et ne devrait pas trouver de réponse définitive sous peu puisqu'il est très difficile de quantifier les apports financiers de l'immigration. Elle aurait ainsi rapporté près de 3,2 milliards d'euros à l'Etat en 2005 selon une étude, mais coûterait 5 à 10 milliards d'euros d'après un autre rapport.
    En revanche, le coût de la politique européenne de lutte contre l'immigration clandestine est bien connu. Il s'élève, depuis 2000, à 11,3 milliards d'euros pour les seules reconduites à la frontière d'immigrés illégaux et à 1,6 milliard d'euros pour assurer la protection aux frontières en question, selon l'enquête d'un consortium de journalistes européens


    5. "Les immigrés n'ont aucune qualification"


    Là encore, l'idée reçue selon laquelle les migrants seraient des travailleurs non qualifiés, donc potentiellement peu susceptibles d'apporter de la richesse à leur pays d'accueil, est mise à mal par les statistiques de l'Insee.

    Ainsi, 63% des immigrés arrivés en France en 2012 étaient titulaires d'un diplôme équivalent au baccalauréat et 39% de ces nouveaux arrivés disposaient d'un diplôme supérieur. Des statistiques en hausse depuis 2004. 

    Entre 2004 et 2012, la part d'immigrés titulaires d'un diplôme au moins équivalent au bac a en effet augmenté de 7 points. Bien que la majeure partie de ces immigrés aux grandes qualifications provienne d'Amérique ou d'Asie, certains sont aussi originaires d'Afrique.

    L'Insee précise ainsi qu'à eux seuls, les migrants venus d'Afrique représentent "42 % de la progression depuis 2009 : la part des plus diplômés augmente de 5 points pour les Marocains et de 4 points pour les Tunisiens".

    Alexis Orsini


    G) Immigration : une seule issue, ouvrir les voies légales

    Face au caractère inéluctable de l’immigration en Europe et aux conditions désastreuses dans lesquelles elle s’opère actuellement, il est urgent de changer d’approche en légalisant l’immigration.

    Le projet de loi relatif à la réforme du droit d’asile revient à l’Assemblée, exacerbant une nouvelle fois le débat sur la capacité de notre pays à faire face à un afflux croissant d’immigrés.

    Dans ce contexte, il apparaît essentiel de revenir à une réalité inéluctable : quelle que soit l’appétence des uns et des autres pour l’immigration, le nombre de personnes qui rejoindront notre continent dans les années et les décennies à venir va continuer à croître fortement. En effet, il y a d’un côté le besoin économique d’un apport de population dans une Europe vieillissante et de l’autre, la détermination, voire l’héroïsme, mis en œuvre par les individus qui cherchent à rejoindre le continent.

    Le déni de réalité, les crispations, les circonvolutions actuelles se payent cher. En l’absence de dispositif légal à la hauteur du phénomène, l’aventure des migrants s’apparente à la traversée des Enfers. Lors du voyage d’abord : ils sont condamnés à des conditions de vie inhumaines. Ensuite, arrivés sur place : ils pénètrent des méandres administratifs qui les maintiennent dans une situation kafkaïenne. Ceux qui demandent l’asile se voient gratifiés provisoirement par l’État d’un subside symbolique, mais ont l’interdiction de subvenir par eux-mêmes à leurs besoins en travaillant. Cela donne naissance à des zones de campements sauvages où les migrants sont condamnés à attendre Godot. Mais cette attente est en général rapidement perturbée puisque la police se charge de les déloger et les voisins de leur reprocher de ne pas s’intégrer.

    Pour les autochtones, ces images de rafiots à l’attaque des côtes européennes et la sensation que le denier public est dilapidé dans la gestion de l’immigration favorisent une posture de défiance, voire d’agressivité face aux arrivants.

    Pourtant, le phénomène migratoire est inéluctable. Il peut y avoir encore quelques gesticulations politiciennes mais cela restera quantité négligeable face aux réalités de fond : le besoin économique en immigration et la détermination des migrants.

    Alors, plutôt que d’infliger des souffrances stériles à tous les protagonistes, immigrants ou autochtones, il conviendrait de mettre en place urgemment les voies légales permettant d’accompagner dignement ces flux migratoires.

    En quoi cela consisterait-il ? Il s’agirait simplement d’octroyer un titre de séjour à toute personne qui en ferait la demande. En contrepartie, le migrant aurait à s’assumer seul, par son propre travail ou la solidarité familiale. Dans un premier temps, 5 ans ?, il ne bénéficierait de la solidarité nationale que pour les services auxquels il aurait cotisé. Par exemple, un salarié migrant bénéficierait comme tout cotisant aujourd’hui, de l’assurance chômage, de la couverture santé, etc. En revanche, les autres dispositifs de redistribution ne lui seraient pas ouverts, soit actuellement, RSA, allocations familiales, ou autre subvention. Au terme de cette durée probatoire, il pourrait devenir pleinement membre de la communauté nationale.

    Ce dispositif s’appliquerait quelle que soit la raison de la migration, politique, économique, familiale. Il permettrait d’une part d’éviter la sauvagerie des traversées en mer ou dans les trains d’atterrissage des avions, ainsi que la précarité et la dangerosité du statut de clandestin. Il favoriserait d’autre part l’intégration des migrants. En effet, ayant à s’assumer seuls, ils bénéficieraient de la sociabilisation par le travail ou s’appuieraient sur leur famille déjà présente sur place. De leur côté, les autochtones n’auraient plus à craindre que leurs impôts servent à entretenir les personnes immigrées.

    Plutôt que d’essayer de construire des digues aussi minuscules qu’inefficaces et de se mette en position de subir les flux migratoires, l’Europe aurait tout à gagner à prendre acte du caractère incontournable de l’immigration, afin d’intégrer les arrivants dans les meilleures conditions, au bénéfice de tous.
     
    Anthony Végat - Le site de l'auteur



    H) Immigration de Wikiberal

    L'immigration (du latin immigrare, pénétrer dans) désigne l'entrée dans un pays d'étrangers qui viennent y séjourner et s'y établir pour une période de temps plus ou moins longue.

    Libéraux et libertariens diffèrent quant à la façon de concevoir l'immigration. On peut dégager plusieurs tendances :
    • Pour les libéraux conservateurs, attachés au concept de nation, la politique d'immigration est décidée en fonction des besoins du pays. La nationalité s'obtient en remplissant certaines conditions (pas de casier judiciaire, langue parlée couramment) après quelques années et avec une période probatoire. Les immigrés clandestins sont reconduits dans leur pays. L'accès aux services sociaux est limité dans le temps pour les étrangers, même en situation légale. Les immigrés condamnés à de la prison ferme sont définitivement expulsés à l'issue de leur peine. Mais de nombreaux libéraux authentiques ne partagent pas cette vision, estimant que toute barrière à une immigration libre représente une forme de protectionisme et favorise la main d'oeuvre au détriment de la liberté de contracter de l'employeur.
    • En théorie, pour les libertariens, il n'existe pas de lois particulières à l'immigration. Les étrangers sont libres de s'installer là où ils le souhaitent, à partir du moment où le propriétaire des lieux accepte de les recevoir, si l'endroit en question fait l'objet d'un droit de propriété. Certes, comme pour n'importe quel autre habitant, un étranger devrait pouvoir bénéficier d'un droit d'usucapion sur un bien resté libre de propriétaire, et dont il deviendrait le légitime propriétaire après quelques années pendant lesquelles il en aurait été le possesseur pacifique. Vu qu'un immigré est, par définition, une personne qui a émigré, refuser le principe de l'immigration revient ipso facto à refuser que quelqu'un puisse quitter son pays, et donc à cautionner l'idée de souveraineté étatique. De même, les immigrés sont libres de travailler là où ils le souhaitent si l'entreprise est prête à les embaucher. En somme, il n'y a pas de différence entre immigrés et autochtones. C'est une simple question d'isonomie, d'égalité devant la loi.
    • Cependant, dans les faits, beaucoup de libertariens comme Ron Paul, Nigel Farage, Hans-Hermann Hoppe considèrent avec méfiance l'immigration, jugée bien trop massive depuis plusieurs années et incontrôlée. Pour Hoppe, l'immigration actuelle découle de l'irresponsabilité des gouvernants démocratiques qui agissent comme de simples détenteurs (et non propriétaires) du territoire qu'ils administrent - à la différence des monarques propriétaires de la terre, plus soucieux, selon lui, de la rentabiliser. Dans cette logique, l'État-providence fonctionne comme un appel d'air favorisant l'entrée d'immigrants intéressés prioritairement par les diverses allocations octroyées par les services gouvernementaux. Pour pallier ce problème, Hoppe envisage une décentralisation de l'autorité politique, confiée notamment aux villes et municipalités, qui décideraient souverainement qui peut ou non entrer sur leur territoire. Pour remédier à ce qu'il définit comme une "intégration forcée", le philosophe et économiste préconise donc une forme de discrimination coercitive et, partant, un contrôle politique de l'immigration. Ron Paul préconisait lors de sa campagne présidentielle 2012 de faire rentrer les troupes américaines d'Irak pour en placer certaines à la frontière avec le Mexique et autoriser les propriétaires terriens américains a aider le gouvernement dans leur tâche. Il dira cependant être contre la construction d'un mur le long de la frontière, affirmant qu'il restreindrait les mouvements des américains et ne serait de toute façon pas assez efficace. On notera sa phrase “Une Nation sans frontières n'est pas une Nation du tout". Nigel Farage propose quant à lui de "geler" l'immigration en Grande-Bretagne pendant 5 ans suite au flux massif d'immigrés rentrés en Grande-Bretagne, mieux contrôler les frontières et que dans le futur l'immigration soit limitée à 50.000 individus choisis par an maximum.

    L'immigration: un faux problème

    Il y a deux manières de traiter le "problème" de l'immigration : de façon autoritaire (règlementations, contrôles, répression, "préférence nationale" et autres procédés fleurant bon l'étatisme) ou de façon libérale, en autorisant toute immigration, mais en supprimant les motivations malsaines (État-providence, protection sociale), les seules qui n'enrichissent pas le pays d'accueil. La contradiction propre à la social-démocratie est qu'elle attire les moins favorisés (immigration) et fait fuir les plus capables ou les plus taxés (émigration), ce qui alimente un processus d'appauvrissement général du pays :
    Si l'État-providence n'existait pas, si nous avions une complète liberté des marchés, il serait alors logique de laisser la porte grande ouverte à l'immigration. Mais avec l'État-providence c'est impossible. Sa présence implique de contrôler l'immigration. (Milton Friedman)
    Au cours du temps, l'instauration d'un État-providence de plus en plus étendu s'est accompagnée d'un surcroît de contrôles et d'entraves à l'immigration (car il faut empêcher l'étranger de bénéficier indûment des privilèges réservés aux nationaux ; de plus, un immigré clandestin qui serait salarié échapperait à l'impôt et aux charges sociales). A titre d'exemple, la Suisse, en 1848, avait une politique extrêmement libérale : avoir droit de cité quelque part entraînait l'acquisition automatique de la nationalité. Aujourd'hui cette acquisition est difficile, cependant la population étrangère représente une proportion de 22 % de la population totale, un record en Europe avec l'Andorre (qui compte, elle, 60 % d'étrangers : espagnols, portugais et français).

    La question des frontières: autre faux problème

    Enfin, les frontières étatiques ne peuvent être invoquées pour prohiber ou freiner l'arrivée d'étrangers. Dans la logique libérale et libertarienne, tant qu'elles existent, elles ne doivent pas empêcher les individus de se déplacer, mais bien plutôt contenir l'État dans le territoire qu'il administre. Les libertariens observent que c'est le contraire qui se produit de nos jours: le contrôle de l'immigration s'étend - fait relativement récent -, tandis les États continuent de ne pas respecter les limites territoriales. Par exemple, en plus de régir la vie de leurs administrés, les gouvernements contraignent sous la menace les ressortissants étrangers à porter eux aussi des pièces d'identité, faute de quoi ils sont déclarés "illégaux" et privés de liberté comme de vulgaires délinquants.
    Il faut aussi relever qu'en combattant l'immigration "illégale", les gouvernements affaiblissent la coopération libre et volontaire, tout en renforçant leur propre coopération entre appareils coercitifs à travers les échanges d'informations relatives aux individus, toujours présumés coupables. Les cas les plus flagrants sont les renvois de personnes "indésirables" dans leur pays d'origine, où elles risquent d'être arrêtées, torturées, voire exécutées, par la police ou les autorités locales.
    Les limites territoriales sont donc des bornes à la liberté de circulation des individus alors qu'elles devraient être considérées comme une entrave à l'expansion (militaire en particulier) des États.

    L'immigration, un "choc" culturel et religieux ?

    On peut aussi voir l'immigration sous l'angle des "chocs" culturels et identitaires : selon Samuel Huntington (Le Choc des civilisations), le monde est divisé en diverses conceptions culturelles et religieuses, au-delà des nations et des états. Selon la thèse du "choc des civilisations" énoncée par Samuel Huntington, une immigration peut produire un "choc" culturel, car les populations "immigrantes" ont tendance à perpétuer les habitudes socio-culturelles et religieuses de leur pays d'origine, ce qui implique des tensions culturelles et religieuses entre les populations nationales ou autochtones et les populations "immigrantes".
    La source possible de conflits n'est alors ni idéologique ni économique, mais culturelle. Les puissances dominantes devraient selon Huntington respecter strictement les zones d'influence qui sont liées aux différentes cultures (occidentale, latino-américaine, islamique, slavo-orthodoxe, hindoue, japonaise, confucéenne et africaine) et s'interdire d'intervenir hors de leur zone culturelle (ce qui est à l'opposé des conceptions néoconservatrices américaines).

    Bibliographie

    • 1995.
      • Peter Brimelow, "Alien Nation: Common Sense About America’s Immigration Disaster", New York: Random House.
      • Richard M. Ebeling et Jacob G. Hornberger, eds. The Case for Free Trade and Open Immigration. Fairfax, VA : The Future of Freedom Foundation.
      • Hans-Hermann Hoppe, “Free Immigration or Forced Integration?”, In: Thomas Fleming, dir., Immigration and the American Identity, Rockford, Ill.: The Rockford Institute, pp212-220.
      • Thomas E. Lehman, "Coming to America: The Benefits of Open Immigration", The Freeman, December, Vol 45, n°12.
    • 1999, David Friedman, “Senza assistenzialismo niente immigrazione”, Enclave, Rivista Libertaria (Treviglio: Leonardo Facco Editore, n. 5) pp. 26-27, (it)

    Citations

    • Comment pourrait-on défendre le libre-échange, c'est-à-dire la libre circulation des marchandises et s'opposer par la force au libre mouvement des hommes ? Ainsi, les barrières à l'entrée dans un pays – les interdictions d'entrée, les quotas d'immigration ou même la simple obligation de détenir un passeport et un visa – constituent une atteinte aux droits légitimes des gens. Par conséquent, aucun argument ne peut permettre de justifier les politiques d'immigration pas plus, bien sûr, que les politiques de limitation de l'émigration mises en place par tant de régimes totalitaires. La meilleure politique d'immigration consiste donc à ne pas en avoir. (Pascal Salin, Libéralisme, 2000)
    • Les ouvriers qui accourent en foule à un certain endroit y pèsent sur la productivité-limite [marginale]. Le revenu du travail, le salaire, baisse, et par là un tort est causé aux ouvriers qui travaillaient en cet endroit avant l’immigration. Ces ouvriers voient dans les immigrés la cause de leurs salaires réduits. Leur intérêt particulier exige une prohibition de l’immigration. Empêcher l’afflux de nouveaux ouvriers devient un point du programme de la politique particulière de tous les groupements d’ouvriers. (Ludwig von Mises), "Le Socialisme, 1938)
    • Une autre forme, a priori plus pacifique, de redistribution et de régulation de l’inégalité mondiale du capital est évidemment l’immigration. Plutôt que de déplacer le capital, ce qui pose toutes sortes de difficultés, une solution plus simple consiste parfois à laisser le travail se déplacer vers les salaires les plus élevés. (Thomas Piketty, Le Capital au XXIème Siècle, 2013)
    • Observons encore que s’il est juste et utile de laisser tout homme disposer de son travail, il l’est également et par les mêmes raisons, de lui laisser choisir son séjour. L’un est une conséquence de l’autre. Je ne connais rien de plus odieux que d’empêcher de sortir de son pays un homme qui y est assez mal pour désirer de le quitter malgré tous les sentiments de la nature et toutes les forces de l’habitude qui l’y retiennent. (Destutt de Tracy, Traité d'économie politique, 1823)
    • Si l’État-providence n’existait pas, si nous avions une complète liberté des marchés, il serait alors logique de laisser la porte grande ouverte à l’immigration. Mais avec l’État-providence c’est impossible. Sa présence implique de contrôler l’immigration. (Milton Friedman)

    Liens externes



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