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février 16, 2018

21 mesures pour l'enseignement des mathématiques - Rapport

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21 mesures pour l'enseignement des mathématiques - Rapport - Cédric Villani, député de l’Essonne et Charles Torossian, inspecteur général de l’éducation nationale


Jean-Michel Blanquer a confié une mission sur les mathématiques à une équipe menée par Cédric Villani, député de l'Essonne, et Charles Torossian, inspecteur général de l'éducation nationale. Le rapport sur l'enseignement des mathématiques en France a été remis au ministre de l'Éducation nationale le lundi 12 février 2018. La mission était chargée d'établir un bilan des forces et des faiblesses actuelles, de préciser les points de blocage et les leviers potentiels avant de formuler des propositions concrètes en s'inspirant des pratiques les plus concluantes et à la lumière des études internationales.



Le Rapport

MISSION MATHÉMATIQUES

21 MESURES POUR
L’ENSEIGNEMENT DES MATHÉMATIQUES


« Les mathématiques, bien considérées, sont douées non seulement de justesse, mais aussi de suprême beauté. »
Bertrand Russell


INTRODUCTION : LA MISSION ET SON CONTEXTE 

Des résultats catastrophiques
Depuis une douzaine d'années, les résultats de nos élèves en mathématiques ne cessent de se dégrader, y compris pour les meilleurs d’entre eux. C’est ce que montre l'enquête internationale Pisa (Programme international pour le suivi des acquis des élèves), même si elle mesure surtout des connaissances ou compétences de base. Il est permis de s’interroger sur les scores qu’obtiendraient nos élèves si l’on s’avisait de comparer leurs performances sur des questions plus fines, avec celles des élèves de pays plus performants (Asie du Sud-Est, Pologne, Roumanie, Hongrie, etc). L'évaluation Timss 2015 (Trends in International Mathematics and Science Study) n’est pas meilleure, elle place tout simplement la France au dernier rang des 19 pays participants.
À juste titre le monde politique s’en inquiète et pointe une urgence : remédier à une situation socialement et économiquement calamiteuse qui, si elle n’est pas corrigée, obère notre avenir.
Les évaluations nationales confirment encore ce constat inquiétant. Ainsi, l'enquête Cedre1 de la direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (Depp) révèle des acquis très fragiles à la fin du primaire. On y apprend que 42,4 % des élèves ont une maîtrise fragile des mathématiques, voire de grandes difficultés. Multiplier 35,2 par 100 représente ainsi un obstacle majeur pour la moitié des élèves en fin de primaire. Cette fragilité en mathématiques perdure par la suite, puisque l’enquête JDC2 (2014) montre qu’un jeune français sur dix est en difficulté dans l’utilisation des mathématiques de la vie quotidienne. Dit autrement : 10 % des jeunes Français souffrent d’un handicap dans la réalisation d'activités quotidiennes dès que les nombres sont en jeu, ce qui entrave la réalisation de leurs projets personnels (création d’entreprises, etc.).
Les résultats nationaux et internationaux successifs mettent en évidence une fraction croissante des élèves se situant aux niveaux les plus faibles des échelles de performance. À cela s’ajoute l'incapacité de notre système à réduire les inégalités qui en résultent sur l’ensemble de la population scolaire (indépendamment des déterminismes sociaux). Cette incapacité tient aussi à la défaillance dans le repérage et la prise en charge des difficultés rencontrées par les élèves, ainsi qu’à une propension à mettre en avant des facteurs externes pour expliquer ces troubles. 

1 http://www.education.gouv.fr/cid53629/cedre-2014-mathematiques-en-fin-d- ecole-primaire-les-eleves-qui-arrivent-au- college-ont-des-niveaux-tres-heterogenes.html
2 http://www.education.gouv.fr/cid58761/journee-defense-et-citoyennete- 2014-un-jeune-sur-dix-handicape-par-ses- difficultes-en-lecture.html

Des professeurs en souffrance
Nous avons également constaté une grande souffrance dans le corps enseignant, corrélée à cette dégradation, et tout aussi préoccupante, entretenue par la détérioration de l'image de l’enseignant dans la société. La lourdeur des tâches administratives, l’impression de non reconnaissance, y compris salariale3, concourent à ce mal-être. Un tiers des professeurs des écoles déclare ne pas aimer enseigner les mathématiques. Les problèmes de gestion de classe4, qui empiètent sur le temps effectif, génèrent un surcroît d’anxiété professionnelle et des démissions en augmentation.
La disproportion entre les moyens investis et les résultats
Un autre signe de dysfonctionnement est la grande disproportion entre les moyens financiers mis en œuvre, qui restent toutefois dans la moyenne de l’OCDE5,6, et les résultats obtenus. Quand le rendement d'un dispositif est faible, on cherche à l'améliorer, ce qui demande d'en identifier les dysfonctionnements. La situation observée a une dimension systémique dont il est tout à fait indispensable de tenir compte et c'est donc toute la chaîne éducative qu’il faut ausculter. 

3 http://eacea.ec.europa.eu/education/eurydice/documents/facts_and_figures/salaries.pdf
4 Cnesco : Selon l’enquête Talis (2013), les enseignants d’éducation prioritaire estiment consacrer au collège 21 % du temps de classe à l’instauration et au maintien d’un climat de classe favorable (contre 16 % hors éducation prioritaire et 12 % dans le privé).
5 http://www.keepeek.com/Digital-Asset-Management/oecd/education/regards-sur-l-education-2016_eag-2016- fr#page220
6 150 milliards d’euros pour l’éducation soit 7 % du PIB, 50 milliards de budget pour l’éducation nationale, dont seulement la moitié concerne les dépenses des personnels enseignants. On peut considérer que près de 1/7e du temps élève est en relation direct avec les mathématiques et beaucoup plus, si on tient compte du temps d’exposition indirect.
 
La pression sociétale et la démocratie
Enfin, l’image actuelle des mathématiques est préoccupante. La discipline occupe en effet une place à part dans les parcours scolaires : elle est devenue une des clés pour accéder aux études et aux écoles les plus recherchées. C'est dire que, pour de nombreuses formations, son poids symbolique dépasse largement son poids réel. En outre l’impact des mathématiques dans le monde économique numérique d’aujourd’hui accroît cette pression. Cette domination s’exerce même dans l’esprit de tout un chacun. Le développement d’un sentiment d’autodépréciation est très répandu, chez les élèves comme chez les adultes ; parce qu’ils ne font pas partie du trio d’élèves qui tournent entre 18 et 20, même des élèves de niveau tout à fait satisfaisant en viennent à se considérer comme « nuls en maths » et se l’entendent parfois dire. Dès 7 ans, certains élèves se déclarent déjà « nuls en maths ».
Face à une telle situation, nous ne pouvons que nous interroger. Comment cet enchaînement, qui aboutit à une perte durable d’estime de soi se met-il en place ? Comment une discipline, reconnue pour son utilité et ses vertus formatrices à la rigueur du raisonnement, peut-elle être perçue comme un repoussoir ? La place et le rôle des mathématiques méritent d’être explicités, ramenés à leur juste proportion. Mais dans le même temps, les mathématiques doivent être remises en valeur, en termes simples. La place des familles dans le suivi des élèves doit être renforcée, donc autorisée et instituée au plus haut niveau, là aussi en termes ordinaires. Les parents doivent être encouragés à rencontrer les professeurs et à questionner les résultats de leurs enfants, en même temps que les professeurs et l’encadrement doivent être encouragés à valoriser tous les élèves. 

Une priorité nationale
Devant un tel constat, qui met en jeu jusqu’aux fondements de la vie sociale, il est grand temps de réagir, en prenant des mesures énergiques à la hauteur de l’enjeu tout en les accompagnant de moyens adéquats7. C'est pourquoi la mission propose d'inscrire l'enseignement des mathématiques parmi les priorités nationales. 

7 Le Royaume-Uni, conscient de l'enjeu renouvelé de la qualité de l'enseignement mathématique, y a investi 45 millions d'euros ; cela indique bien que le sujet fait l'objet d'une attention internationale forte.

Lettre de mission et constitution de l'équipe
La société s’est récemment saisie de toutes ces questions, notamment à travers un débat sur l’efficience des méthodes pédagogiques en mathématiques. C’est dans ce contexte que le ministre Monsieur Jean-Michel Blanquer, a décidé de confier à Cédric Villani, député de l’Essonne et à Charles Torossian, inspecteur général de l’éducation nationale, une mission portant sur l’enseignement des mathématiques. La lettre de mission, que l’on trouvera en annexe, a été reçue le 23 octobre 2017 et demande : de repérer des leviers, d’analyser les difficultés, d’identifier les points de blocage, de formuler des propositions concrètes et opérationnelles. Elle porte sur quatre axes : déterminer les pratiques les plus concluantes en s’inspirant notamment des études internationales et analyser le rôle du numérique éducatif, repenser la place du calcul sur tous les niveaux de la scolarité en lien avec les apports des neurosciences, formuler des recommandations sur les paliers annuels d’acquisition, formuler des propositions pour mieux articuler les actions périscolaires et scolaires. 

8 Dgesco.
9 La mission remercie la Dgesco pour son soutien logistique, qui a permis l’avancée de ses travaux durant un temps aussi court, et la mise à disposition de Bertrand Cavayé, adjoint au chef du bureau des contenus d’enseignement et des ressources pédagogiques, comme secrétaire général.
 
Après concertation avec Jean-Marc Huart, directeur général de l’enseignement scolaire8 et Yves Cristofari, chef du service de l'instruction publique et de l'action pédagogique, il a été convenu de former une équipe d’une vingtaine de personnes autour des deux pilotes, Cédric Villani et Charles Torossian9. La formation de cette équipe a procédé selon la logique suivante : agglomérer les compétences, ouvrir le débat interne aux points de vue complémentaires, permettre d’appréhender l’ensemble des problématiques pédagogiques, didactiques, organisationnelles, scientifiques et culturelles en diversifiant les profils (cadres opérationnels, chercheurs, universitaires, enseignants, philosophes, responsables d’associations, professionnels de la formation). Travailler dans la confiance et l’ouverture intellectuelle fut le maître-mot qui guida notre organisation. On trouvera en annexe la liste des membres permanents de la mission ainsi qu’un court curriculum vitae.
Dans un premier temps la mission a organisé seize auditions10 pour les institutions et associations à partir du 22 novembre 2017 ; 250 pages de syllabus aux questions posées ont été recueillies. Dans un second temps, la mission a organisé quinze tables croisées11 sur invitations personnelles, avec comptes rendus. La plupart de ces rencontres ont eu lieu au lycée Buffon, salle Arthus, à Paris. La mission remercie chaleureusement Michel Pantebre, proviseur, pour la mise à disposition de la salle du conseil. La mission s’est déplacée sur quatre sites (Lille, Orléans, Paris, Les Ulis) et a reçu, sur mission.maths@education.gouv.fr et les adresses des pilotes, près de 1 000 messages et contributions, qui ont tous été lus et traités. 

10 Voir Annexe 2. 11 Voir Annexe 3.
 
La progression du rapport
Nous avons choisi de présenter nos propositions (21 mesures principales et 32 recommandations complémentaires) en les organisant autour de sept grands chapitres. D'abord, il nous a paru indispensable de décrire l'esprit dans lequel nous avons travaillé, l'objectif que nous avons poursuivi (§1). Ensuite, nous avons présenté les expériences sur lesquelles nous nous sommes appuyés. Parmi les pratiques existantes, nous avons interrogé celles qui nous paraissaient pouvoir montrer les voies de la réussite (§2). À partir de là, nous avons commencé à dérouler les conclusions que nous pouvions tirer. Le cœur de ce rapport se situe au §3, où il est question du cours, du calcul, de l'interdisciplinarité. Mais les mesures préconisées ne seront effectives que si elles sont accompagnées d'une révision en profondeur de la formation des enseignants (§4). Pour bien exercer leur métier, ceux-ci ont aussi besoin de disposer d'outils pédagogiques adaptés, comme de rester en contact avec la recherche (§5). Nous avons évoqué l'importante question de l'ouverture de l'école et de l'impact des mathématiques sur les diverses inégalités sociales (§6). En conclusion (§7), nous avons eu soin d'indiquer les mesures systémiques nécessaires pour faire vivre tout ce qui précède. Il est clair en effet que c'est toute la chaîne éducative qui est intéressée à l'amélioration de l'enseignement des mathématiques et que si aucun suivi n'est garanti, dans un effort de longue haleine, tout ce qui suit ne sera que lettre morte. 

Les 21 mesures pour l'enseignement des mathématiques

Priorité au premier degré

1 - Formation initiale
Construire, dès 2018, la formation initiale des professeurs des écoles démarrant à Bac+1, de façon à assurer, dans une licence adaptée ou un parcours pluridisciplinaire, un volume suffisant d’enseignements dédié aux disciplines fondamentales.
2 - CP-CE1 en Rep+
Inclure, dès septembre 2018, les mathématiques dans la priorité nationale décrétée en Rep+ pour les CP et CE1 à 12 ; étendre cette mesure à l’ensemble des Rep en 2020.
3 - Expérimentation à grande échelle
Lancer, dès septembre 2018, sur le cycle 2, des expérimentations pour procéder à une évaluation scientifique de méthodes explicites et de l’efficacité de leur mise en œuvre.
4 - Équipement
Proposer à toutes les écoles un équipement de base, accompagné de tutoriels, favorisant les manipulations d’objets réels ou virtuels.

Mathématiques : efficacité, plaisir et ambition pour tous

5 - Les étapes d’apprentissage
Dès le plus jeune âge mettre en oeuvre un apprentissage des mathématiques fondé sur :
  • la manipulation et l’expérimentation ;
  • la verbalisation ;
  • l’abstraction.
6 - Le cours
Rééquilibrer les séances d’enseignement de mathématiques : redonner leur place
  • au cours structuré et à sa trace écrite ;
  • à la notion de preuve ;
  • aux apprentissages explicites.
7 - Périscolaire et clubs
Encourager les partenariats institutionnels avec le périscolaire et favoriser le développement de ce secteur. Recenser et pérenniser les clubs en lien avec les mathématiques (de modélisation, d’informatique, de jeux intelligents, etc.).
Rémunérer les intervenants et adapter les emplois du temps des enseignants.
8 - Apports des autres disciplines
Développer et renforcer les échanges entre les autres disciplines et les mathématiques ; expliciter les liens entre la langue française et les mathématiques dès le plus jeune âge.
9 - Réconciliation
Proposer aux élèves du lycée un module annuel de "réconciliation" avec les mathématiques sur des thématiques et des démarches nouvelles.
10 - Projets
Assurer, dans les projets disciplinaires ou interdisciplinaires (EPI, TPE, PPCP, Grand oral, etc.), une place importante aux mathématiques et à l’informatique.

Nombres et calculs

11 - Sens des nombres et des opérations
Cultiver le sens des quatre opérations dès le CP. L’enseignement effectif des grandeurs et mesures à l’école primaire vient soutenir le sens des nombres et des opérations.
12 - Automatismes
Développer les automatismes de calcul à tous les âges par des pratiques rituelles (répétition, calculs mental et intelligent, etc.), pour favoriser la mémorisation et libérer l’esprit des élèves en vue de la résolution de problèmes motivants.
13 - Paliers
Définir des paliers sur les bases des nombres et du calcul. S’assurer de la maîtrise obligatoire de ces fondamentaux par tous, en mesurant trois fois par an, les acquis des élèves sur un nombre limité d’items simples et standardisés.

Formation continue et développement personnel

14 - Référent mathématiques
Développer la formation continue en mathématiques des professeurs des écoles. Dans chaque circonscription, favoriser le développement professionnel entre pairs et en équipe, et nommer un troisième conseiller pédagogique, "référent mathématiques".
15 - Développement professionnel en équipe
Développer la formation continue des professeurs de mathématiques à l’échelle locale, dans une logique de confiance, entre pairs et en équipe ; promouvoir l’observation conjointe ; dégager un temps commun dans les emplois du temps ; identifier les personnes ressources.
16 - Laboratoire de mathématiques
Expérimenter, financer et évaluer sous trois ans, dès septembre 2018, dans au moins cinq établissements et un campus des métiers par académie, la mise en place de laboratoires de mathématiques en lien avec l’enseignement supérieur et conçus comme autant de lieux de formation et de réflexion (disciplinaire, didactique et pédagogique) des équipes.

Pilotage et évaluation

17 - Priorité nationale
Inscrire les mathématiques comme une priorité nationale en mobilisant tous les acteurs de la chaîne institutionnelle (recteurs, cadres, formateurs, enseignants).
18 - Expert de haut niveau en mathématiques
Créer un poste d’expert de haut niveau en mathématiques à la Dgesco : responsable du suivi et de la mise en œuvre des préconisations de ce rapport au niveau national, il s’appuiera sur un réseau de chargés de mission académiques. Une évaluation de la mise en œuvre de ces mesures sera effectuée dans trois ans.
19 - Égalité femmes-hommes
Former les enseignants et l’encadrement aux problématiques liées à l’égalité femmes-hommes en mathématiques (stéréotypes de genre, orientation professionnelle, réussite, etc.).
20 - Manuels
Les manuels de mathématiques feront l’objet d’un positionnement sur une échelle, par un comité scientifique, en regard de chacun des critères d’une courte liste arrêtée par ce même comité.
21 - Montée en puissance d’un portail de ressources
Doter ce portail de ressources en lien avec les mathématiques de moyens logistiques et de fonctionnement suffisants pour remplir pleinement ses missions.


1. L’ESPRIT DANS LEQUEL NOUS AVONS TRAVAILLÉ : LA CONFIANCE
Pour répondre aux questions que nous nous posions, nous avons souhaité interroger les différents acteurs, afin de comprendre cette situation et d'en tirer des propositions simples, précises et respectueuses de chacun. Très vite, nous avons identifié un grand désarroi à tous les niveaux : les professeurs des écoles disent leur lassitude des changements de programmes, des critiques incessantes sur leurs méthodes et leurs résultats; les professeurs de mathématiques du secondaire expriment une perte de repères concernant les programmes, témoignent de leur passion pour leur discipline et de leur déception de pouvoir si peu transmettre et partager avec des élèves souvent peu motivés ; les formateurs en Écoles supérieures du professorat et de l’éducation (Espe) de la discipline «mathématiques» disent qu’ils manquent de temps pour partager les bases de la discipline ; les inspecteurs disent qu’ils sont occupés par une foule de tâches annexes et n'ont plus le temps d'exercer le cœur de leur métier.
L'expression de ce désarroi est accompagnée d'un ensemble de demandes annexes, qui se laissent résumer en quelques mots : davantage de reconnaissance, au sens fort du mot. 

1.1. Le professeur dans un système positif 1.1.1. La situation
Actuellement, beaucoup de professeurs expriment un certain malaise dans l’exercice de leur métier. Les difficultés de gestion de classe peuvent s’avérer envahissantes, en particulier en début de carrière. Pour le professeur de lycée professionnel débutant, s’y ajoute la découverte d’un milieu souvent nouveau. Plus généralement, les enseignants ne sont pas suffisamment soutenus ni préparés pour prendre en compte l’hétérogénéité des élèves. Par ailleurs, les professeurs des écoles et les professeurs de maths-sciences en lycée professionnel doivent enseigner plusieurs disciplines pour lesquelles leur niveau d’expertise peut être variable. À cet égard les démissions de plus en plus nombreuses en début de carrière doivent nous interpeller.
Comme le montre l’enquête « Emploi du temps 2010 »12, les professeurs français consacrent beaucoup plus de temps que leurs collègues d’autres pays à la correction de copies et à la préparation de cours ; en particulier, l’instabilité des programmes les contraint à revoir en permanence leurs progressions et à préparer de nouveaux cours, activités, exercices et problèmes pour leurs élèves.
De surcroît, le professeur est souvent seul : seul dans sa classe avec ses élèves, portes fermées, mais seul aussi pendant ses préparations, pour faire un choix de méthodes, pour se former au quotidien. 

12 Enquête Insee-Depp, citée sur le site du Cnesco.

Les moments de travail en équipe ne sont pas toujours facilités. Les moments de rencontre avec les inspecteurs sont rares et de ce fait plutôt perçus comme des occasions de recevoir des injonctions de l’institution ou d’être parfois jugés, moins comme de réels temps d’échanges. L’évolution récente du PPCR13 tend vers cette logique d’accompagnement, qui reste encore trop réduite. 

1.1.2. Ce qu’il s’agit de mettre en place Le travail en équipe
Les réussites observées viennent en général d’un travail collaboratif: l’intégration d’enseignants (notamment novices) au sein d’une équipe compréhensive, conciliante et composée de collègues aux expériences et compétences variées, apporte la confiance nécessaire à un exercice serein de la profession. Apprendre de ses pairs, par l’échange et l’explicitation partagée de ses difficultés, rassure, renforce les ambitions, et fait disparaître certains complexes. Cette dimension collaborative est donc essentielle pour le bien-être enseignant. La mission recommande de développer davantage d’échanges au sein des équipes, des équipes de mathématiques en particulier, autour de questions pédagogiques, didactiques mais surtout disciplinaires. Ceci suppose un lieu où ces échanges puissent se faire, lieu de formation qui leur permette de réfléchir et d’expérimenter les matériaux didactiques et les méthodes, qui ne manquent pas par ailleurs.
L’École de la confiance, c’est aussi la confiance entre les professeurs et l’administration, en particulier le personnel d’encadrement qui doit piloter les équipes afin de favoriser leur travail commun, et faciliter toute initiative pédagogique intéressante. Il convient que les enseignants soient éclairés, tant sur la nature de l’enseignement que sur le cadre dans lequel il s’exerce. Cette confiance ne se décrète pas, elle se construit. 

La formation
Les professeurs doivent bénéficier d’une formation initiale solide et d’une formation continue régulière et de qualité. Toutes les personnes auditionnées, sans exception, ont souligné ces deux aspects.
Actuellement, nombreux sont les professeurs des écoles qui se sentent fragiles, voire incompétents en mathématiques. Ils suivent alors une méthode qui les rassure, se raccrochent à des fichiers « emprisonnants » qui font passer à côté des enjeux de la discipline. Ces professeurs des écoles ont besoin d’une formation capable de les aider à renouer (voire se réconcilier) avec les mathématiques. Cette formation doit s’articuler avec la pratique du métier, permettant ainsi aux enseignants de s’approprier des notions de didactique des mathématiques, de la maternelle au cycle 3. Parmi les enjeux didactiques, celui des manipulations concrètes est essentiel pour favoriser l’apprentissage des élèves et les accompagner dans la construction d’abstractions. La formation doit permettre aux enseignants de s’approprier des ressources avec toute la distance critique nécessaire, pour concevoir des situations d’enseignement riches. 

13 Protocole sur les parcours professionnels, les carrières et les rémunérations.


1.2. Pour un élève plus serein
Il n’y a pas de désamour pour les mathématiques chez les jeunes enfants. En effet, 38 % des 18-24 ans déclarent que les mathématiques étaient leur matière préférée à l’école primaire14,15. Le problème n’est donc pas tant de motiver les élèves, que de ne pas les démotiver et de trouver les moyens de cultiver la curiosité, la créativité et le plaisir dans l’activité mathématique. Toutefois, au collège et au lycée, une évaluation parfois vécue comme sévère par les élèves vient ternir cet élan initial. 

1.2.1. Un élève en souffrance
Il n’est malheureusement pas rare que des élèves se sentent complètement en décalage par rapport à ce qui est demandé en mathématiques, au point que certains quittent le système scolaire en souffrant d’innumérisme. D’autres, qui ont perdu tout espoir de progrès et de réussite, en sont arrivés à subir le cours de mathématiques.
Ce sentiment de fatalité pour les élèves, souvent déresponsabilisés, provient de la fragilité de leurs acquis sur les notions fondamentales. Celle-ci peut s’expliquer par :
les insuffisantes prises en compte et évaluations des progrès des élèves ;
une construction des notions trop rapide pour une appropriation pérenne (en particulier le nombre et la forme pour le jeune enfant, les symboles algébriques pour le collégien) ;
des difficultés pour le professeur à repérer la cause des erreurs de l’élève.
En outre, les difficultés qui ont pu s’accumuler d’année en année sont malaisées à surmonter, malgré les aides, parfois maladroites, proposées : le contenu peut se révéler mal ciblé, le contexte inadapté à l’âge de l’élève. Pour enrayer ce qui pourrait devenir une spirale négative, il est important de valoriser chaque année des réussites ciblées (cf. §3.2.2).
Pour éviter qu’un stress excessif s’installe chez l’élève, les professeurs doivent davantage tenir compte du rôle de l’affectivité dans les apprentissages. Nous pouvons à cet égard citer Michèle Artigue16

« Parmi les faiblesses que je perçois à notre système comparé à d’autres, il y a la difficulté que nous avons à penser l’enseignement et l’apprentissage de façon inclusive, à savoir encourager les élèves, valoriser leurs progrès, même limités, nous adapter aux différences, leur manifester notre confiance dans leur capacité à apprendre les mathématiques, être bienveillants et exigeants à la fois. Il est intéressant de constater, avec le projet Lexicon, que ceci s’exprime par un déficit de termes concernant ses dimensions dans le lexique professionnel des enseignants français, comparativement à d’autres. » 

14 http://cache.media.education.gouv.fr/file/208/89/6/depp-dossier-2017-208-cedre-2014-mathematiques-fin- ecole_847896.pdf
15 https://www.csa.eu/media/1675/1700868-csa-pour-le-point_les-français-et-les-mathematiques.pdf 16 [Audition 16]


1.2.2. Un autre regard sur l’erreur
La confiance réciproque doit s’instaurer entre le professeur et l’élève, elle permet à ce dernier de prendre le risque de se tromper. Le temps est un facteur clé dans les apprentissages mathématiques : l’élève doit avoir le temps d’essayer, d’éventuellement se tromper, d’analyser son erreur, d’essayer à nouveau. Le professeur doit aider l’élève à identifier son erreur, à la comprendre afin qu’elle devienne constitutive de son apprentissage. Tel un mathématicien dans son travail de recherche, l’élève ne doit pas craindre l’erreur, la plus grande de toutes serait de le priver de cette expérience. 

1.2.3. L’importance du plaisir
Le plaisir et le désir sont des moteurs fondamentaux des apprentissages. Mais, sans effort, il n’y a pas non plus de progrès. Il faut développer le sens de l’effort chez l’élève, éviter de sous-estimer son potentiel : lui proposer un contenu ambitieux et accessible, développant ainsi une difficulté désirable mais accessible et l’encourager. 

l’école primaire, « que les nombres soient ses amis »
Pour que les nombres deviennent « ses amis », l’enfant doit se familiariser suffisamment tôt au passage à l’abstraction et à l’écriture mathématique. Thierry Dias et Hervé Le Madec17ont insisté sur l’aspect rassurant et sécurisant qu’apportent la simplification et la stabilité de l’abstrait. Il ne s’agit pas bien sûr de figer la représentation enfantine dans un abstrait vide de sens, mais de réaliser des va-et-vient constants entre situations concrètes et expression mathématique, et ce dès que l’élève découvre la richesse de l’écriture-lecture alphabétique. De nombreux intervenants ont pointé une difficulté particulière dans l’apprentissage des nombres, due à l’irrégularité de la langue pratiquée en France pour les nombres de 70 à 9918 ; ce n’est pas le cas en Suisse ou en Belgique19. Cette irrégularité est un problème réel qu’on rencontre dans de nombreuses langues occidentales, peu dans les langues asiatiques. Mais modifier notre langue est un problème autrement difficile, raison pour laquelle nous devrons préparer nos élèves à dépasser cette difficulté en accordant plus de temps à la construction de la numération décimale. 

Le plaisir par le jeu
Afin de ne pas laisser s’installer l’anxiété face à la tâche scolaire en mathématiques, inspirons-nous du Canada, de Singapour, des États-Unis ou encore du Nord de l’Europe, où les activités scolaires en mathématiques sont la plupart du temps associées à la notion de plaisir. Jeux, énigmes, concours, défis et histoires sont au rendez-vous ! Les dispositifs comme les concours, les rallyes, les ateliers type MATh.en.JEANS vont dans ce sens. En France, l'initiative de plus grande ampleur à ce sujet est le concours Kangourou, qui s'inscrit dans un mouvement international. On ne peut que souhaiter que ce type d'initiatives se multiplie. 

17 [Table croisée 1]
18 http://theconversation.com/70-80-et-90-dites-moi-comment-vous-les-prononcez-je-vous-dirai-qui-vous-etes-87387
19 Pour éviter l’échec de 1945, sur l’évolution du code Vaugelas, Guy Brousseau, propose la création d’une commission chargée d’étudier « les conditions d’une transition didactique expérimentale du répertoire mathématiques des élèves de 5 à 8 ans ».


RECOMMANDATIONS
1. Prendre en compte la dimension affective de la relation pédagogique. Ne pas oublier que l’apprentissage n’est pas une opération exclusivement intellectuelle.
2. Dédramatiser l’erreur, reconnaître qu’elle participe aux apprentissages. 

 1.3. Priorité au primaire
Une conclusion majeure s’est progressivement imposée à nous. De tout ce que nous avons entendu, il ressort que, pour redresser la situation, priorité doit être donnée au premier degré.
Ce faisant, il ne s’agit en aucune façon de faire porter aux professeurs des écoles la responsabilité des dysfonctionnements constatés dans le premier degré, et a fortiori dans l’ensemble du système éducatif. Si priorité est donnée au premier degré, ce n’est pas que cela y aille plus mal qu’ailleurs mais tout simplement parce qu’il faut commencer par le commencement.
Demander que priorité soit accordée au premier degré, c'est donc tout sauf mettre en cause ses professeurs ; bien au contraire, c’est souligner la place fondamentale qu’ils occupent dans l’ensemble du système éducatif et, partant, dans la société. C’est d’ailleurs ce qu’ont compris les pays qui obtiennent de bons résultats : l’École est la clé de la réussite de tout le reste et, à ce titre, tous les professeurs des écoles devraient faire l’objet d’une attention particulière, notamment concernant leur formation en mathématiques. Nous espérons qu’il n’y aura pas le moindre malentendu sur ce point, car rien ne serait plus contraire à notre plus intime conviction. 

1.4. Le système
Pour atteindre l'objectif fixé, il est impossible de s'en tenir à la seule relation pédagogique, qui a pour cadre la salle de classe. La classe se trouve dans une école ou un établissement, qui eux-mêmes appartiennent à une académie. C'est dire que l'amélioration de l'enseignement des mathématiques n'est pas uniquement l’affaire des professeurs, des savoirs et des élèves : cela concerne l’ensemble du système. Pour faire vivre les mesures que nous proposons, continuité et suivi sont tout à fait indispensables. L'ampleur de la tâche fait que rien ne sera atteint si l'ensemble des acteurs du système éducatif ne se mobilise pas. Trop souvent, cette dimension systémique du problème est négligée, quand elle n'est pas ignorée. Si l’on se rapporte à l’effectivité de la mise en œuvre des dernières tentatives de « redressement »20 de l’enseignement des mathématiques en France pour aller vers une réelle amélioration des acquis des élèves, on se doit d’être en alerte. Sans une organisation stratégique conjuguant la classe, les écoles et établissements et l’encadrement, le système apparaît livré à lui-même, prisonnier de son inertie et il a tôt fait de transformer les préconisations en péripéties, pour poursuivre vers la conservation de l’existant. Nous sommes intimement convaincus que, sans un changement de mentalité dans ce domaine, toute tentative d'amélioration est tôt ou tard condamnée à l'échec.

20 Rapport Kahane en 2002 ; programmes d’enseignement en 2002, 2008, 2015 ; « Stratégie mathématique » en 2014 ; conférence de consensus du Cnesco en 2015.

 
2. QUE FAUT-IL APPRENDRE DES PRATIQUES LES PLUS CONCLUANTES NOTAMMENT À L’INTERNATIONAL ?
La question des pratiques les plus concluantes renvoie donc à un ensemble de variables : la valorisation des élèves et des professeurs, les programmes, les méthodes d’enseignement, les manuels, la formation professionnelle, ainsi que les ressources disponibles.
L’analyse des évaluations internationales montre que certains pays ont de meilleurs résultats en mathématiques et que, pour certains d’entre eux, ces résultats peuvent être corrélés à des stratégies politiques, programmatiques et pédagogiques d’envergure. Trois exemples concrets : les stratégies systémiques de la Finlande dans les années 70, de Singapour dans les années 80, et de l’Allemagne dans les années 2000, après son choc Pisa. Peut-on dire que ces résultats sont liés à des outils ou à des méthodes ? Probablement les deux, mais pas seulement. Diverses études21 concluent que des changements systémiques, reliant recrutement, formation, rémunération, programmes, horaires, manuels, méthodes, développement professionnel et, surtout, une attitude positive envers les mathématiques produisent des résultats remarquables.
Cependant, la culture a aussi son importance. Des études comparatives menées depuis vingt ans ont montré que des systèmes éducatifs très différents peuvent avoir des performances similaires ; les caractéristiques culturelles influent aussi sur les réussites. Par exemple, l’étude ICMI 1322 (International Commission on Mathematical Instruction) a montré que l’on ne pouvait comprendre les performances des pays asiatiques sans prendre en compte la tradition confucéenne, ni la façon dont cette tradition conditionne la vision de l’apprentissage, la valorisation de l’étude et de l’enseignant.
La France mériterait certainement de s’inspirer des réussites de pays comme Singapour ou la Finlande, mais aussi des décisions fortes et rapides prises par des pays comme l’Allemagne et la Nouvelle-Zélande, sous réserve d’agir simultanément sur plusieurs terrains imbriqués, et sous réserve d’accompagner cette nouvelle politique dans la durée

21 http://www.lps.iccr.edu.au
22 Leung, Graf & Lopez-Real, (2006). Mathematics education in different cultural traditions : a comparative study of East Asia and the West (ICMI 13), New-York, Springer.
 
2.1. Le cas de Singapour
2.1.1. « Des écoles qui pensent, une nation qui apprend »
En une génération, la république de Singapour est passée d’une économie du tiers-monde à un des plus hauts niveaux de prospérité. La plupart des indicateurs montrent que ses élèves sont excellents dans toutes les disciplines.
Ce succès est le fruit d’une volonté politique affirmée en 1997. Les « écoles qui pensent » sont décrites comme des organisations d’apprentissage. « Une nation qui apprend » imagine une culture nationale et un environnement social qui promeuvent l’éducation tout le long de la vie, pour ses citoyens éclairés, engagés et capables de répondre aux défis de l’avenir à l’aube du XXIe siècle23.
Pour devenir un leader dans un monde technologique, le pays a pris la décision d’améliorer de façon radicale ses programmes de mathématiques. Toutes les parties du système éducatif, et ses partenaires, se sont mobilisés donc pour concevoir le Primary Mathematics Project. Bien que comprenant d’excellents outils pour l’enseignant, ce qui est appelé « méthode de Singapour » ne s’y résume pas : c’est un programme harmonisé, cohérent et de haute qualité qui inclut une vision claire et ambitieuse, des outils didactiques efficaces, une formation professionnelle approfondie, des évaluations systématiques et un système de fonctionnement en équipes qui soutient les enseignants. 

2.1.2. Une méthode basée sur des pédagogies efficaces, sur la recherche et formation
La méthode employée à Singapour n’est pas une « méthode de Singapour » dans le sens où elle aurait été inventée à Singapour ex nihilo : c’est une synthèse de pratiques didactiques et pédagogiques efficaces, reposant sur les travaux de nombreux chercheurs24 ou s’inspirant de textes plus anciens25. Pendant quinze ans, la méthode a été testée, corrigée et améliorée grâce aux retours du terrain. Tous les professeurs du pays ont été formés dans l’Institut national de l’éducation. Ces efforts ont porté leur fruit : les performances des élèves sont montées en flèche et le monde en a pris note 26 .

La méthode repose sur trois piliers fondamentaux : le niveau macro (facteurs socioculturels et économico-politiques), le niveau organisationnel (qualité des écoles, de la formation des professeurs, du curriculum, etc.), et le niveau familial (socialisation et parentage)27. Il est évident que ces facteurs ne sont pas transférables d’un pays à l’autre, notamment la dimension liée à la culture confucéenne, mais ces trois piliers doivent nous inspirer. Nous pouvons rapidement nous saisir des dispositions les plus simples et efficaces, notamment :
  •   une pédagogie explicite et systématique : l’élève est guidé de manière explicite mais non dirigiste dans son apprentissage ;
  •   des étapes d’apprentissage bien identifiées : l’étape concrète, l’étape imagée et l’étape abstraite ;
  •   les quatre opérations introduites dès le cours préparatoire, leur sens étant exploré dès la maternelle ;
  •   des stratégies efficaces de résolution de problèmes mathématiques ;
  •   une formation initiale intensive ;
  •   le développement professionnel du professeur, centré sur la didactique disciplinaire et relié à la pratique de classe.
    La verbalisation est centrale : dès la maternelle, le professeur encourage l’élève à raisonner à voix haute et à échanger avec les autres en mettant « un haut-parleur sur sa pensée ». 

    23 https://www.moe.gov.sg/about  
    24 Jérôme Bruner, George Polya, Richard Skemp, Jean Piaget, Zoltan Dienes, Lev Vygotsky, Benjamin Bloom, Maria Montessori.
    25 Ferdinand Buisson, Dictionnaire pédagogique d’instruction primaire, 1887.
    26 Au Royaume-Uni, depuis 2016, 45 millions d’euros seront investis sur quatre ans pour former près de 700 enseignants et étendre l’utilisation de la « méthode de Singapour » à quelque 8 000 écoles primaires et secondaires.
    27 J-M Jamet, L’iceberg singapourien : au-delà du visible, comprendre l’excellence singapourienne autrement, 2017.
Intensif et régulier, le développement professionnel promeut le travail collaboratif entre professeurs au sein d’une même école ou même entre écoles, il est cohérent avec les intérêts et besoins des professeurs, il prend en compte les priorités nationales ou locales (de l’école). Le professeur ne se voit pas comme un technicien « exécutant » mais comme un professionnel capable d’analyser sa propre pratique. 

2.2. Les pédagogies alternatives – laisser place à l’intuition de l’enfant
Il y a un très grand nombre de méthodes pédagogiques censées permettre de mieux faire participer l’élève au processus d’apprentissage (par exemple en Finlande, où sont pratiquées des méthodes de participation, de travail en groupes basées sur le socioconstructivisme, etc.)
Elles peuvent permettre de donner de l’intérêt et de l’attractivité à la discipline (changements de cadres, lien entre mathématiques et sciences, arts, etc.). Cela permet parfois de « raccrocher » certains élèves peu motivés et de mieux les mettre en situation de réussite28. C’est également l’approche des pédagogies actives, principalement représentées en France par les écoles Montessori et le mouvement Freinet. La manipulation tient une place primordiale, mais elle est pensée en vue de l’abstraction et ceci dans une perspective de progressivité étendue sur le long terme. Ces méthodes s’appuient sur les sens et sur l’intuition de l’enfant, ce qui a été le principe de l'École française pendant plus d'un siècle tout en sachant que « le moment où il s'agit de passer de la forme intuitive à la forme abstraite est le grand art d'un véritable éducateur »29. Ce passage du concret à l’abstrait est l’enjeu de différentes procédures selon les méthodes, mais beaucoup reposent autour du triptyque manipulation verbalisation abstraction. 

Les programmes
Ce grand éventail de méthodes ne doit pas faire oublier que la question de l’efficacité pédagogique est à mettre en perspective par rapport aux contenus enseignés.
C’est ce que Timss met en valeur depuis le début des années 2000, en analysant les systèmes qui ont les meilleurs résultats (et donc Singapour). Dans l’article publié par l’American Federation of Teachers30, les auteurs précisent des caractéristiques de ces systèmes :
  •   la cohérence, c'est-à-dire la définition précise des prérequis, essentiellement annuels, pour passer d'un niveau au niveau suivant et la complémentarité des programmes de chaque matière ;
  •   la concision : un programme est d'autant plus efficace qu'il comprend, pour un niveau donné, un nombre raisonnable de nouvelles notions, sous réserve qu’elles soient étudiées de manière suffisamment approfondie. 

    28 Jean Cassou, [Audition 16].
    29 Ferdinand Buisson, Dictionnaire pédagogique d’instruction primaire, 1887.
    30 A coherent curriculum : the case of mathematics (https://www.aft.org/sites/default/files/periodicals/curriculum.pdf


    La caractéristique d'un programme déficient est, au contraire, d’aborder à chaque niveau un nombre important de notions traitées de manière superficielle, l'étude de chacune s'étendant sur un grand nombre d'années. Il est étendu mais sans profondeur : « a mile wide, an inch deep ».
    La mission recommande une évaluation sur le cycle 2, sur un échantillon de 200 écoles (environ 1 000 classes), des méthodes dites explicites et intuitives. La « méthode de Singapour » appartient à cette catégorie mais n’est pas la seule31.
    Même si l’on observe une certaine efficacité des systèmes qui proposent un manuel unique, puisque la cohérence et la continuité y sont obligatoirement assurées, il est reconnu qu'une méthode ne fonctionne qu'avec l'engagement total de l'enseignant. Une fois le programme clarifié et les paliers d'apprentissage bien définis, il s'agira pour l'enseignant de pouvoir choisir, en toute liberté, une méthode et un manuel qui répondent aux critères de réussite que nous avons tenté de dégager ici. Ceci n'est possible qu'avec un accompagnement professionnel efficace et un accès aux ressources simplifié. 

    31 Un tel enseignement a été aussi mis en œuvre, par exemple par le GRIP de manière expérimentale de 2005 à aujourd'hui dans les classes SLECC (Savoir Lire Écrire Compter Calculer) http://slecc.fr/GRIP/GRIP_page-documents/2004-slecc.pdf


    RECOMMANDATIONS 

    1. Expérimentation à grande échelle [M3]
      Lancer, dès septembre 2018, sur le cycle 2, des expérimentations pour procéder à une évaluation scientifique de méthodes explicites et de l’efficacité de leur mise en œuvre.
    2. Veiller à la cohérence des méthodes et des programmes.
    3. Étudier en profondeur les notions présentées dans des programmes adaptés. 


    3.RÉÉQUILIBRER ET CLARIFIER L’ENSEIGNEMENT DES MATHÉMATIQUES
    Parler de rééquilibrer n’a de sens que si au préalable il y a eu déséquilibre. Si on se place sur un temps long, on peut estimer que c’est bien ce qui s’est passé pour l’enseignement des mathématiques.
    Si le projet des mathématiques modernes des années 1960-1970, issues du mouvement bourbakiste et portant sur la nature des contenus enseignés, était théoriquement louable, il faut bien reconnaître que sa mise en pratique dans l’enseignement non universitaire a été un échec retentissant. Pour tenter d’y remédier, on s’est réclamé d’un autre mot d’ordre, plutôt pédagogique : l'élève doit faire des mathématiques. Il est vrai que le mathématicien fait des mathématiques, et sa pratique est originale au sens qu’il crée une chose nouvelle. Mais on a trop souvent oublié que pour faire des mathématiques, il faut au préalable en avoir appris. La multiplication des activités de toutes sortes plaçant l’élève au centre de ses apprentissages, voire de la construction de ses propres savoirs, a procédé d’une intention tout aussi louable. Force est de constater, aujourd’hui, que les résultats ne sont plus au rendez-vous et que les publics les plus fragiles socialement y ont plutôt perdu.
    Rééquilibrer, signifie avoir l’ambition de redresser la barre, sans pour autant déstabiliser l’organisation ni le corpus dialectique de la discipline ; infléchir au lieu de révolutionner, tenir compte de ce qui existe, de ce qui fonctionne mieux ailleurs, afin de constituer un corpus auquel chacun peut se référer.
    Le besoin de clarification n’est pas moins important. L'enseignant doit savoir ce qu’il doit enseigner, pour garantir une équité de territoire dans le cadre d’un enseignement à dimension nationale, et c’est pourquoi il faut des programmes. Mais il faut aussi que ceux-ci permettent au professeur de bien cerner l’objectif qui lui est fixé. La présidente du conseil supérieur des programmes, Madame Souâd Ayada l’a encore rappelé récemment : il est essentiel de rendre les programmes intelligibles. 

    •   Pour que l’élève s’engage et apprenne, il faut que les attendus soient clairs.
    •   Il en va de même pour l'enseignant : la demande doit être claire et explicite, de
      façon à ce qu’il sache ce que l’Institution attend de lui.
      Enfin, concernant la cohérence, les propos de Pierre Arnoux32 résument parfaitement l’orientation que préconise la mission :
      « Une meilleure cohérence dans l'enseignement augmente fortement son efficacité. Tout d'abord cohérence sur une année, à l'intérieur d'une discipline : suivre un programme mieux construit, où l'on établit des liens entre les divers domaines (algèbre, géométrie, analyse, probabilités et statistiques). Cela relève d'un travail didactique, de documents de programmes et d'accompagnement, et de la formation continue. Ensuite, cohérence entre disciplines : la scission entre mathématiques et physique est une cause majeure de l'affaiblissement de la formation. Enfin, cohérence le long du cursus, où l'on explique comment l'enseignement d'une année reprend et prolonge celui des années précédentes. » 

    32 [Table croisée 3]

     
    3.1. Le cours
    Comme l’expliquait Paul Lockhart33, les mathématiques sont un art et c’est pourquoi l’enseignement des mathématiques, et ce dès le plus jeune âge, doit être un dosage subtil entre technique et art, les deux étant intrinsèquement mélangés grâce au plaisir et au rêve. Le calcul lui-même doit passer de l’état de technique à l’état d’art.
    La question de savoir à quoi sert le cours de mathématiques est encore très souvent posée : il est essentiel de comprendre qu’en plus d’une culture mathématique citoyenne nécessaire, le cours de mathématiques apporte, au-delà du raisonnement logique, de l’esprit critique, de la rigueur et de l’autonomie, la capacité à établir des vérités absolues à travers des preuves. C’est une caractéristique forte de notre culture. 
    S’il ne suffit pas que le professeur enseigne bien pour que les élèves apprennent bien, il
    n’empêche que certaines conditions d’enseignement se révèlent plus efficaces que d’autres en termes d’apprentissage.


    Si l'on récapitule les missions du cours de mathématiques, on voit qu'il remplit des objectifs très variés : assurer aux futurs citoyens des compétences minimales dans le maniement des concepts mathématiques, leur donner les clés d'un raisonnement logique de qualité, les sensibiliser à l'importance des sciences mathématiques dans notre culture, notre histoire, notre technologie, préparer de futurs scientifiques, ingénieurs et mathématiciens à des métiers de plus en plus nombreux. La poursuite de tous ces objectifs demande un savant dosage qui ne peut s'improviser et nécessite une préparation spécifique.
    En aucun cas ce rapport n’entend établir de dogme ou de bréviaire sur ce que serait un bon cours de mathématiques. En revanche, il propose des pistes pour renouveler les pratiques observées, certaines ayant montré leurs limites. Ce constat est unanimement partagé par les personnes qui ont été entendues par la mission. 

    On a pu constater, depuis le début des années 1990, la substitution du cours par des activités diverses (activités de découverte, tâches complexes censées développer des compétences transversales, démarche d’investigation, démarche de projet, activités interdisciplinaires, etc.) qui n’avaient pourtant pas vocation à le faire disparaître.
    La volonté de rendre les élèves chercheurs peut être pertinente, bien évidemment, mais l’on peut s’interroger, en termes d’efficacité, sur le choix des moments, des durées, des thèmes de ces recherches, voire la manière dont elles sont conduites.
    Les activités de découverte sont trop souvent artificielles, le monde réel s’avérant beaucoup plus difficile à appréhender que les modèles mathématiques utilisés pour le décrire ; souvent, les contextes retenus perturbent les élèves plutôt qu’ils ne les aident et ces modèles sont tellement simplifiés qu’ils n’apportent pas de réelle plus-value aux disciplines auxquelles ils sont empruntés (économie, sciences physiques, etc.).
    De même, les tâches complexes n’ont pas toujours un objectif d’apprentissage mathématique clair. Leur conception s’avère extrêmement chronophage pour les professeurs et leur résolution l’est également pour les élèves, sans pour autant être toujours porteuse d’apprentissage, notamment auprès des plus faibles en mathématiques. 

    33 Paul Lckhart, Mathematician's Lament: How School Cheats Us Out of Our Most Fascinating and Imaginative Art Form. 2009 Bellevue Literary Press. Traduction française disponible en ebook (2017).


    De manière générale, ces activités visent à « faire » plutôt qu’à « apprendre ». Très difficiles à mener de façon efficiente, elles peuvent s’avérer opportunes mais ne doivent en aucun cas se substituer à une vraie phase de formalisation ni à un travail régulier d’entraînement.
    Pour pouvoir utiliser les mathématiques avec efficacité, notamment dans des situations complexes, il faut avoir acquis des connaissances, des méthodes, et avoir été sensibilisé aux stratégies de résolution de problèmes spécifiques à la discipline. Toutes ces choses doivent être aussi enseignées. On ne développe des compétences solides qu’en s’appuyant sur des connaissances solides.
    Plus généralement, il faut tendre vers une plus grande efficacité et s’interroger sur ce que chaque élève a appris à l’issue d’une séance. 
     
    3.1.1. Le cours (la trace écrite)
    Le plaisir d’apprendre et de faire des mathématiques passe à tout âge par une bonne compréhension des concepts. La trace écrite est une référence qui permet à l’élève de structurer sa pensée, son savoir et ses compétences. Il ne faut pas la négliger. 

    Sa raison d’être
    Une trace écrite a pour but d’aider l’élève dans ses apprentissages en redonnant toute sa place à l’acquisition de connaissances. Elle doit favoriser « la mise en mémoire » ; cela facilitera d’autant l’accès aux compétences, qui ne peuvent se construire sur des savoirs ténus ou peu ancrés. Tous les élèves doivent bénéficier d’une trace écrite de qualité leur permettant de s’y référer autant que de besoin, notamment lors de la résolution d’exercices et de problèmes, avec l’aide de leur professeur. Les sciences cognitives nous apprennent qu’il faut revenir au moins cinq fois sur l’apprentissage de son cours (lecture d’un énoncé ou d’une propriété) pour l’ancrer définitivement en mémoire, mais qu’il est infiniment plus efficace de s’y référer explicitement à travers des exercices ou des problèmes (par exemple ouvrir son cahier de cours au moment où l’on fait l’exercice en question) plutôt que de le relire hors de tout contexte. 

    Le contenu
    Les traces écrites de cours dans lesquelles des connaissances et des méthodes sont récapitulées sans articulation logique, sans cohérence et donc sans essence mathématique, sont sources de confusion.
    Elles ne permettent pas aux élèves de progresser dans la compréhension.
    La trace écrite doit servir de référence et ne pas se limiter à un « catalogue » de résultats ou de recettes. Les définitions et propriétés doivent être clairement identifiées. La trace écrite doit à la fois respecter les enchaînements logiques, être rigoureuse et précise, et être compréhensible. Le professeur pourra avec avantage expliciter certains énoncés mathématiques, notamment au niveau de la scolarité obligatoire, par une reformulation en français courant compréhensible par le plus grand nombre (y compris les familles et les accompagnateurs du périscolaire).
    Une fois encore, la clarté des énoncés proposés est essentielle. 

    Le rôle du professeur
    Le professeur doit retrouver toute sa place dans les moments de «présentation et
    commentaires des savoirs » (le cours). Qui mieux que le professeur peut exposer pas à pas
    un texte de définition, de théorème, de propriété, en en expliquant les tenants et les
    aboutissants, le pourquoi de tel élément de quantification, son importance, la nécessité de la
    précision de tel terme ? Le professeur doit ainsi retrouver la fierté de son savoir et de son aptitude à l’exposer et l’expliquer. Cela ne peut que renforcer sa légitimité et le respect que ses élèves lui témoignent.

    Une simple vidéo projection d’un texte de cours « clés en main » n’est pas pertinente ; elle exclut trop le professeur et toute la richesse qu’il peut apporter. 
     
    À quel moment la placer ?
    La trace écrite ne peut arriver qu’après des étapes importantes comme celles où les élèves manipulent, s’approprient les notions avec leur cheminement, leurs mots. Ce passage de la manipulation, de la découverte, vers l’abstraction doit vraiment prendre appui sur une phase intermédiaire, souvent oubliée ou trop implicite : la phase de verbalisation, de « mise en mots » par les élèves. Et ceci de la maternelle au lycée ; ces trois phases d’apprentissage peuvent se résumer dans le triptyque : manipuler, verbaliser, abstraire.
    Les sciences cognitives, nous rappellent que l’attention des élèves joue un rôle crucial pour un apprentissage efficace et que par ailleurs leur capacité de concentration est réduite en temps (35 minutes sur une phase de cours de 55 minutes). Il convient donc que la phase écrite soit terminée à ce moment, pour laisser place à un autre temps. Reporter la trace écrite à une autre séance est tout simplement inefficace. 

    Remarques
    Il ne s’agit bien sûr pas de préconiser des séances entières de « cours magistral » pendant lesquelles les élèves se contentent de copier un texte qui, pour eux, n’a aucun sens. Il s’agit plutôt de rétablir une réflexion sur les diverses phases d’apprentissage qui sont : 

    •   les phases de recherche autonome mais encadrée ;
    •   les phases de cours très commentées, où l’on interroge la rédaction des énoncés mathématiques, où l’on présente certaines preuves (cf. §3.1.2 ci-dessous) ;
    •   la présentation d’exemples abondants, matière à débats, pour s’assurer de la
      compréhension de tous, en étant très à l’écoute des élèves ;
    •   la mise en application par les élèves, en autonomie, sur des cas très simples d’abord, puis de plus en plus substantiels ;
    •   les rituels, indispensables pour faire fonctionner et stabiliser les connaissances, les méthodes et les stratégies ;
    •   l’étude de problèmes internes aux mathématiques et pas seulement de situations appliquées. 

      3.1.2. La preuve
      Au dire d’enseignants-chercheurs auditionnés, de nombreux étudiants arrivant à l’université éprouvent des difficultés à comprendre ce qu’est une preuve et en quoi elle est essentielle en mathématiques. Les vérités sont trop souvent assénées, plutôt que démontrées. D’une certaine manière, l’enseignement des mathématiques est devenu axiomatique et nombre d’élèves du collège n’imaginent pas que le théorème de Pythagore puisse se démontrer.
      Or la notion de preuve est au cœur de l’activité mathématique, quel que soit le niveau (de façon adaptée, cette assertion est valable de la maternelle à l’université). Et, au-delà de la théorie mathématique, comprendre ce qu’est une démarche de justification argumentée reposant sur la logique est un axe important de la formation du citoyen (cf. §3.3.1). Les graines de cette démarche fondamentalement mathématique sont semées dès les petites classes. 
       
    L’acquisition de formes d’argumentation propres aux mathématiques, qui viennent compléter celles développées dans d’autres disciplines, est essentielle. Il est regrettable que les vérités mathématiques (démontrables) soient ramenées à un statut de vérités contestables.
    Il se trouve que l’on peut constater une quasi disparition des « démonstrations » des résultats proposés dans les manuels de collège, par exemple, et dans certaines pratiques de classe. Il serait souhaitable de rééquilibrer ces pratiques en redonnant une place significative à la présentation de démonstrations de résultats du cours ; nous faisons confiance aux enseignants pour déterminer lesquelles, et selon quelles modalités (selon les cas: recherche, présentations, commentaires, vidéos, etc.). 

    RECOMMANDATIONS 

    6. Les étapes d’apprentissage [M5]
    Dès le plus jeune âge mettre en œuvre un apprentissage des mathématiques fondé sur 

    la manipulation ;  
    la verbalisation ;  
    l’abstraction. 

    7. Le cours [M6]
    Rééquilibrer les séances d’enseignement de mathématiques : redonner leur place 

    au cours structuré et à sa trace écrite ;  
    à la notion de preuve ;
    aux apprentissages explicites. 


    8. Proposer des traces écrites riches, pertinentes et aussi compréhensibles que possible (y compris par les familles). Le cours doit être exploitable et mobilisé par tous les élèves. 

    3.2. Le calcul et les automatismes
    3.2.1. Calcul : une place centrale un calcul intelligent
    Depuis un certain nombre d’années, il semble y avoir un malentendu entre les recommandations figurant dans les documents officiels sur la place du calcul et les pratiques observées en classe de mathématiques. Le calcul a été sérieusement discrédité dans un passé pas si lointain et finalement partiellement réhabilité dans les programmes récents de l’École, puisque la stratégie mathématiques en 2014 annonçait : « La connaissance et la compréhension des nombres, ainsi que le calcul, en particulier le calcul mental, tiendront une place centrale dans les nouveaux programmes de mathématiques. »
    La mission reprend à son compte les conclusions de la conférence de consensus organisée par le Cnesco en 201534, notamment sur l’indispensable acquisition et mémorisation des tables (addition et multiplication).
    L’avis de l’Académie des sciences de 200735 et l’interprétation qu’en fait Thierry Dias36 sont intéressants et mettent bien le sujet en perspective, que ce soit à l’école primaire ou au collège. 

    « Le calcul doit être vu comme un jeu sur les nombres, il doit donc être présenté comme tel dès les petites classes dans des tâches variées faisant la part belle à cette dimension ludique. De manière concomitante, une pratique simultanée de la numération et des quatre opérations doit être encouragée dès le CP, comme nous l’apprennent les observations des systèmes performants à l’international (cf. §2.1). Le calcul sur les nombres construit les fondamentaux nécessaires à toutes les connaissances mathématiques et cela requiert du temps d’apprentissage dans les classes. L’efficacité de cet apprentissage repose aussi sur l’acquisition nécessaire des automatismes. »

    Il ne s'agit évidemment pas de se précipiter à poser les opérations, sans compréhension ou contexte, mais plutôt d'explorer des situations qui donnent du sens aux actions liées aux quatre opérations, de les mettre en action, puis d'évoluer progressivement vers les écritures mathématiques.
    Les modalités de développement des capacités calculatoires sont diverses et complémentaires (le calcul mental, en ligne, posé, écrit, approché et instrumenté). Toutefois le calcul mental reste une modalité insuffisamment travaillée à l’école primaire (notamment par rapport aux pays asiatiques) et au collège. Il en est d’ailleurs de même pour le calcul approché qui reste cantonné à quelques activités trop sporadiques. En revanche, le temps consacré aux répétitions d’algorithmes de calcul dit « posé » est souvent disproportionné, notamment concernant la multiplication. A contrario, un algorithme aussi intéressant mathématiquement que celui de la division est trop souvent vécu comme une souffrance par les élèves. La diversité des algorithmes permettant de faire une même opération devrait également faire l’objet de pratiques plus récurrentes37

    34 http://www.cnesco.fr/wp-content/uploads/2015/11/Recommandations-du-jury.pdf 35 http://www.academie-sciences.fr/pdf/rapport/avis230107.pdf
    36 [Table croisée 11bis]
    37 Voir Annexe 5 pour une présentation d’une technique anglo-saxone de la division.


    Par ailleurs, la volonté de ne pas réduire l’acte mathématique à de simples techniques répétitives, afin de donner toute son importance au sens des démarches, a conduit à des incompréhensions totales, certainement faute d’accompagnements suffisants. On en est ainsi arrivé parfois à la disparition complète d’activités d’ancrage, de «gammes ou d’échauffements » pourtant indispensables. Des rituels de calcul permettent pourtant de faire fonctionner et de stabiliser les connaissances, les méthodes et les stratégies. Les activités routinières de calcul permettent de gagner de l’aisance, de la fluidité, de la flexibilité, d’acquérir des automatismes (destinés à libérer la charge cognitive et la mémoire de travail). Avec un peu d’entraînement, les élèves réussissent ce type d’activités, ce qui développe leur plaisir à faire des mathématiques et les aide à progresser. La réussite des élèves est un facteur de satisfaction de leurs professeurs.
    Il faut absolument retrouver un équilibre essentiel à la réussite des élèves et cela vaut pour tout le cursus jusqu’à la terminale. S’il est exclu de limiter la formation des élèves à l’entraînement au calcul, sa fréquentation trop rare rend inaccessible à beaucoup la pratique de résolution de problèmes, dès lors que le moindre calcul fait obstacle. 

    3.2.2. Paliers d’acquisition ; repères de réussite des élèves
    Les capacités de calcul des élèves restent un facteur souvent discriminant38 (cf. §6.4), voire sélectif, à l’École. Il incombe toutefois à l’institution scolaire de postuler sur le potentiel de développement de tous les élèves. En l’absence de diagnostic médical, lemploi abusif du terme dyscalculie pour désigner une grande variété de difficultés d’apprentissage est un symptôme notable. Il faut au contraire tabler sur la capacité de tous les élèves à jouer avec les nombres, parfois même de manière intuitive, pour qu’ils construisent le sens nécessaire à la conceptualisation des objets de savoirs qui correspondent au calcul. La répétition permet de mesurer les progrès.
    Aujourd’hui le constat est alarmant en France : les évaluations nationales et internationales montrent de très faibles résultats en calcul pour les écoliers et plus généralement pour les jeunes Français. À chaque niveau de classe, les enseignants se plaignent des faibles capacités de leurs élèves à comprendre les nombres ou à mener à bien des calculs à cause de difficultés remontant à des classes antérieures. Il est donc urgent de faire en sorte que cette tendance s’inverse et que les Français renouent avec l’agilité en calcul.
    Ainsi les auditions, de Pôle Emploi39 et des responsables des ressources humaines de grandes entreprises, ont fait ressortir la grande souffrance d’adultes en difficulté avec les nombres et les calculs « de base » comme une simple multiplication par 10. Il est essentiel de faire évoluer nos représentations : l’École doit à tout citoyen un savoir minimum sur les bases du calcul. Nous devons collectivement, sur cet enjeu, passer de l’obligation de moyens à l’obligation de résultats. 

    38 D’après O. Hunault, 42 % des élèves ne réussissent pas 80 % des items de calcul, et donc 58 % les réussissent à plus de 80 %.
    39 [Audition 8]
     
    C’est pour cela que la mission recommande, tout au long de la scolarité obligatoire, de mesurer trois fois par an les acquis et progrès des élèves, sur la construction des nombres et les bases du calcul à l’aide d’une collection d’items standardisés, très simples, définis année par année. Nous devons faire en sorte que 100 % des élèves réussissent ces quelques items à 95 %.
    L’obligation de résultat est de la responsabilité partagée de l’enseignant et de la circonscription ou du collège. En particulier, disposant alors de vrais repères de réussite, les dispositifs de remédiation et de rattrapage seront mis en place pour les élèves n’atteignant pas le seuil de 95 % lors du premier test de l’année. Pour faciliter le travail de l’enseignant, les tests individuels se dérouleront sur une plateforme numérique, éventuellement enrichie par l’intelligence artificielle [IA]. Les tests seront élaborés par la Depp en collaboration avec les inspections générales concernées, le Cnesco et le Conseil scientifique de l’éducation nationale. Il est important de sélectionner des capacités simples et de base, mais nécessaires pour tous et d’échelonner leur passation, niveau par niveau. Au collège, on pourra s’interroger sur la pertinence d’adjoindre les rudiments du calcul algébrique.
    Les familles seront informées, dans un langage clair, des résultats de leur enfant, ce qui correspond à un besoin exprimé par les associations de parents d’élèves auditionnées40

    3.2.3. Automatismes
    Il est souvent question de « donner du sens » au calcul mais il ne faut pas oublier que le calcul est porteur de sens en lui-même. Il est même « donneur de sens » puisque la construction du nombre dans les petites classes passe par des activités ludiques variées et que ces jeux sur les nombres sont l’essence même du calcul. C’est dans cette optique qu’il faut mettre en œuvre la préconisation de l’Académie des sciences de 2007 (cf. 3.2.1) recommandant l’apprentissage simultané de la numération et des quatre opérations dès le cours préparatoire. Seule cette pratique permet d’échapper au risque souvent dénoncé par Rémi Brissiaud41 de réduire la notion de nombre à celle de comptage par récitation de la comptine numérique42.

    40 [Audition 4]
    41 [Audition1]
    42 D’après R. Brissiaud, l’effondrement des résultats est d’ordre pédagogique et pourrait être en relation directe avec la recommandation du comptage-numérotage dans les programmes, jusqu’à son abandon récent dans ceux de 2015.


    Les jeux de groupements et de partages pratiqués dès l'école maternelle ouvrent la voie aux décompositions multiplicatives des nombres, en plus des décompositions additives. La représentation des nombres par des « constellations », le comptage par groupements (de 2 en 2, de 3 en 3, de 5 en 5), et d'autres pratiques adaptées, constituent une approche intuitive de la construction du nombre par addition et par
    multiplication.

    Cette mise en place est fondamentale et il faut prendre le temps nécessaire pour installer les quatre opérations en alternant le travail sur le sens (comprendre pourquoi on le fait, le mettre en actes puis en mots) et celui sur l’acquisition nécessaire des automatismes. Retarder cet apprentissage est donc tout aussi néfaste à la compréhension qu’à l’automatisation du calcul. Cette automatisation ne doit pas être interprétée de manière mécaniste, elle permet de libérer la pensée de charges cognitives pour son émancipation, tout en facilitant des représentations mentales propices à la résolution de problèmes. 


    Bien évidemment, l’instauration des automatismes de calculs concerne tout autant les collégiens que les lycéens, dans les niveaux respectifs (calcul algébrique, analyse, etc.), et notre recommandation vaut pour tous les niveaux43

    RECOMMANDATIONS 

    1. Automatismes [M12]
      Développer les automatismes de calcul à tous les âges par des pratiques rituelles (répétition, calculs mental et intelligent, etc.) pour favoriser la mémorisation et libérer l’esprit des élèves en vue de la résolution de problèmes motivants. 

    2. Sens des nombres et des opérations [M11]
      Cultiver le sens des quatre opérations dès le CP. L’enseignement effectif des grandeurs et mesures à l’école primaire vient soutenir le sens des nombres et des opérations. 

    3. Paliers [M13]
      Définir des paliers sur les bases des nombres et du calcul. S’assurer de la maîtrise obligatoire de ces fondamentaux par tous, en mesurant trois fois par an les acquis des élèves sur un nombre limité d’items simples et standardisés. 

    4. Prendre en compte, à leur juste valeur, les avis de l’Académie des sciences et du Cnesco sur le calcul. 

    3.3. Des mathématiques pour tous
    Tout le monde s'entend sur le fait que les mathématiques sont un enjeu stratégique pour l’économie d’aujourd’hui et certaines études annoncent même que les mathématiques contribuent à hauteur de 15 % du PIB44. Nous vivons une époque de changements extraordinaires et accélérés ; de nouvelles connaissances, de nouveaux outils et de nouvelles façons de communiquer – tous reliés directement aux mathématiques – émergent. 
     
    43 Le jeu Mathador est un exemple de jeu adapté pour le calcul mental. https://www.mathador.fr/
    44 https://www.lesechos.fr/27/05/2015/lesechos.fr/02192785770_les-maths-contribuent-a-hauteur-de-15--au-pib- francais.htm

    L'information quantitative, autrefois reversée aux spécialistes, est aujourd'hui largement diffusée par les médias. Le besoin de comprendre et d'utiliser les mathématiques dans la vie de tous les jours et au travail n'a jamais été aussi grand et ne cesse de croître. Dans un monde en mutation, les élèves ont besoin d’un socle solide en mathématiques.
    Notre société abonde d’informations chiffrées. Les mathématiques apportent des outils essentiels à l’exercice d’une citoyenneté active. L'absence ponctuelle de regard critique et le manque de temps pour analyser une donnée numérique (pourcentages, sondages, lectures graphiques, statistiques, etc. dont les médias sont friands) nous rendent particulièrement vulnérables aux tentatives de manipulation45.
    Les mathématiques sont nécessaires à la démocratie parce qu’elles favorisent l’autonomie et la capacité d’innovation. Il est ainsi indispensable de fournir aux enfants tous les outils de logique, de calcul, de développer chez eux l’intuition et la démarche scientifique, la rigueur et sa nécessité, et enfin de leur permettre de mener des raisonnements et d’élaborer des preuves46.
    En tant que langage des sciences, les mathématiques permettent d’approcher efficacement de nombreux domaines sociétaux ou professionnels, de créer des descriptions quantitatives précises du monde. La pensée mathématique, la résolution de problèmes et la modélisation sont nécessaires dans de nombreux domaines professionnels tels que la santé, l’économie, la conception graphique.
    Aujourd’hui une formation en mathématiques mène à de très nombreux métiers et il est important de faire campagne pour le faire savoir.
    Rappelons enfin que les mathématiques font partie de notre patrimoine culturel. Elles constituent l'une des plus anciennes et des plus nobles traditions intellectuelles de l'humanité. C’est pourquoi nous pensons que tous les citoyens devraient développer une appréciation et une compréhension de cette réalisation humaine dans toutes ses dimensions, y compris esthétique et récréative.
    Le nombre d’élèves quittant le système éducatif sans qualification et sans avoir maîtrisé les savoirs mathématiques de base reste aujourd’hui plus important que dans la plupart des autres pays européens. Nous ne pouvons-nous en satisfaire. Alors même que nous savons47 que la qualification et le diplôme protègent du chômage, les difficultés liées à la numératie (souvent indissociables de problèmes de littératie) sont un obstacle majeur à l’embauche (y compris pour des emplois à faible exigence mathématique) et au retour à la formation.
    Les mathématiques sont une discipline extrêmement incrémentale, où l’on a besoin de bâtir l’étage N+1 sur l’étage N. Par conséquent, c’est une discipline tout indiquée pour des systèmes type anglo-saxon ou universitaire, basés sur des unités d’enseignement, que l’on pourrait repasser ou revalider, indépendamment de son niveau dans le cycle ; ce système permettrait d’assurer une réussite pour tous.
    Le système éducatif français doit garantir à chaque élève, à la fin de sa scolarité obligatoire, une formation de mathématiques « du citoyen ». Au lycée, quelle que soit sa voie de formation, générale, technologique ou professionnelle, cette formation doit être prolongée. Les élèves qui se destinent à des études supérieures scientifiques poussées doivent bénéficier d’un enseignement de mathématiques plus « expertes ». 

    45 MMI, [Audition 9].
    46 SMF, [Audition1].
    47 Pôle emploi, [Audition 8].
    3.3.1. Mathématiques du citoyen
    Il est important qu’un citoyen soit capable d’opérer une écoute active et critique face à un discours qui lui est tenu, que ce soit dans un cadre professionnel, politique, ou autre. Ainsi, se familiariser avec la démarche de la preuve mathématique est un moyen d’apprendre à décomposer un raisonnement en arguments, à y déceler d’éventuelles failles ou erreurs, à ne pas confondre l’hypothèse et ses conséquences ou l’ordre logique qui s’y réfère, voire à déceler la substitution d’une causalité à une corrélation pour justifier un argument peu étayé scientifiquement. La géométrie48 a souvent été citée, dans le cadre des auditions, comme l’un des domaines où la preuve se met en œuvre de façon accessible à divers niveaux. 

    48 Abraham Lincoln lisait et relisait les Éléments d'Euclide pour s'entraîner au raisonnement logique, considérant cela comme un élément fondamental de sa formation intellectuelle.
     
    Le calcul numérique et algébrique, doit être également consolidé. Dans la diversité des situations de la vie courante ou professionnelle, un résultat exact n’est pas toujours attendu, ni même possible. Le citoyen doit être suffisamment outillé pour trouver une estimation correcte du résultat ou une valeur approchée. Dans ce traitement du calcul, l’usage raisonné de la calculatrice ou d’autres instruments s’imposent.
    La lecture et l’analyse de graphiques et la compréhension des statistiques ont souvent été présentées à la mission comme essentiel à la formation du citoyen, notamment à travers l’usage que l’on fait des proportions, du sens que l’on donne aux indicateurs de position (médiane, moyenne) ou de dispersion, pour justifier une décision sociale ou politique. Mais les mathématiques du citoyen peuvent aussi être considérées à travers une approche de la culture scientifique, à valoriser dans le cours de mathématiques. Diverses entrées, historique, philosophique, sociologique, peuvent susciter une remotivation et permettre de dépasser un utilitarisme de courte vue.
    Posséder un bagage minimum en mathématiques est donc indispensable ; c’est l’ambition du socle validé pour la plupart des élèves en fin de classe de troisième. Au lycée général et technologique, la classe de seconde est le moment critique pour l’enseignement des mathématiques ; un nombre trop important d’élèves quittent cette classe « fâchés avec la discipline ». Il en résulte soit une orientation par défaut, soit un abandon, notamment dans les actuelles sections littéraires. Il nous paraît aujourd’hui utile de permettre à tout un chacun de pouvoir bénéficier d’un enseignement de réconciliation, ambitieux et qui rompe avec le caractère cumulatif de la discipline. Un tel enseignement doit pouvoir être dispensé à tout moment du cycle terminal. 

    3.3.2. La voie professionnelle
    Le lycée professionnel est d’abord un lycée. À ce titre, il a vocation à intégrer les évolutions et appliquer les préconisations qui s’adressent à tous les lycées. Cependant, par son fonctionnement particulier et ses objectifs de formation, par la diversité des parcours, par la variété des diplômes préparés et des spécialités proposées à son public, le lycée professionnel n’est pas un lycée comme les autres. À ce titre, des adaptations ou ajustements sont souhaitables. 

    Plutôt que de parler de pédagogie ou d’une didactique particulière à la voie professionnelle, on peut davantage s’attacher à dégager les spécificités de cette voie de formation et leurs répercussions sur l’enseignement des mathématiques.
    Actuellement, l’enseignement professionnel ambitionne de mobiliser ses élèves autour d’un projet professionnel, sur l’ensemble des savoirs, dont ceux de l’enseignement général et du socle. Nombre de ces élèves se destinent à des études courtes de deux ou trois années. Il convient alors d’accorder une importance toute particulière à l’éducation à la citoyenneté, et d’assurer une maîtrise des outils et savoirs mobilisables dans une perspective de formation tout au long de la vie.
    Les mathématiques apportent aux élèves, aux apprentis et aux adultes en formation continue (au sein des Greta), des notions et des outils permettant de maîtriser et de comprendre les gestes, des démarches et des processus inhérents au domaine professionnel. Elles servent à préparer les futurs diplômés aux évolutions possibles ou probables de leurs métiers respectifs, et leur permettent une future reconversion professionnelle. Signalons ici la publication de la ressource commune Irem-Dgeso-IGEN intitulée Mathématiques, Monde économique et Professionnel et parcours Avenir 49 , à laquelle la commission inter-Irem Lycée professionnel a contribué. 

    49 http://cache.media.eduscol.education.fr/file/MEP/79/6/RA16_MULTI_Maths_Mathematiques_Monde_Economique_et_ professionnel_759796.pdf
     
    Enfin, il est essentiel de permettre à un maximum d’élèves, qui le souhaiteraient, d’accéder dans de bonnes conditions de préparation, à l’enseignement supérieur afin de poursuivre un parcours de professionnalisation valorisé par l’obtention d’un diplôme de niveau III (une problématique similaire à celle-ci consiste à préparer les élèves de CAP qui le souhaitent à une poursuite d’études dans de bonnes conditions de préparation, en première professionnelle).
    Une organisation des enseignements constituée d’un tronc commun et de modules de spécialisation doit permettre de renforcer le niveau de tous les élèves en mathématiques. Un système de différenciation, permettant des entrées à des niveaux divers au sein même du tronc commun et des modules (« réconciliation », » certification », « approfondissement ») pourrait être proposé.
    Le baccalauréat professionnel se compose en une série d’épreuves et de sous-épreuves, partagées entre le domaine professionnel et l’enseignement général. Le poids de la sous- épreuve de mathématiques au regard des épreuves professionnelles est particulièrement réduit. On observe un rapport de l’ordre de 1 à 10 (14 dans certaines filières) entre le coefficient attribué aux mathématiques et celui alloué au domaine professionnel. Cet affichage est dévalorisant pour la matière, et guère incitatif pour les élèves ; il conviendrait de reconsidérer ce poids. 

    3.3.3. Mathématiques«expertes»pour préparer l’enseignement supérieur
    L’explosion des usages de l’intelligence artificielle, la modélisation, la simulation numérique, l’optimisation des processus et le traitement des données massives mettent en jeu des mathématiques fondamentales et appliquées qui requièrent une expertise de haut niveau. Former en nombre suffisant ces experts, y compris ceux qui iront enseigner à tous les niveaux de la scolarité, est une nécessité stratégique et un défi économique et social du XXIe siècle. 

    Au lycée, il s’agit de susciter à la fois l’intérêt et le plaisir, voire la passion, des élèves pour les mathématiques en elles-mêmes et les domaines qui y font un appel essentiel. Un enjeu important de l’enseignement de cycle terminal est donc de garantir l’orientation d’élèves en nombre suffisant vers les filières de l’enseignement supérieur qui préparent aux métiers de demain en lien avec les mathématiques et l’informatique ; c’est aussi une demande des organisations professionnelles. Dans les prochaines années, les sociétés les plus en pointe en matière d’innovation envisagent de multiplier par un facteur trois la proportion de leurs personnels formés aux mathématiques.
    Dans cette perspective, il convient de proposer aux élèves des classes de première et terminale un enseignement en synergie avec l’enseignement supérieur. À cet égard, il n’est nul besoin d’anticiper l’étude de chapitres traditionnellement exposés au-delà du secondaire, mais bien davantage de procéder à l’approfondissement et le perfectionnement d’une matière, tout en restant au niveau de l’enseignement secondaire.
    Approfondir, cela signifie apprendre à : 

    •   manipuler de manière pertinente avec des outils logiciels pour expérimenter, conjecturer, critiquer ;
    •   calculer avec intelligence et démontrer avec rigueur ;
    •   s’exercer sur des questions exigeant de la réflexion et de la méthode.
      Se perfectionner, développer son autonomie en calcul intelligent, nourrir ses facultés d’abstraction, c’est travailler dans le cadre des programmes en adoptant progressivement le regard de l’enseignement supérieur pour en constituer une authentique première marche. À cet effet, sont mis en avant : 

    •   l’acquisition d’une véritable culture mathématique, basée sur le raisonnement et des connaissances, pour construire et comprendre des modèles adaptés et efficaces aux interactions avec les autres disciplines ;
    •   la recherche d’exercices et de problèmes complexes.
      Les élèves des classes de première et terminale vont se voir sollicités par un cours présentant les grands domaines des mathématiques (algèbre, analyse, géométrie, traitement des données, probabilités et statistiques) sur un temps que la mission souhaite suffisamment long chaque semaine (sept à huit heures en première, huit à neuf heures en terminale). Ces enseignements, associés à celui de l’informatique et de la physique-chimie (ou de l’économie, des sciences de l’ingénieur ou des sciences de la vie et de la Terre), vont permettre à l’élève la consolidation de son choix d’études scientifiques dans l’enseignement supérieur et créer les conditions préalables à sa réussite.
      Les mathématiques enseignées aux lycéens qui en font l’une de leurs disciplines majeures ont vocation à demeurer à un niveau d’exigence élémentaire et raisonnable. Néanmoins, elles sont intensives en connaissances acquises et en investissement personnel, engendrant ainsi du plaisir et de la confiance dans la réussite future de tous.
     
    RECOMMANDATIONS 

    13. Réconciliation [M9]

    Proposer aux élèves du lycée un module annuel de « réconciliation » avec les
    mathématiques sur des thématiques et des démarches nouvelles. 

    1. Au lycée professionnel, et dans son organisation actuelle, le module de réconciliation peut être proposé dans le cadre d’un accompagnement personnalisé, ou d’une aide individualisée. 

    2. Augmenter le poids relatif des mathématiques à l’examen du baccalauréat professionnel.

    3. Clarifier, dans le programme de seconde, les niveaux de maîtrise attendus en fonction des projets d’orientation des élèves.

    3.4. Repenser les branches des mathématiques dans les programmes
    Contrairement à une idée largement répandue, les contenus mathématiques enseignés évoluent avec le temps long, c’est pourquoi ils nécessitent une formation permanente des enseignants. L’enseignement des mathématiques ne se résume pas à l’apprentissage de la multiplication à l’école primaire, ni au théorème de Pythagore au collège ! Si on prend l’exemple de la mécanique, qui était partie intégrante du cours de mathématiques il y a encore quarante ans, elle est aujourd’hui dans le cours de sciences de l’ingénieur, après avoir transité par celui de physique.
    Il convient ainsi de dire quelques mots sur les grands champs mathématiques et leur évolution souhaitable, notamment pour les programmes du lycée.
    Tout d’abord, l’épistémologie et l’histoire de la construction des notions mathématiques, qui apportent une réelle richesse didactique, sont peu enseignées en formation initiale. Par exemple vers 1620, Fermat propose une méthode originale pour trouver le maximum de l’aire d’un rectangle connaissant son périmètre : on a les prémices du calcul infinitésimal. Débattre de la méthode de Fermat, qui troubla ses contemporains, peut constituer une approche intéressante du nombre dérivé, enseigné aujourd’hui dans les classes de lycée. Expliciter le chemin parcouru par les sciences pour comprendre la technique employée par Fermat est intéressant pour les élèves. En tirant parti de l’histoire des mathématiques, les professeurs inscrivent leur enseignement dans l’évolution de la pensée. De plus, les élèves sont souvent sensibles à la « légende des mathématiques ». La narration peut jouer ici un rôle motivant. D’autre part, les leçons épistémologiques qui se dégagent de l’histoire (rôle des problèmes, enchevêtrement des concepts et des techniques, nécessité de l’abstraction) sont évidemment de nature à contribuer à la formation, notamment en permettant de dépasser un utilitarisme à courte vue. 

    Comme l’a souligné l’Union des Professeurs de Spéciales50, lors de son audition par la mission : 

    « L’Histoire reste donc un guide pour définir clairement les objectifs des programmes, notamment à travers les grands problèmes. L’algèbre par sa puissance de compactification des raisonnements est mal comprise dans l’enseignement et rapprochée du calcul sans âme. Or l’algèbre est l’essence même des mathématiques. Il faut donc veiller à une acquisition raisonnée des outils algébriques et ce jusqu’aux nombres complexes. L’analyse et l’invention, au XVIIe siècle, du calcul infinitésimal sont un apport typiquement occidental à la culture universelle, apport qui ébranla les mathématiques chinoises. Ces notions et les problèmes qui les ont motivées restent au cœur des mathématiques et de leurs applications. Ils doivent donc figurer au centre de l’enseignement. » 

    Par ailleurs, le développement de l’intuition géométrique doit être un objectif majeur de l’enseignement des mathématiques, d’autant qu’elle est construite depuis les petites classes. Il est étrange que cette intuition se perde lors de la montée du cursus. Ce qui était autorisé aux enfants en termes d’audace est refusé aux collégiens sous couvert d’une rigueur langagière ou écrite, parfois stérile. La géométrie, fondée au collège sur les configurations et une première approche des transformations, doit progressivement intégrer les outils qui lui donnent toute sa puissance et qui seront généralisés ultérieurement (lien algèbre-géométrie, calcul vectoriel, barycentre). La représentation géométrique prend tout son sens dans un enseignement renouvelé de la statistique, notamment dans les sections scientifiques. L’étude excessive des fluctuations et de l’échantillonnage, qui finalement apporte peu en termes de formation mathématique, gagnerait à céder sa place à un rapprochement des statistiques et de la géométrie. Dans le prolongement, l’enseignement de probabilités finies, fondé sur l’intuition du nombre et accompagné des rudiments de combinatoire51, permettrait d’éviter une approche des probabilités simples par la limite fréquentiste, qui paraît être une inversion didactique et scientifique bien peu intuitive.
    Les mathématiques discrètes, par exemple, sont trop marginales dans l’enseignement des mathématiques aujourd’hui, alors qu’elles constituent, d’une part, un lien avec la recherche contemporaine et l’informatique et d’autre part un champ dans lequel il est permis de raisonner et prendre du plaisir sur des problèmes motivants avec des connaissances mathématiques minimales.
    La place de la modélisation, qui ne doit pas être confondue avec la contextualisation stérile dont l’enseignement des mathématiques a souffert, est un enjeu majeur en termes de formation des enseignants et des élèves pour alimenter les filières universitaires porteuses d’emplois de haute qualification. La modélisation est le moteur de l’expérimentation et un carburant pour le fonctionnement des laboratoires de mathématiques au sein des établissements (cf. §4.3.2). En revanche, un enseignement comme l’arithmétique supérieure peut faire l’objet d’un module plus spécialisé52
     
    50 [Audition 5]
    51 Tim Gowers, [Audition 16].
    52 http://smai.emath.fr/IMG/pdf/2016-10-maths-info-lycee.pdf

    Ainsi ces enseignements (modélisation, statistiques, mathématiques discrètes voire géométrie) sont parfaitement adaptés à une conception modulaire du lycée et peuvent faire l’objet d’un enseignement de base, avec des entrées de niveau différent et permettant une véritable souplesse en termes d’acquis. En effet, un découpage en années (module I – module II) bien pensé devrait permettre de découpler ces modules des niveaux première ou terminale, voire seconde. L’aspect cumulatif des mathématiques engendrant bien souvent l’échec à répétition, il serait intéressant de permettre à des élèves de terminale de suivre un module de type I. Cette offre s’articule clairement avec la mesure M9 [Réconciliation].
    Ces enseignements sont par ailleurs une source infinie pour mener des projets interdisciplinaires en lien avec l’informatique, dans le cadre des temps dédiés comme les TPE (travaux personnels encadrés), le Grand oral ou le PPCP (projet pluridisciplinaire à caractère professionnel) en lycée professionnel ; il appartient aux enseignants et à leurs élèves de s’en saisir. 

    RECOMMANDATIONS 

    17. Projets [M10]
    Assurer, dans les projets disciplinaires ou interdisciplinaires (EPI, TPE, PPCP,
    Grand oral, etc.), une place importante aux mathématiques et à l’informatique. 

    18. Veiller, dans les futurs programmes du lycée, à respecter les équilibres entre les branches des mathématiques. Veiller à construire des programmes cohérents et concis. 

    3.5. Renouveler le dialogue entre les disciplines
    Les mathématiques, du fait de leurs universalité et ancienneté, sont riches d’exemples propres à susciter le plaisir et l’intérêt chez les élèves, il s’agit donc de développer à nouveau un aller-retour fructueux, avec les autres disciplines, et ce dès l’école primaire.
    Toutes les disciplines sont concernées : si les liens sont naturels avec la physique-chimie, l’informatique, les sciences de la vie et de la Terre, la technologie, la gestion, les sciences économiques et sociales, la langue française (en particulier la grammaire) est également concernée.
    L’école primaire est le berceau du lien entre les disciplines : la découverte des nombres et de leurs relations s’enrichit de ses applications dans les domaines de la mesure du temps et de l’espace. L’étude complète du système métrique offre des exercices donnant une représentation concrète des nombres décimaux. La familiarité avec les fractions peut se construire avec des applications usuelles sur la durée ou les dosages de contenus (demi- heure, quart de litre, etc.). Mais la familiarité avec les mathématiques s’établit également dans de nombreuses activités comme le sport, les arts, les arts décoratifs, etc. qui peuvent largement être développées dans le domaine périscolaire. Comme le suggérait le Cnesco en 2015, il appartient à l’École de donner l’impulsion pour « partager avec les parents des situations d’apprentissage »53

    53 https://www.cnesco.fr/fr/numeration/recommandations/
    Les mathématiques se nourrissent des problèmes qui se posent dans d’autres disciplines. Cela demande un travail de synergie et de cohérence à mener au niveau des programmes, afin de ne pas développer une conception erronée des sciences, laquelle entraîne de trop nombreux échecs en première année de l’université. On aura soin de ne pas isoler les mathématiques du contexte apporté par les autres disciplines, où elles peuvent contribuer à développer l’exigence de rigueur et de clarté.
    Il est légitime de s’interroger sur l’efficacité de l’interdisciplinarité quand les mathématiques ne sont vues que comme outil « au service » d’autres disciplines. La mission préconise un rééquilibrage, via une interdisciplinarité qui permette de renforcer directement certaines compétences en mathématiques.
    Que les mathématiques soient utilisées dans les autres disciplines est une évidence. D’une certaine manière, on pourrait dire qu’elles sont naturellement contextualisées. Si on veut réellement augmenter l’efficacité de l’enseignement des mathématiques, il faut que les autres disciplines participent en retour comme consolidation, aux acquis en mathématiques, et ce dès l’école primaire. Cela demande donc de renforcer la cohérence des programmes concernant le soutien des autres champs scientifiques aux mathématiques. Il s’agit de bien comprendre les mathématiques pour elles-mêmes et pas uniquement comme discipline de service (« maths-outils »). Il n’existe aucun sous-produit pour l’apprentissage de la proportionnalité, alors que cette notion est présente dans toutes les disciplines enseignées au collège et que les élèves français sont toujours en difficulté sur cette notion fondamentale en fin de scolarité obligatoire.
    Peut-on, par exemple, progresser dans l’apprentissage des probabilités à travers le cours de biologie ? De même, le fait de manipuler des dérivées en mécanique permet-il à l’élève de progresser dans la maîtrise de la dérivation dans le cours de mathématiques ? La question de la précision des données numériques en physique permet-elle de mieux comprendre la précision mathématique adéquate lorsqu’on cherche à écrire l’équation d’une droite de régression de données logarithmiques par exemple ? La présentation des lois physiques permet-elle de mieux maîtriser la notion de variable ? La conservation de la masse en chimie permet-elle de se réconcilier avec la proportion ? À toutes ces questions, les réponses sont souvent hélas négatives. Dialoguer entre disciplines, c’est aussi aborder des questions disciplinaires ou didactiques, et pas uniquement d’ordre pédagogique. L’existence d’un lieu de discussion, tant dans les programmes que sur le terrain, doit être posée ; les laboratoires de mathématiques dans un lycée apprenant (cf. §4.3.2) sont bien évidemment les lieux adaptés à de telles discussions. 

    Technologie
    En technologie, notamment au collège, la contextualisation est une obligation. L’enseignement de la technologie est centré sur les concepts de matière, d’information et d’énergie, en relation avec les enjeux de société. Aussi cet enseignement devrait jouer le rôle de déclencheur vis-à-vis de disciplines comme les mathématiques, permettant, par exemple, de débloquer la situation pour des élèves en difficulté sur les questions de proportionnalité. La fonction de déclencheur peut rendre les élèves plus impliqués. Actuellement, c’est la situation inverse qui prévaut. Des difficultés en mathématiques créent des situations de blocage pour progresser en technologie : 

     « lorsque je dis qu’il s’agit de mathématiques, les élèves posent le stylo et ne font plus rien »  
    témoigne un enseignant de technologie54

    54 [Audition 5]

    Physique-Chimie
    Alors que l’enseignement de la physique était relativement mathématisé jusqu’à la réforme de 2010, l’immense majorité des acteurs de cette discipline déplore la démathématisation exagérée qui en a suivi, notamment au lycée55. L’usage des nombres complexes, des vecteurs, des fonctions et des équations différentielles a cédé la place à la contextualisation au lieu d’une modélisation maîtrisée via l’outil mathématique ou informatique. Si le but initial était de rendre plus attractive la physique, la contextualisation généralisée a engendré de nouvelles difficultés liées à la capacité de traduction des énoncés. Ceci trouble beaucoup les élèves, y compris en filière professionnelle. La mathématisation qui existait auparavant permettait aussi aux élèves de donner un sens aux concepts mathématiques. Un retour au formalisme et une remathématisation de la physique sont des urgences pour créer les synergies nécessaires, comme indiqué par de nombreuses personnes lors des auditions. 

    Lycée professionnel
    Le cas des professeurs de lycée professionnel est intéressant et illustre la nécessité de renouveler ce dialogue didactique, y compris lorsque l’enseignant de mathématiques et celui de physique-chimie sont une même personne ! La relation qui s’instaure entre les deux disciplines se limite trop souvent à la sollicitation d’outils mathématiques appliqués à un contexte scientifique. Cette logique d’instrumentalisation se rencontre également dans les différentes déclinaisons possibles de projets pluridisciplinaires ordinairement mis en œuvre dans un cursus de formation professionnelle : chantier-école, PPCP56, EGLS57...
    La liberté pédagogique que permet la bivalence doit inciter l’enseignant à expérimenter des séquences de mathématiques-sciences, dans lesquelles des objectifs inhérents à la formation en mathématiques, clairement définis, seront visés à travers un contenu scientifique. La progressivité des apprentissages peut alors s’organiser sur un temps plus long, couvrant les horaires de mathématiques et partiellement ceux de sciences. Il ne s’agit pas de sacrifier un horaire alloué à l’enseignement des sciences au profit des mathématiques, mais bien de prendre conscience que le développement de compétences scientifiques contribue à la découverte, la pratique, la consolidation et la maîtrise des concepts mathématiques essentiels. 

    Informatique
    L’introduction de la pensée informatique dans notre quotidien bouleverse le rapport au monde et aux autres. Il faut fournir à chaque citoyen les clés du monde numérique, dans un rapport éclairé aux écrans et aux réseaux. Le besoin d’un enseignement disciplinaire informatique est clairement établi, et c’est donc l’occasion de créer une articulation didactique entre informatique et mathématiques. 


    55 Note de l’Académie des sciences sur la restructuration l'enseignement de la physique, de la chimie et des mathématiques dans la série S (2017) : http://www.academie-sciences.fr/fr/Rapports-ouvrages-avis-et-recommandations-de-l- Academie/restructurer-enseignement-physique-chimie-mathematiques.html
    56 Projet Pluridisciplinaire à Caractère Professionnel 57 Enseignements Généraux Liés à la Spécialité

    Les mathématiques sont largement présentes dans l’enseignement de la discipline informatique : il s’agit, entre autres, d’acquérir les fondements conceptuels nécessaires pour pouvoir évoluer tout au long d’une carrière professionnelle mobilisant l’informatique. L’apprentissage de l’algorithmique débute bien souvent par des activités débranchées propices au raisonnement pur. La discipline informatique permet, de plus, de développer une démarche complète de modélisation : on part d’un problème, on le modélise, on propose un algorithme, on le programme, on l’exécute et on analyse les résultats ; on part du concret, on passe par l’abstraction et on retourne au concret58.
    Du point de vue des mathématiques, l’apprentissage de l’informatique développe des qualités indispensables autour d’activités concrètes, variées voire ludiques, où interviennent le raisonnement logique (écrire la séquence des instructions dans un certain ordre, disjonction des cas, utilisation des opérateurs logiques, etc.), la rigueur (toutes les instructions doivent être parfaitement explicitées) et la précision. L’informatique amène de plus une aisance en combinatoire et dans le domaine des mathématiques discrètes.
    La mission recommande de développer une offre spécialisée, efficace, structurée, d’un enseignement d’informatique qui commence très tôt et va en se spécialisant de plus en plus, avec ses enseignants, ses programmes, le tout en coordination avec les cours de sciences et tout particulièrement le cours de mathématiques. Le périmètre précis de cette nouvelle offre doit faire l’objet d’études approfondies. Le site de la Fondation La main à la pâte, consacré à l’initiation des élèves et enseignants aux sciences informatiques et l’ouvrage 1,2,3...CODEZ ! 59 constituent de bons exemples de ressources adaptées à l’initiation à travers des activités à la fois débranchées (c’est-à-dire sans ordinateurs) ou branchées.
    Remarquons que cet enseignement d’informatique ne doit pas se substituer à celui des mathématiques.
    À noter qu’une difficulté supplémentaire est l’absence de partenaires institutionnels identifiés au sein de l’éducation nationale pour la mise en place équilibrée de cette synergie entre mathématiques et informatique, et la difficulté de construire un véritable curriculum de la maternelle à l’enseignement supérieur.60 

    Projet
    Il est important que les mathématiques continuent à s’ouvrir sur les autres disciplines. De grandes thématiques pluridisciplinaires peuvent être identifiées et traitées dans un cadre « projet » dans les collèges ou les lycées. L’interdisciplinarité repose sur un travail collaboratif et suppose que le professeur de mathématiques et ceux d’autres disciplines travaillent ensemble. C’est là où réside la difficulté. Il est nécessaire de changer les habitudes pour pouvoir collaborer efficacement.
    Les statistiques, l’informatique, les mathématiques discrètes, la modélisation voire la géométrie sont des sources intéressantes pour mener des projets. La donnée est clairement un vecteur d’interdisciplinarité qui est actuellement sous-utilisé. Il est vrai que l’accès à de vraies données (météo par exemple) n’est pas toujours facile, et souvent payant. La loi « République numérique » a été interprétée de façon curieuse et la mission recommande de faciliter l'utilisation de données, a minima des établissements publics, pour des fins pédagogiques.

    58 SIF,[Audition 2].
    59 https://www.fondation-lamap.org/fr/123codez [Le député Villani, signale ici un lien d’intérêts avec la Fondation] 60 http://www.computingatschool.org.uk/data/uploads/CASPrimaryComputing.pdf

    Mettre en place des mini-projets interdisciplinaires dans la classe ou des challenges, avec une composante informatique (R ou Python), dans le but de produire un algorithme, est un vrai défi. La dynamique des laboratoires de mathématiques in situ (cf. §4.3.2) permettra justement de créer la formation entre pairs nécessaire à la réalisation de ces projets, dans un esprit de confiance et de développement professionnel. 

    RECOMMANDATIONS 

    19. Apports des autres disciplines [M8]
    Développer et renforcer les échanges entre les autres disciplines et les mathématiques; expliciter les liens entre la langue française et les mathématiques dès le plus jeune âge. 

    1. La création d’une offre de cours d’informatique efficace et structurée doit faire l’objet d’études approfondies

    2. Faciliter l’accès des données sectorielles (des établissements publics) pour des fins pédagogiques. 

    3.6. Liberté pédagogique et pilotage
    Si le maître mot est rééquilibrer, il ne s’agit pas de tomber dans un nouvel excès et l’équilibre recherché ne sera atteint qu’avec la collaboration de tous les acteurs. Pensant aux programmes, Souâd Ayada, présidente du Conseil supérieur des programmes, remarquait : « Il faut que les professeurs sachent ce qu’ils doivent enseigner ». Un enseignant doit savoir quel est le but à faire atteindre aux élèves. Il faut donc des programmes clairs, intelligibles par les professeurs comme par les élèves, assez explicites pour limiter les risques de flottement dans l’interprétation.
    Mais les programmes ne sont pas des carcans, ni même des feuilles de route. En même temps qu’ils fixent le but à atteindre, ils définissent un espace de liberté : le chemin à suivre est à l’initiative de l’enseignant. Comme le disait déjà Compayré à la fin du XIXe : « pourvu que [le maître] arrive à son but dans le délai voulu, il est libre de ses mouvements ». Il n’y a donc aucune contradiction entre programmes et liberté pédagogique. Celle-ci, en effet, ne consiste pas à laisser le professeur abandonné à lui-même, sans la moindre idée de ce qui est attendu de lui, et c’est pourquoi il faut un contrat clair. De même encore, la condition de son exercice, c’est d’abord une bonne connaissance de la discipline à enseigner, sans quoi il se trouve à nouveau démuni et malheureux. De même enfin, dans le second degré, la liberté pédagogique s’arrête là où le travail en équipe (disciplinaire ou interdisciplinaire) ne devient plus possible. Il ne faut pas qu’au nom de la liberté pédagogique l’élève soit complètement désorienté, désemparé, quand il passe d’un cours ou d’une classe à l’autre.
    De ce point de vue, il est même permis de penser que les professeurs ne se servent pas assez de leur liberté pédagogique. Le programme, par exemple, est une borne inférieure, non une borne supérieure. Nous ne devons pas faire moins, mais rien n’interdit de faire plus, si les objectifs sont déjà atteints pour tous. Les professeurs doivent avoir davantage de confiance en leur capacité à savoir ce qu’ils peuvent développer chez leurs élèves.
    Ceci étant, toutes les méthodes, comme tous les chemins, ne se valent pas. Il est permis de conseiller, de partager une expérience acquise. C’est le premier rôle de l’inspecteur, qui relève avant tout de l’accompagnement. Le programme indique les objectifs à atteindre, les méthodes proposent des itinéraires en indiquant les raccourcis et les obstacles mais les conditions du voyage ne seront jamais les mêmes : l’enseignant est entièrement responsable du choix de son parcours. Même si, en dernier lieu, il appartient à l’inspection de vérifier si les objectifs ont bien été atteints, il lui incombe surtout d’intervenir en amont pour éviter les impasses et les sorties de route.
    C’est ainsi qu’il faut aussi comprendre les mesures préconisées dans ce rapport : elles ont pour but d’aider la marche, non de l’entraver. Ce qui a été dit par exemple au §2.1 ne vise en aucune façon à imposer une méthode ou à la transposer de façon mécanique, car il est clair que son contexte socioculturel n’est pas le nôtre.
    Il est bien connu qu’une méthode vaut ce que vaut celui qui l’enseigne. Il ne suffit donc pas d’avoir une bonne méthode, il faut aussi se l’être appropriée et y croire61

    61 Jan de Lange, [Audition 16].

    4. LA FORMATION ET LE DÉVELOPPEMENT PROFESSIONNEL DES ENSEIGNANTS, L’ÉTABLISSEMENT APPRENANT 

    4.1. Un constat alarmant
    Le constat partagé par toutes les personnes auditionnées est que les formations initiale et continue en mathématiques sont très insuffisantes en France. Notre société n’accepterait pas que la formation des personnels de santé ou juridiques soit à ce point négligée. Les différentes réformes du système de formation des enseignants depuis la création des instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM) ont plutôt engendré une dégradation progressive de cet outil indispensable dans le système éducatif. La délégation à l’université de la formation n’a pas apporté de valeur ajoutée à la dimension professionnelle de la formation, et tous les acteurs s’accordent pour relever plutôt une dégradation importante en comparaison avec l’existant assuré, pour le premier degré, par les anciennes écoles normales. La mise en œuvre hâtive de la réforme dite de la « masterisation » a aggravé la confusion et fragilisé encore la formation de nos enseignants.
    Toujours dans le premier degré, on peut noter un manque crucial de formation initiale en mathématiques, pourtant bien nécessaire si on regarde les parcours préalables des futurs enseignants (80 % des impétrants sont issus des filières relevant des humanités en licence). Or, le volume d’enseignement disciplinaire en mathématiques, dans les deux années de master Meef62, est bien trop faible pour assurer les connaissances de base utiles au futur enseignant. À ce jour, les Espe forment, en première année, essentiellement à la préparation des différents concours, ce qui ne peut être assimilé à une formation au métier bien évidemment. Remarquons ici que la place actuelle du concours nuit à la professionnalisation des futurs enseignants. En faire une barrière de sélection à l’entrée du master serait plus cohérent et permettrait de se concentrer sur l’apprentissage du métier, la construction de compétences pédagogiques et didactiques dans une dialectique d’observation et pratique en classe et de théorie outillant les futurs enseignants. Actuellement, les étudiants réussissant le concours et déjà titulaires d’un master, quelle que soit sa nature, peuvent dans certaines Espe n’avoir en deuxième année qu’une vingtaine d’heures de formation spécifique pour enseigner les mathématiques de la maternelle au CM2 !
    Le temps global de formation initiale est ainsi très inférieur à celui de nos voisins proches et éloignés63. Pourtant comme l’indique un rapport du Cnesco datant de novembre 201664, environ la moitié des étudiants se destinant au métier de professeur des écoles ont fait ce choix avant le baccalauréat ! 

    62 Métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation.
    63 400 h à Singapour et au Québec, 350 h + 100 h au Portugal.
    64 http://www.cnesco.fr/wp-content/uploads/2016/11/161107-Rapport-attractivite-metier-enseignant.pdf (p. 73)
     
    Concernant la formation continue, le bilan est tout aussi insatisfaisant. Un rapport de l’OCDE pointe que « les enseignants français, avec environ deux jours et demi par an, bénéficient de bien moins de jours de formation que leurs homologues étrangers ». Devenue peau de chagrin, elle se résume aux 18 heures d'animation pédagogique dans le premier degré, avec des contenus qui, trop souvent, ne répondent pas aux attentes de la profession65.
    Les professeurs du second degré non plus ne se forment pas assez, en partie parce qu’ils ne trouvent pas dans l’offre de formation les réponses à ce qu’ils identifient comme étant leurs besoins, malgré une offre écrite parfois pertinente. Nombre d’entre eux font des démarches personnelles de formation. Il est regrettable que ces efforts individuels ne soient pas systématiquement reconnus, ni valorisés dans les équipes au sein des établissements.
    De plus, il a été confirmé, lors d’une contribution à une table ronde66, « qu’un des obstacles au bon fonctionnement de la formation continue est que les structures qui devraient y travailler ensemble se retrouvent parfois en concurrence les unes avec les autres. Des problèmes apparemment anodins peuvent créer de grosses difficultés». Des dysfonctionnements fréquents entre rectorats, universités et Espe ont été particulièrement pointés au cours des auditions réalisées. À ce stade il nous apparaît essentiel de travailler à gommer ces dysfonctionnements afin de faire en sorte que ces partenaires privilégiés de la formation, initiale et continue, agissent dans la même direction, pour le bien de l’enseignement des mathématiques.
    Enfin, si l’on combine ce manque évident de formation professionnelle avec le système de gestion des ressources humaines dans la fonction publique française, qui fait la part belle à l’ancienneté au détriment des compétences, on constate que les secteurs réputés les plus difficiles pour enseigner sont en quelque sorte réservés aux débutants (non formés donc). Ceci conduit actuellement à un renouvellement très important dans des établissements qui auraient, au contraire, besoin d’une stabilité de leurs équipes. Des enseignants peu ou pas formés, qui souffrent dans l’exercice de leur métier, ne peuvent évidemment pas relever le défi de la réussite de leurs élèves dans leurs apprentissages mathématiques.
    Pour redresser la situation, il faut donc agir de façon énergique sur la formation initiale et sur la formation continue des enseignants. 

    65 Notons toutefois avec satisfaction, le lancement, cette année, du plan de formation des professeurs des écoles de cycle 3 (neuf heures) en lien avec les programmes 2016mais nous sommes loin encore des standards internationaux, qui portent sur le développement professionnel continu.
    66 [Table croisée 3b]
     
    4.2. La formation pour le premier degré
    4.2.1. La nécessité d’une licence adaptée ou d’un parcours pluridisciplinaire
    L'ensemble des acteurs interrogés est unanime à réclamer une licence adaptée, pluridisciplinaire, ou à tout le moins un parcours pluridisciplinaire post-baccalauréat, exigeant et de qualité, pour les étudiants qui se destinent préférentiellement à l'enseignement primaire.
    Cette licence ou ce parcours devrait venir avec de possibles jeux de majeures et de mineures, permettant de dégager des lignes de spécialisation pour les aspirants enseignants. En particulier, il serait ainsi possible d'identifier des professeurs des écoles ayant suivi un entraînement plus poussé en mathématiques, et la composition des équipes pédagogiques pourrait en tenir compte. 

    Dans les parcours à dominante non scientifique, il est important que l'offre modulaire en mathématiques permette d'atteindre, dans une atmosphère apaisée, sur les trois ans de licence, le niveau requis. Cela exige un volume suffisamment important pour correspondre à un objectif proche des pratiques internationales67 .
    Il semble nécessaire de proposer des enseignements de didactique en mathématiques, qui permettent l'appropriation des enjeux d'apprentissage des savoirs, leur reconnaissance dans les activités scolaires proposées aux élèves, la prise en compte des difficultés récurrentes et ce, dans les différentes facettes de l'exercice d’un futur métier.
    Cette formation en licence doit par ailleurs s'accompagner de stages d'observation de classes, en France ou à l'étranger, pour que les étudiants puissent prendre conscience de la complexité des situations d'enseignement en mathématiques et de la variabilité culturelle et institutionnelle des formes scolaires.
    La construction d’une telle formation, étayée par les résultats de la recherche, nécessitera du temps, et pourra être expérimentée dès 2018. 
     
    67 Dans les parcours à dominante scientifique, on peut symétriser cette demande pour le français, mais surtout valoriser les débouchés professionnels concernant l’enseignement primaire, afin d’augmenter le nombre d’étudiants des parcours scientifiques dans les concours de professeurs des écoles.
     
    4.2.2. La nécessité d’une formation continue plus tournée vers les mathématiques au sein des circonscriptions apprenantes
    Pour enseigner les mathématiques, dans l’état actuel d’une formation initiale dont on a déjà dit la faiblesse, les enseignants du premier degré sont démunis, et se réfèrent parfois à des savoirs professionnels empiriques. Le lien entre le métier, les savoirs théoriques généraux et ceux issus de la recherche sont rarement établis ; la pratique n’est pas suffisamment questionnée.
    Pour améliorer l’efficacité de l’enseignement, il faut relier savoirs scientifiques et savoirs pratiques en concentrant les efforts sur le quotidien. L’enseignement est aussi une pratique au même titre que par exemple la médecine, le design industriel, l’architecture, la menuiserie ; c’est ce qui légitime la nécessité d’une formation ancrée sur les pratiques de classe. Cela implique de pouvoir créer des situations de coopération professionnelle entre pairs.
    Ce qui importe, c’est bien que chaque enseignant, face à chaque élève, dans chaque situation apprenne à : 

    apprendre de sa propre expérience ;
    chercher l’origine des difficultés qu’il observe ;
    interroger ses évaluations, ses observations, ses représentations ;
    se référer à des théories, à des travaux de recherches ;
    débattre des situations ordinaires qu’il rencontre, dans un climat de confiance entre professionnels.
    Or, quel professionnel apprend seul de sa propre expérience ?
    Il s’agit donc d’innover, au sens d’introduire quelque chose de nouveau dans une chose établie, en ayant à l’esprit que cette idée de « chose établie » est propre à chacun, et donc qu’il s’agit d’accompagner les évolutions en fonction de chaque enseignant, en intégrant notamment les besoins de formation qu’il exprime.
    Il est nécessaire de définir un nouvel horizon de l’enseignement et de l’enseignant du XXIe siècle, qui pourrait utilement renvoyer à un ingénieur pédagogique, conscient qu’il lui appartient d’enquêter sur ses résultats et ses pratiques dans une conception résolument scientifique et collégiale, accompagné par des pairs dans une démarche d’équipe de professionnels.68 69
    Dans un contexte national et académique de mise en œuvre de la priorité nationale « réussir en mathématiques », le rôle de l’encadrement est primordial.
    Si l’institution maintient les circonscriptions comme structures pertinentes de pilotage du premier degré, alors il faut enrichir leur force de travail et leur assigner des missions modernisées, favorisant la réflexion, les échanges entre professionnels responsables et autonomes, les visites croisées entre enseignants et les expérimentations dans le domaine des mathématiques, pour répondre aux défis évoqués plus haut.
    La collaboration et le travail en réseaux doivent être recherchés. En effet :
    « il y a une relation de cause à effet entre les communautés professionnelles et l’amélioration de la réussite des élèves qui ont un effet sur la qualité du travail des enseignants, leur moral, et le développement de leurs compétences comme de leurs pratiques professionnelles. Elles permettent enfin de modifier profondément les cultures professionnelles au sein des écoles70. »
    La mission préconise donc la modernisation des relations de travail entre les équipes de circonscription et les équipes enseignantes, basée sur la recherche de coopérations71 accordant une large place à la réflexion des enseignants et à la mise en œuvre des conditions de coopérations énoncées ci-dessus, dès la rentrée 2018, sur un nombre adapté de « circonscriptions apprenantes ». 
     
    68 François Muller Des enseignants qui apprennent, ce sont des élèves qui réussissent, ESF éditeur, 2017.
    69 http://chaire-unesco-formation.ens-lyon.fr/
    70 Hairon S., Dimmock C., Singapore schools and professional learning communities : Teacher Professional Development and school leadership in an Asian hierarchical system, Educational Review, 2012, 64(4), pp 405-424.
    71 Professional Learning Communities (PLCs) depuis plus de 25 ans au USA et Lesson Studies au Japon.

    4.2.3. Encadrement et pilotage : un conseiller pédagogique pour les mathématiques dans chaque circonscription
    La mission propose par ailleurs de nommer un conseiller pédagogique supplémentaire dans chaque circonscription, recruté sur profil, pour développer l’enseignement réflexif des mathématiques, en commençant par les enseignants des CP et des CE1. Cet effort conséquent permettra de soutenir l’action des inspecteurs de l’éducation nationale (IEN) et de densifier l’accompagnement des professeurs au cœur des classes, dans un pilotage concerté entre le directeur académique des services de l’éducation nationale (Dasen) et le référent académique. Ce nouveau conseiller agira dans un cadre défini avec les acteurs (Dasen, IEN adjoint 1er degré, IEN de circonscription, etc.) et les partenaires (Irem, université, Espe). Il bénéficiera d’une formation solide72 pour accompagner les équipes pédagogiques en mathématiques.
    Par ailleurs, conformément à la préconisation M2 [CP-CE1 en REP+], la mission recommande un effort particulier, dès septembre 2018, dans l’accompagnement en mathématiques des professeurs des CP et CE1 en REP+. 

    72 D’après les standards internationaux une formation continue pendant deux ans de 9 à 12 jours par an, éventuellement durant les vacances scolaires (3-4 jours fin août/Toussaint/février) est nécessaire.
     
    RECOMMANDATIONS 

    1. Formation initiale [M1]
      Construire, dès 2018, la formation initiale des professeurs des écoles démarrant à Bac+1, de façon à assurer dans une licence adaptée ou un parcours pluridisciplinaire, un volume suffisant d’enseignements dédié aux disciplines fondamentales. 

    2. Développer des systèmes de majeures et de mineures dans les licences classiques, avec des mineures de mathématiques et de sciences pour les non- scientifiques permettant de donner les compétences minimales indispensables à leur enseignement. 

    3. Créer, dans les masters Meef 1er degré (métiers de l'enseignement, de l'éducation et de la formation), des parcours différenciés qui permettraient aux futurs enseignants de renforcer substantiellement leurs connaissances dans les disciplines où ils sont les plus fragiles. 

    4. Référent mathématiques [M14]
      Développer la formation continue en mathématiques des professeurs des écoles. Dans chaque circonscription, favoriser le développement professionnel entre pairs et en équipe, et nommer un troisième conseiller pédagogique, « référent mathématiques ». 

    5. Expérimenter et évaluer, dans chaque académie, sur un nombre adapté de circonscriptions, la mise en place du concept de « circonscription apprenante ». 

    4.3. Le second degré : une formation continue décentralisée, collaborative, autour du laboratoire de mathématiques
    4.3.1. Développement professionnel en équipe
    Une action de formation efficace doit prendre appui sur les travaux de la recherche sur l’enseignement des mathématiques et favoriser les allers-retours fréquents entre cette recherche et la pratique en classe. Une coopération durable entre chercheurs et praticiens est à même de faire évoluer les pratiques des enseignants de mathématiques afin d’en renforcer l’efficacité.

    Actuellement, les professeurs de mathématiques qui participent à des actions de formation continue le font le plus souvent à titre individuel. Pour un passage à l’échelle, il faut former les équipes d’enseignants et ainsi développer un modèle de formation continue de plus grande ampleur.
    Des modèles de formation collaborative existent aujourd’hui, en France et à l’étranger. On peut citer les « Communautés d’apprentissage professionnel »73 ou les « lesson studies »74. Ces expériences de formation collaborative montrent l’impact du travail en équipe sur l’efficacité de la formation continue des enseignants, à condition que ceux-ci se fassent mutuellement confiance. Une première étape pour construire cette confiance est d’ouvrir les portes des classes : la mission recommande que chaque professeur visite des collègues, trois fois par an. 

    73 https://fr.linkedin.com/pulse/les-communautés-dapprentissage-professionnel-à-romuald-normand (source Hairon S., Dimmock C., Singapore schools and professional learning communities : Teacher Professional Development and school leadership in an Asian hierarchical system, Educational Review, 2012, 64(4), pp 405-424) ; http://www.sedl.org/pubs/change34/9.html
    74 https://www.hepl.ch/cms/accueil/formation/unites-enseignement-et-recherche/enseignement-apprentissage- eval/laboratoire-lausannois-lesson-st/les-lesson-et-learning-study.html
     
    En France, un modèle de formation continue a fonctionné de manière exemplaire ces dernières années dans nos lycées : lors de la création, dans les classes de terminale scientifique, d’un enseignement de spécialité informatique et sciences du numérique (ISN), quelques établissements expérimentaux ont désigné (sur la base du volontariat) un ou des enseignants qui ont suivi une formation disciplinaire (parfois 80 heures réparties sur deux ans), dispensée souvent par des universitaires (issus d’Inria par exemple). Ces enseignants, ayant obtenu ensuite une certification à l’issue de cette formation, sont devenus des personnes ressources en informatique dans leur établissement et peuvent désormais former leurs pairs sur l’enseignement de l’informatique au lycée.
    Il n’est pas nécessaire que toutes les compétences professionnelles (en informatique, modélisation, maîtrise exhaustive de la discipline, etc.) soient acquises par tous les professeurs d’une équipe mais il faut faire en sorte qu’elles soient réparties, à l’échelle d’un établissement ou d’un bassin, avec des personnes ressources identifiées et valorisées dans leurs compétences.
    Nous préconisons que ces modèles de formation collaborative se développent au sein d’établissement dits « apprenants ». Le principe est d’inscrire cette formation dans un nouveau plan de développement professionnel, si possible articulé avec un cahier des charges, en accord avec le chef d’établissement : chaque année sera fait un rapport d’activités de l’équipe pédagogique. Ici, la politique d'établissement prend tout son sens lorsqu’elle se décline dans un projet où s’inscrivent formellement les objectifs à atteindre, les actions envisagées et les formations spécifiques suivies par chacun des membres de l’équipe.
    Exemple d’action: un thème de recherche est choisi (la modélisation, les mathématiques discrètes, etc.). Des professeurs de l’équipe s’engagent alors sur ce thème, soit (liste non exhaustive) : 

    à participer à un groupe Irem, à prendre contact avec des chercheurs ou des universitaires ;
    à assister à une conférence organisée par l’association des professeurs de mathématiques de l’enseignement public (APMEP), par exemple ; 
     
    à lire des ouvrages sur ce thème75,76ou à suivre une formation de type Mooc ;
    à faire participer une équipe d’élèves à un concours de modélisation.
    La réflexion collective est alors enrichie par les apports de chacun. Il peut de plus être opportun de suivre des formations inscrites dans les plans académiques de formation, soit individuellement, soit collectivement. Ainsi la formation continue s’articule autour de l’équipe et non plus des individus pour gagner en stabilité et accompagner les enseignants, qui pourraient, à un moment donné, se sentir en difficulté. C’est un changement profond de paradigme.
    La mise en œuvre d’un tel plan suppose toutefois que l’on crée (enfin !) un laboratoire de mathématiques par établissement apprenant. 

    4.3.2. Création des laboratoires de mathématiques
    C'est lors d'une conférence au musée pédagogique de Paris, en 1904, qu'Émile Borel lance l'idée de la création de laboratoires de mathématiques. Cette idée, chère à Jean-Pierre Kahane et défendue par sa commission de réflexion sur l’enseignement des mathématiques, n’a pas abouti en 2002 bien que le ministre de l’Éducation nationale de l’époque ait écrit à tous les recteurs en ce sens.
    La proposition figurant dans ce rapport définit un périmètre centré prioritairement sur les équipes.
    Dans le cadre d’une politique publique basée sur les preuves77, la mission propose d’expérimenter d’une part la création de tels laboratoires dans chaque académie et, d’autre part, leur évaluation dans les trois ans78 avant de statuer sur l’efficacité objectivée d’une telle mesure.
    Ces laboratoires doivent être équipés d’un matériel spécifique (équipement informatique notamment) et donc financés. Les régions pourront s’emparer de cette question.
    Ce lieu, nouveau cœur de la formation continue et du développement professionnel des enseignants, permettra aux équipes de se réunir, de rencontrer les intervenants extérieurs (collègues mettant en œuvre des pratiques innovantes, enseignants d’autres disciplines ou d’autres établissements, enseignants-chercheurs, etc.), de chercher de manière collaborative des problèmes, de se former (sur la modélisation, la didactique, l’expérimentation numérique, etc.), de s’aider mutuellement lors de la préparation à l’agrégation interne, etc. Si la taille le permet, le laboratoire pourra accueillir des élèves dans le cadre de projets.
    Au sein de la voie professionnelle, le laboratoire de mathématiques peut prendre diverses formes selon la nature de l’établissement (campus des métiers, lycée ou section d’enseignement professionnel), sa taille, les filières en présence, l’implantation de la structure dans son contexte local (réseau, bassin, etc.). La création du laboratoire de mathématiques sera facilitée par l’existence, dans ces établissements, d’un laboratoire de sciences. 

    75 Site de formation continue de la Dgesco : http://culturemath.ens.fr/
    76 Site du CNRS : http://images.math.cnrs.fr/
    77 Evidence based policy : http://www.academie-sciences.fr/pdf/conf/colloque_110915.pdf 
    78 Par exemple : Depp, Cnesco, Hcéres.

    Dans le cas d’un lycée polyvalent ou d’une cité scolaire intégrant un lycée professionnel, il est essentiel de constituer l’équipe disciplinaire avec l’ensemble des enseignants de mathématiques, dont les professeurs mathématiques-sciences.
    Dans ce cadre, les campus des métiers, lieux d’excellence en formations initiale et continue et de synergie entre le secondaire et le supérieur, sont un terrain propice à une mise en œuvre expérimentale du laboratoire de mathématiques. 

    4.3.3. Pour que cela fonctionne
    La mission a repéré deux éléments déterminants : d’une part le rôle du chef d’établissement et d’autre part l’enrichissement extérieur continu.
    Il appartiendra au chef d’établissement d’installer officiellement le laboratoire de mathématiques par une délibération du conseil d’administration, le dotant d’un lieu, de moyens matériels et horaires ainsi que des indemnités pour missions particulières. Le chef d’établissement doit jouer un rôle prépondérant en facilitant l’organisation du travail en équipe. Il lui revient de co-piloter, avec l’inspection académique, l’action de moyen terme, en identifiant des besoins récurrents et mutualisables dans les équipes, en mettant en relation ces dernières avec les différents acteurs de la recherche et de la formation continue : Irem, Universités, APMEP, Espe, Ifé, Maison des sciences, CNRS, Inria, formateurs académiques, etc.
    Un enseignant de l’équipe ou une personne extérieure, par exemple un enseignant- chercheur ou un membre de l’Irem, doit être l’animateur du laboratoire (coordonnateur ou référent).
    L’emploi du temps doit être construit par les équipes de direction avec l’obligation de dégager du temps pour que l’équipe de mathématiques se réunisse facilement (36 heures annualisées, par exemple, pouvant être réparties à raison d’une heure par semaine, de deux heures par quinzaine, etc.). Pour qu’une telle organisation fonctionne de manière pérenne, le temps de service des enseignants doit être pris en compte. Ainsi, on peut envisager que chaque professeur de l’équipe se voie attribuer 18 heures annualisées dans son service pour une formation de 36 heures annuelles au sein de l’établissement apprenant. Cette formation permanente s’inscrit dans le cadre du Parcours professionnel carrière et rémunération (PPCR). 

    4.3.4. Le rôle particulier des Irem
    Nous souhaitons souligner tout particulièrement ici le rôle crucial des Irem, partenaires historiques et institutionnels des équipes de professeurs de mathématiques, ce que de nombreuses personnes interrogées lors des auditions ont rappelé. Les Irem, dont le réseau couvre pratiquement l’ensemble du territoire, doivent donc s’impliquer pleinement dans la formation continue au sein des établissements apprenants et s’engager dans des partenariats avec les laboratoires de mathématiques. Nous prônons clairement une réelle montée en puissance des Irem dans ce nouveau modèle de formation continue, tant en mathématiques qu’en informatique. C’est pourquoi il nous semble désormais nécessaire d’intégrer pleinement une composante de recherche sur l’enseignement de l’informatique dans les Irem.


    Pour conclure, il convient d’ajouter que les structures de tutelle (rectorats, universités) doivent s’engager de manière contractuelle, comme elles l’ont fait pour la continuité des parcours des lycéens dans le cadre du bac-3/bac+3, afin de préciser les contours d’un partenariat efficace entre les différentes composantes universitaires concernées et les établissements apprenants. 

    4.3.5. La dimension internationale
    Signe de son importance, la formation continue des enseignants figure à l’agenda de l’Union Européenne, et il y a là une opportunité à saisir. Dans le cadre du « Programme Erasmus+ » 79 , les personnels des établissements scolaires (en particulier les enseignants) peuvent réaliser des missions d'enseignement dans un établissement scolaire européen partenaire ou bien suivre des formations (période d'observation, participation à un cours structuré) dans un établissement scolaire ou tout autre organisme actif dans le champ de l'enseignement scolaire en Europe.
    Ce type de projet, qui peut permettre de découvrir des pratiques innovantes et efficaces dans les autres systèmes éducatifs européens ou non80, s'apparente ainsi à un plan de formation continue qui permet d’améliorer la qualité de l'établissement et de développer sa dimension internationale81

    79 http://www.agence-erasmus.fr/page/mobilite-scolaire
    80 Un programme d'échange entre la Chine et le Royaume Uni a démarré depuis septembre 2014 où quelque 71 enseignants ont travaillé avec leurs partenaires chinois dans les écoles et collèges les plus performants à Shanghai.
    81 https://www.researchgate.net/project/DrIVE-MATH-Development-of-Innovative-Mathematical-Teaching-Strategies-in- European-Engineering-Degrees


    RECOMMANDATIONS 

    1. Développement professionnel en équipe [M15]
      Développer la formation continue des professeurs de mathématiques à l’échelle locale, dans une logique de confiance, entre pairs et en équipe ; promouvoir l’observation conjointe ; dégager un temps commun dans les emplois du temps ; identifier les personnes ressources. 

    2. Laboratoire de mathématiques [M16]
      Expérimenter, financer et évaluer sous trois ans, dès septembre 2018, dans au moins cinq établissements et un campus des métiers par académie, la mise en place de laboratoires de mathématiques en lien avec l’enseignement supérieur et conçus comme autant de lieux de formation et de réflexion (disciplinaire, didactique et pédagogique) des équipes. 

    3. Permettre à chaque enseignant de mathématiques de visiter, trois fois par an, les classes de ses collègues, dans un esprit d’ouverture et de confiance. 

    30.Le chef d’établissement doit dynamiser le développement des équipes disciplinaires (identification des besoins actions de formation). 




    1. Prévoir le travail collaboratif dans l’emploi du temps. 

    2. Assurer l’accompagnement (scientifique, didactique, pédagogique) des équipes
      dans les établissements et son évaluation. 

    3. Encourager les professeurs de mathématiques à participer à des missions dans d’autres pays européens dans le cadre du projet Erasmus+

    4.4. Les apports de la recherche
    Au regard de leur importance, les liens actuels entre le système éducatif et la recherche sont notoirement insuffisants. Il paraît nécessaire d’intensifier le transfert des apports de la recherche et la diffusion des savoirs pratiques, mais surtout d’en assurer une plus large publicité. Malgré les apparences, la relation entre enseignants et chercheurs est loin d’être asymétrique. Certes, l’enseignement se nourrit des résultats, plus ou moins récents, de la recherche, mais il ne faut pas oublier que le travail des enseignants nourrit aussi celui des chercheurs. Une communication plus étroite et facilitée est donc importante. Le rôle renforcé que la mission souhaite voir confié aux Irem, notamment dans l’animation de terrain, devrait permettre de renforcer cet axe.
    Au cours de sa formation initiale, l'enseignant est déjà, de façon indirecte, en contact avec les résultats de la recherche, puisque ses formateurs sont le plus souvent des enseignants- chercheurs (Espe, université). Dès ce stade, une initiation à la pratique directe de la recherche doit être assurée, notamment durant les cours de master. Cette ouverture précoce est indispensable afin de permettre par la suite un dialogue aisé avec les chercheurs.
    Cependant, pour un enseignant, l'apport de la recherche se situe principalement bien après sa formation initiale. C'est tout au long de sa carrière qu'il doit actualiser et renouveler son enseignement. S’il n’est pas pertinent de distinguer ici, comme dans les sections précédentes, primaire et secondaire, il est clair que le besoin, dans ce domaine, est extrêmement diversifié. Il n’est pas le même pour un professeur de CP, pour un professeur de CPGE ou encore un professeur de lycée professionnel : certains s’intéresseront surtout à la recherche en pédagogie, d’autres aux nouveaux résultats obtenus dans telle ou telle branche de la discipline, d’autres encore à l’histoire des mathématiques, sans bien sûr que cela soit exclusif. Les apports de la recherche se laissent ainsi répartir le long de deux grands axes, l'un centré sur la pédagogie, l'autre sur le disciplinaire et l’historique.
    Pour le premier axe, il est clair que la connaissance de la psychologie de l’enfant et de l’adolescent est absolument indispensable à tout enseignant et les sciences cognitives nous rappellent par exemple qu'il existe quatre facteurs principaux dans la réussite d’un apprentissage: l’attention, l’engagement actif, le retour d’information et, enfin, la consolidation82. Dans ce domaine, on tirera également parti de rapports établis par des institutions internationales comme l'OCDE83. En formation initiale et continue, il est important d'aborder ces divers points.
    Pour le second axe, les mathématiques ont la chance d'avoir un institut de recherche spécialement consacré à leur enseignement. Pour les autres disciplines, il n'y a rien d'équivalent aux Irem, qui constituent un lieu privilégié de rencontre entre les enseignants et les chercheurs. La diversité des thématiques abordées, qui couvrent à peu près tous les domaines des mathématiques et de leur enseignement, est remarquable. Y sont en particulier menées de nombreuses recherches sur l'histoire des mathématiques, approche dont les vertus pédagogiques sont bien connues : ainsi, pour mieux comprendre la linéarité, un retour sur les origines cartésiennes de la géométrie analytique peut être fort utile. À l'intérieur du laboratoire de mathématiques, on ne peut donc qu’encourager la montée en puissance des Irem, qui pourraient ainsi prendre une part plus grande dans la mise en relation des enseignants et des chercheurs ou enseignants-chercheurs de l’université. La question, complexe d’un point de vue administratif, de la prise en compte horaire ou financière de ces interventions, ne pourra pas être évitée.
    Les mathématiques bénéficient également d’un institut de recherche au sein du CNRS, qui a une mission nationale d’animation de la recherche en mathématiques, à savoir l’INSMI (Institut national des sciences mathématiques et de leurs interactions). Les chercheurs de l’INSMI sont tous affectés dans des laboratoires universitaires qui maillent le territoire.
    Le CNRS peut donc devenir un acteur important de l’enjeu de la formation en mathématiques84. Cela peut se faire, par exemple avec des délégations dédiées pour les enseignants-chercheurs.
    Pour leur part, dans le cadre d’une extension du domaine et des conditions d’enseignement de la prime d’excellence scientifique (PES), les chercheurs du CNRS et d’Inria sont de plus en plus désireux de s’adresser à un public plus vaste que celui des seuls spécialistes, et tout spécialement de s’engager davantage dans la formation des enseignants ou le développement des activités auprès des publics extra-universitaires85. Le cadre proposé, dans ce rapport, pour la formation continue in situ, doit permettre cette réalisation.
    En conclusion, il n’est pas inutile de rappeler qu’il y a un bon et un mauvais usage de la recherche dans l’enseignement. Il est donc indispensable que l’usage qui en est fait soit un usage éclairé. Comme le montre l'expérience des mathématiques modernes, la volonté d'actualiser l'enseignement en y intégrant les apports de la recherche peut être contreproductive. Les mathématiques qu’on enseigne en CP n’ont pas beaucoup changé depuis l’époque où Condorcet écrivait ses « Moyens d’apprendre à compter sûrement et avec facilité », et on ne voit pas que les capacités cognitives d’un enfant de six ans aient beaucoup changé non plus. 

    82 Fondements cognitifs de l'apprentissage des mathématiques, de Stanislas Dehaene http://www.college-de- france.fr/site/stanislas-dehaene/course-2015-03-03-09h30.htm
    83 Critical Maths for Innovative Societies, the role of metacognitive pedagogies http://www.keepeek.com/Digital-Asset- Management/oecd/education/critical-maths-for-innovative-societies_9789264223561-en#page1
    84 Dans l'apport de la recherche, il conviendrait également de faire une place à l'informatique et de mobiliser pour cela non seulement les Irem, mais aussi le CNRS avec l'INS2I et l’Inria, dont l'expertise dans ce domaine est internationalement reconnue, et qui encourage fortement ses chercheurs à intervenir en lycée, tant sur l'informatique que sur les mathématiques appliquées.
    85 http://audimath.math.cnrs.fr/

    RECOMMANDATIONS 

    1. Inscrire en formation initiale et continue un axe sur les questions de la mémorisation, la compréhension, l'attention, l'implication active, l'évaluation formative. 

    2. Concevoir et diffuser un ouvrage accessible, explicitant les apports des sciences cognitives et de la psychologie cognitive, pour un enseignement inscrit dans les réalités de la classe.
       



    5. LES OUTILS EFFICACES POUR LES ENSEIGNANTS

    La mission s’est intéressée à l’usage du manuel et des ressources par les enseignants. La littérature et les enquêtes sont nombreuses sur ces questions. L’articulation entre le support papier (plus efficace pour l’adhésion) et le numérique (plus léger et interactif) fait partie de la réflexion. 

    5.1. Le manuel
    Les publications officielles traitent peu des manuels scolaires et de leurs usages dans les classes. Alors que les programmes de français du cycle 286 mentionnent « l’utilisation des manuels ou/et des outils élaborés par la classe, notamment comme aides pour écrire », aucune allusion n’y est faite dans les programmes de mathématiques. Pourtant, comme l’a souligné Jean-Louis Durpaire87 : « même si le numérique joue un rôle de plus en plus important pour la préparation des cours, les manuels scolaires restent la première ressource pédagogique pour les enseignants ». 

    5.1.1. Son usage et son utilité
    Lors de la conférence de consensus « Nombres et opérations : premiers apprentissages à l’école primaire » de novembre 2015, le Cnesco s’est penché sur les manuels scolaires de mathématiques à l’école primaire, proposant une analyse descriptive de l’offre éditoriale, sans doute trop abondante (120 titres dans l’étude de 2015, plus de 140 titres aujourd’hui) et de l’utilisation en classe. Dans cette étude88, est considéré comme manuel scolaire tout support pédagogique (livres ou fiches). Les observations menées révèlent que certains enseignants n’utilisent pas de manuel papier, même s’il est présent dans la classe, préférant concevoir leur propre progression, à partir de ressources variées (multiples manuels, ressources en ligne). Ils sont nombreux, hélas, à photocopier et télécharger des ressources libres (ou qu’ils considèrent comme telles). Cause ou conséquence, le budget alloué aux photocopies dans certains établissements (par élève et par année scolaire) dépasse celui de l’achat de manuels !
    Le risque majeur est celui d’une perte de cohérence dans les apprentissages, avec parfois jusqu’à cinq livres issus de collections différentes à l’école élémentaire, et d’un manque de progressivité dans la construction des notions. En effet, comme en témoigne Jean Nemo89 pour le premier degré : 

    86 http://www.education.gouv.fr/pid285/bulletin_officiel.html?cid_bo=94753 87 Jean-Louis Durpaire, [Table croisée 12].
    88 http://www.cnesco.fr/wp-content/uploads/2015/11/Manuels.pdf
    89 Jean Nemo, [Table croisée 12].
     
    « Une méthode d’enseignement des mathématiques efficace est avant tout une progression, souvent bâtie sur plusieurs années, dans la présentation des notions, dans la représentation des nombres, dans le passage du concret à l’abstrait, dans la répétition des apprentissages, des entraînements et des pratiques. Le manuel se doit dès lors d’être le garant de cette cohérence, sans pour autant porter atteinte à la liberté pédagogique de l’enseignant. Enfin, si l’on pense à certaines situations de remplacement d’enseignants, le manuel est la première ressource (et peut-être la seule) pour le professeur contractuel découvrant son service, parfois quelques heures avant sa première séance. » 

    Par ailleurs, des choix éditoriaux communs à une très grande majorité des manuels de mathématiques de collège ont abouti à la raréfaction, voire la disparition, des preuves et autres démonstrations au profit de simples activités de découverte et pléthore d’exercices d’application directe, rarement des exercices à plusieurs niveaux de profondeur et de raisonnement. Alors même que la démonstration est annoncée, dans les programmes, comme un élément central dans l’enseignement des mathématiques, elle a disparu des manuels du collège. À ce titre, on peut considérer, que beaucoup de manuels de mathématiques, actuellement sur le marché, ne correspondent pas aux ambitions et attentes de l’Institution et de ses programmes. Pire, cela conduit à une dérive didactique, notamment dans les établissements les plus exposés, puisque certains enseignants sont incités à délaisser cet aspect fondamental de l’enseignement de la discipline, puisque le manuel le fait.
    En tant qu’outil privilégié des enseignants, le manuel de mathématiques doit garder une ambition de rigueur et de qualité dans ses contenus.
    Pour que le manuel regagne la confiance des enseignants et retrouve ses fonctions didactique et pédagogique, il est important : 

    •   qu’il soit conçu dans un temps suffisamment long et qu’il témoigne d’une culture commune partagée ;
    •   qu’il soit un outil « clé en main », facile d’utilisation ;
    •   que les équipes s’accordent sur une continuité et une stabilité dans l’usage du
      manuel de référence au sein de l’école, du collège ou du lycée ;
    •   que les acteurs du choix et des achats des ouvrages soient mieux éclairés, y compris certaines collectivités territoriales ;
    •   que les enseignants soient formés à l’utilisation des manuels scolaires dans le cadre de leur formation initiale et approfondissent leur réflexion sur cette utilisation en formation continue ;
    •   qu’une réflexion90 soit conduite sur le statut du manuel scolaire et sur son évolution, au regard de l’émergence des outils numériques (manuels numériques avec utilisation de tablettes et de tableaux numériques interactifs). Les ressources numériques seront plus longuement évoquées dans le §5.3. 

      Dans un rapport de l’IGEN91, Jean-Louis Durpaire rappelle que les manuels à l’école primaire ne sont pas tous conformes aux programmes, et que leur actualisation n’est pas en phase ; il peut y avoir deux ou trois générations d’écart ! 
      90 Préconisation exprimée par le Cnesco en 2015.
      91 Le manuel scolaire à l’heure du numérique à l’école primaire JL Durpaire, Y.Cristofari, C. Saint-Marc, JP. Villain, avril 2010. Rapport non publié.
       
      Enfin, il faut être vigilant sur l’utilisation massive de ressources de type «fichiers», notamment pour les classes du cycle 2, dont le renouvellement onéreux est nécessaire à chaque rentrée scolaire. Ce type de manuels peut enfermer l’enseignant dans une réflexion 
      didactique trop rigide et développer chez l’élève un systématisme peu constructeur de sens, notamment par la pratique d’un écrit trop fragmenté. 

      5.1.2. Un éclairage sur son choix
      Le manuel est un ouvrage au statut paradoxal puisqu’il n’est pas choisi par l’utilisateur auquel il est directement destiné : l’élève. Dès lors se pose l’importante question du choix des manuels par les enseignants et des raisons qui auront motivé ce choix. Les équipes ont besoin d’être accompagnées dans leur lecture réflexive de l’offre éditoriale : du fait des choix opérés par les éditeurs et les auteurs, les qualités et défauts des manuels, leur conformité aux programmes, leur cohérence ne sont pas aisément perceptibles. Il est nécessaire de fournir aux enseignants un outil leur permettant un choix éclairé, au regard d’un ensemble de critères pertinents.
      La mission recommande que le contenu de chaque manuel scolaire soit analysé par un comité scientifique92. La grille de lecture publiée à l’issue de ce processus ne constituerait ni une validation, ni une condamnation des manuels examinés, mais un outil sur lequel les enseignants pourront fonder leur choix. Elle pourrait fournir aux concepteurs de manuels des priorités pédagogiques, didactiques, mais aussi économiques, leur permettant de mettre en forme le contenu des programmes de façon adaptée. 

      92 Le CSP ou le Conseil scientifique de l’éducation nationale précisera les modalités pratiques.
       
      RECOMMANDATIONS 

      36. Manuels [M20]
      Les manuels de mathématiques feront l’objet d’un positionnement sur une échelle, par un comité scientifique, en regard de chacun des critères d’une courte liste arrêtée par ce même comité. 

      5.2. Les ressources matérielles
      Les objets mathématiques sont abstraits, donc construits théoriquement. Épistémologiquement, il est donc important de respecter la progression qui permet de passer d’un objet familier et sensible (la manipulation dans un jeu, par exemple) à la généralisation des faits et des phénomènes par la rencontre du symbolisme. Enseigner les mathématiques aux plus jeunes ne peut se faire sans leur faire expérimenter des situations. Le vécu expérimental et manipulatoire des élèves favorise l’acquisition des connaissances et leur mémorisation. Le matériel didactique et pédagogique sur lequel reposent ces expérimentations occupe donc une place centrale93. La question du rapport que les enseignants établissent et entretiennent avec les différents matériels est cruciale pour la création de situations d’apprentissage pertinentes, efficientes et pour la scénarisation de séances. 

      93 Comme le souligne une récente étude menée en 2017 en Angleterre :
      https://educationendowmentfoundation.org.uk/public/files/Publications/Campaigns/Maths/EEF_ _Maths_KS2_KS3_Guidance_A3_Recs_Poster.pdf et https://educationendowmentfoundation.org.uk/tools/guidance-reports/maths-ks-two- three?utm_content=buffer0a206&utm_medium=social&utm_source=twitter.com&utm_campaign=buffer
       
      Il est alors important de : 

      •   développer la manipulation de matériels pédagogiques pour l'apprentissage du calcul, des opérations, des formules géométriques en 2D ou 3D, etc. (jetons, cubes emboîtables, matériel de base 10, bouliers, réglettes colorées, planches à clous avec élastiques ou géoplans, mosaïques de formes géométriques, tangrams, solides à remplir avec de l’eau ou du sable, etc.) (cf. §5.3) ;
      •   entretenir et poursuivre, autant que possible, la manipulation dans la construction des objets mathématiques (au-delà du cycle 3) ;
      •   prévoir dans l’établissement du matériel de mesure : balances, mètres et décamètres, verres doseurs, récipients et boîtes vides, horloges et chronomètres à cadran, etc. ;
      •   porter une attention particulière sur les caractéristiques pédagogiques et didactiques des matériels utilisés dans la classe et sur l’effet induit sur les apprentissages des élèves ;
      •   fournir aux équipes des exemples de mise en œuvre de séances intégrant des ressources matérielles reconnues ;
      •   allouer à chaque école un budget pour l’achat de matériel pédagogique en mathématiques.
        Les situations expérimentales vécues par les élèves sollicitent leur créativité, développent leur motivation, encouragent leur esprit d’autonomie et d’initiative. 

        Les jeux
        En travaillant les fondamentaux par une approche différente, le jeu contribue lui aussi à la formation mathématique des élèves94 95 96. Les jeux traditionnels (comme les échecs), les jeux à règles (jeux de cartes, jeux de plateaux pour les petites classes, jeux de l’oie, etc.) et les jeux de construction stimulent le raisonnement logique et contribuent à créer ou restaurer le plaisir de faire des mathématiques (pour l’élève comme pour son professeur). Tous ces jeux sont d’excellents outils pour décomposer-composer les nombres, et pratiquer le raisonnement, mais ne sont pas assez utilisés ; d’une certaine manière, « l’enseignement est parfois trop conceptuel », comme le dit Jean-Louis Durpaire. Les BCD, les CDI et les espaces de vie scolaire (transformés en 3C, Centres de connaissances et de culture) doivent être des lieux privilégiés pour faire vivre la culture mathématique et la mettre en valeur, notamment dans sa dimension ludique. Lieux de culture et de « l’apprendre autrement », ces centres doivent, si possible : 

        s’enrichir de ressources en mathématiques adaptées, pour les élèves et pour les enseignants (ouvrages intéressants, ensembles de jeux, etc.) ; 
        aménager des espaces de ludothèque et des espaces pour construire ou manipuler (makerspaces, fablabs ) et surtout ouverts pendant la pause méridienne. 

        94 What is a serious game ? Julian Alvarez, https://www.canal- u.tv/video/eduscol/journee_d_etude_ehess_menesr_intervention_de_julian_alvarez_les_jeux_a_l_ecole_what_is_a_seri ous_game.18150
        95 https://www.lesechos.fr/04/07/2017/LesEchos/22479-117-ECH_navadra--le-jeu-video-qui-fait-progresser-tous-les- eleves-en-maths.htm
        96 http://eduscol.education.fr/maths/actualites/actualites/article/navadra-1.html

        RECOMMANDATIONS 

        37. Équipement [M4]
        Proposer à toutes les écoles un équipement de base, accompagné de tutoriels,
        favorisant les manipulations d’objets réels ou virtuels. 

        5.3. Environnements numériques
        Le numérique est un élément incontournable de l’enseignement, dans un contexte d’explosion de l’offre en outils d’apprentissage permettant un enseignement plus individualisé et mieux différencié. Il permet surtout de faciliter le droit à l’expérimentation, phase première des apprentissages. 

        5.3.1. Apprentissage intelligent
        Dans l’enseignement des mathématiques, les outils numériques (interactifs, plurimedia, etc.) interviennent de diverses façons, de la géométrie dynamique aux exerciseurs, en passant par le tableau numérique interactif, le livre numérique ou la tablette. Ressources numériques et applications hautement interactives sont désormais augmentées par l’intelligence artificielle, selon l’approche numérique (traitement des données d’apprentissage) ou symbolique (systèmes experts et ingénierie des connaissances). Elles ouvrent de nouvelles fonctionnalités,apportant instruments pédagogiques, didactiques et d’analyse pour l’adaptation et la personnalisation97

        L’individualisation des parcours d’apprentissage permet des contextes variés d’apprentissage, de gérer la diversité cognitive des élèves et la mise en place de parcours et d’activités adaptatifs en fonction du besoin de chaque élève (difficultés, rythme d’apprentissage et de mémorisation). L’élève dispose ainsi d’un tuteur personnel.
        La validation à la demande des interactions élève-savoir : ces outils permettent de développer les automatismes en faisant travailler la répétition avec un diagnostic non stigmatisant tout au long de l’entraînement. Ceci est particulièrement pertinent au primaire pour fixer les automatismes fondamentaux dans un ancrage mémoriel (tables de multiplication, calcul, orthographe, règles de grammaire élémentaires, etc.). L’élève peut vaincre sa peur et retrouver confiance en lui. 

        97 https://www.pearson.com/content/dam/one-dot-com/one-dot-com/global/Files/about- pearson/innovation/Intelligence-Unleashed-Publication.pdf [R. Luckin, W. Holmes, M. Griffiths & L. B. Forcier Intelligence Unleashed an Argument for AI in Education, 201], communiqué par Vanda Luengo, que nous remercions.

        •   La visualisation des procédés mathématiques et algorithmique, par exemple dans le cadre de la géométrie dynamique et des « lutins » de Scratch, aide à la compréhension.
        •   L’accès simple au jeu (jeux épistémiques numériques, jeu vidéo, etc.), en particulier dans sa dimension d’engagement personnel, devient même une expérience d’apprentissage personnalisé.
        •   La possibilité d’action directe par l’élève sur une situation mathématique (par exemple encore dans le cadre de la géométrie dynamique) lui permet de s’approprier les notions mobilisées.
          Ces fonctionnalités apportent un accompagnement intelligent à l’élève et à l’enseignant. L’enseignant devient ainsi « augmenté » dans sa dimension pédagogique (selon la formule de Gérard Giraudon98). Sa charge cognitive se trouve allégée par l’utilisation de différents traitements automatisés des informations (analyse des traces, cartographies de l’apprentissage et des savoirs, etc.), lui permettant de mieux comprendre les résultats des élèves, leurs modalités d'apprentissage, et de voir comment apporter une réponse adaptée. 

          5.3.2. Personnalisation, différenciation, handicap
          Les outils numériques jouent un rôle clé dans la gestion des situations particulières (handicap, précocité, etc.), pour la personnalisation des parcours et la différenciation pédagogique.
          Un des enjeux est la lutte contre le décrochage, l’échec et l’isolement scolaire. Un second enjeu majeur est l’accompagnement des élèves en situation de handicap, où des approches numériques sont à explorer et à développer, comme par exemple la création de prothèses mnésiques ou cognitives, la détection et la remédiation aux troubles Dys, la traduction français/LSF et français/FALC, l’enrichissement de l’environnement des élèves déficients sur le plan cognitif en lien avec la réalité augmentée99. Les outils numériques proposent des réponses personnalisées et efficaces aux élèves à besoins éducatifs particuliers comme nous en témoignent les documents du ministère100,101

          98 Inria, [Audition 2].
          99 DNE, [Audition 12]. 
          100https://pedagogie.ac-reims.fr/images/stories/actus-carrousel/id4391/numerique-handicap.pdf 101http://www.education.gouv.fr/cid207/la-scolarisation-des-eleves-en-situation-de-handicap.html
           
          5.3.3. Production et mise à disposition de ressources
          Si le numérique s'inscrit progressivement dans le paysage de l'éducation, il est important de souligner le rôle essentiel de l’enseignant et de l’institution (cf. §6.3). L’enseignant a besoin de créer ses propres parcours et contenus. Il est important pour lui d’avoir des pages modifiables et adaptables. Cela suppose donc de former les enseignants pour leur apprendre à analyser les outils, à mieux les appréhender et à les choisir en fonction du contexte.
          Il faut également produire et partager des ressources dans une co-conception impliquant tous les acteurs. Citons l’exemple du projet Calcul@Tice porté par l’académie de Lille. Une équipe départementale composée d’enseignants du premier et du second degré, encadrés 
          par des IEN et des IA-IPR, a produit des ressources, aujourd’hui déployées au niveau national102. Des réseaux sociaux dédiés à l’animation de la communauté, avec des conseillers virtuels, doivent également être développés. Une entrée vers ces ressources aura toute sa place dans un portail unique pour l’enseignement mathématique. Devant l’inflation des ressources en ligne, la question de leur évaluation selon des protocoles validés scientifiquement est également un enjeu crucial ; le cas de l’Australie est intéressant à titre de modèle103. La mission estime que les moyens humains dédiés au portail national de ressources104 sont insuffisants pour assurer le rôle décrit dans le présent rapport. 

          RECOMMANDATIONS 

          38. Montée en puissance d’un portail de ressources [M21]
          Doter ce portail de ressources en lien avec les mathématiques de moyens
          logistiques et de fonctionnement suffisant pour remplir pleinement ses missions. 

          39. Favoriser les ressources IA, y compris celles qui sont conçues par les entreprises, qui permettent d’aider à gérer la différenciation pédagogique, à prendre en compte la personnalisation des parcours, en particulier celles qui sont conçues pour prendre en compte le handicap. 

          40. Proposer des ressources en mathématiques pour le cycle2 dans la Banque de ressources numériques pour l’École105 en partenariat avec les éditeurs. 

          102 http://calculatice.ac-lille.fr/calculatice/spip.php?article388 103 http://www.scootle.edu.au/ec/p/home
          104 http://eduscol.education.fr/maths
          105 http://ecolenumerique.education.gouv.fr/brne/
       


      6. MATHÉMATIQUES ET SOCIÉTÉ 

      6.1. Les parents
      La relation des parents à l’enseignement des mathématiques se révèle souvent douloureuse. Considérée parfois comme élitiste, la discipline est perçue comme le facteur de sélection dominant dans les processus d’orientation vers les filières identifiées comme les plus prestigieuses. L’anxiété et le sentiment d’impuissance de certains parents face aux difficultés précoces de leur enfant dans la matière, altèrent leur confiance en sa réussite et compromettent ainsi les apprentissages. Ces difficultés font parfois écho au vécu scolaire des parents concernés et contribuent à entretenir une image « traumatisante » des mathématiques.
      Il est donc urgent de renouer le lien entre les parents et l’enseignement des mathématiques, de les «réconcilier», pour qu’ils se sentent comme des partenaires dans l'éducation mathématique de leurs enfants.
      Pour instaurer la confiance nécessaire et promouvoir une image positive des mathématiques, il est sans doute judicieux d’ouvrir ponctuellement l’établissement et la classe aux parents. Il ne s’agit pas ici d’une réunion d’information administrative mais bien d’inviter les parents à des ateliers pour prendre connaissances des
      contenus, activités et recherches en mathématiques pratiqués par leurs enfants106.
      Il ne faut donc pas craindre d’associer les parents au rayonnement des mathématiques au sein de l’établissement (semaine des mathématiques, journées portes ouvertes, remises de prix, invitations de personnalités, etc.) et de les informer de l’offre périscolaire : concours, rallyes107, ateliers, clubs, visites, partenariats, etc. Le périscolaire peut ainsi reconnecter les parents aux apprentissages de leur enfant, favoriser leur implication, développer leur sentiment de compétences et leur capacité à agir dans l’accompagnement à la scolarité.
      Le travail personnel hors du temps scolaire, pourtant capital, peut quant à lui engendrer des inégalités. Les élèves dont les parents sont les plus éloignés des savoirs scolaires et des codes de l’École sont particulièrement pénalisés. En effet, ces parents sont les plus démunis pour accompagner leur enfant dans son apprentissage des mathématiques. Certains d’entre eux, pourtant à l’aise avec la discipline, peuvent néanmoins se sentir en difficulté face à une notion mathématique parce qu’ils n’en comprennent pas la construction. Pour leur permettre d’accompagner plus sereinement les apprentissages mathématiques de leur enfant, il est donc nécessaire : 

      •   que les contenus et les méthodes leur soient explicités de façon plus accessible108 (cf. §3.1.1) ;
      •   que l’enseignant explicite davantage ses attentes en termes de travail personnel de l’élève, notamment pour préparer une évaluation ;
      •   que des ressources (notamment en ligne) soient mises à disposition des familles, en continuité avec le travail conduit en classe109

        106 Selon certaines expériences : tous les parents sont reçus dans différents ateliers durant une après-midi.  
        107 Les rallyes par équipe, favorisent l’esprit d'initiative, de curiosité et de créativité. Leur organisation, par un groupe d'élèves agissant seuls ou chapeautés par des professeurs ou des parents, favorise le développement d’une culture mathématique et développe le désir de la recherche mathématique.
        108http://www2.assemblee-nationale.fr/static/15/commissions/CAffCult/Mission flash parents-école note de synthèse2.pdf

      que les parents soient encouragés à proposer à leur enfant des situations ludiques d’apprentissage en mathématiques. 

      6.2. Le périscolaire
      Le périscolaire, par définition110, désigne des activités qui se déroulent autour de l’école, donc distanciées de la dimension scolaire stricto sensu. Il est donc normal que ces activités soient fondamentalement différentes, tant dans leur organisation que dans leurs objectifs. L’enrichissement des apprentissages scolaires, à travers certaines activités périscolaires comme les jeux intelligents (échecs, bridge, magie, clowns mathématiques111, certains jeux vidéo, etc.) est reconnu par tous. Pourtant l’intégration de ce type d’activités dans les écoles et établissements n’est pas assez mise en valeur, alors même que des portails nationaux comme la Fondation Blaise Pascal112 ou Animath113 sont disponibles.
      Plus généralement, si les activités périscolaires semblent fonctionner plutôt bien dans certains domaines (artistiques et sportifs, notamment), elles restent, quand elles existent, plutôt anecdotiques et sporadiques pour les mathématiques, en dépit de la richesse de l’offre existante. Notons que le périscolaire est naturellement développé dans le primaire du fait même de la structure de l’organisation. Les problématiques, par contre, sont plus saillantes au niveau secondaire. L’objectif de la réflexion suivante est de remédier à cette situation.
      Nous sommes frappés par le constat de fragilité et de tension financière de tout ce secteur, qui a les plus grandes peines à trouver des financements privés, et nous recommandons un plus grand investissement public dans le périscolaire.
      Enfin le périscolaire est lié à la culture scientifique, en l'occurrence la culture mathématique, qui s'adresse à toute la société. Ce sujet est moins développé en France que dans d'autres pays, et un effort de rattrapage salutaire est en cours. 

      6.2.1. Son importance, sa raison d’être
      Le périscolaire est un lieu d’innovation et de découverte, mais il ne doit pas et ne peut pas se substituer à l’école. Le contrat qui lie les intervenants et les participants est différent, le projet n’est pas le même, il n’y a pas de programme national, pas d’évaluation au sens scolaire du terme, pas de prise en compte dans le parcours de l’élève. De plus, les expériences efficaces dans un cadre restreint ne passent pas forcément à l’échelle. Le périscolaire reste donc une offre complémentaire et inégale sur le territoire, qu’il s’agit de mieux articuler dans le cadre d’un assouplissement de l’organisation scolaire. Ce dispositif doit s’intégrer au projet de l’établissement et valoriser les actions menées par les enseignants. Le chef d’établissement peut, par des ouvertures d’horaires dédiés et une prise en compte des besoins, jouer pleinement son rôle. 

      109 Recommandations du jury de la conférence de consensus sur la numération (Cnesco, 2015) http://www.cnesco.fr/wp- content/uploads/2015/11/Recommandations-du-jury.pdf
      110 Circulaire n° 2013-036 du 20 mars 2013 Annexe 3 :
      http://cache.media.education.gouv.fr/file/12/50/8/PEDT_annexes3_4_5_245508.pdf  
      111 Cédric Aubouy, http://ilelogique.fr/
      112 http://fondationblaisepascal.strikingly.com/
      113 http://www.animath.fr/


    La question de la motivation ne se limite pas à celle des élèves, celle des enseignants joue également un rôle important. En rencontrant d’autres méthodes et d’autres objets mathématiques, en pratiquant de nouvelles modalités pédagogiques, ils changent leur regard sur leurs élèves et leur discipline. Découvrir le monde du périscolaire est souvent source d’un plaisir restauré chez les enseignants. Prenant appui sur des rencontres, des expériences nouvelles avec les objets de sa discipline, l’enseignant peut alors continuer à exercer une activité de mathématicien participant à son développement professionnel. En particulier, ce levier peut s’avérer important dans la dynamique de « réconciliation » des professeurs d’école avec les mathématiques lorsqu’ils en ressentent le besoin.
    Il ne s’agit pas non plus de croire que le périscolaire est la panacée. Le risque existe d’un investissement amoindri de l’élève en classe : bénéficiant d’un soutien externalisé (par exemple, grâce à l’intervention d’associations partenaires de la réussite scolaire, comme Coup de pouce114, ZUPdeCO115), l’élève peut penser à tort qu’il ne lui est pas nécessaire de se mobiliser lors de la phase d’apprentissage en classe. Il faut également se soucier de « la double peine » que certaines formes de répétition trop scolaires infligent aux élèves en difficulté, en dehors de la classe. Ces élèves ne sont pas davantage motivés par de telles modalités de soutien.
    Le périscolaire a une fonction importante de lutte contre les inégalités sociales et culturelles. Cette fonction est très forte dans la voie professionnelle, où les déterminismes de genre sont particulièrement marqués. Ainsi, l’accès aux activités périscolaires (clubs mathématiques ou scientifiques, ateliers de recherche MATh.en.JEANS116, sorties à caractère scientifique) peut permettre à tout élève, et particulièrement dans la voie professionnelle, de s’ouvrir sur un champ essentiel à sa formation citoyenne : dépassant le seul cadre des mathématiques, le périscolaire participe au développement de la mixité sociale et de la diversité culturelle (cf. §6.3). La participation active des élèves et les compétences développées dans ce cadre, devraient être valorisées, en intégrant, d’une manière ou d’une autre, les « suppléments » au baccalauréat ou en figurant dans les dossiers des lycéens. Ajoutons, enfin, que le périscolaire offre des occasions exceptionnelles pour les élèves les plus motivés de développer leur talent et d'approfondir leurs connaissances, en particulier à travers des initiatives telles que les concours et projets (France IOI, Kangourou, Animath, TFJM, etc.). 

    114 http://www.coupdepouceassociation.fr/  
    115 http://www.zupdeco.org/
    116 https://www.mathenjeans.fr/
     
    6.2.2. Scolaire et périscolaire : une étroite collaboration, conditions de succès
    Inquiets de manquer de temps pour finir le programme, pour préparer les élèves aux examens certificatifs, certains enseignants du lycée hésitent à s’engager avec leur classe dans des activités périscolaires. Relier activités de médiation et programmes scolaires par des passerelles explicites pour l’exploitation des activités en classe serait de nature à rassurer les enseignants qui ne seraient alors plus inquiets de « perdre du temps ». Une future réforme du baccalauréat, laissant plus de place au contrôle continu et à l’expression orale, pourra, elle aussi, permettre de dépasser ce blocage. Pour développer l’adhésion des enseignants à l’offre périscolaire de qualité, il est important de leur faire prendre conscience de l’apport réel pour les apprentissages mathématiques des élèves. Varier les points de vue, multiplier les angles de perception, relativiser et dédramatiser l’erreur, développer l’imagination, prendre le temps de chercher sont autant de démarches mises en œuvre dans le périscolaire et permettant une meilleure transmission des mathématiques.
    Dans le second degré, pour une collaboration réussie entre scolaire et périscolaire, un partenariat confiant et respectueux des acteurs et de leurs rôles respectifs est nécessaire. Il faut porter une attention particulière à la formalisation du contrat liant les parties. Les actions périscolaires qui échappent au vote d’une signature d’une convention annuelle ou qui se développent en dehors du regard du chef d’établissement ou des responsables de circonscription sont à bannir. La mission, qui vise à la pérennité de ces actions et à leur financement, encourage les parties à établir des relations structurelles, au-delà des actions humaines indispensables. Les chefs d’établissement, avec l’aide des conseils pédagogiques, ont ici un rôle central à tenir : ils ont à établir les conventions nécessaires et à en administrer les moyens horaires et financiers : ils articulent le projet d’établissement avec les projets des enseignants d’une part, et des associations, organismes, intervenants d’autre part, créant ainsi, avec l’appui de l’inspection, une dynamique autour du périscolaire.
    Les échanges entre enseignants et intervenants périscolaires profitent à chacun, dans le respect des différentes compétences. Un suivi et un dialogue sur la durée entre associations et établissements doivent être instaurés dans les deux sens, le travail des uns étant valorisé par les autres. Par exemple, lors d’événements ponctuels (fête de l’école, festival de jeux mathématiques, journées de jeux intelligents, Semaine des mathématiques, rencontres intercycle), les élèves peuvent exposer leurs productions, valoriser leurs découvertes, en contribuant à l’image positive des mathématiques et au rayonnement de l’établissement, en particulier auprès des parents, du site Internet de l’établissement (ou de l’académie) et des médias.
    Les activités périscolaires peuvent se tenir en classe ou dans d'autres lieux spécifiques : on pense en particulier aux Maisons pour la science qui se sont montées ces dernières années.
    Tout comme pour la formation continue, la mission recommande qu’une équipe académique spécifique, formée à identifier, répertorier, accompagner et dynamiser les activités périscolaires, évalue avec le chef d’établissement ou les IEN de circonscription, de manière non intrusive, les collaborations locales dans le but de diffuser les informations importantes, de faire connaître les initiatives intéressantes ainsi que les dispositifs et personnes ressources. Cette équipe pourra également proposer des interventions dans les établissements où le périscolaire peine à se développer. Il faut se donner les moyens financiers d’une telle formation (décharges d’actifs compétents, rémunération de retraités, d’experts) tant au niveau national que localement.
    Plus largement, en étant présents lors d’évènements scientifiques locaux, les différents acteurs de la formation (recteurs, IA-IPR, IEN, Espe, universités) témoignent de leur intérêt pour le travail. 

    6.2.3. Les clubs de math, pour le plaisir et par l’effort
    Le périscolaire est un espace de liberté, permettant d’avoir une approche non scolaire des concepts, avec du temps pour construire les choses autrement. Cependant il ne gomme pas les efforts nécessaires à leur maîtrise. Le plaisir que le résultat procure rend l’effort acceptable, comme dans un club de sport, de musique ou de théâtre. « Des mathématiques sans pleurs, c’est possible, mais sans sueur, ça ne l’est pas ! » pourrait-on dire, comme en témoigne la participation, pendant les vacances, de dizaines de jeunes à des clubs très exigeants de préparation aux concours internationaux, pour le plaisir de chercher et de trouver.

    La participation à ces clubs développe le travail en équipe et la participation à des tournois de jeunes mathématiciennes ou mathématiciens comme le TFJM117, particulièrement motivants.

    117 https://tfjm.org/

    Pour développer et pérenniser les initiatives locales, les enseignants et les animateurs doivent être encouragés et accompagnés dans la création et le maintien de clubs, y compris de jeux, mathématiques ouverts au plus grand nombre et pas uniquement aux meilleurs élèves : mise en œuvre à des horaires adaptés et réguliers, pour les élèves et les enseignants, attribution de moyens (photocopies, journal d’établissement, lieu dédié, affichage d’infos au CDI) et d’un financement annuel stable. La rémunération, ou la prise en compte d’une manière ou d’une autre du travail accompli, est un facteur essentiel de la pérennité recherchée. 

    6.2.4. Le chef d’établissement dans le fonctionnement pérenne du périscolaire
    La position des chefs d’établissement, vis-à-vis des associations et des individus (professeurs et élèves), est un facteur crucial de réussite ou d’échec. La multiplicité des acteurs est bien évidemment une richesse, mais peut également se révéler source de confusion, notamment pour les professeurs et les chefs d’établissement qui ne savent pas forcément avec quel organisme prendre contact. Ce problème est particulièrement criant lorsque les établissements sont éloignés des grandes villes (établissements ruraux), lorsque les contacts avec le tissu associatif et/ou de la recherche sont plus ténus.
    Force est de constater que la plupart des chefs d’établissement ne sont pas formés à l’intégration efficace du périscolaire dans l’organisation scolaire, ni à la gestion des relations avec les associations, oscillant entre méfiance et défaut de considération. Il faut remédier à cela.
    Dans les établissements, les leviers structurels existants sont faiblement activés : le conseil d’enseignement est très dépendant de l’engagement du coordonnateur, de sa posture, de la confiance accordée par l’équipe et de la marge de liberté laissée par l’équipe de direction ; le conseil pédagogique ne joue pas toujours son rôle dans la réflexion pédagogique. Le contrat d’objectifs, le projet d’établissement, le projet éducatif territorial sont parfois ignorés (oubliés...) par les personnels, même quand une démarche participative a prévalu à leur construction.
    Le chef d’établissement doit donc légitimer l’action périscolaire par son inscription dans le projet d’établissement. Ce projet est mis en œuvre par tous les acteurs (équipe enseignante et partenaires) dans une synergie visant la réussite de l’enseignement. Cela nécessite parfois d’opérer des choix entre les différentes initiatives, en réponse aux besoins des élèves de l’établissement. Cela nécessite aussi de mettre en confiance les parents sur le rôle positif de ces associations, en consacrant un temps suffisant à leur présentation et en expliquant, par exemple au lycée, en quoi ces activités participent de la réflexion sur l’orientation et la préparation à l’enseignement supérieur. Cela suppose évidemment une réflexion très en amont dans la construction des emplois du temps118, par exemple pour dégager des plages horaires suffisantes, afin que ces actions puissent se développer.
    La vision globale des actions périscolaires au niveau académique, et donc leur évaluation, ne sera pas possible si elle n’est pas clairement identifiée à l’échelle locale. L’exemple du jeu d’échecs en Russie est très parlant à cet égard : tous les établissements ont un responsable de club, parfaitement identifié, appartenant à un réseau structuré à l’instar d’une fédération sportive. Les rectorats doivent, par exemple, pouvoir recenser l’ensemble des clubs de mathématiques actifs sur leur territoire, et en faire une cartographie accessible aux familles. Les chefs d’établissement où un club ou atelier de mathématiques existe, doivent le signaler au rectorat pour inscription au fichier « clubs et ateliers » avec le nom des animateurs. 


    1. 118 Voir en annexe 4 un exemple de modification d’un emploi du temps réel de niveau 4e , basé sur des modules de 45 min et laissant place à un temps de clubs au sein de l’établissement, et supprimant les interclasses du matin.
     
    6.2.5. Aspects pratiques : financement, certification, évaluation



    Le périscolaire doit être le complément qui répond aux besoins des élèves. Son bon

    fonctionnement requiert une communication claire sur les contenus des actions, d’un comité


    de suivi, d’un d’un processus défini d’évaluation, d’une coordination (à différents niveaux) de tous les dispositifs. 
    Pour développer la confiance entre établissements, enseignants, cadres et monde associatif, la mission propose de : 

    •   mener une étude, à l’échelle nationale, sur l’impact du périscolaire sur l’engagement et la performance des élèves ;
    •   développer la démarche de labellisations des associations ;
    •   valoriser auprès des élèves les intervenants extérieurs (médiateurs scientifiques,
      etc.) ;
    •   intégrer, dans les parcours de formation des enseignants du 1er et du 2d degrés les Espe, la dimension périscolaire.
      Une autre question se pose : celle des fonds propres pour le financement. Il n’y a pas de périscolaire pérenne sans repenser sérieusement la valorisation financière des marges de fonctionnement des établissements, pour aller vers plus d’autonomie. 





    1. RECOMMANDATIONS 

      41. Périscolaire et clubs [M7]
      Encourager les partenariats institutionnels avec le périscolaire et favoriser le développement de ce secteur. Recenser et pérenniser les clubs en lien avec les mathématiques (de modélisation, d’informatique, de jeux intelligents, etc.). Rémunérer les intervenants et adapter les emplois du temps des enseignants. 

      42. Favoriser l’inscription des élèves et des classes à des ateliers de recherche ou à des concours de mathématiques et d’informatique, nationaux et internationaux, dont on assure la publicité auprès des chefs d’établissement, des enseignants, des élèves et des parents d’élèves.

    43.Organiser une journée de rentrée «Festival des jeux», en lien avec les mathématiques.

    1. Former dès l’ESENESR les chefs d'établissement et les corps d’inspection l’importance du périscolaire en mathématiques et à la gestion des relations avec les associations.
    2. Intégrer systématiquement dans les projets d’établissement et les contrats d’objectifs un volet partenariats et périscolaire

    6.3. La nouvelle économie
    Les outils et ressources numériques, en particulier en termes d’aide à l’enseignement des mathématiques, sont aujourd’hui un puissant vecteur d’innovation. L'interaction de l'éducation nationale avec les entreprises du secteur présente des enjeux variés, d’ordre économique, pédagogique, et de sécurisation des données. 

    6.3.1. Enjeux économiques
    Comme souligné par l’Inria119 , on note l’importance des acteurs étrangers dans le monde du numérique (citons par exemple les Gafam et la Chine). Les cultures et les législations ne sont pas les mêmes en France, en Amérique du Nord, ou encore en Chine. Cela pose des problèmes concernant la confidentialité des données collectées pendant l’utilisation de ces outils, y compris par les élèves et leurs familles. Il faut ainsi veiller à ce que le développement économique du secteur ne soit pas aux mains des géants du numérique et penser en termes d’entreprises européennes diversifiées.
    La France est riche d’un tissu d’entreprises innovantes et ouvertes à l’international qui produisent ressources et approches didactiques nouvelles. Ce tissu est en cours de structuration (citons par exemple Afinef, EdTech France ou encore EducAzur). S’il existe plusieurs phases à considérer dans les projets d’innovation publique (recherche et développement, passage à l’échelle, déploiement, etc.), il y a urgence à expérimenter pour l’écosystème français, avec une évaluation des diverses expérimentations: il faut développer, évaluer, itérer, avec des normes sur les données, dans un cadre éthique. L’École doit pour cela s’ouvrir aux partenariats, et en particulier aux entreprises françaises, et aux produits innovants. Les relations entre entreprises éducatives et enseignement doivent être encouragées et organisées (par exemple avec des visites dans les établissements). Un portail d’expérimentations doit être développé. 

    119 [Audition 2]

    6.3.2. Des ressources libres, ouvertes et sécurisées
    Un modèle économique intéressant se dessine avec la création de biens communs libres et ouverts au sens des licences dites creative-commons, ce qui permet de les repartager avec le plus grand nombre. C’est un levier pour mettre à disposition de toutes les populations de nouvelles modalités d’enseignement tout en limitant l’engagement de fonds publics, y compris dans une démarche de passage à l'échelle. Il faut alors des plateformes qui permettent le partage de ressources ouvertes et donner une véritable chance aux acteurs qui jouent le jeu des ressources libres et réutilisables (comme par exemple OpenClassrooms ou Class’Code). Cela demande également d’accompagner les enseignants par le développement des compétences correspondantes (voir par exemple le projet francophone de l’OIF et de l’Unesco120).
    Le modèle de développement doit être compatible avec la gestion de données à caractère personnel. Il ne serait pas tolérable que la collecte des données individuelles des utilisateurs fasse l’objet d’un commerce avec l’illusion d’un service gratuit. Le stockage des données anonymisées (visibles, partageables et réutilisables) de façon transparente doit interroger l’éducation nationale. Il faut développer des dispositifs responsables, transparents, confidentiels, et accessibles (voir par exemple à l’international121). 

    6.3.3. Les appels à projets et appels d'offre de l'éducation nationale
    Pour remporter les appels à projets et appels d'offre de l'éducation nationale dans une logique du moindre coût, les start-ups, comme les éditeurs, tendent à tordre leurs modèles économiques et technologiques, en produisant des solutions conformes à l’existant au lieu d’investir dans une vraie innovation. L’interopérabilité avec les ENT (Espaces numériques de travail) demandée systématiquement par les appels à projets en est un exemple probant, avec des outils peu efficaces et d’utilisation compliquée122. Il faut veiller à ne pas mélanger innovation et interopérabilité avec l’existant. De plus, les appels à projets centralisés, où quarante entreprises brûlent de l’énergie pour que trente-neuf ne le fassent qu’en pure perte, sont contreproductifs123.
    Les entreprises intervenant dans l’éducation peuvent aider les enseignants dans leur efficacité pédagogique, mais ceci ne peut se faire qu’à condition de préserver la liberté pédagogique quant au choix de la ressource à utiliser. Le choix d’achat de matériel par les enseignants doit ainsi être un choix libre, éclairé et expérimental. Un budget significatif et des canaux administratifs simplifiés sont indispensables à l’acquisition et à la gestion de ces ressources. Par exemple, nous recommandons un dispositif de type « carte d’achat » au niveau de tous les établissements scolaires pour gérer les commandes correspondantes. 

    120 https://ifadem.org/sites/default/files/divers/guide_rel_web.pdf et https://ifadem.org/sites/default/files/divers/livret- rel-v1-1-web.pdf
    121 https://pslcdatashop.web.cmu.edu  
    122 myBlee Mat, [Audition 9].
    123 EvidenceB, [Audition 9].
     
    6.3.4. Enjeux pédagogiques
    Un autre enjeu majeur réside dans la maîtrise de la pédagogie et de la didactique. Le risque est que cette maîtrise ne se crée finalement plus dans l'éducation nationale mais à travers l'ingénierie déterminée par les entreprises éducatives (comme dans le cas des fichiers mathématiques en primaire, par exemple). Il faut à la fois former tous les enseignants aux technologies de l’éducation pour qu'ils comprennent leur fonctionnement, leurs potentialités et leurs limites, les associer dans les phases de conception et de développement, et également imposer aux ingénieurs concepteurs d’outils une véritable formation à la didactique et à la pédagogie des mathématiques, le tout, intégrant les apports de la recherche (sciences cognitives, etc.). 

    RECOMMANDATIONS 

    46. Expérimenter et ouvrir l’École aux partenariats et produits innovants numériques dans un cadre organisé. 

    6.4. Mathématiques et inégalités
    Depuis plusieurs décennies, le fort accroissement des inégalités sociales dans les pays développés est régulièrement montré du doigt. Si l’École n’en est certainement pas la cause principale, il est permis de penser qu’elle n’y est pas non plus tout à fait étrangère. Au lieu de compenser les inégalités, on peut même se demander si elle ne les creuse pas encore davantage comme l’indiquent les notes du Cnesco 124 (voir aussi les études portant sur les communautés flamandes ou francophones en Belgique125). Les piètres résultats de la France aux évaluations internationales, cachent en vérité des résultats encore plus mauvais pour les publics déjà défavorisés et indiquent une forte corrélation ; mais ce n’est pas une fatalité comme l’indique l’OCDE126 qui démontre qu’un bon système éducatif, peut décorréler les fatalités sociales, y compris pour les élèves issus des migrations récentes.
    La question se pose avec encore plus de force pour les mathématiques, dans la mesure où elles jouent un rôle de sélection au sein du système scolaire (cf. §1), avec des inégalités d’ordre varié : inégalités femmes-hommes, territoriales et sociales.
    Une représentante de Pôle emploi nous a dit que l’incompétence en calcul élémentaire (cf. §3.2.2) était vécue par certains employés comme une grande souffrance. L'innumérisme est un facteur majeur d'exclusion, dans toutes les sphères de l'activité humaine, qu'il s'agisse de la vie familiale et privée, ou des activités publiques et professionnelles. L’utilisation des règles de base de calcul et le raisonnement mathématique font d’ailleurs partie des domaines de base de la certification interprofessionnelle Ciéa127. À l’autre extrémité de la hiérarchie sociale, les représentants des grandes écoles ne sont pas moins inquiets. Ce n’est pas tant le niveau de leurs élèves qui les préoccupe, que le manque de diversité dans leur origine sociale, indique Yves Poilane 128 . Cette inégalité a aussi une dimension territoriale. Ainsi près de la moitié des élèves qui entrent à Polytechnique viennent de deux établissements de la région parisienne, inversement, les élèves des grands lycées de province ont de plus en plus de mal à réussir le concours d’entrée à Polytechnique

    124 http://www.cnesco.fr/wp-content/uploads/2015/11/Enseignement-en-education-prioritaire.pdf et http://www.cnesco.fr/wp-content/uploads/2016/09/270916_synthese_inegalites.pdf
    125 www.academia.edu/168459/Performances_des_eleves_issus_de_l_immigration_en_Belgique_selon_l_etude_PISA_une _comparaison_entre_la_Communaute_francaise_et_la_Communaute_flamande
    126 http://www.oecd.org/fr/education/Les-eleves-immigres-et-lecole-avancer-sur-le-chemin-de-lintegration.pdf  
    127 https://www.certificat-clea.fr/socle.html
    128 [Audition 10]

    À ces inégalités liées aux origines sociales s’ajoutent des inégalités liées au genre129, particulièrement marquées à l’entrée des concours comme ENS-Paris ou Polytechnique. Dans le cours de mathématiques, l’enseignant a tendance à s’adresser davantage aux garçons qu’aux filles et à ne pas avoir les mêmes attentes. Le stéréotype du garçon doué et de la fille travailleuse perdure. Plus la croyance dans le talent inné est forte dans un domaine, moins les femmes y sont nombreuses: les professions relevant des mathématiques restent ainsi encore majoritairement masculines. Comme souligné dans la note d’Elyès Jouini : 

    « Il est en outre intéressant de se rendre compte de l’analogie, troublante, entre les inégalités de genre et les inégalités sociales. Les écarts de performance, de confiance en soi130 et d’orientation qui se retrouvent entre les filles et les garçons existent également entre les classes socioprofessionnelles les plus favorisées et les moins favorisées. »
    La situation n’est tout simplement pas admissible et il faut redonner un sens à l’expression « égalité des chances ». 

    Quels moyens ?
    Toutes les actions de déploiement décrites dans le présent rapport (en particulier pour ce qui concerne la formation et le périscolaire) sont mobilisées sur le sujet des inégalités. Elles concernent tous les établissements sur tout le territoire : il faut rompre la corrélation entre difficultés sociale et scolaire en mathématiques.
    Les activités facultatives périscolaires permettent non seulement d’aider les élèves en difficulté, mais offrent également motivation et émulation par des rencontres avec des chercheurs ou avec d’autres jeunes. Tout ceci contribue également à faire évoluer l’image des mathématiques. Les outils de prise en charge sont variés : clubs de mathématiques, tutorat, ressources en ligne, etc. Lutter contre l’exclusion socioculturelle peut aussi se faire en sortant les mathématiques des lieux d’enseignement classiques. Les centres de sciences peuvent ainsi contribuer à « lisser » les inégalités sociales : ils offrent un rapport à la connaissance scientifique, axé sur le plaisir de la découverte et non sur des enjeux de réussite scolaire et/ou professionnelle131.
     
    129 Elyès Jouini. Filles et mathématiques. Déconstruire les mythes sur le genre. Opinions & Débats. Numéro 18. 2018.
    130 Une note de l’OCDE indique : « À performances égales, les filles sont plus susceptibles de ressentir de l’anxiété lorsqu’elles sont confrontées aux mathématiques, et ont moins confiance en leurs propres aptitudes à résoudre des problèmes mathématiques que les garçons. »
    131 Universcience, [Audition9].

    Si les professeurs sont souvent amenés à réduire leurs exigences vis-à-vis des élèves issus de milieux défavorisés, chaque élève doit cependant se voir offrir la possibilité de progresser selon son potentiel. Un haut niveau d’exigence et une réelle ambition pour tous doivent être le moteur de l’enseignement des mathématiques. Pour cela, la formation initiale et la formation continue doivent être mobilisées et participer à la lutte contre les représentations et les stéréotypes. Familles et équipes éducatives stables doivent échanger et mieux se connaître. L’orientation est elle aussi impactée : il faut inciter et encourager tous les élèves qui le peuvent, à accéder aux filières scientifiques du lycée général et technologique, et les accompagner dans leur démarche.
    Aide aux devoirs, situation sociale et cadre de vie ne sont pas les seuls facteurs d’inégalités en mathématiques. La maîtrise du langage est fondamentale pour la compréhension des 
    énoncés et la formulation du raisonnement. Le vocabulaire mathématique, parfois proche du langage usuel, mais parfois éloigné, peut de plus engendrer incompréhension, stress et échec132. Comme déjà souligné au §2.1, la verbalisation et la reformulation sont nécessaires en mathématiques pour dépasser ce qui peut constituer un obstacle important à la réussite de certains élèves.
    Concernant les inégalités femmes-hommes, la formation est un enjeu majeur. Il s’agit de la formation des enseignants, mais plus généralement des adultes au contact des enfants (parents, chefs d’établissement, Atsem133, psychologues de l’éducation nationale, conseillers principaux d’éducation, etc.). D’autres leviers sont à actionner : 


    •   le développement des actions de mentorat 134 ;
    •   la diffusion de modèles mathématiques féminins positifs ;
    •   l’encouragement des filles à se présenter à des concours ;
    •   la lutte contre les stéréotypes liés aux mathématiques dans les outils et documents produits par l’éducation nationale, dans les manuels scolaires, mais aussi dans les choix d’orientation professionnels, etc. 

      132 Fermat Science, [Audition9].
      133 Agent territorial spécialisé des écoles maternelles. 
       134 Femmes & Mathématiques, [Audition6].
       
      RECOMMANDATIONS 

      47. Égalité femmes-hommes [M19]
      Former les enseignants et l’encadrement aux problématiques liées à l’égalité femmes-hommes en mathématiques (stéréotypes de genre, orientation professionnelle, réussite, etc.).

     


    7. CONCLUSION : FAIRE VIVRE CES MESURES 

    Les recommandations exprimées par la Mission mathématiques se déclinent en protocoles opérationnels accompagnés d’échéanciers pluriannuels. Cela suppose une mobilisation rapide, coordonnée, durable et certainement ardente de l’ensemble des acteurs du système éducatif.
    Pour mener sur plusieurs années, sans la différer, une nouvelle politique de l’enseignement des mathématiques, efficace et utile à tous les élèves, il faut assurément qu’une chaîne de pilotage vienne en assurer solidement et de manière pérenne l’installation dans le paysage éducatif. Cela concerne aussi bien les initiatives et les dispositifs de formation, d’accompagnement et d’expérimentation, que la concertation et l’évaluation qui doivent les guider. 

    7.1. Une tâche et deux leviers
    L’ampleur de la tâche est immense et à la mesure des objectifs dessinés par notre lettre de mission.
    Dès lors, il faut entendre que c’est toute la chaîne éducative qui est appelée à se mobiliser pour que les changements préconisés aboutissent effectivement au sein des classes. Deux leviers nous paraissent essentiels à cet égard.
    Le premier consiste à prendre en considération les structures, les circonscriptions pour les écoles, les établissements et les bassins pour les collèges et les lycées. Dans ce contexte, il revient aux IEN et aux chefs d’établissement de relayer les résolutions nationales et académiques, de susciter les initiatives locales, puis de prendre les dispositions propres à leur organisation. Nous les invitons à s’investir davantage encore dans les relations humaines ainsi que dans la pédagogie.
    Ensuite, faisons confiance aux professeurs pour adopter spontanément une posture positive. Aussi, faut-il s'adresser à eux comme à des cadres authentiques, travaillant en synergie avec les autres maillons de la chaîne éducative. Les IEN, IA-IPR, chargés de mission et chefs d’établissement, en charge du pilotage, ont donc la responsabilité de sa mise en œuvre quotidienne.
    La mise en confiance, y compris entre pairs, la capacité à mener un travail collaboratif, l’aptitude à innover, la définition des besoins individuels et/ou collectifs en termes de formation sont autant de moyens favorisant la pleine appropriation par les enseignants des programmes, objectifs, moyens et ressources qui concourent à leur diffusion dans les cours et à la réussite des élèves.
    Ce qui vient d’être écrit induit un changement systémique qu’il faut encourager car il est porteur d’efficience et préserve la liberté pédagogique des enseignants. 

    7.2. Continuité et chaîne de pilotage
    Beaucoup a été fait en France et à l’étranger pour comprendre et améliorer les stratégies d’enseignement des professeurs et les résultats des élèves. En France, les Espe, le Cnesco, la Depp, l’Ifé et d’autres institutions et associations ont produit des analyses et des propositions reconnues par la recherche et les praticiens. Certaines ont été mises en œuvre localement, avec des résultats reconnus, ce qui montre la validité de certaines préconisations. Pour autant, même si les meilleurs élèves continuent d’intégrer les meilleures écoles pour former les chercheurs et les ingénieurs de haut niveau dont le pays a besoin, la dégradation des résultats globaux se confirme d’année en année : nous ne sommes pas parvenus, collectivement - politiques, cadres dirigeants et enseignants - à inverser la tendance.
    Il est donc nécessaire aujourd’hui de prendre des mesures fortes pour accompagner les évolutions en mathématiques, de même qu’il s’est avéré nécessaire de prendre des mesures fortes pour faire face aux résultats en lecture et en écriture.
    C’est pour cela que les réflexions de ce rapport n’auront une chance de produire durablement les effets recherchés, dans l’intérêt des élèves, qu’avec des mesures fortes et un accompagnement dédié et volontariste. 

    7.3. Relier trois niveaux stratégiques
    Ces mesures fortes ont pour but de relier souplement trois niveaux stratégiques de mise en œuvre : 


    •   Le premier et principal niveau est celui de la classe, dans la mesure où l’essentiel s’y joue, au contact quotidien des élèves. Il est essentiel qu’à ce niveau-là, la mise en œuvre des recommandations permette aux professeurs de mieux exercer leurs responsabilités, dans un climat de confiance et de dialogue entre professionnels partageant des valeurs communes. Il n’est en effet pas envisageable de réussir à mobiliser les professeurs s’ils ne se sentent pas pleinement reconnus comme responsables et capables. La formation n’est qu’un élément de réponse. Cette ambition nécessite aussi de poursuivre la rénovation des relations de travail entre les professeurs et les personnels d’encadrement (inspection et direction) pour développer des formes de direction et de coopération qui conjuguent liberté, responsabilité et autonomie135, dans un cadre explicite.
    •   Le deuxième niveau est celui des écoles et des établissements136, dans la mesure où l’amélioration des pratiques d’enseignement dans chaque classe se nourrit aussi du développement des pratiques collectives, donc des pratiques d’équipe dans les écoles et établissements. Cette dimension importante et reconnue par la recherche internationale conduit à considérer l’évaluation des écoles et des établissements comme une opportunité d’avenir137. Il est possible de conjuguer : 

      •   l’auto-évaluation des écoles et des établissements, y compris l’évaluation entre pairs ;
      •   un regard externe porté par des équipes d’inspecteurs territoriaux dans une approche systémique ;
      •   les dialogues stratégiques et de gestion que conduisent les académies et les départements avec les circonscriptions et les établissements. 

        135 Timperley H. & Parr J., The chain of influence from policy to practice in the New Zealand literacy strategy. Research Papers in Education, vol. 24, n° 2, 2009, p. 135-154.
        136 Une telle évaluation est mise en place depuis 2016 dans l’académie de Nantes.
        137 MacBeath J., School inspection and self-evaluation. Working with the new relationship, Ed. Routledge, 2006.

    Enfin le troisième niveau est celui de l’encadrement. Pour obtenir des résultats durables, il est nécessaire de mobiliser les personnels qui pilotent la mise en œuvre, notamment pour créer les conditions de la confiance et de l’accompagnement des professeurs. En effet, puisque c’est dans l’école et dans l’établissement que se jouent les stratégies d’équipe essentielles pour la réussite des élèves, il est nécessaire de relier l’évaluation, le développement professionnel et l’organisation scolaire138 – entre les cadres et les enseignants, mais aussi entre le haut encadrement et l’encadrement de terrain – pour mieux accompagner les évolutions attendues.
    La mobilisation de l’encadrement suppose, là encore, un discours fort sur les valeurs et le sens des évolutions attendues pour définir des buts, les partager et engager l’adhésion des acteurs du système. Elle doit pouvoir s’appuyer sur des décisions opérationnelles favorisant la mise en œuvre d’une nouvelle politique pour l’enseignement des mathématiques. 

    7.4. Un réseau de chargés de mission académique
    Il semble avant tout essentiel que l’ensemble de la chaîne de pilotage soit sensibilisé à la réalité du problème et aux leviers d’action possibles. Les recteurs, les IA-Dasen, les inspecteurs pédagogiques (IA-IPR, IEN-ET, IEN-CCPD) et les chefs d’établissement doivent être mieux informés. Ils doivent être associés à une réflexion approfondie sur l’enseignement des mathématiques.
    L’une de leurs missions consistera à faciliter la mise en cohérence des divers plans de formation (plans d’établissement ou de circonscription, départementaux, académiques et nationaux), mais également à partager des résultats et à donner des axes de réflexion pour les dialogues de gestion à tous les niveaux. Le redressement des progrès des élèves en mathématiques doit être considéré comme une priorité nationale et, à ce titre, intégrée en amont dans les leviers de pilotage.
    En termes de formation, l’encadrement pédagogique a certainement été délaissé par le passé. Il est important que les IEN et les IA-IPR soient mieux accompagnés sur la problématique de l’enseignement des mathématiques. Leur surutilisation comme vecteurs locaux des inflexions nationales successives, pédagogiques comme structurelles, a produit chez beaucoup un sentiment de dispersion et a sans doute nui à leur action d’accompagnement des enseignements disciplinaires. L’état actuel de l’enseignement des mathématiques doit conduire à recentrer l’action des personnels d’inspection sur le cœur du métier d’accompagnement des enseignants.
    Parallèlement, un travail significatif de réflexion, en commun avec les auteurs de programmes, mérite d’être mené sur plusieurs journées lors des évolutions (et pas simplement une conférence suivie d’ateliers autogérés). On pourrait mettre à disposition des IEN et des IA-IPR qui le souhaitent, des séminaires d’approfondissement de leurs connaissances mathématiques, sur des sujets à définir avec eux. Des travaux de réflexion commune avec des chercheurs en sciences de la cognition sont à développer. Toutes ces actions représentent de vrais investissements. 

    138 Derouet JL & Normand R, Évaluation, développement professionnel et organisation scolaire, Revue française de pédagogie, 2011.


    Par ailleurs, compte tenu des transformations souhaitées par ce rapport en ce qui concerne la formation continue des enseignants de mathématiques vers une meilleure prise en compte de la formation entre pairs et d’interventions plus « horizontales » et moins « verticales », les inspecteurs et les formateurs doivent eux-mêmes être accompagnés (depuis les prescripteurs des plans de formation jusqu’aux conseillers pédagogiques et aux professeurs formateurs académiques, en associant aussi les inspecteurs et les chefs d’établissement). 

    À titre de première expérimentation, la mission recommande : 


    •   de mettre en place un suivi soutenu, non intrusif, des pratiques d’enseignement des mathématiques dans tous les CP et CE1 en REP+, en encourageant les initiatives des circonscriptions et des départements ;
    •   de suivre la mise en place opérationnelle des laboratoires de mathématiques en lien avec les référents et les acteurs de l’enseignement supérieur ;
      de rassembler des données d’observations sur les pratiques, la formation, l’accompagnement, les résultats intermédiaires ;

    •   d’étudier les données obtenues en lien avec des chercheurs spécialisés sur ces questions (leadership, développement professionnel, accompagnement, évaluation des élèves) et de les mettre à disposition de tous ;
    •   de conduire un séminaire national annuel pendant au moins trois ans ;
    •   de publier des actes annuels.
      Cet ensemble de recommandations constituerait une façon de tester, à grande échelle, la capacité de la mission nationale à animer le réseau envisagé, en lien avec les acteurs de terrain, en valorisant l’autonomie et la responsabilité.
      Par ailleurs la mission recommande d’implanter un réseau de chargés de mission académique, animé par un responsable national, expert de haut niveau rattaché à la Dgesco. Ce réseau doit être installé dans chaque académie, au plus tard à la fin de l’année civile 2018. Le but est d’apporter plus de cohérence à toutes les actions concernant l’enseignement des mathématiques, de la maternelle aux classes terminales.
      Il est important que les mondes universitaire et de la recherche soient impliqués dans ce réseau via les laboratoires de mathématiques. C’est ainsi que, dans chaque académie, on pourrait avoir un correspondant « mission Mathématiques » dans l’un des laboratoires de mathématiques dans lesquels le CNRS intervient ; on pourrait ainsi envisager un chargé de mission dédié au suivi, correspondant du responsable national rattaché à la Dgesco. 

    7.5. Évaluation du processus
    Des protocoles d’évaluation des méthodes139 ont déjà été mis en place dans de nombreux pays, notamment anglo-saxons. Dans certains pays, les organismes de formation sont eux- mêmes évalués et font l’objet d’accréditations à durée limitée. On peut envisager de telles démarches, mais il faudrait disposer, pour cela, d’organismes idoines qui ne soient pas partie prenante des actions évaluées. 

    139 Par exemple : New Jersey Assessment of Skills and Knowledge (NJ ASK), Spring 2009 et 2010, conduit par le Educational Research Institute of America.


    Une première évaluation générale des procédures engagées, et de leur efficacité suite à ce rapport, devra être menée d’ici trois ans par des laboratoires indépendants, nationaux ou internationaux. 

    RECOMMANDATIONS 


    1. Priorité nationale [M17]
      Inscrire les mathématiques comme une priorité nationale en mobilisant tous les

      acteurs de la chaîne institutionnelle (recteurs, cadres, formateurs, enseignants). 

    2. Expert de haut niveau en mathématiques [M18]
      Créer un poste d’expert de haut niveau en mathématiques : responsable du suivi et de la mise en œuvre des préconisations de ce rapport au niveau national, il s’appuiera sur un réseau de chargés de mission académiques. Une évaluation de la mise en œuvre de ces mesures sera effectuée dans trois ans. 

    3. CP et CE1 en Rep+ [M2]
      Inclure, dès septembre 2018, les mathématiques dans la priorité nationale décrétée en Rep+ pour les CP et CE1 à 12 ; étendre cette mesure à l’ensemble des Rep en 2020. 

    4. Désigner, dans chaque académie, un chargé de mission responsable de la mise en œuvre des préconisations du présent rapport. 

    5. Promouvoir l’évaluation des écoles et des établissements dans une approche systémique, reliant auto-évaluation, évaluation externe (bâtie sur l’échange avec toutes les catégories d’acteurs de la communauté éducative) et dialogue stratégique. 

    6. Constituer une agence de la formation, chargée d’évaluer la qualité de la formation initiale, de la formation continue et de l’animation territoriale, et de publier chaque année un rapport assorti de recommandations.






    ANNEXE 1 : LES MEMBRES DE LA MISSION 

    Cédric VILLANI, député
    Cédric Villani est un mathématicien français, ancien élève de l’ENS et docteur en mathématiques, titulaire 2010 de la Médaille Fields et lauréat 2014 du prix Doob. Professeur de l’université de Lyon, il a été professeur-invité d’universités étrangères et directeur de l’Institut Henri Poincaré de 2009 à 2017, il est député de l’Essonne. Il siège à la commission des Lois et préside l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques. Membre de l’Académie des sciences, il a publié plusieurs ouvrages dont « Théorème Vivant » traduit en 12 langues. 

    Charles TOROSSIAN, inspecteur général de l’éducation nationale
    Après des études à l'ENS, Charles Torossian soutient une thèse en théorie des groupes en 1991, puis une habilitation à diriger des recherches en 2001. Chercheur au CNRS entre 1991 et 2009, ses travaux portent sur les espaces symétriques généraux et la quantification formelle (associateur Alekseev-Torossian). Nommé inspecteur général en 2009, président du jury de l'agrégation externe (2012-2015), il est chargé du développement des programmes de licence en Chine (IFC), du segment bac-3+3 et de l'action périscolaire (Cap'Maths, programme MathC2+, Olympiades). 

    Dorothée BADINIER, directrice d’école
    Dorothée Badinier a suivi un cursus bilingue puis, suite à l’obtention d’une maîtrise d’anglais, a poursuivi sa formation aux États-Unis. Elle est fortement intéressée par les systèmes éducatifs anglo-saxons. Professeure des écoles, puis directrice, elle a été membre et animatrice au sein de l’Association pour la pédagogie explicite (APPEx) jusqu’en 2014. Elle est auteure d’ouvrages de mathématiques pour le premier degré (éditions La librairie des écoles). 

    Marie-Ange BALLEREAU, professeure de collège
    Marie-Ange BALLEREAU est professeure de mathématiques en collège. Formatrice académique, elle intervient dans la formation initiale des professeurs stagiaires à l’Espe, ainsi que dans la formation continue. Elle a été chargée de mission auprès de l’Inspection et est membre de jury de concours de recrutement des professeurs. 

    Valérie BERTHÉ, directrice de recherche
    Valérie Berthé est directrice de recherche au CNRS au sein de l’IRIF (Institut de recherche en informatique fondamentale - université Paris-Diderot). Ancienne élève de l’ENS, agrégée de mathématiques, titulaire d’une thèse et d’une habilitation à diriger les recherches, elle a été chargée de mission au CNRS pour les relations entre mathématiques et informatique. Elle est vice- présidente en charge des publications de la Société mathématique de France. 

    Michel BOUCHAUD, proviseur honoraire
    Après avoir enseigné les mathématiques pendant quatorze ans en lycée et en IUT, il devient personnel de direction en 1990. Proviseur depuis 1993, il dirige successivement les lycées Blanqui à Saint-Ouen, Parc de Vilgénis à Massy, Faidherbe à Lille, Montaigne à Bordeaux, puis Louis-le- Grand. Il a siégé, entre autres, au CA de la Conférence des grandes Écoles, au Comité de pilotage du dispositif Admission-postbac et au Haut comité pour l’éducation, l’emploi et l’économie. 

    Michèle DRECHSLER, inspectrice de l’éducation nationale
    Michèle Drechsler est déléguée académique au numérique adjointe chargée de l'innovation et de l'expérimentation (académie de Nancy-Metz). Docteur en sciences « info-com » et titulaire d'un master 2 « Communautés virtuelles et management de l’intelligence collective via les réseaux numériques », elle développe de nouveaux dispositifs de pilotage de la formation intégrant les organisations apprenantes, visant le développement professionnel des enseignants et des cadres.

    Pascal DUPRÉ, professeur des écoles honoraire
    Pascal Dupré a été instituteur puis professeur des écoles dans le Loiret jusqu’en 2015. Membre du conseil d’administration du Groupe de réflexion interdisciplinaire sur les programmes (Grip) depuis 2005, il a été coordonnateur du réseau SLECC (Savoir lire écrire compter calculer) de 2007 à 2010. Il est auteur de manuels de mathématiques et de grammaire pour le primaire. 

    Alice ERNOULT, professeure de lycée
    Alice Ernoult est professeure de mathématiques en classe préparatoire économique et commerciale au lycée François 1er du Havre. Elle a été membre du jury de l’agrégation externe de sciences économiques et sociales de 2014 à 2017. Depuis juin 2017 elle est présidente de l’Association des professeurs de mathématiques de l’enseignement public (APMEP). 

    Anne KELLER, professeure de lycée
    Anne Keller enseigne les mathématiques au lycée Louis Pasteur de Lille, après 14 ans en éducation prioritaire. Formatrice académique, elle intervient au sein de l’Espe Lille Nord de France et dans la formation continue des enseignants. Elle a été membre du jury du Capes interne de mathématiques de 2014 à 2017. Auteure de manuels scolaires pour les éditions Nathan, elle participe également à différents projets éditoriaux pour le réseau Canopé. 

    Patrice LEMOINE, directeur académique adjoint des services de l’éducation nationale
    Patrice LEMOINE est directeur académique adjoint des services de l'éducation nationale à Nantes après avoir été instituteur puis coordonnateur Zep à Marseille, chargé de mission académique sur l'éducation prioritaire (Aix-Marseille), IEN premier degré à Toulon et IA-IPR établissements et vie scolaire en Alsace. Il a été membre du Conseil national de l'innovation et de la réussite éducative. 

    Christian MERCAT, professeur d’université
    Christian Mercat est professeur de didactique des mathématiques à l’université Claude Bernard Lyon1, directeur de l'Irem de Lyon, enseignant à l'Espe. Il s’intéresse à l’utilisation pédagogiquement pertinente de la technologie dans l’enseignement des mathématiques, en particulier comme outil pour ouvrir des yeux scientifiques sur le monde qui nous entoure, avec des applications à l’art, la créativité, la modélisation et les sciences de l’ingénieur. 

    Sami MUSTAPHA, professeur d’université
    Sami Mustapha soutient une thèse en mathématiques en 1994, puis une habilitation à diriger des recherches en 1999. Maître de conférences à l'université Paris VI - Pierre et Marie Curie de 1994 à 2000, il est nommé professeur à l'institut de mathématiques de Jussieu en 2000. Directeur du département du cycle d'intégration de l'UPMC entre 2010 et 2016, il est élu en 2017 doyen de la faculté de mathématiques. 

    Monica NEAGOY, formatrice
    Monica Neagoy, franco-américaine, éduquée dans le système français en Asie et aux États-Unis, a un master en mathématiques pures et un doctorat en didactique des mathématiques. Consultante internationale, formatrice et conférencière multilingue, créatrice de vidéos et de spectacles, elle est l’auteure, en anglais, de Planting the Seeds of Algebra et Unpacking Fractions. En français, elle dirige la collection Maths-Méthode de Singapour (adaptation conforme aux programmes 2016).

    Benoît PATEY, inspecteur de l’éducation nationale
    Benoît Patey a enseigné 15 ans les mathématiques et la physique chimie en lycée professionnel. Il est inspecteur de l’éducation nationale, enseignement général, mathématiques-sciences depuis 2004, et exerce dans l’académie de Lille. Il assure diverses missions académiques de promotion scientifique dont la coordination de la semaine des mathématiques. 

    Olivier PINSON, professeur de lycée
    Olivier Pinson est professeur agrégé de mathématiques dans un lycée public, à Angers. Il est l’animateur d’un groupe IREM de l’académie des Pays de la Loire qui, depuis plus de dix ans, réfléchit à l’enseignement de la discipline au lycée. Il est également formateur académique en formation continue pour les enseignants de lycée. Il possède la certification lui permettant d’enseigner l’informatique au sein de son établissement. 

    Éric SERRA, inspecteur d’académie inspecteur pédagogique régional
    Éric Serra est agrégé de mathématiques (1985), et IA-IPR de mathématiques depuis 1993 (académie de Nice). Il assure la vice-présidence du Capes de mathématiques. Il a été pendant plusieurs années correspondant académique pour l’éducation prioritaire de l’académie de Nice. Il a été auteur puis directeur de collection de manuels de mathématiques (éditions Bordas) de 1989 à 2003. 

    Halim YAHIAOUI, professeur de lycée honoraire
    Halim Yahiaoui est agrégé de mathématiques. Plus de la moitié de sa carrière de professeur s’est déroulée dans un établissement en zone d’éducation prioritaire puis dans un lycée des métiers de l’industrie (électronique, électrotechnique et maintenance industrielle). Il était simultanément chargé de cours à l’UFR de Sciences éco de l’université Paris 13, tout en animant des ateliers. 

    Expert associé : Thierry DIAS
    Thierry Dias est professeur à la Haute école pédagogique de Vaud (Suisse) et membre du comité de culture mathématiques de l’Institut Henri Poincaré (Paris). Il est titulaire d’un doctorat sur la dimension expérimentale des mathématiques et d’un master de construction des savoirs scientifiques, spécialité didactique des mathématiques, ainsi que du certificat d’aptitude aux fonctions de professeur des écoles maître formateur. Il est lauréat du Best Science Teacher 2015 European teacher award for creativity in science education. 

    Secrétaire scientifique : Michel BOURDEAU
    Michel Bourdeau est directeur de recherche émérite au CNRS. Agrégé de philosophie (1967), il a longtemps enseigné en lycée, en France et à l’étranger. Entré au CNRS en 1990, il a été rattaché au CAMS (Centre d’analyse et de mathématiques sociales ; EHESS) puis à l’IHPST (Institut d’histoire et de philosophie des sciences et des techniques ; université Paris 1).

    Secrétaire général : Bertrand CAVAYÉ
    Bertrand Cavayé est adjoint au chef du bureau des contenus d’enseignement et des ressources pédagogiques (Maf1) au sein de la mission de l’accompagnement et de la formation de la Dgesco.


    ANNEXE 2 : AUDITIONS Audition 1 (22/11 PM) : sociétés mathématiques
    •   SociétémathématiquedeFrance(SMF)
    •   Société de mathématiques appliquées et industrielles (Smai)
    •   Sociétéfrançaisedestatistiques(SFdS)
      Audition 2 (23/11 AM) : mathématiques et informatique
    •   SociétéinformatiquedeFrance(Sif)
    •   Institut national de recherche en informatique et en automatique (Inria)
    •   France international olympiad in informatics (France IOI)
      Audition 3 (23/11 PM) : éditeurs
    •   Sésamaths
    •   La librairie des écoles
    •   Éditions Hachette
    •   Éditions Nathan
    •   Éditions Retz
      Audition 4 (24/11 AM) : élèves, étudiants et parents
    •   Syndicat général des lycéens (SGL)
    •   Union nationale interuniversitaire (UNI) lycéens / étudiants
    •   Fédération des associations générales étudiantes (Fage)
    •   Fédérationdesparentsd’élèvesdel’enseignementpublic(Peep)
    •   Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE)
    •   Association des parents d’élèves de l’enseignement libre (Apel)
      Audition 5 (24/11 PM) : associations d’enseignants
    •   Union des professeurs de classes préparatoires scientifiques (UPS)
    •   Union des professeurs de physique et de chimie (UdPPC)
    •   Association des professeurs de biologie et géologie (APBG)
    •   Association nationale pour l’enseignement de la technologie (Assetec)
    •   Association nationale des professeurs d’économie et de gestion (Apag)
    •   Association des professeurs de sciences économiques et sociales (Apses)
      Audition 6 (29/11 PM) : périscolaire
    •   FondationBlaisePascal
    •   Animath
    •   Scienceouverte
    •   Maths en jeans
    •   Kangourou
    •   L’îlelogique
    Audition 7 (30/11 AM) : enseignement supérieur et recherche
    •   Académiedessciences
    •   Centre national de la recherche scientifique (CNRS)
    o Institut national des sciences mathématiques et de leurs interactions (Insmi)
    •   Conférence des grandes écoles (CGE)
    •   Conseil national des universités (CNU)
    o Section mathématiques
    o Section mathématiques appliquées et applications des mathématiques o Section sciences de l’éducation
    Sociétédesagrégés
    Audition 8 (30/11 PM) : monde de l’entreprise
    Carrefour
    Pôleemploi
    Audition 9 (01/12 AM) : startups et mathématiques grand public
    Kwyk
    EvidenceB
    LearnEnjoy
    myBleeMath
    TOPLA
    Universcience
    Maisondesmathématiques FermatScience
    Audition 10 (01/12 PM) : associations de professeurs de mathématiques
    •   Assembléedesdirecteursd’institutsderecherchesurl’enseignementdesmathématiques(Adirem)
    •   Commission française pour l’enseignement des mathématiques (CFEM)
    •   Femmesetmathématiques
    •   Association générale des enseignants des écoles et classes maternelles publiques (Ageem)
    •   Association des professeurs de mathématiques de l'enseignement public (APMEP) Audition 11 (06/12 PM)
    Inspectiongénéraledel’éducationnationale(IGEN) o Groupe de l’enseignement primaire
    o Groupe des mathématiques
    •   Conseil supérieur des programmes (CSP)
    •   Canopé
      Audition 12 (07/12 AM)
    •   Direction du numérique pour l’éducation (DNE)
    •   Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (Depp)
    •   Conseil national d’évaluation du système scolaire (Cnesco)
    Audition 13 (07/12 PM) : chefs d’établissement et partenaires périscolaires
    •   Syndicat national des personnels de direction de l'éducation nationale (SNPDEN)
    •   Association des chefs d’établissements catholiques d’enseignement du second degré sous
      contrat (Synadic)
    •   Coupdepouce
    •   ZupdeCo
      Audition 14 (08/12 AM) : syndicats d’enseignants, formation
    •   Syndicat des enseignants - union nationale des syndicats autonomes (SE-Unsa)
    •   Syndicat national des enseignements de second degré (SNES)
    •   Syndicat national des lycées et collèges (Snalc)
    •   coles supérieures du professorat et de l’éducation (Espe)
    •   Syndicat national des inspecteurs d’académie – inspecteurs pédagogiques régionaux (SNIAIPR-Unsa)
    •   Syndicat de l’inspection de l’éducation nationale (SIEN-Unsa)
    •   Syndicat national de l’éducation nationale – confédération française démocratique du travail
      (Sgen-CFDT)
    •   Syndicat national unitaire des instituteurs, professeurs des écoles et professeurs
      d’enseignement général des collèges (SNUipp)
      Audition 15 (08/12 PM) : culture mathématique
    •   La main à la pâte
    •   Les maisons pour la science
    •   Groupederéflexioninterdisciplinairesurlesprogrammes(Grip)
      Audition 16 (12/01 AM) : international
    •   MichèleARTIGUE(professeuredesuniversitésémérite)
    •   Jean CASSOU (professeur de mathématiques honoraire)
    •   JandeLANGUE(professeuràl’universitéd’Utrecht)
    •   Thierry DIAS (professeur à la Haute école de pédagogie de Lausanne)
    •   Tim GOWERS (professeur à l’université de Cambridge)
    •   BernardMANUELetÉlisabethZÉBOULON(ÉcoleactivebilingueJeannineManuel) Auditions complémentaires
    •   23 Novembre 2017, Aurélie JEAN, In Silico Veritas, Femmes, codage, entreprises
    •   6 Décembre 2017, Guillaume DUHAMEL, Benoît ROGNIER, Présentation de Edukera
    •   21 décembre 2017, Patricia SPINELLI, Nadia HAMIDI, Diane VANDAELE, Écoles Montessori
    •   4 Janvier 2018, Michel VIGIER, Dominique GAY-SYLVESTRE, Rufin KOUBI, Le Boulier Didactique
    •   11 Janvier 2018, Nicolas PELAY, Plaisir Maths
    •   11 Janvier 2018, Martine KERNEVES, Pascale MICOLEAU-MARCEL, La Finance pour Tous
    •   17 janvier 2018, Gérard SIEGEL, Le NUMY-CODE
    •   5 février 2018, Gilles ROUSSEL , Président de la CPU

    ANNEXE 3 : TABLES CROISÉES
    Table 1 (13/12 PM) : pédagogie et efficacité : quels sont les freins et les difficultés que rencontre
    l'enseignement en mathématiques ? (primaire- collège)
    •   Rémi BRISSIAUD, chercheur en psychologie cognitive
    •   Jean-François CHESNÉ, directeur scientifique du CNESCO
    •   Hervé le MADEC, professeur des écoles spécialisé (troubles à dominante psychologique)
    •   Isabelle MALET, professeure des écoles spécialisée (neurosciences, Cogni’junior)
    •   NicolasPINEL,IENpremierdegré,méthodeheuristiquedemathématiques
      Table 2 (14/12 AM) : pédagogie et efficacité : les raisons qui ont empêché d'atteindre les résultats espérés en matière de performance pédagogique ou de résultats internationaux
    •   Jean-Paul BELTRAMONE, IA-IPR de mathématiques
    •   Michel DELORD, professeur de mathématiques honoraire, Grip
    •   KarineDEVANLAY,directriced’uneécoleprivéesouscontrat
    •   Edwige GODLEWSKI, professeure d’université, Smai
    •   Yves MATHERON, professeur d’université, IFé
    •   Éric TROUILLOT, professeur de mathématiques, créateur de Mathador
      Table 3 (14/12 PM) : pédagogie et efficacité : les freins et difficultés de l'enseignement en mathématiques qui proviennent de l'organisation structurelle (collège- lycée)
    •   Roland CHARNAY, professeur honoraire de mathématiques, CSP
    •   ChristianJEANBRAU,IA-IPRdemathématiqueshonoraire
    •   Yannick LOISEA,U proviseur d’une cité scolaire
    •   Yves MATHERON, professeur d’université, IFé
      Table 3b (14/12 PM) : quelle efficacité pour la formation continue actuelle des enseignants ?
    •   MarionDESMAREST,IENpremierdegré
    •   ChristianJEANBRAU,IA-IPRdemathématiqueshonoraire
    •   LouiseNYSSEN,maîtredeconférences,directriceadjointedel’ESPEduLanguedoc-Roussillon
    •   Gaëlle PAPINEAU, professeure de mathématiques, lycée des métiers de l’hôtellerie
    •   Nelly RIZZO, secrétaire nationale du SNUipp
      Table 4 (20/12 PM) : le rôle du numérique dans l'amélioration des acquis des élèves (notamment le handicap)
    •   Sandrine BOISSEL, professeure spécialisée, conceptrice de la mallette scratch (déficients visuels)
    •   Laurent FOUCHER, professeur formateur en didactique des mathématiques, Isfec Bretagne
    •   Laetitia GRAIL, ancienne professeure de mathématiques, fondatrice de myBlee Math
    •   Véronique IZARD ,chargée de recherche, laboratoire de psychologie de la perception
    •   AnneLEFÈVRE,professeuredemathématiques
    •   Delphine SEMAIL, conseillère pédagogique départementale pour le numérique éducatif
    Table 4b (20/12 PM) : calcul : neurosciences, fondamentaux et automatismes. Les apports des neurosciences dans l'acquisition des fondamentaux et la mémorisation.
    •   Laetitia GRAIL, ancienne professeure de mathématiques, fondatrice de myBlee Math
    •   Véronique IZARD, chargée de recherche, laboratoire de psychologie de la perception
    •   Vanessa KAPLAN, directrice associée de Kiupe, jeux Math Mathews
    •   PascalROMON,maîtredeconférences,laboratoired’analyseetdemathématiquesappliquées
      Table 5 (21/12 AM) : neurosciences et acquisition des fondamentaux : les paliers annuels d'acquisition notamment du calcul (primaire - collège).
    •   DanielleBLAU,IA-IPRdemathématiques
    •   Géraud CHAUMEIL, professeur de mathématiques, auteur de « Bulles de maths »
    •   Marie-LineGARDES,maîtredeconférences,laboratoiresurlelangage,lecerveauetlacognition
    •   Franck RAMUS, professeur attaché à l’ENS, co-directeur du master en sciences cognitives
    •   Catherine THÉVENOT, professeure associée à l’université de Lausanne, DecoPsy
    •   Stanislas DEHAENE professeur au Collège de France
      Table 6 (21/12 PM) : Singapour et les autres méthodes : au regard des autres pays et expériences, quelles sont les pratiques les plus concluantes (primaire essentiellement) ?
    •   DjelikaDARBO,professeuredesécoles
    •   Marthe-Aline JUTAND, enseignante à l’université Bordeaux 2, SFdS
    •   Chantal KRITTER, formatrice à l’Espe de Créteil
    •   Marie MÉGARD IGEN, groupe du premier degré
    •   Marie-Lise PELTIER, maître de conférences en didactique des mathématiques, Ldar
    •   Reem YASSAWI, professeure au département de mathématiques, Trent University, Canada
      Table 7 (04/01 AM): périscolaire : où sont les blocages ? Le périscolaire et les projets d'établissement vis-à-vis des pratiques des professeurs. Points de blocage et leviers.
    •   Arthur CHASSANIOL, professeur de mathématiques, fondateur de Insignis
    •   Yann COGAN, professeur de mathématiques, enseignement scolaire par le jeu vidéo
    •   Thierry DIAS, professeur à la Haute école de pédagogie de Lausanne
    •   Jean-RogerRIBAUD,IA-Daasendel’Oise
      Table 8 (04/01 PM) : périscolaire : accompagnement. Le périscolaire comme accompagnement personnalisé des élèves et moteur des innovations pédagogiques.
    •   Martin ANDLER, professeur émérite, président d’Animath
    •   Alex BERASATEGUI, principal adjoint en Rep
    •   Thierry DIAS, professeur à la Haute école de pédagogie de Lausanne
    •   Bernard DUBREUIL, recteur honoraire
    •   Agnès RIGNY, ex-professeure de mathématiques, coach, Maths sans stress
    •   Dominique SOUDER, professeur de mathématiques
    Table 9 (05/01 AM) : didactique : le cours, les activités, des professeurs heureux. Quelle place pour le calcul au sens large dans la didactique/pédagogie des mathématiques ?
    •   AnneBURBAN,IGEN,groupedesmathématiques
    •   Jean-François CLAIR, professeur de mathématiques en REP+
    •   Jean-Pierre DEMAILLY, professeur d’université, Institut Fourier
    •   Thierry DIAS, professeur à la Haute école de pédagogie de Lausanne
    •   Vincent PANTALONI, professeur de mathématiques, co-auteur de Geometry Snacks
    •   Thibault STEIGELMANN, professeur de mathématiques
      Table 10 (05/01 PM) : calcul : dépolitiser le calcul, outil pour résoudre des problèmes. Enseigner par des problèmes ou des problèmes pour enseigner ?
    •   Adam BAÏZ, professeur à Sciences Po
    •   AnneBURBAN,IGEN,groupedesmathématiques
    •   Thierry DIAS, professeur à la Haute école de pédagogie de Lausanne
    •   Brigitte GRUGEON, professeure des universités en didactique des mathématiques, Espe de
      Créteil
    •   Yves POILANE, directeur de Télécom Paristech
    •   Monique TALEB, professeure de mathématiques
      Table 10b (05/01 PM) : paliers : neurosciences et acquisition des fondamentaux. Quels sont les paliers annuels d'acquisition notamment du calcul au lycée, pour préparer à l'enseignement supérieur ?
    •   Paul DARTHOS, professeur de mathématiques en lycée
    •   Alexandre FIEBIG, professeur de physique-chimie en lycée
    •   Bernard JULIA, chercheur, laboratoire de physique théorique de l’ENS Paris, QSF
    •   Nicolas TOSEL, professeur de mathématiques en CPGE
      Table 11 (11/01 PM) : Singapour et les autres méthodes. Évaluations internationales et études des pratiques les plus concluantes. Peut-on importer des méthodes ?
    •   LaurenceCOHEN,professeuredesécoles,rédactriceenchefadjointeauxCahierspédagogiques
    •   Thierry DIAS, professeur à la Haute école de pédagogie de Lausanne
    •   Ollivier HUNAULT, IGEN, groupe du premier degré
    •   Nathalie NAKATANI, co-auteure de manuels sur la méthode de Singapour, formatrice à l’ILFM
    •   Emmanuel SANDER, professeur à l’UFR de psychologie, université Paris 8
    •   Évelyne TOUCHARD, co-auteure de manuels sur la méthode de Singapour
    •   Stéphanie de VANSSAY, professeure, conseillère technique au Se-Unsa







    ANNEXE 6 : BIBLIOGRAPHIE, SITOGRAPHIE

    Les références ci-dessous complètent celles qui sont indiquées en notes de bas de pages du présent
    rapport.
    Formation initiale
    Réunion de la Société mathématique de France sur la formation en mathématiques dans les masters Meef premier degré (2017) : http://smai.emath.fr/IMG/pdf/cr_reunion_premier_degre_vf.pdf
    Réunion de la Société mathématique de France sur les parcours mathématiques des masters Meef second degré (2017) : http://smai.emath.fr/spip/IMG/pdf/2017-02-03.reunion_meef.pdf
    Éducation prioritaire
    Dossier Ifé sur les mathématiques en éducation prioritaire (2018) : http://centre-alain-savary.ens- lyon.fr/CAS/education-prioritaire/ressources/theme-1-perspectives-pedagogiques-et- educatives/travailler-sur-ce-qui-donnent-lieu-a-de-fortes-inegalites/mathematiques-en-education- prioritaire/reportage-argenteuil/apprendre-les-mathematiques-en-resolvant-des-problemes-en- education-prioritaire
    Équipement
    Thierry Dias, Manipuler et expérimenter en mathématiques, Éditions Magnard, 2017 Programmes
    Quatre sociétés savantes de mathématiques et d'informatique font des propositions pour le futur programme de mathématiques du lycée (2016) : http://smai.emath.fr/IMG/pdf/2016-10-maths-info- lycee.pdf
    Nombres et calculs
    Mathador : https://www.mathador.fr/territoirecalculant.html Jeux
    Nicolas Pelay, Jeu et apprentissages mathématiques : élaboration du concept de contrat didactique et ludique en contexte d’animation scientifique (2012) : https://halshs.archives-ouvertes.fr/tel- 00665076/document
    Les mathématiques du bridge, sous la direction de Michel Gouy. Editions Pole,CRDP, Nord -Pas de Calais, 2013
    Les jeux vidéo (2012) : http://www.educ-revues.fr/ARGOS/AffichageDocument.aspx?iddoc=44855 Numérique
    Impact de l’utilisation des tablettes dans l’enseignement (2015) :
    http://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/2331186X.2015.1127308
    Le modèle SAMR : https://www.ac-paris.fr/portail/jcms/p2_1501626/samr-un-modele-a-suivre- pour-developper-le-numerique-educatif


    International et autres méthodes
    Engagement des élèves (États-Unis, 2017) : http://www.ascd.org/publications/educational- leadership/mar17/vol74/num06/Student-Engagement@-Key-to-Personalized-Learning.aspx
    Une conception universelle de l’enseignement (Nouvelle-Zélande) :
    http://inclusive.tki.org.nz/guides/universal-design-for-learning/
    L’enseignement des mathématiques en Finlande (2018) :
    https://www.linkedin.com/pulse/lenseignement-des-mathématiques-en-finlande-romuald- normand/?trk=v-feed
    Rapport de l’éducation Endowment Foundation (Royaume Uni, 2017) https://educationendowmentfoundation.org.uk/public/files/Publications/Campaigns/Maths/KS2_KS 3_Maths_Guidance_2017.pdf
    Lee Pen Yee- Lee Nghan Hoe. Méthode de Singapour. Enseigner les mathématiques au primaire, Édition française 2016. La Librairie des écoles, édition originale2009, McGraw-Hill Education
    Maria Montessori, Psycho géométrie, Ed. Desclée de Brouwer, 2011, édition originale 1934 Constats et recommandations, stratégies
    Les quatre piliers de l'apprentissage de S. Dehaene : http://parisinnovationreview.com/article/les- quatre-piliers-de-lapprentissage-stanislas-dehaene (2013)
    Note de l’OCDE sur l’enseignement des mathématiques pour des sociétés innovantes :
    http://oecdeducationtoday.blogspot.fr/2014/10/maths-education-for-innovative- societies.html?utm_content=bufferbc380&utm_medium=social&utm_source=twitter.com&utm_ca mpaign=buffer
    Mathématiques clefs de lecture des résultats Timss 2015, Depp, Education & Formation, n°94, sept. 2017 : http://cache.media.education.gouv.fr/file/revue_94/44/2/depp-EF94-2017- mathematiques-resultats-TIMSS-2015_819442.pdf
    Stratégie nationale de culture scientifique technique et industrielle (2017), ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation http://www.enseignementsup- recherche.gouv.fr/cid113974/la-strategie-nationale-de-culture-scientifique-technique-et- industrielle.html
    Les défis de l’enseignement des mathématiques dans l’éducation de base, Unesco (2011) : http://unesdoc.unesco.org/images/0019/001917/191776f.pdf
    Tribune individuelle : http://micheldelord.info/nt-06.pdf
    Auguste Sejan, Trois jours de réflexion, The BookEdition.com, 2017
    Pédagogie
    Rétroaction http://www.formapex.com/telechargementpublic/appyf2014a.pdf?utm_campaign=cosc hedule&utm_source=twitter&utm_medium=carnetsdeprof
    Carte mentale sur la rétroaction https://www.mindmeister.com/fr/765675479?t=W2JzVIaCm7 Classe inversée : http://www.interactive-maths.com/blog/mathster-review
    Le statut de l'erreur, Jean-Pierre Astolfi https://fr.calameo.com/read/000302261601a643fdad4
    Rapport de l’OCDE : Critical Maths for Innovative Societies, the role of metacognitive pedagogies (2014) http://www.keepeek.com/Digital-Asset-Management/oecd/education/critical-maths-for- innovative-societies_9789264223561-en#.WnmLf2fz_wQ#page1
    Travaux de Barak Rosenshine (Principles of instruction - Research-based strategies that all teachers should know, 2012) : https://headguruteacher.files.wordpress.com/2017/06/rosenshine-2.pdf
    Inégalités
    Pour une école riche pour tous les élèves, avis au ministre de l’éducation, du loisir et du sport (Canada, 2017) : http://cse.gouv.qc.ca/fichiers/documents/publications/Avis/50-0500.pdf




    ANNEXE 7 : LETTRE DE MISSION