février 13, 2015

Informations Marine et Aviation Janvier 2015 (Enfin le Rafale !)

L'Université Liberté, un site de réflexions, analyses et de débats avant tout, je m'engage a aucun jugement, bonne lecture, librement vôtre. Je vous convie à lire ce nouveau message. Des commentaires seraient souhaitables, notamment sur les posts référencés: à débattre, réflexions...Merci de vos lectures, et de vos analyses.

 (© DASSAULT AVIATION)



Sommaire: 


A) - La vente de Rafale et d’une FREMM à l’Egypte confirmée par DCNS Dassault Aviation

B) -  Un nouveau navire logistique pour les Australes et l’Antarctique - Mers australes





La FREMM Normandie © MER ET MARINE - VINCENT GROIZELEAU


A) - La vente de Rafale et d’une FREMM à l’Egypte confirmée

C’est un contrat aussi inattendu qu’important pour l’industrie française. Hier soir, François Hollande a confirmé la vente à l’Egypte d’une frégate multi-missions et d’avions de combat Rafale. Le président de la République a annoncé que le contrat serait signé lundi 16 février, au Caire, par le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian. Estimé à 5.2 milliards d’euros, il a été négocié en quelques mois seulement, les premières discussions remontant à septembre dernier. Initialement, l’Egypte aurait souhaité une seconde FREMM et un lot plus important de missiles mais la facture, dépassant 7 milliards d’euros, était trop élevée.
 
Une commande de quatre à six corvettes déjà signée en 2014
D’autant que 2014 avait déjà été marquée par un important contrat entre les deux pays, la marine égyptienne passant commande à DCNS de quatre corvettes du type Gowind 2500 pour plus d’un milliard d’euros. La tête de série est livrable à l’été 2017 par le site DCNS de Lorient, les trois autres devant être réalisées en Egypte via un transfert de technologie. Le contrat est, par ailleurs, assorti d’une option pour deux unités supplémentaires, prévues pour être construites en France.

Ces bâtiments de 102 mètres et 2700 tonnes en charge seront notamment équipés de missiles surface-air VL Mica et de missiles antinavire Exocet MM40, de torpilles MU90, d’un canon de 76mm, d’un système de combat SETIS, d’un radar tridimensionnel (probablement un SMART-S), de lance-leurres Sylena ainsi que de sonars Kingklip et Captas 2.

Gowind 2500 (© DCNS)


La frégate Normandie va changer de nationalité
S’y ajoutera donc une FREMM, bâtiment nettement plus imposant avec ses 142 mètres et 6000 tonnes. Dotée d’un radar multifonctions Herakles, d’un sonar de coque et d’un sonar remorqué (Captas 4), ainsi que d’un système SETIS, cette frégate mettra en œuvre des missiles surface-air Aster 15, des missiles antinavire Exocet MM40, un canon de 76mm, des torpilles MU90 et un hélicoptère. Elle devra être livrée dès cet été afin de répondre à la volonté du président égyptien d’en disposer pour conduire la revue navale allant marquer début août la fin des travaux d’élargissement du canal de Suez. Les délais étant trop courts pour une construction neuve, il a été décidé de prélever la Normandie, seconde FREMM française, qui devait être livrée fin 2014 à la Marine nationale. Le bâtiment, actuellement à quai à Lorient, va être modifié par DCNS pour répondre aux besoins et standards égyptiens. Les lanceurs Sylver A70 conçus pour accueillir 16 missiles de croisière MdCN seront en outre débarqués, cet armement n’étant pas vendu. L’un des grands enjeux enjeu de la FREMM égyptienne sera la formation de son futur équipage, qui sera probablement menée sous la houlette de DCI Navfco. La société s’appuiera sans nul doute sur les marins français, qui ont mené à bien, pendant plus d’un an, l’armement et la montée en puissance de la frégate, aux côtés des équipes de DCNS.

La FREMM Normandie (© DCNS)


La Marine nationale se réorganise
Ce prélèvement d’un bâtiment qui allait intégrer la flotte française va imposer à la Marine nationale et à DCNS de se réorganiser. Concernant les marins, l’équipage de la Normandie sera basculé sur la Provence, actuellement en essais et dont la livraison est prévue en fin d’année. Quant à celui de la Provence, il sera transféré sur la Languedoc, qui est en achèvement à flot après sa mise à l’eau à Lorient en octobre dernier. Afin de disposer au plus vite d’un noyau de deux FREMM à Brest, où les frégates ont pour mission prioritaire de protéger les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins, la Provence remplacera la Normandie à la pointe Bretagne, alors qu’elle devait rejoindre Toulon pour succéder au Montcalm. Puisque la base navale varoise devra attendre 2017 pour voir arriver sa première FREMM, en l’occurrence la Languedoc, il a été décidé de prolonger le Montcalm d’au moins un an, sachant que cette unité devait être retirée du service en 2016. Une mesure similaire pourrait être adoptée pour le Jean de Vienne, la seconde frégate varoise du type F70 ASM. Tout dépendra en fait du rythme de livraison des FREMM suivantes. Interrogé en début de semaine par Mer et Marine, le chef d’état-major de la marine, l’amiral Rogel, a indiqué que des assurances avaient été prises auprès de DCNS pour qu’en cas de vente de la Normandie, la cadence de production des FREMM soit accélérée. Avec, comme objectif, que quatre frégates de ce type soient livrées d’ici la fin 2016 et six d’ici la fin 2018.

La FREMM Normandie (© MER ET MARINE - VINCENT GROIZELEAU)


Modernisation et bond capacitaire
Grâce à la « future ex-Normandie » et aux Gowind, la marine égyptienne va profondément moderniser ses forces navales. Son corps de bataille est en effet très vieillissant avec six anciennes frégates américaines, quatre O.H. Perry mises en service en 1981 et 1982, ainsi que deux Knox datant de 1973 et 1974. S’y ajoutent deux unités chinoises du type Jianghu I, livrées en 1984 et 1985, ainsi que deux anciennes corvettes espagnoles du type Descubierta, opérationnelles depuis 1984. Les nouveaux bâtiments vont permettre à l’Egypte de renforcer significativement sa puissance navale dans la région, tant pour des questions géopolitiques que militaires, la sécurité des approches maritimes du pays, garantissant le libre accès au canal de Suez, étant une impérieuse nécessité (le canal constitue l’une des principales ressources de l’Egypte). On notera que la FREMM et les Gowind, très polyvalentes, vont permettre à la marine égyptienne de disposer de capacités anti-sous-marines de premier ordre. Un domaine de lutte considéré comme crucial par Le Caire, qui a aussi passé commande à l’Allemagne de deux sous-marins du type 209, dont la livraison est attendue à partir de 2016 (l’accord a été conclu entre Berlin et Le Caire en 2011).



Premier contrat export pour le Rafale
Le contrat qui va être signé entre la France et l’Egypte va également constituer la première commande export du Rafale. Un succès attendu depuis longtemps par Dassault Aviation et ses partenaires, à commencer par Thales, Safran et MBDA. Mais aussi 500 entreprises sous-traitantes pour un programme générant quelques 7000 emplois. En service depuis 2001 dans l’aéronautique navale et depuis 2006 dans l’armée de l’Air, l’avion de combat français a largement fait ses preuves sur les théâtres d’opérations, de l’Afghanistan à l’Irak, en passant par la Libye et le Mali. Unique en son genre, cet appareil totalement polyvalent, qui se substitue à 7 types d’avions dans les armées françaises, peut remplir tout type de missions : frappe au sol avec des bombes à guidage laser, des missiles AASM et des missiles de croisière, attaque antinavire avec l’Exocet AM39, défense aérienne avec les missiles Mica IM et ER, bientôt complétés par le Meteor, et même frappes nucléaires avec l’ASMPA. Doté d’une nacelle de désignation d’objectif et d’un canon de 30mm, le Rafale est également apte aux missions de reconnaissance grâce au pod Reco NG, ainsi qu’au ravitaillement en vol d’autres appareils. Continuant à évoluer au fil du temps, avec de nouveaux équipements, les derniers modèles intègrent le radar à antenne active RBE2 AESA. Salué par les forces aériennes et les marines étrangères (notamment l’US Air Force et l’US Navy) comme un appareil exceptionnel aux capacités remarquables, le Rafale n’avait jusqu’ici jamais été vendu à l’export. Après les échecs rencontrés en Asie dans les années 2000, qui s’expliquent logiquement par l’intérêt des pays concernés à se placer sous la protection américaine, l’occasion ratée au Maroc, dont la faute revient probablement à l’Etat, avait été mal vécue. Quant au Brésil, les annonces bien trop prématurées du président de l’époque, Nicolas Sarkozy, n’ont fait qu’accentuer le sentiment d’un grave revers commercial. Pourtant, les Brésiliens, en choisissant finalement le Gripen NG, moins onéreux mais loin d’offrir les mêmes capacités que son concurrent français, ont pris une décision assez « sage »,  le petit chasseur suédois étant à la vérité bien suffisant pour des forces aériennes qui ne sont pas amenées à se projeter sur de grands théâtres internationaux.

Rafale Marine sur le Charles de Gaulle (© MARINE NATIONALE)


Les négociations s’éternisent avec l’Inde
Pour le Rafale, la première bonne nouvelle est arrivée en janvier 2012 lorsqu’il a remporté l’appel d’offres lancé par l’Inde pour un programme de 126 avions. Le « contrat du siècle », évalué à quelques 20 milliards de dollars, pour lequel les négociations se poursuivent mais s’éternisent, ce qui suscite quelques inquiétudes. Les discussions, difficiles, portent sur les aspects liés au transfert de technologie, 108 des 126 appareils devant être réalisés localement, où il convient de réunir les compétences et savoir-faire nécessaires. Dassault espère que cette commande géante sera notifiée d’ici 2016. Au-delà de l’Inde, il y a également différents prospects, comme les Emirats Arabes Unis, avec là aussi des négociations complexes depuis 2009, ou encore le Qatar, avec lequel les échanges sont en cours.

Conjonction de facteurs conduisant au succès
En devenant le premier client international du fleuron de l’aéronautique militaire française, l’Egypte (qui utilise des avions de Dassault depuis les années 70 avec le Mirage 5, l’Alpha Jet et le Mirage 2000) incitera peut être d’autres pays à lui emboiter le pas. C’est en tous cas ce qu’a espéré hier François Hollande. Le chef de l’Etat a redit le besoin urgent de l’Egypte à se doter de moyens lui permettant d’assurer sa défense face aux menaces auxquelles elle est confrontée. Une exigence à laquelle la France a répondu avec des matériels qui ont séduit le maréchal Abdel Fattah al-Sissi. Au-delà des excellentes relations entre Paris et Le Caire, la dimension politique étant essentielle dans ce type de marché, il faut dire qu’en ce qui concerne le Rafale, l’avion français a marqué des points ces derniers temps. Il y évidemment ses performances en opérations, mais aussi les difficultés que des pays du Moyen-Orient ont eu avec les Etats-Unis pour utiliser du matériel américain dans des opérations n’ayant pas l’assentiment de Washington. D’après certains observateurs, il en a résulté la conviction, dans plusieurs capitales arabes, que faire affaire avec les Français était un atout en matière de souveraineté. A ces éléments positifs s’ajoute l’engagement de Jean-Yves Le Drian, unanimement salué par les industriels, pourtant rarement du même bord politique, comme un ministre extrêmement actif dans le soutien à l’export. La France récolte aussi les fruits de plusieurs décennies de coopération avec de nombreux pays, y compris en matière de formation. Ainsi, plusieurs générations d’officiers ont appris leur métier avec les armées françaises et arrivent aujourd’hui à des postes de haute responsabilité. C’est donc un ensemble de facteurs qui contribue aux succès commerciaux.

Chaine de production Rafale (© DASSAULT AVIATION)


Compenser la baisse des livraisons aux forces françaises
Pour la France, les ventes de Rafale à l’export sont en tous cas une priorité et, avec le retard de la conclusion du programme indien, la signature d’un contrat avec l’Egypte est une incroyable aubaine pour l’industrie et l’Etat. Afin de respecter financièrement la loi de programmation militaire (2014-2019), le ministère de la Défense avait en effet anticipé les succès à l’export. Ainsi, à compter de 2016, il est prévu de réduire les livraisons de Rafale aux forces françaises, soit 6 appareils par an au lieu de 11, seuil limite sous lequel Dassault Aviation assure ne pouvoir descendre. Pour assurer le différentiel, il était prévu qu’environ 5 avions soient chaque année, jusqu’à la fin de la LPM au moins, destinés à des clients étrangers. On pensait alors aux 18 Rafale indiens. Sauf que ceux-ci tardent et vont donc être opportunément remplacés dans la chaîne de production par des avions égyptiens.  On ne sait pas, pour l’heure, comment va exactement se réorganiser Dassault. Seule certitude : l’Egypte commande 24 Rafale et elle les veut très rapidement. Un étalement des livraisons sur 5 ans est-il jouable ? Faudra-t-il aller plus vite ? Quid également du plan de charge si une autre commande export vient se juxtaposer ? Faudra-t-il encore réduire les livraisons aux forces françaises ? La cadence de production peut-elle être augmentée ?  On devrait, assez rapidement, y voir plus clair.

Le malaimé enfin salué sur ses terres…
En attendant, le Rafale, qui fait depuis ses débuts l’objet en France de quantités de critiques, souvent aussi stupides qu’injustifiées, devrait normalement sortir du purgatoire. Malaimé dans un seul pays, celui qui l’a vu naître, ce superbe avion, fierté des industriels et des militaires, va peut-être, enfin, trouver grâce aux yeux du grand public et de la presse généraliste. Toujours un brin vachard, de nombreux media ne manquaient pas hier soir de lancer des piques sur le prix de l’avion et le temps qu’il aura fallu pour le vendre à l’export. Mais, dans le même temps, la bonne nouvelle et les performances du Rafale ont été unanimement saluées. C’est déjà un beau progrès… 

DCNS Dassault Aviation
© IPEV

B) -  Un nouveau navire logistique pour les Australes et l’Antarctique 


La Marine nationale et les Terres Australes et Antarctiques Françaises s'allient pour construire un bateau dédié à la logistique et les missions de souveraineté en océan Indien, dans les Australes et en Antarctique. « Le patrouilleur Albatros de la Marine nationale, dédié à la surveillance des eaux australes, sera désarmé en juillet prochain. Le ravitailleur Astrolabe qui effectue la desserte de la base de Dumont d’Urville en Terre Adélie  va perdre son certificat de franc-bord en 2017. Deux bateaux sortent de flotte dans notre zone d’intervention et il n’y a pas de remplaçant prévu. D’où notre idée de construire un bateau neuf qui puisse mutualiser les moyens et effectuer ces deux missions », constate Christophe Jean, secrétaire général des TAAF.


L'Albatros est retiré du service actif cet été (MARINE NATIONALE)

La zone de juridiction des TAAF est immense. Sur un gradient allant de 15°à 75° sud, elle englobe les îles subantarctiques (Crozet, Kerguelen, Saint-Paul-et-Amsterdam), les Iles Eparses (Tromelin, Glorieuses, Juan de Nova, Bassas de India, Europa) et les bases françaises de l’Antarctique (Dumont d’Urville et Concordia), ainsi que les immenses zones économiques exclusives et les aires marines protégées s’y trouvant. Outre les missions scientifiques et les programmes de conservation menés dans les aires marines protégées, la zone est hautement stratégique, tant d’un point de vue économique (pêche à forte valeur ajoutée de la légine et du thon tropical, gisement gazier dans le canal du Mozambique) que géopolitique (présence dans l’océan Indien et dans les zones polaires).



Les cinq districts des Terres Australes et Antarctiques Françaises (TAAF)

Pour surveiller cette gigantesque étendue et y assurer les missions de souveraineté aussi bien que la logistique des bases, les TAAF disposent actuellement de moyens nautiques en propre : le Marion Dufresne, qui effectue, quatre fois par an, la desserte des îles subantarctiques et, très ponctuellement (et à la demande des forces armées de la zone de l’océan Indien), celui des îles Eparses. L’Astrolabe, ancien navire offshore armé par P&O et géré par l’Institut Polaire Paul-Emile Victor, opère le ravitaillement de Dumont d’Urville au départ de Hobart durant l’été austral. S’ajoute également la Curieuse, qui passe l’été austral à Kerguelen pour y transporter les scientifiques entre les îles de l’archipel, ainsi que des petits moyens nautiques à poste à Port-aux-Français. Enfin, l’Osiris, un ancien bateau de pêche saisi en 2003 et affrété à l'année auprès du GIE Protection Légine et Ressources Halieutiques qui regroupe les armements de pêche à la légine, effectue des patrouilles de surveillance des pêches dans les Australes. Il devrait sortir de flotte en 2016.

 Le Marion Dufresne (MICHEL FLOCH)
 Le patrouilleur Osiris (STEPHANE BOMMERT)

Il y a ensuite les moyens de la Marine nationale qui a deux frégates de surveillance basées à la Réunion : le Nivôse (actuellement en cale sèche après l’incendie dont il a été victime fin septembre) et le Floréal. Ces deux bâtiments patrouillent dans l’ensemble de la zone des océans Indien et Austral. Ils ne sont pas spécifiquement dédiés à la zone des TAAF puisqu’ils participent régulièrement à d’autres missions militaires, comme par exemple l’opération Atalante de lutte contre la piraterie dans le golfe d’Aden. La marine dispose également du patrouilleur Le Malin, ancien palangrier saisi en 2004, qui effectue des missions de surveillance des pêches dans la zone Réunion/Mayotte/Eparses. Enfin, le bâtiment de transport léger La Grandière, qui devrait être désarmé en 2017, intervient ponctuellement dans cette même zone. Pour le remplacer, la Marine nationale souhaite qu'un quatrième bâtiment multi-missions (B2M) soit construit et basé à la Réunion (les trois premiers seront positionnés en Nouvelle-Calédonie, aux Antilles et en Polynésie).

 La FS Floréal (MARINE NATIONALE)
 Le patrouilleur Le Malin (MICHEL FLOCH)
Le batral La Grandière (PATRICK SORBY)

« Face à ces différentes sorties de flotte, nous avons réfléchi, avec la Marine nationale, à la meilleure solution. Nous avons constaté que le ravitaillement logistique de Dumont d’Urville occupe le bateau cinq mois par an. Il reste donc 7 mois qui peuvent  être consacrés à des missions de souveraineté et de logistique au départ de la Réunion. Nous avons, par conséquent, décidé de lancer le projet d’un navire neuf qui serait armé par des équipages de la Marine et qui effectuerait l’ensemble de ces missions ». 

Le futur navire sera acheté par les TAAF et l’IPEV, la marine fournira l'équipage et effectuera son maintien en condition opérationnelle. « Nous portons ce projet qui s’élève à 60 millions d’euros et sommes en discussions avec les banques. L’emprunt sera contracté solidairement avec l’IPEV ». Le cahier des charges de ce bateau qui devra être très polyvalent est actuellement en cours de définition, « avec l’aide précieuse de l’équipage de l’Astrolabe. Nous sommes en train de définir les exigences en termes de motorisation, de coque et de logistique pour les missions diverses qu'il aura à mener ». L’appel d’offres et le choix du chantier devrait être effectués dans l’année. Le nouveau bateau devra être à Hobart en octobre 2017.

février 12, 2015

Étude géopolitique sur la condition féminine dans le monde

L'Université Liberté, un site de réflexions, analyses et de débats avant tout, je m'engage a aucun jugement, bonne lecture, librement vôtre. Je vous convie à lire ce nouveau message. Des commentaires seraient souhaitables, notamment sur les posts référencés: à débattre, réflexions...Merci de vos lectures, et de vos analyses.



Voici la première étude géopolitique sur la condition féminine, sous la forme d’un manuel qui expose clairement une vue d’ensemble de la question. 

Présentation du livre d’Élizabeth Crémieu, Bouchra Benhida "Géopolitique de lacondition féminine", Paris, Collection Major, PUF, 2014, 204 p. ISBN-972-2-13-062130-0 

VIOLS en Inde en 2012 ou enlèvement de 200 étudiantes par Boko Haram au Nigéria en 2014, la médiatisation croissante de violences contre des femmes témoigne d’un état de la condition féminine encore difficile dans le monde, et ce, malgré le troisième objectif du millénaire du développement souhaitant « promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes ». Cette question ne se pose bien sûr pas qu’au « Sud » et se retrouve aussi dans les pays dits « développés », avec par exemple les débats récurrents sur la parité en France ou la restriction du droit à l’avortement par de nombreux états des Etats-Unis. Enfin, alors que le mouvement Femen donne une image souvent critiquée du féminisme, il semble justifié de s’interroger sur la situation des femmes aujourd’hui. Elizabeth Crémieu, agrégée de géographie et ancien professeur de classe préparatoire HEC et maitre de conférence à Sciences Po, se propose justement de dresser la géopolitique de la condition féminine dans son ouvrage, réalisé en collaboration avec Bouchra Benhida, docteur en économie et directrice de l’Institut de recherche et d’analyse en géopolitique et géoéconomie de l’ESCA (Casablanca). Lorsqu’on traite de la condition des femmes, on est au cœur d’un affrontement entre la tradition et la modernité. Elizabeth Crémieu retient deux aspects pour définir la condition féminine : les droits des femmes d’une part, c’est-à-dire droits civils, politiques, droit à l’éducation, aux soins, au travail ; et leurs conditions de vie d’autre part, plus précisément leur statut, leur relation avec les hommes, leurs libertés, etc. Malgré des progrès certains mais inachevés, le danger de recul est grand, surtout dans le contexte actuel de recrudescence des violences envers les femmes. Comme l’avait bien compris Jules Ferry en 1880, « celui qui tient la femme, celui-là tient tout » (cité p. 12). La femme est en effet à la fois marqueur identitaire et clé de la maitrise démographique. Il est important aussi de noter que « lorsqu’on traite de la condition des femmes, on est au cœur d’un affrontement entre la tradition et la modernité » (p. 14). 

Contrôler... croient-ils
Dans son ouvrage, l’auteure revient d’abord sur l’héritage universel et persistant de l’infériorité de la femme. Cet héritage, qu’on retrouve dans tous les textes fondateurs des religions mais aussi chez des penseurs comme S. Freud ou C. Levi-Strauss, se justifie par l’infériorité physique des femmes et instaure une division sexuée des tâches : aux hommes la gestion des questions productives et politiques, aux femmes celle des fonctions reproductives et domestiques. Se retrouve aussi ici la volonté des hommes de contrôler la fécondité. Préférence pour les fils, importance de la virginité, réclusion des femmes, dot, mariage précoce, prostitution, privation du droit à l’héritage, exclusion des veuves, chasse aux sorcières, violences, sont autant d’exemples cités pour illustrer la place traditionnelle de la femme soumise. La responsabilité des femmes dans la reproduction de ce modèle de génération en génération n’est enfin pas à sous-estimer. 

Les droits de vote, à l’éducation, à la protection
Elizabeth Crémieu dresse ensuite un tableau du féminisme, depuis les Lumières à aujourd’hui, en passant par les conséquences de la Révolution industrielle et celles de l’exode rural et de l’urbanisation. Les premiers mouvements féministes apparaissent en Europe et en Amérique du Nord au XIXe siècle, menés par des femmes instruites de la classe moyenne favorisée, en lien avec d’autres grandes mobilisations de l’époque comme la lutte contre l’alcoolisme, la prostitution ou l’esclavage. Une des premières revendications est le droit de vote, qui remet directement en cause « une des prérogatives essentielles des hommes : le monopole de la gestion de la cité » (S. Samouiller et K. Jabre dans Le Livre noir de la condition des femmes, cités p. 56). Le droit à l’éducation et la protection des mères font aussi partie des revendications. 

Le féminisme est multiforme : féminisme de l’égalité ou de la différence, féminisme socialiste ou libéral, « black feminism », féminisme laïque et universaliste, féminisme d’inspiration religieuse. 

Suit la deuxième vague féministe des années 1960 et 1970 avec la liberté sexuelle, la contraception et l’avortement. Les « gender studies » apparaissent également à ce moment-là. Certains parlent d’une troisième vague dans les années 1990, le féminisme « pro-porn », revendiquant la légalisation de la prostitution. L’auteure souligne que le féminisme est multiforme : féminisme de l’égalité ou de la différence, féminisme socialiste ou libéral, « black feminism », féminisme laïque et universaliste, féminisme d’inspiration religieuse. Le féminisme est également parcouru de tensions : entre femmes éduquées et populaires, entre féminisme indépendant et féminisme des ONG. Et enfin, entre féminisme du Nord et féminisme du Sud. Car le Sud aussi connaît des mouvements féministes. D’abord minoritaires et faibles dans les contextes de décolonisation, les revendications se font entendre après les indépendances qui n’ont pas amélioré la situation des femmes. Il faut aussi noter l’héritage égalitaire des sociétés communistes ou encore les avancées des dictatures modernistes. Au Nord comme au Sud, les mêmes méthodes sont utilisées : relais de la presse, manifestations, utilisation d’Internet, lobbying. Cela n’est cependant pas sans danger dans bon nombre de pays où les femmes risquent l’emprisonnement, l’exil ou parfois même la mort. Enfin, le féminisme est souvent méconnu et caricaturé. 

Dynamiques
La condition féminine a connu de grands progrès depuis 1945. D’abord, les femmes ont maintenant le droit pour elles avec des textes comme la Charte de l’ONU garantissant l’égalité des droits des femmes et des hommes. La communauté internationale s’est emparé de cette question avec, entre autres, la création d’ONU Femmes et la Convention pour l’élimination des discriminations envers les femmes (CEDAW). Le livre insiste sur le rôle important de l’intérêt politique à l’échelle nationale dans le traitement de ces questions. Cela peut même devenir un enjeu de politique étrangère comme le montre l’exemple de l’octroi par l’Arabie Saoudite du droit de vote aux femmes prévu en 2015. Cependant, le droit civil reste encore discriminatoire dans de nombreux pays. 

La santé des femmes - notamment leur espérance de vie - peut être considérée comme un révélateur de l’état d’une société et des rapports entre les sexes. 

Les progrès scientifiques ont, eux, permis la contraception, largement utilisée dans le monde (par 61% des couples aujourd’hui). Pour Françoise Héritier citée p. 96, le droit à la contraception « constitue le levier essentiel de la sortie de la domination parce qu’il porte et agit au lieu même où la domination s’est produite ». Et face à la religion, le plus souvent contre, l’impératif démographique a permis la diffusion de la contraception. L’avortement,
lui, reste un sujet brûlant et est limité dans les trois quarts des pays. La santé des femmes a également connu des progrès, même si les écarts demeurent très grands entre les pays à revenu élevé et les pays à revenu moyen ou faible. A ce titre, la santé des femmes peut être considérée comme un révélateur de l’état d’une société et des rapports entre les sexes. 

Eduquer les filles
L’éducation des filles est importante car elle a des effets multiplicateurs sur la démographie, la santé et l’économie. On note de grands progrès dans les taux de scolarisation ainsi qu’une progression de la parité dans le monde. Cependant, des écarts persistent entre Nord et Sud, où la pauvreté, la distance jusqu’à l’école, les possibles harcèlements sexuels et le faible nombre d’enseignantes sont autant de freins à la scolarisation des filles. Au Nord, on continue de noter des différences d’orientation selon les sexes. Et, malgré ces progrès, en 2008, deux tiers des analphabètes restent des femmes. Enfin, l’éducation est la première à souffrir des guerres et des crises économiques. 




Deux tiers des pauvres sont des femmes.
Le travail des femmes a également augmenté et s’est déplacé de l’agriculture vers l’industrie et les services. Les femmes souffrent encore d’une ségrégation verticale et horizontale, au Nord comme au Sud. Au Sud, le problème des emplois informels et vulnérables touche d’abord les femmes, avec une « féminisation de la survie » [1]. L’auteure rappelle d’ailleurs que deux tiers des pauvres sont des femmes. Il existe cependant un lien entre richesse, puissance et emploi des femmes, et on lie maintenant souvent la question de la croissance et du développement à celle de l’amélioration de la condition féminine. Pour les femmes aussi, travailler peut avoir des effets positifs, à l’image du cas de l’émigration de travail qui, malgré les difficultés rencontrées, constitue une libération et un gain en statut pour les femmes qui renvoient l’argent gagné au pays et font ainsi vivre leur famille. 

Pour certains, « le corps de la femme est, non pas métaphoriquement mais réellement, un territoire ennemi, jugulé, terrassé, mis à sac et à profit ». 

Pour finir, Elizabeth Crémieu décrit les menaces pesant sur les femmes. Elle note que la montée des fondamentalismes religieux, toutes religions confondues, représente aujourd’hui le plus grand danger, car ces derniers cherchent à contrôler la femme et la sexualité pour gagner le pouvoir en imposant des valeurs. La femme est en effet un marqueur de l’identité d’une société : « Dans toutes les sociétés qui se sentent menacées, ce sont les femmes qui sont chargées de conserver, de porter l’identité. Si elles veulent se libérer, c’est qu’elles sont passées à l’ennemi » (Sophie Bessis, citée p. 157). De plus, les violences contre les femmes sont en augmentation. Le fémicide est aujourd’hui la première cause de mortalité des femmes. Ces violences contre les femmes peuvent avoir des conséquences géopolitiques comme le montre l’exemple des fœticides féminins en Chine, où le manque de femmes pourrait avoir deux effets: un «nouvel enlèvement des Sabines»[2] et un enrôlement plus important des hommes dans l’armée. F. Héritier, citée p. 167, affirme que « le corps de la femme est, non pas métaphoriquement mais réellement, un territoire ennemi, jugulé, terrassé, mis à sac et à profit ». Ainsi les viols par exemple peuvent être de véritables armes politiques, notamment en temps de guerre ou de nettoyage ethnique. Ainsi, les acquis pour la condition féminine restent fragiles et menacés. Et face à cette menace que constituent les « trafiquants de Dieu » [3], Elizabeth Crémieu conclue ainsi : « La guerre est donc déclarée entre partisan(e)s de l’égalité et de la liberté des femmes et des hommes, et partisan(e)s des traditions. Cette guerre se déroule non pas entre des civilisations ou des sociétés, des Etats, ou des religions, mais au sein de chaque société, de chaque Etat, de chaque religion, et peut-être de chaque individu.» (p. 186) Cette «première étude géopolitique sur la condition féminine»[4] se présente comme un manuel et expose clairement une vue d’ensemble de la question. La construction thématique par chapitres donne parfois une impression de catalogue compilant les travaux existants sur la condition féminine. Cela a toutefois l’avantage de présenter de nombreux exemples et de renvoyer à de nombreux auteurs. La bibliographie, organisée elle aussi selon les chapitres, permet en effet de se référer facilement aux ouvrages cités. Elizabeth Crémieu semble prendre fait et cause pour les femmes, mais sait aussi reconnaître que les hommes n’ont pas tous les torts et que le patriarcat a pu avoir des effets bénéfiques, comme la protection. Elle reste cependant en retrait pour faire un exposé neutre tentant de traiter tous les aspects de la question, ne montrant son envie d’être digne de l’héritage féministe qu’à la dernière ligne. 



Géopolitique de la condition féminine
4e de couverture 

Où en est la condition des femmes ? Malgré l’influence tenace des traditions patriarcales dans une grande partie du monde, de nombreux progrès ont été accomplis depuis soixante-dix ans, que ce soit en matière de droits politiques et civils, d’accès à la contraception et à l’avortement, ou encore de droit à l’éducation et au travail. Ces avancées constituent un facteur majeur de croissance et de développement. Elles sont toutefois très inégales selon les régions du monde et constamment menacées : le fémicide reste en effet la première cause de mortalité des femmes, et ce type de violences tend aujourd’hui à se répandre. Cet ouvrage s’adresse à ceux qui veulent connaître les origines des inégalités entre les hommes et les femmes et étudier les enjeux de pouvoir qui en découlent à l’ère de la mondialisation, et en particulier aux étudiants en géopolitique et dans les IEP. 

[1] Formule de Saskia Sassen citée p.142.
[2] Formule de Gérard-Francois Dumont dans son article « Vers un nouvel enlèvement des Sabines ? » paru dans Géostratégiques, n°17, en septembre 2007, formule citée p. 171.
[3] Formule utilisée par Elizabeth Crémieu p. 186.
[4
] Présentation faite par l’éditeur en quatrième de couverture.


GEOPOLITIQUE DE LA CULTURE :
Géopolitique de la condition féminine  
Source, journal ou site Internet : diploweb
Date : 10 février 2015
Auteur : Ornella Chassagne:

Etudiante en Master I de Relations Internationales et Action à l’Etranger à l’Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Créé en 2005, le Master de Relations Internationales et Action à l’Etranger a pour vocation de préparer les étudiants à la grande variété des métiers ouverts sur la vie internationale.

L'incompétence de l'Etat et la paie des fonctionnaires. L'Etat ce n'est pas nous, l'Etat c'est eux !!

L'Université Liberté, un site de réflexions, analyses et de débats avant tout, je m'engage a aucun jugement, bonne lecture, librement vôtre. Je vous convie à lire ce nouveau message. Des commentaires seraient souhaitables, notamment sur les posts référencés: à débattre, réflexions...Merci de vos lectures, et de vos analyses.


La Cour des comptes a pointé du doigt, mercredi dans son rapport public annuel, la mise en place ratée d'un système centralisé de paie des fonctionnaires qui ne verra finalement jamais le jour. Un fiasco à 346 millions pour la Cour mais qui au total atteindrait presque un milliard.  

Décidément, l’Etat n’a pas de chance avec les logiciels. Après le fiasco du logiciel Louvois destiné à la paie des militaires dont le ministre de la Défense a annoncé la suspension après 400 millions d’euros dépensés en pure perte, c’est au tour du super logiciel de paie des 2,5 millions de fonctionnaires de l’Etat d’être pointé du doigt.

Dans son rapport annuel rendu public ce mercredi 11 février, la Cour des comptes s’est attardée sur ce nouveau fiasco qui devrait coûter selon elle 346 millions d’euros. En fait, selon le Sénat, la note finale devrait avoisiner le milliard.

500 personnes mobilisées

Lancé en 2007 pour une mise en service espérée en 2017, « SI-Paye », son nom administratif, été mis en sommeil discrètement au printemps dernier par le gouvernement. Près de 500 personnes ont pourtant travaillé sur ce projet durant cinq ans.

« Si l’on intègre l’adaptation des logiciels de paie des différents ministères, alors le coût total de ce programme qui ne verra jamais le jour « serait proche d’un milliard d’euros », écrivaient deux sénateurs, l’UMP Michel Bouvard et le PS Thierry Carcenac, dans un récent rapport parlementaire.

De son côté, la député socialiste Karine Berger notait dans son rapport sur les crédits 2015 de Bercy que la décision du gouvernement d’arrêter les frais « évite près de 200 millions d’euros de dépenses budgétaires pendant les quatre prochaines années ».

1.700 primes différentes à intégrer

Au départ, les intentions gouvernementales étaient pourtant louables. Il s’agissait de remplacer les 8 services de paie des ministères dotés chacun de leur spécificité par un opérateur public unique disposant d’un logiciel performant. A terme, l’Etat espérait réaliser 200 millions d’euros d’économies par an, en supprimant 6.000 des 10.000 emplois de fonctionnaires affectés à la paie des agents.

Mais les initiateurs du projet ont vu trop grand. Le futur logiciel était visiblement trop complexe à manier. Certains ministères, comme l’Agriculture, n’arrivaient même pas à se connecter au nouveau système. « SI-Paye » devait par exemple calculer directement le montant des 1.700 primes des fonctionnaires alors que celles-ci dépendent de chaque ministère, une prérogative à laquelle aucun n’entend renoncer.

Selon le directeur interministériel des systèmes d’information de l’Etat, Jacques Marzin, le logiciel n’aurait pas pu être vraiment opérationnel avant….2023.  » Un projet interministériel dont la durée est prolongée de sept à huit ans devient un objet dont la bonne fin est extrêmement aléatoire », concédait-il en terme tout administratif devant le Sénat en mai dernier

Chorus, le logiciel qui fonctionne…

Les projets informatiques coûtent toujours cher à mettre en oeuvre. Ainsi d’un autre projet, Chorus, le logiciel de la comptabilité de l’Etat qui est entré progressivement en service depuis 2008. Toujours selon la députée socialiste Karine Berger, le coût global du projet atteint 995 millions d’euros. Bonne nouvelle toutefois, le coût initial était estimé à 1,1 milliard.

Mais ses deux collègues sénateurs UMP et PS sont plus dubitatifs. « Si le déploiement de Chorus est aujourd’hui terminé, la question du retour sur investissement reste entièrement posée », écrivent-ils dans leur rapport budgétaire. La Direction des systèmes d’information et de communication placée auprès de Matignon doit « améliorer considérablement le pilotage des chantiers informatiques de l’Etat », ajoutent-ils. On ne saurait mieux dire.

Source:
  • Contribuable Associés
Observatoire des gaspillages

Comment l’Etat a perdu 1 milliard avec la paie des fonctionnaires



février 07, 2015

La Liberté et l'automobile en question, " la vache à lait de l'Etat " !

L'Université Liberté, un site de réflexions, analyses et de débats avant tout, je m'engage a aucun jugement, bonne lecture, librement vôtre. Je vous convie à lire ce nouveau message. Des commentaires seraient souhaitables, notamment sur les posts référencés: à débattre, réflexions...Merci de vos lectures, et de vos analyses.



 Sommaire: 

A) -  La guerre contre les automobilistes : destructrice et immorale par Pascal Salin

B) - Le trafic automobile vu sous l'angle libertarien - Wikiberal par Pierrot de la Luna

C) -  Les mythes de l'insécurité routière par Bertrand Lemennicier

D) - Citations de Pascal Salin et Faré



A) -  La guerre contre les automobilistes : destructrice et immorale

Pour illustrer les absurdités des décisions publiques  de  son  époque,  le  grand économiste  français  du  début  du  XIXe siècle, Frédéric Bastiat, prenait l’exemple de la construction à grands frais d’une ligne  de  chemin  de  fer  entre  Paris  et Bruxelles  afin  de  faciliter  les  transports  de personnes et de  marchandises. Mais une fois la ligne achevée, l’Etat engage de  nouvelles  dépenses  pour  entretenir des  douaniers  chargés  d’empêcher  ou de  freiner les  échanges  de  marchandises. Si Frédéric Bastiat était encore en vie, la période actuelle lui fournirait bien des exemples d’absurdités de ce genre.

Ainsi,  les  gouvernements  français  sont généralement  soucieux  de  maintenir l’activité  de  la  production  d’automobiles,  comme  en  témoigne  l’absurde « prime  à  la  casse »  décidée  en  2010.

Cette mesure a certes stimulé les achats de  voitures  pendant  une  courte  période,  mais  le  rajeunissement  du  parc automobile  qui  en  a  résulté  conduit maintenant à une diminution des achats et  a  essentiellement  eu  pour  conséquence  d’introduire  de  l’instabilité  dans la  production  d’automobiles.  Toujours est-il  que,  parallèlement  à  ce  désir  de maintenir  ou  d’accroître  la production  d’automobiles,  les  gouvernements inventent une série de mesures destinées  à  décourager  les  automobilistes et à les inciter à renoncer à l’usage de la voiture. Ces mesures sont  bien  connues,  qu’il  s’agisse  du permis à points, des contrôles radars, mais  aussi  de  décisions  plus  ponctuelles comme celle qui, à Paris, consiste à supprimer la voie sur berge sur la rive gauche de la Seine de manière à créer des embouteillages censés être dissuasifs pour les automobilistes.

On veut donc produire des voitures, mais on veut dissuader les individus de les utiliser et donc de les acheter ! Les gouvernements sont ainsi victimes d’une erreur intellectuelle fréquente : celle qui consiste à se focaliser sur la production et à ignorer ou mépriser les besoins humains.

Or les êtres humains sont tous confrontés au même problème, celui de la rareté du temps. Ils sont par ailleurs des êtres sociaux, c’est-à-dire qu’ils vivent grâce à leurs rapports les uns avec les autres. Mais aller au-devant d’autrui, aussi bien pour des échanges commerciaux qu’affectifs, cela demande du temps et il est donc rationnel de chercher à réduire le plus possible le temps occupé aux déplacements. C’est bien pour cela que l’automobile a été inventée et on doit la saluer comme l’une des plus grandes réussites de l’esprit humain dans l’Histoire de l’humanité.

L’automobile est un extraordinaire instrument de développement économique parce que le progrès n’est pas possible si l’on ne recourt pas à l’échange; or, l’usage de l’automobile facilite les échanges et, en économisant le temps, il permet aux êtres humains de se consacrer davantage à d’autres tâches productives.

L’automobile est par ailleurs un extraordinaire instrument de liberté parce qu’elle permet à chacun de se déplacer à n’importe quel moment et rapidement.

Mais c’est peut-être, malheureusement, parce qu’elle est un instrument de liberté individuelle que l’automobile déplait à tous les législateurs et règlementeurs qui veulent contrôler la vie des autres, ce qui les conduit par exemple à affirmer qu’il faut donner la priorité aux transports en commun. Pourtant, les transports en commun ne donneront jamais à leurs utilisateurs les satisfactions que procure le véhicule  individuel.

Celui-ci est une sorte de petit abri où se retrouve la famille; il donne une incomparable souplesse pour effectuer toutes les activités que l’on peut prévoir dans une journée en des lieux fort divers; il permet de transporter facilement  tous les objets dont on a besoin. Freiner l’usage de la voiture individuelle représente donc un coût considérable pour les individus et les familles.

Certes, il existe bien des arguments pour justifier les limitations apportées à la liberté de conduire. Faute de pouvoir examiner en détail tous ces arguments, considérons celui de la sécurité. Celle-ci est accrue, par exemple, par l’aménagement des voies de circulation, les progrès techniques dans l’automobile, la diminution de l’alcoolisme au volant, etc.

Mais les autorités publiques donnent un rôle prioritaire à la vitesse. On peut  évidemment admettre que les accidents sont d’autant plus sérieux que la vitesse des véhicules est plus importante.

Mais, comme dans la plupart des décisions humaines, on ne peut pas se contenter d’un seul critère de décision et il faut mettre dans la balance plusieurs critères qui  peuvent jouer en sens inverse.

Ainsi, le critère du gain de temps conduit à rechercher une vitesse élevée, tandis que le critère de la sécurité incite à modérer la vitesse. Comment arbitrer entre ces deux exigences ? Il ne peut pas y avoir de réponse objective car la détermination d’une vitesse optimale relève normalement des préférences des êtres humains. Le  problème n’est donc pas de savoir s’il faut arbitrer entre ces deux critères, mais de savoir qui doit effectuer les choix correspondants ? Malheureusement, les hommes de l’Etat considèrent que les citoyens sont incapables de faire ces choix et qu’il convient de les faire à leur place. Ils déterminent donc de manière totalement  arbitraire des limites de vitesse censées être valides en toutes circonstances et pour tout le monde. Pourtant conduire une automobile ne devrait pas consister à obéir  passivement à des obligations arbitraires, mais à adapter continuellement sa  conduite à ses propres capacités et aux circonstances concrètes des lieux et des voies de communication où l’on se trouve.

En retirant aux citoyens ce droit à décider et à faire leurs propres choix, les autorités publiques empêchent les êtres humains d’agir selon leur propre nature, c’est-à-dire d’être des individus responsables.

Etre responsable c’est supporter soi-même les conséquences de ses propres décisions. C’est pourquoi le système par lequel la vitesse « optimale » est déterminée arbitrairement et imposée par des autorités publiques au lieu d’être l’objet de  décisions individuelles prises par des personnes responsables est profondément immoral par principe.

Mais il a aussi des conséquences pratiques regrettables.

Ainsi, dans son souci d’éviter les sanctions pour excès de vitesse, un conducteur est incité à regarder son compteur de vitesse ou à rechercher s’il n’y a pas des radars cachés au bord des routes, au lieu de se concentrer sur ce qui devrait être sa priorité : regarder la route, repérer les conducteurs situés dans la même zone que lui, évaluer les dangers.

A cela s’ajoute un climat de stress préjudiciable, dû à la crainte de ne pas se conformer aux prescriptions de vitesse.

On peut d’ailleurs le signaler au passage, de nombreuses études ont montré que la vitesse n’était pas la cause d’accidents la plus importante par rapport à d’autres causes. Mais les pouvoirs publics donnent la priorité à ce qui est le plus facile à contrôler, la vitesse, du fait de l’existence des radars. Et ils peuvent ainsi facilement prélever des amendes auprès des conducteurs.

L’excès de vitesse est une cause majeure de retrait de points et de perte de permis de conduire. Or, ce faisant, les autorités publiques portent une grave atteinte à ce qui devrait être – et qui a été dans le passé – un des principes essentiels du Droit. Si un conducteur a dépassé la limite de vitesse administrative sans causer un quelconque dommage à autrui, il n’y a aucune raison de le sanctionner, sous prétexte qu’il représenterait un facteur de risque.
Si l’on voulait bien le considérer pour ce qu’il est – un être humain responsable – on devrait lui permettre de faire ses choix de conduite librement, mais, bien sûr, le sanctionner s’il crée un dommage à autrui par suite d’un « excès de vitesse » ou pour toute autre raison.

Il serait temps que l’on revienne, vis-à-vis des automobilistes, à une attitude plus conforme aux principes éternels d’une société civilisée. Les défendre ne doit pas être considéré comme la simple satisfaction d’intérêts catégoriels, mais comme le retour non seulement  à l’efficacité économique, mais aussi à une véritable éthique.

Pascal Salin
Professeur émérite d’Economie à l’Université Paris-Dauphine

Source:Anti Perrichon - « La guerre contre les automobilistes : destructrice et immorale »



B) - Le trafic automobile vu sous l'angle libertarien
Dans cette présente étude, il sera relaté les conceptions libertariennes, dans le domaine de la circulation automobile. Cette étude constitue l'explication de la notion de la Route nue. Le texte en anglais et sa traduction en français proviennent des sites internet libéraux. Cette présente étude vise à apporter des arguments libertariens, par rapport à l'interventionnisme étatique, dans le domaine de la circulation automobile, qui n'est qu'un exemple symptomatique, parmi d'autres. Cette étude montre, effectivement, que cet interventionnisme étatique, non seulement infantilise les personnes, mais aussi aboutit à des résultats inverses à celui recherché, c'est-à-dire une aggravation du nombre d'accidents, parfois mortels, à cause de l'instauration d'un nombre trop important de panneaux de signalisation et que ce phénomène s'autoalimente de lui-même, malheureusement .


 C) -  Les mythes de l'insécurité routière

Boire ou conduire, le conducteur ne boit pas lorsqu'il raccompagne ses amis, faites la pause portable, témoignages, images chocs d'accidents, de chute du cinquième étage qui équivaut à un choc à 50 km/h, conseils de prudence sur les trajets quotidiens et courtes distances etc.. Nous sommes littéralement envahis par ces conseils de "mère- grand" dans la presse, la radio et la télévision. Chaque Week-end de grande sortie sur les routes, les médias y vont de leur couplet sur l'insécurité routière.
Malheureusement ces campagnes de sensibilisation qui partent sans doute d'un bon sentiment ne sont qu'une opération de manipulation de l'opinion publique en laissant croire que les causes réelles des accidents sur la route résultent principalement du comportement des automobilistes et non pas de l'irresponsabilité de nos élus en charge de la gestion du réseau routier.

Ainsi se serait l'alcoolisme au volant qui tuerait ou encore la vitesse excessive qui tuerait, voire le non-respect du code de la route, le fait que le conducteur n'oblige pas au port de la ceinture de sécurité à l'arrière serait à l'origine d'une fraction des décès sur les routes. Jamais n'est évoqué la responsabilité des hommes politiques qui ont en charge la gestion des routes. Les routes sont en effet publiques. Imaginez que de telles choses arrivent sur des routes privées, les propriétaires et gestionnaires de ces routes seraient en prison depuis longtemps.

La seule réponse offerte au niveau médiatique et politique est la répression et la violation des droits individuels. On en vient à considérer n'importe quel automobiliste comme un "terroriste" un "criminel" en puissance : un délinquant. Cette dérive totalitaire est d'autant plus inacceptable qu'elle repose sur des croyances erronées.

Il apparaît opportun de démystifier toute la propagande qui entoure la question de l'insécurité routière. Les débats comme les chiffres qui sont présentés dans les médias consistent à diffuser de fausses croyances dans l'opinion publique. Cette propagande fait partie du "politiquement correct" qui entre dans une stratégie sans doute plus globale de certains groupes de pression liés à la santé publique qui veulent absolument, pour des raisons obscures, que l'on ne décède pas prématurément comme si vivre vieux et en bonne santé était un objectif que chacun devrait poursuivre. Notre vie n'appartient pas à ses individus. Il serait temps qu'ils comprennent que leurs actions de propagande se traduisent via la réglementation par des violations systématiques de nos droits individuels et qu'ils ne sont pas habilités à mentir ou diffuser de fausses informations pour satisfaire leurs intérêts personnels ou leur vision particulière de la vie en société.
Ce dossier a pour but de démystifier la question de l'insécurité routière en rétablissant la vérité sur ce sujet. Nous traiterons des faits, des coûts et des gains attendus en roulant vite et à risquer sa vie sur une route, des causes de la mortalité sur les routes et des moyens dont on dispose pour réduire cette mortalité, enfin nour rappelerons le rôle important des hommes politiques et des bureaucrates en charge de l'insécurité routière dont les objectifs ne sont pas de satisfaire les citoyens mais de leur faire la guerre ou d'étendre leur budget pour augmenter leur pouvoir respectif. En effet Le pouvoir des hommes de l'Etat ne s'accroît que s'ils font la guerre et la bureaucratie concernée par la lutte contre l'insécurité routière (les organismes étatiques et para étatiques de la prévention routière) cherche à accroître son budget et milite pour la réglementation quel qu'en soit le coût. Cette dérive est la conséquence de l'irresponsabilité fondamentale des élus et des bureaucrates en charge de la sécurité routière face aux décisions qu'ils prennent.

Quelques faits stylisés

1) Les accidents de la route sont la première cause de mortalité de la classe d'âge des 15 à 44 ans

Le tableau ci dessous représente la mortalité liée aux accidents de la route par rapport à d'autres sources de mortalité : suicides, cancers, maladies cardiaques etc. pour la classe d'âge des 15 à 44 ans. En effet la réduction des décès prématurés de personnes nées vivantes est l'objectif affiché par les groupes de pression de la santé publique qui veulent nous empêcher de mourir avant un âge avancé. Or le Haut Comité pour la Santé Publique ( les soi disant experts) présente dans son rapport sur la santé en France de 2002 les causes de la mortalité des 15 à 44 ans. Vous remarquerez que les campagnes de propagande menées par les organismes publics ou semi-publics de santé publique ou de sécurité publique n'accordent pas la même importance aux causes de mortalité : le tabac et le sida attirent plus l'intérêt de nos bureaucrates que l'alcoolisme et le suicide. Ces dernières causes sont en termes de taux de mortalité pour 100 000 habitants, pourtant beaucoup plus importantes. Que font nos médias pour inciter les gens à ne pas se suicider ? Voilà pourtant une cause de mortalité qui pourrait sans doute être évitée si l'on était plus attentif à nos enfants, collègues de bureau etc. Quand s'intéressera -t-on au dépistage de la dépression nerveuse ? Mis à part ce biais de perception de la part de activistes de la santé publique on peut leur accorder qu'ils évoquent un problème sérieux. Que peut-on faire pour éviter qu'il y ait un grand nombre de victimes sur les routes ?

Tableau 1 Taux de mortalité pour 100 000 habitants des 15-44ans
Causes de la mortalité prématurée en 1997HommesFemmes
Accidents de la route27.7 (16.5)7.1
Suicides26.6(38)8.3 (15)
Alcoolisme 7.2 (57)ND (21)
Sida5.41.4
Cancer du poumon (lié au tabac)5.3 (168)2 (22)
Cancer du sein ---5.9 (64)
Cardiopathies ischémiques 5.2 (129)1.9 (31)
Chutes accidentelles2.5---
Sources: La santé en France rapport 2002 Haut comité de la Santé Publique (entre parenthèse taux de mortalité des 45 à 74ans )
Suicides et accidents de la route apparaissent comme les principales causes de décès prématurés, pour les hommes comme pour les femmes. Pratiques sexuelles à risque, alcoolisme et consommation de tabac sont loin derrière ces deux causes de mortalité prématurées. On peut compléter ce tableau par le suivant représentant pour cent jeunes de 15 à 24 ans le nombre de décès consécutifs à un accident de la route ou à un suicide.
Tableau 2 sur cent décès des 15 à 24 ans, x % sont dus aux:
Causes de la mortalité prématurée en 1999 pour les 15 à 24 ansTaux de mortalité pour l'ensemble de la population en % HommesFemmes
Accidents de la route2.144.3 37.7
Suicides2.713.410.2
Cardiopathies ischémiques 27.73.55.1
Tumeurs32.46.812.3
Maladie de l'appareil respiratoire8.2 1.32.7
Sources: Tableaux de l'Economie Française INSEE 2002-2003 p.61

Les jeunes sont essentiellement les victimes des accidents de la route. D'où l'importance du débat sur l'insécurité routière. Rappelons pour mémoire qu'il y a chaque année environ 530 000 décès pour 58 millions d'habitants. La mortalité,en 1997, ramenée par habitant fait un taux de 883 décès pour 100 000 habitants. En l'an 2000, en France, le taux de tués sur la route est de 13,6 /100 000 habitants, le taux de mortalité de cette année là a été de 910/100 000 habitants, les accidents de la route font donc simplement 1,5% de la mortalité générale. Ces chiffres permettent de relativiser le problème de l'insécurité routière. Ce problème est important parce que le décès sur la route frappe doublement les esprits : il est prématuré, violent et spectaculaire. Par ailleurs, chacun, après un certain nombre d'années de conduite, a pu assister à un accident mortel et/ ou avoir été victime d'un accident non mortel. En conséquence, les hommes politiques ont plus intérêt à s'attaquer à ce qui est visible et qui frappe les esprits et ce au détriment des autres causes de mortalité.

2) La France est un pays où la mortalité sur les routes est élevée comparé aux autres pays de l'Union européenne, exception faite, de l'Espagne, de la Grèce et du Portugal où la mortalité y est encore plus élevée

Tableau 3: les taux de mortalité en europe
Pays de l'Union européenne, 1999
Densité (habitants/km2)
Taux de tués pour 100 000 habitants
Allemagne
230
9,5
Autriche
96
13,4
Belgique
339
13,7
Danemark
123
9,4
Espagne
78
14,6
Finlande
15
8,4
France
107
14,3
Grèce
80
20,7
Irlande
52
12,4
Italie
191
11
Luxembourg
166
13,5
Pays Bas
380
6,9
Portugal
102
22,4
Royaume Uni
243
6
Suède
20
6,6

Les routes les plus sûres sont au Royaume Uni et en Suède. Les journalistes qui répètent ce qu'on leur dit de dire vraisemblablement, évoque tout de suite la répression qui est plus efficace au Royaume Uni ou en Suède qu'en France pour expliquer cette différence. Ils ne leur viennent pas à l'esprit que le réseau routier peut être différent.
La géographie humaine explique pour l'essentiel ces différences. Par exemple, les pays où l'espace est rare c'est-à-dire les pays à forte densité d'habitants au kilomètre carré ont un réseau urbain plus développé. Or les accidents mortels ont lieu en rase campagne, ces pays ont donc un taux de mortalité plus faible. La Finlande et la Suède confirment paradoxalement cette intuition, la densité par habitants y est faible mais les routes en rase campagne sont enneigées 9 mois sur 12, la mortalité observée est donc plutôt celle des zones urbaines. Si l'on enlève de l'échantillon la Suède et la Finlande pour les raisons mentionnées, on trouve une corrélation négative significative entre le taux de tués et la densité de la population au km2.
La comparaison entre les pays des taux de tués ne peut -être utilisée comme argument dans le débat sans prendre en compte la géographie humaine de chaque pays.

Le tableau 4 suivant suggère que la densité réduit fortement la mortalité sur les routes.

Tableau 4: densité et mortalité sur les routes
Variable expliquée: TAUX de tués
pour 100 000 habitants
Méthode: Moindre carré simple
Nombre de données : 1 13
Variable
Coefficient
Ecart type
t-Statistic
Prob.
C
17.19370
2.233147
7.699312
0.0000
DENSITE
-0.025477
0.011425
-2.229986
0.0475
R au carré
0.311331
Taux moyen de tués
12.90769
R au carré ajusté
0.248725
Ecart type de la variable expliquée
4.729951
Ecart type de la régression
4.099739

5.800362
Somme du carré des résidus
184.8865

5.887277
Log likelihood
-35.70235
F-statistic
4.972837

2.775893
Prob(F-statistic)
0.047528


On en a une confirmation lorsque l'on compare les indicateurs d'accidentologie locale. Le ratio de tué pour un million d'habitants va de 29 pour les Hauts de seine à 292 pour l'Ariège. Le département des Hauts de seine est essentiellement urbain celui de l'Ariège est de rase campagne. En zone urbaine les tués sont essenteillement des piétons, des cyclomotoristes et des motocyclistes. Les départements urbains et de montagne présentent des sous risques et ceux des plaines des surrisques, précise le Bilan de l'année 2002 sur la sécurité routière France (La documentation Française).

3) La baisse constante de la mortalité sur les routes comme du nombre des blessés depuis 1972 est le trait essentiel de l'insécurité routière.

Le tableau 5 suivant présente l'évolution des tués sur la route sur une longue période et par catégories d'usagers : piétons, bicyclettes, motos, voitures

Tableau 5 : Evolution des tuées sur longue période et par catégorie d'usagers
Années
Tués
Blessés
Gravité (tués pour 100
accidents corporels
Piétons (tués)
Bicyclettes
(tués)
Motos
(tués)
Voitures
(tués)
1970
14462
ND
ND
3202
795
2943
7522
1980
12543
339632
5,05
2200
659
2330
6699
1990
10289
225860
6,33
1407
401
1601
6295
2000
7643
162117
6,3
793
255
1317
5006
2002
7242
137839
6,8
819
211
1339
4602


Les routes sont plus sûres aujourd'hui qu'elles ne l'étaient, il y a trente ans. Le nombre de tués a été divisé par deux alors que dans le même temps la circulation automobile a doublé. En fait le nombre de tués sur les routes n'a jamais été aussi bas depuis que des statistiques fiables existent (1956). La baisse totale de la mortalité provient surtout de la diminution drastique de la mortalité des piétons et des cyclistes. La mortalité des piétons a été divisée par 4 et celle des cyclistes par 3. Mais il ne faut pas oublier que le nombre de cyclistes et de piétons ont diminué aussi dans la période au profit de la motos et de la voiture comme le suggère le doublement de l'indice de circulation sur les routes. En 1970 la mortalité des piétons et cyclistes faisait 27.6% de la mortalité totale aujourd'hui elle n'en fait que 13,7%. La voiture ou la moto est un moyen de transport plus sûr que de marcher ou de prendre une bicyclette. Les journalistes oublient que dans les années 1950 beaucoup de gens circulaient sur les routes départementales à pieds ou en vélo, que le trafic y était dense parce que la population rurale était importante comparée à aujourd'hui.

4) La mortalité en motos ou en voiture frappe
les jeunes, celle des piétons et des bicyclettes frappe les
vieux.

Le tableau 6 suivant compare, pour l'année 2000, la structure des décès par âge et catégorie d'usagers.

Tableau 6 : décès par âge et catégories d'usagers
Classes d'âge Piétons (tués)%Bicyclettes
(tués)
%Motos
(tués)
%Voitures
(tués)
%
0-14 ans789.83112.2423.21803.6
15-24 ans597.43112.245234.3139027.8
25-44 ans15319.34818.863147.9157431.4
45-64 ans16921.36224.314110.796019.2
65 et plus32440.97931352.780216
Ensemble79310025510013171005006100
Les vieux sont majoritaires dans les décès de piétons et cyclistes, les jeunes sont majoritaires dans les décès de motos et de voitures.


5) Il n'y a pas de lien entre vitesse et mortalité sur les routes

Le tableau 7 suivant donne le nombre de tués selon la catégorie du réseau pour les années 1990 et 2000 ainsi que la vitesse moyenne observée sur chaque réseau.

Tableau 7: décès par catégories de réseaux routiers et vitesses

Vitesse moyenneréseauTués
Années 19902000Années 1970198019902000
Ensemble autoroutes

Ensemble autoroutes

633499
Autoroutes de liaisons111 km/h -
(17%) (8%)
127km/h
(52%) (32%)
Autoroutes de liaisons


318
Autoroutes de dégagement99 km/h -
(27%) (11%)
110km/h
(54%) (33%)
Autoroutes de dégagement


181
Routes nationales92 km/h
(51%) (27%)
89km/h
(52%) (28%)
Routes nationales4529331125591967
Routes départementales94km/h
(58%) (34%)
95km/h
(61%) (38%)
Routes départementales6363491442433969
Voies communales et autres voies.

Voies communales et autres voies.


1208
Ensemble réseau

Ensemble réseau1446212543102897643
Entre parenthèses % de dépassement de 10km/h
et de + de 10km/h


On remarque que la vitesse moyenne observée et sa dispersion autour de la moyenne augmentent alors que le nombre de tués diminue ! Le rapport de la sécurité routière de 2002 fait remarquer que 60% des automobilistes (75% pour les motocyclistes) ne respecte pas les limites de vitesse. En ville, ce chiffre atteint 80%. Ce tableau contredit la théorie habituelle que la vitesse tue au sens où à une plus grande vitesse moyenne des automobilistes serait associée une mortalité plus élevée.
La vitesse tue au sens mécanique du terme. Une fraction des tués (28.9% en 2002) le sont lors d'accidents qui se produisent entre un véhicule et un obstacle fixe. Plus la vitesse est élevée plus l'accident sera grave. C'est le cas des arbres sur les routes de campagne contrairement aux glissières sur les autoroutes !

Le tableau suivant, pour l'année 2000, éclaircit ce point. Sur 7643 décès sur la route, 2423 décès, soit 31% des tués, le sont à la suite d'un accident n'impliquant pas de tiers et contre un obstacle fixe. 30,8% des tués le sont contre un arbre et la gravité est la plus élevée dans ce cas. D'où le débat sur l'éradication des arbres sur les routes de campagne. L'accident survient parce que le conducteur s'est endormi, a fait une fausse manoeuvre ou évite un obstacle sur la route. Dans un tel cadre plus la vitesse est élevée plus mécaniquement l'accident sera grave. Là encore l'infrastructure joue un rôle non négligeable. Rappelons aussi que les arbres sont présents sur les routes départementales beaucoup plus que les autoroutes ( où il y a des glissières) ou que les routes nationales alors que la vitesse moyenne sur ces routes départementales y est plus faible !


Tableau 8: accidents contre obstacles fixes

Nature de l'obstaclenombrepourcentageGravité (tués pour 100 véhicules
impliqués)
ensemble2423 (31% des décès) 10012,48
glissières266118,44
arbres75630,825,32
Murs, piles, pont33413,813,62
parapets431,816,54
poteaux30612,615,6
Fossés, talus, parois rocheuses46619,29,88

Rappelons aussi que les accidents mortels avec choc frontal ou choc sur le coté entre deux véhicules concerne 2677 tués soit 35% des décès. Le choc frontal ou sur le coté ne peut arriver sur une autoroute, en revanche plus facilement sur une route de campagne ou en ville. L'infrastructure du réseau routier avec la géographie est la principale cause de la mortalité sur les routes.
C'est en cela que les informations véhiculées par les médias comme par les organismes de sécurité routière sur la causalité entre vitesse et mortalité constituent une manipulation de l'opinion publique et non une information objective.


B) Les coûts et les gains à risquer sa vie sur les routes


Démontrer qu'il y a un risque de se tuer sur la route est une chose, en déduire que ce risque entraîne des dommages nets à l'individu ou à la collectivité en est une autre. Or, l'idée que les coûts excèdent les gains pour un individu ou pour la "collectivité" justifie, dans l'esprit des ingénieurs économistes, la lutte contre les accidents de la route . Or, une totale absence de réflexion économique sur ce sujet est le trait majeur de ce débat.

Il nous faut traiter au moins de deux points : le dommage attendus d'un accident de la route qui est la probabilité d'avoir un accident multipliée par le montant du dommage encouru et des gains attendus à faire un trajet en empruntant une route, à pieds, en vélo , en moto ou en voiture et a fortiori le gain attendu à rouler vite si l'on est en moto ou en voiture. La première difficulté réside dans l'estimation du montant du dommage lorsque l'on perd la vie ou que l'on est blessé gravement lors d'un accident de la route.

1) Les estimations du coût d'une vie humaine

La bible, semble-t-il dans ce domaine du calcul du prix de la vie humaine, reste un ouvrage de Michel Le Net des années 1990. En faisant référence à d'autres auteurs, Michel Le Net décompose le coût d'une vie humaine de la manière suivante :

i) perte de production
Tout individu vivant produit des richesses qui disparaissent s'il meurt. Son décès prive ses ayants droits ou la communauté des biens ou services qu'il aurait produits s'il avait vécu plus longtemps. Cela vaut aussi pour celui qui sera emprisonné, blessé, pour les personnes bloquées pendant deux heures sur la route en attente de l'évacuation des morts et des blessés etc.

ii) perte directe
Si un individu meurt ou devient infirme, cela implique des dépenses directes :
-les coûts médicaux et sociaux (soins ambulatoires, hospitalisations, coûts funéraires...)
-les dommages matériels ou affectifs causés à autrui.
- le préjudice moral

iii) perte indirecte
-les frais généraux de police de contrôle, de surveillance ou de prévention pour empêcher l'apparition de ce risque de décès prématuré.
- Les frais de justice, d'expertises, d'administration du sinistre etc.

Compte tenu de toutes ces pertes d'argent, le coût a été estimé aux environs de 600 000 EUR pour un tué et 60 000 EUR pour un blessé grave. Ce chiffre a été revu à la hausse par le Commissariat Général au Plan (CGP) par comparaison avec d'autres méthodes d'approche faite dans d'autres pays. Le rapport de la sécurité routière estime donc ce coût à 1000 000 EUR pour les personnes tuées et 150 000 EUR pour les blessés graves. Le chiffre final proposé, tout compris, s'élèverait à 28,3 milliards d'euros. Une faute majeure est commise dans cette estimation.

La société n'existe pas en soi, elle n'agit pas, ce sont les individus composant la société qui agissent et meurent sur les routes, ce sont eux qui supportent les pertes, et qui, s'ils commettent des dommages à autrui, sont tenus de les réparer. Les experts de la santé publique confondent coûts privés et coûts sociaux.

Si l'accident sur la route tue, c'est l'automobiliste et ses ayants droits qui supportent les dommages. C'est l'automobiliste qui perd une opportunité de vie ou de revenu et non les autres. C'est un coût privé. Même son épouse (ou époux) qui vivait grâce aux revenus du défunt peut le remplacer par un autre plus riche. Ce n'est pas un coût social, sauf de supposer que les êtres humains sont la propriété de l'Etat ou de la sécurité sociale. L'idée qu'un employeur perd de l'argent quand son employé tombe malade ou décède est fausse. Si l'employé ne travaille pas, l'employeur ne le paie pas. Il le remplace par un autre. C'est donc à d'autres coûts que le rapport de Michel Le Net fait référence. L'employeur (ou l ' Etat) supporte des coûts supplémentaires non prévus d'embauche et de formation à chaque fois qu'il (elle) doit remplacer un automobiliste. Mais en quoi les gouvernants peuvent-ils se considérer comme les employeurs des automobilistes qui ne sont pas des fonctionnaires ?
Le coût d'un mort sur la route n'est pas non plus tout à fait celui proposé par Michel Le Net parce que celui-ci ne comptabilise pas les économies que les survivants réalisent lorsqu'une personne meurt.

Lorsqu'une personne décède, elle fait économiser des ressources à ses concitoyens survivants:
1) Elle allège le poids des retraites
2) Elle économise les dépenses de santé liées aux âges avancés
3) Elle offre la possibilité de prélever des organes à la transplantation qui sauveront d'autres vies humaines.

Ces économies viennent en déduction des pertes de recettes fiscales. Cette façon de comptabiliser le coût d'une vie humaine provient d'une interférence de l'Etat dans la vie des individus qui vise à faire en sorte que chaque individu fasse supporter le coût de ses actions risquées sur d'autres et qu'il puisse bénéficier des actions que d'autres ont engagées sans qu'il en supporte les coûts!

C'est le principe de la collectivisation des risques par l'Etat. Une telle comptabilisation et un tel cynisme disparaît dès que la sécurité sociale est privatisée. Ce raisonnement et cette façon de faire le calcul est le produit des institutions et non de l'analyse économique.

Pour se prémunir des pertes éventuelles consécutives à un accident de la route, chaque individu se protège contre l'apparition de cet évenement. Mais cette protection et les précautions que l'on va prendre pour éviter un accident toujours probable sur la route ont un coût d'opportunité. Par exemple, au lieu d'aller chercher votre journal à pieds et prendre le risque de se faire écraser par un automobiliste pressé, vous pouvez vous faire livrer chez vous. C'est plus cher , mais plus sûr. D'un autre coté, vous êtes privé du joli sourire que vous fait votre buraliste attitré. Vous pouvez acheter une grosse voiture bardée de ceintures de sécurité, de air bag, de pare chocs et d'un système de freinage sophistiqué. En prenant une telle voiture, vous doublez le prix du véhicule et vous vous privez d'une croisière avec votre maitresse favorite.

Vous pouvez completer cette auto-prtection par une assurance. En payant une prime à un assureur, chaque individu s'assure qu'en cas d'accident, le dommage créeé à autrui ou à soi même sera réparé entièrement ou partiellement (assurance tous risques ou non). En combinant ces moyens de se protéger contre les accidents de la route, l'automobiliste a déjà payé par anticipation le dommage attendu. C'est pour cela qu'il n'y a pas de coût de la vie humaine autre que les dépenses que chacun fait pour la préserver.

L'estimation correcte est alors l'ensemble des primes d'assurance ( y compris les assurances sur la vie) qui ont été payées par les automobilistes et du surccroît de dépenses encourues sur son budget habituel pour réduire la probabilité d'apparition de l'évènement redouté : l'accident sur la route.

Si l'on se reporte aux assureurs, en 1999, ils ont provisionné ou payé pour 12.5 milliards d'euros pour les accidents de la route! Cette somme a été payée par les automobilistes. Si l'on prend en compte les assurances liées à la personne, les asusreurs ont engrangé en 2003 pour 29 milliards d'euros de primes!

L'estimation proposée par le plan du coût de la vie humaine est erronée. Le montant de la provision des assureurs, en 1999 a été de 12.5 milliards d'euros. La moitié de cette somme a servi aux dommages corporels soit 6.25 milliards d'euros. Pour 125000 accidents corporels cela fait une somme de 50 000 euros par victime. Or le calcul proposé par le plan abouti à quadrupler cette somme, puisque l'on obtient par accident corporels 198 450 euros ( en 1999 il y a eu 125000 accidents corporels dont 7125 tués. A 1 000 000 d'euros par décès et 150 000 euros par bléssé cela donne le chiffre proposé). Il existe donc une incompatibilité entre les chiffres effectivement payés et le coût tel que le gouvernement l'estime.

2)Emprunter une route et rouler vite, en risquant sa vie et celles des autres, économisent du temps, or le temps c'est de l'argent.

Il est évident qu'il y a un gain à emprunter la route à pieds , en vélo , en moto ou en voiture. Par exemple, il faut commencer par comptabiliser les gains de temps réalisés en utilisant sa voiture plutôt qu'un moyen de transport alternatif : marcher à pieds, rouler en bicyclette ou moto, prendre l'autobus, le métro, le train ou l'avion.

La majeure partie des trajets sont quotidiens, prendre un transport alternatif sur une courte distance: de zéro à 200 km vous fait perdre une heure par jour ( une demi-heure à l'aller, une demi - heure au retour), soit 5 heures par semaine, mettons 50 semaines par an. Cela nous fait 250 heures d'économie de temps dans une année. Posons un coût du temps égal en moyenne à 40EUR de l'heure ( prix d'une heure de leçon de piano ou de mathématiques), soit de 10 000EUR par an et par personne active. Si l'on compte 22 millions d'actifs, cela nous fait 220 milliards d'Euros de gains à comparer aux 28 milliards de pertes.

Revenons à l'estimation du gain de 10 000euros. Le coût d'un décès est estimé à 1000 000EUR, estimation la plus forte. Celle-ci doit être pondérée par la probabilité d'avoir un accident mortel. Or, cette probabilité en France est de 14/100 000 approximativement. Le coût attendu est donc de 140EUR, soit un gain net de 9860EUR ! Il est donc rationnel de rouler en voiture ou en moto : le gain pour chacun de rouler en voiture par rapport à un moyen alternatif excède le coût attendu.

La question de savoir si rouler vite pour économiser du temps vaut la peine est souvent posée par les tenants de la réglementation. Les campagnes de propagande de la sécurité routière avance l'argument que rouler à 150 plutôt qu'à 130 km heure (vitesse maximale autorisée sur les autoroutes) ne fait gagner que 4 minutes, et d'affirmer que 4 minutes par rapport à toute une vie ce n'est rien. Là encore les tenants de la réglementation commettent une erreur sur la valeur du temps. En roulant à 150 km /h on fait 2,5 km à la minute. On parcours alors les 130 km non pas en heure (vitesse limite) mais en 56 minutes, soit un gain de 4 minutes. A 180 km/h le gain est de 17 minutes. Quand vous avez 200 km à faire le gain de temps est donc de 8 minutes dans un cas et de 34 minutes dans l'autre. Si les 200 km constitue un trajet aller et qu'il faut aussi faire au retour, à 150 km/h le gain de temps est de 16 minutes et à 180 de 1 heure 8 minutes.

Toute la question est alors la valeur accordée par l'individu à cette économie de temps. Cette valeur est subjective et dépend des circonstances de lieux et de temps comme des caractéristiques individuelles de l'automobiliste: âge, revenu etc.. Nous avons pris arbitrairement comme base de calcul le prix d'une heure de leçon privée de piano ou de mathématique, (40EUR) mais il va de soi que le coût du temps d'une minute ou de 4 minutes comme dans la publicité proposée par la sécurité routière peut valoir beacuoup plus que 40EUR qui était le coût d'opportunité de 60 minutes. Si cette minute supplémentaire, qui vous manque, vous fait perdre un emploi ou un rendez-vous important, elle a beaucoup de valeur. Personne ne connaît en dehors de celui qui prend la décision de roulez plus vite, la raison fondamentale pour laquelle il roule vite et prend des risques pour lui et pour les autres.

Sachant qu'il prend des risques aussi pour les autres, il est incité à prendre des précautions par exemple en s'assurant contre les dommages qu'il peut causer à autrui du fait de son comportement.

En effet, habituellement pour réduire le coût des dommages crées par un accident, les automobilistes s'assurent. La prime d'assurance payée par chacun d'eux mesure le véritable coût attendu qui est le produit du dommage par la probabilité de son apparition et non le montant du dommage lui même (la moyenne d'une prime d'assurance pour une grosse cylindrée est inférieure à 2000euros par an !).

Une fois compris que la vitesse optimale d'un automobiliste est celle qui égalise la valeur de l'économie de temps supplémentaire que l'on obtient en roulant plus vite (ou en prenant sa voiture plutôt qu'un autre moyen de transport), au dommage attendu par suite d'un accident de la route, il est naturel d'observer des vitesses optimales différentes pour chaque automobiliste. Par ailleurs, plus le coût du temps augmente, plus le gain à rouler vite augmente. Plus la probabilité de décéder sur la route diminue consécutivement aux efforts de sécurité ( ceinture de sécurité, airbag, freinage assisté, élimination des mauvais conducteurs etc.), plus les automobilistes sont incités à rouler vite. Lorsque le coût d'opportunité d'un accident augmente ( valeur de la vie plus élevée) moins l'automobiliste est incité à rouler vite, toutes choses égales d'ailleurs. Ces conséquences sont paradoxales pour les gens peu familiers avec l' économie, mais ne le sont pas pour l'économiste qui interprète ces faits comme une confirmation de la rationalité des conducteurs.

Les mesures de sécurité routière sont donc en contradiction totale avec ce comportement rationnel face à la rareté du temps. D'une part, elles participent à l'incitation à rouler vite et d'autre part elles s'efforcent d'empêcher les gens de rouler vite !

Les estimations des coûts de la mortalité sur les routes par les fonctionnaires de la sécurité routière sont en fait faussées parce qu'ils ont une approche en termes holistes de l'Etat.

Le point de vue du gouvernement, sur ce débat, en voulant protéger soi disant les automobilistes d'eux-mêmes, consiste à considérer les automobilistes comme des enfants dont ils auraient la garde ou comme des animaux domestiques dont ils auraient la "propriété". Comme les hommes de l'Etat tirent un revenu sur la production et la consommation des automobilistes : celui de l'impôt. Ils sont incités à rentabiliser le revenu tiré de cet impôt. Un décès prématuré est donc une perte pour eux. En fait ce qui gène le gouvernement c'est qu'un automobiliste meurt avant ou après l' âge optimal auquel il devrait mourir pour maximiser le rendement de l'impôt !

Le rendement provient de l'impôt que l'on peut prélever sur un automobiliste vivant. Posons T le montant des recettes fiscales. Celui-ci est une fraction du revenu de l'automobiliste. Ce revenu varie avec l' âge.
Posons T=t.Y(a). Plus l'individu avance en âge plus le revenu supplémentaire qu'il tire de son activité augmente jusqu'à un certain âge et diminue par la suite. En supposant un impôt proportionnel au revenu, le profil de l'impôt supplémentaire en fonction de l'âge suit un profil identique. Le coût d'entretien du troupeau varie aussi avec l' âge de l'automobiliste. Posons C=c°+ c(a). Le coût supplémentiare d'entretien augmente avec l'âge de l'automobiliste. Il arrive même un point ou ce coût augmente plus vite que la recette fiscale et le coût excède le produit de l'impôt avec l'âge.
La recette fiscale sera maximum quand le supplément de revenu dT/da, obtenu lorsque l'automobiliste vieillit d'une année, da, sera juste égal au coût supplémentaire de son entretien dC/da. De cette équation on tire l' âge optimal du décès. Celui-ci varie avec les circonstances de lieux, de générations, du stock de capital humain acquis et du montant d'investissements en capital humain réalisé dans l'année.

L'automobiliste qui meurt prématurément ou qui s'obstine à vivre trop longtemps fait perdre de l'argent à tous ceux qui vivent de l'impôt. En réalité chaque individu décide de la date optimale de son décès en comparant le gain attendu en vivant une année supplémentaire au coût d'opportunité du montant de précautions qu'il faut prendre pour éviter le risque d'un décès prématuré. Cet âge optimal n'a aucune raison de coïncider avec celui qui maximise les recettes nettes des coûts tirés de l'automobiliste au fur et à mesure où il avance en âge.

Vouloir imposer une date supérieure à la date optimale de décès de l'individu veut dire que l'on sacrifie la vie de celui-ci en le forçant à prolonger une vie qui lui coûte plus chère qu'elle ne lui rapporte. Un conflit fondamental apparaît entre les individus et les hommes politiques sur la date optimale de décès. Or les hommes politiques ne sont pas habilités à nous imposer leur point de vue sur cette date sauf à nous considérer comme leurs esclaves ou comme leurs animaux domestiques.

Les causes de la mortalité sur les routes

Vitesse excessive et alcoolisme sont les deux causes avancées par les groupes de pression sécuritaires. Ils méconnaissent le débat entre la dispersion des vitesses et la vitesse moyenne comme la question fondamentale de la coordination des vitesses sur les routes. Abordons ces divers points.

Alcoolisme
L'alcoolisme au volant est un sujet délicat à aborder car les données empiriques dans ce domaine n'ont pas la fiabilité que l'on souhaiterait. Selon le rapport de lma sécurité routière de 2000, sur 7925604 dépistages d'alcoolémie pratiqués en 1999, 111934 ont été jugés positifs; soit 1,4% des contrôles. Sur 439 540 dépistages d'alcoolémie pratiqués en cas d'accidents corporels et matériels, 28644 tests ont été jugés positifs, soit 6,5% des accidents où un contrôle a été jugé nécessaire.
Sur 8029 tués en 1999, 1962 l'ont été par homicide involontaire ( par faute d'un conducteur qui a été condamné en justice pour cet acte), soit 24,4% des tués. Sur ces 1962 décès consécutifs à une faute d'un conducteur, 451 décès résultent d'un conducteur en état alcoolique, soit 23% des homicides involontaires mais seulement 5,6% des tués.

En 1999 on dénombre 31 851 blessés graves et 167 572 blessés légers. Sur ce total 7747 sont des blessés à la suite d ' une faute involontaire d'un conducteur. Rapportons ce chiffre au total de 199 423 blessés, 3,8% des blessés sont le résultat de ces fautes. 3919 de ces blessés l'ont été à la suite d'une faute d'un conducteur en état alcoolique, soit 1,9% du total des blessés !
Distinguons les blessés légers ( ITT <à 3 mois) de ceux qui le sont moins (ITT> à 3 mois). Sur les 7747 blessures involontaires, 3397 sont des blessés légers suite à un accident avec un conducteur en état alcoolique soit 43,8% des blessés légers. Les blessures graves sont au nombre de 522, soit 6,7% des blessures involontaires, mais ramené en blessés graves de l'année 1999 (31851) cela fait 1,6% des blessés de ce style. En fait 94,4% des tués sur la route résulte d'un accident où un conducteur alcoolique n'est pas impliqué ! Quand on prend les données liées aux condamnations par un tribunal pour avoir causé la mort d'un tiers parce que l'on conduisait en état alcoolique, l'alcoolémie ne semble pas la source principale des accidents de la route.

Mais le rapport de la sécurité routière de 2002, nous donne une toute autre version. Quand il y a un accident, les autorités font un test d'alcoolémie sur les conducteurs impliqués. Le taux d'alccolémie malheureusement n'est connu que seulement pour 59,5 % des accidents mortels. Le rapport présente donc les résultats pour les accidents mortels où le taux d'alcoolémie est connu.

Pour l'année 2002 sur 6549 accidents mortels, on connaît le taux d'acoolémie pour 3899 d'entre eux. Sur ce chiffre de 3889 accidents mortels, 1158 ont impliqué un conducteur avec un taux d'alccolémie en excès de la norme. Il y aurait donc 30% d'accidents mortels consécutif à une conduite en état alccolique. Ce dernier chiffre suppose que l'échanitllon des accidents mortels pour lesquels on ne connaît pas le taux d'alcoolémie n'est pas différent de celui où on le connaît. Sinon le chiffre tomberait à 18% si dans l'échantillon où l'on ne connaît pas le taux d'alcoolémie, aucun de ces accidents n'aurait impliqué un conducteur ayant un excès d'alcool dans le sang.

Le relevé du taux d'alcoolémie des conducteurs impliqués dans un accident mortel ou non, ne nous dit pas qui est responsable de l'accident, contrairement aux chiffres fondés sur les condamnations devant un tribunal.

Cette disparité dans les modes de calcul jette un doute sur la causalité entre accident de la route et alcoolisme. Qu'il y ait en 2002 entre 30% et 18% d'accidents mortels où l'on relève un taux d'alcoolémie supérieur à la norme est la seule chose que l'on puisse affirmer : corrélation n'est pas causalité. En revanche, parmi tous les conducteurs qui ont causé un accident mortel (homicide involontaire) on trouve une fraction importante d'entre eux qui sont des conducteurs en état d'ivresse, nous avons alors une causalité. Or, en l'an 2000 d'après l'annuaire statistique du Ministère de la Justice sur 1842 homicides involontaires dus à des conducteurs, 414 conducteurs étaient en état de conduite alcoolique. Ce qui fait 22% des homicides involontaires. Mais le chiffre de 1842 ne fait que 25% des accidents mortels! 414 divisé par 7242 ne fait que 6% des accidents mortels sur les routes! Là encore l'information est loin d'être objective et vise la manipulation de l'opinion publique.

Vitesses excessives

Il n'y a pas de lien entre vitesse et mortalité sur les routes.On remarque que la vitesse moyenne observée et sa dispersion autour de la moyenne augmentent alors que le nombre de tués diminue ! Ce tableau contredit la théorie habituelle que la vitesse tue au sens où à une plus grande vitesse moyenne des automobilistes serait associée une mortalité plus élevée.

La vitesse moyenne est calculée tous les trimestres par des enquêteurs qui se cachent dans des voitures stationnées sur le bord d'une route. La route doit être dégagée droite sans trafic intense pour que le conducteur roule à son allure optimale. La vitesse tue au sens mécanique du terme. Une fraction des tués (31%) le sont lors d'accidents qui se produisent entre un véhicule et un obstacle fixe. Plus la vitesse est élevée plus l'accident sera grave. C'est le cas des arbres sur les routes de campagne, contrairement aux glissières sur les autoroutes !

Le tableau 7 précédent éclaircit ce point. Sur 7643 décès sur la route, 2423 décès, soit 31% des tués, le sont à la suite d'un accident n'impliquant pas de tiers et contre un obstacle fixe. 30,8% des tués le sont contre un arbre et la gravité est la plus élevée dans ce cas. D'où le débat sur l'éradication des arbres sur les routes de campagne. L'accident survient parce que le conducteur s'est endormi, a fait une fausse manoeuvre ou évite un obstacle sur la route. Dans un tel cadre plus la vitesse est élevée plus mécaniquement l'accident sera grave. Là encore l'infrastructure joue un rôle non négligeable.

Rappelons, quitte à nous répéter, que les arbres sont présents sur les routes départementales beaucoup plus que les autoroutes ( où il y a des glissières) ou que les routes nationales alors que la vitesse moyenne sur ces routes départementales y est plus faible !

Rappelons que les accidents mortels avec choc frontal ou choc sur le coté entre deux véhicules concernent 2677 tués soit 35% des décès. Le choc frontal ou sur le coté ne peut arriver sur une autoroute, en revanche plus facilement sur une route de campagne ou en ville.

L'infrastructure du réseau routier, la non suppression des points noirs et la géographie humaine sont les principales causes de la mortalité sur les routes.
C'est en cela que les informations véhiculées par les médias sur la causalité entre vitesse et mortalité constituent une manipulation de l'opinion publique à des fins politiques qui n'ont rien à voir avec la sécurité routière.

Absence de Coordination des vitesses : vitesses moyennes, dispersion des vitesses et limites de vitesse.

Quand vous entrez sur une autoroute (ou une route) libre d'autres conducteurs, vous avez au moins deux stratégies selon votre temps coût ou votre plaisir : ou vous conduisez vite ou vous conduisez lentement. Mais en conduisant vite l'économie de temps est contrebalancée par un risque d' accident principalement dû à la vitesse en soi. L'idée que la vitesse, en soi, est la source principale d'accidents repose sur le concept physique que le dommage consécutif à l'accident est proportionnel au carré de vitesse. Cette idée a été répandue dans opinion publique par la prévention routière. C'est difficile de comprendre pourquoi une vitesse élevée, en soi, devrait être source d'accidents. Nous pouvons comprendre que les voitures hors de contrôle de leurs conducteurs, à cause de manque d'expérience, de la fatigue ou du manque de sommeil sont plus risquées à haute vitesse qu'à basse vitesse. Si nous considérons qu'un tiers des accidents ne concerne pas un autre conducteur, l'idée que la vitesse tue est une redondance mécanique.

Mais habituellement on n'est pas seul sur les autoroutes et routes. D'autres conducteurs s'y aventurent. La décision de conduire vite ou lentement est alors conditionnée par la façon dont les autres conduisent. Par exemple, chaque conducteur prend en compte le comportement des automobilistes qui l'entourent : devant , derrière et sur les cotés. Même sur une route à une seule voie, chaque conducteur prend en compte le comportement de l'automobiliste qui est devant lui comme de celui qui est derrière lui. Par conséquent la façon dont les autres individus conduisent est cruciale. Supposez vous voulez conduire vite. L'économie de temps en conduisant rapidement excède la perte attendue de votre vie consécutivement à un accident toujours probable. Mais imaginons que tous les autres conducteurs (à l'arrière, devant, sur votre gauche et sur votre droite) conduisent lentement. Le comportement des autres vous impose un coût : le temps perdu faute de pouvoir vous dégager des autres. Maintenant supposons l'inverse, c.-à-d. que vous voulez conduire lentement pour voir le paysage. La valeur de l'économie de temps est inférieure à la perte attendue de votre vie en cas d'accident. Mais, tous les autres conducteurs devant derrière, à droite ou à gauche, roulent vite. Leur comportement vous impose un coût . Vous êtes contraint par les autres à conduire vite, donc à une vitesse supérieure à celle que vous avez jugée optimale. Si vous ne vous conformez pas au comportement des autres conducteurs, le risque d'un accident est très élevé pour tout le monde.

L'idée est la suivante quand les autres roulent vite et que vous roulez lentement le risque d'accident est élevé et réciproquement lorsque vous roulez vite alors que les autres roulent lentement. La dispersion des vitesses est à la source des accidents lorsque plusieurs automobilistes interagissent sur la route.

Par le même raisonnement si chacun adapte sa vitesse à la vitesse de tous les autres, i.e si vous conduisez vite (resp. lentement) quand tous les autres roulent vite (resp. lentement), la probabilité d'un accident est supposée être nulle. L'idée que la dispersion des vitesses tue repose sur le fait que les vitesses optimales Ÿ entre conducteurs ne sont pas coordonnées. La vitesse moyenne n'est pas, en soi, à l'origine de l'accident. En fait c'est toujours la dispersion des vitesses qui est la cause principale de l'accident. C'est particulièrement vrai avec l'interaction entre un piéton et un automobiliste.

Dans la réalité, chaque conducteur n'est pas toujours entouré en même temps par tous les autres conducteurs. L'interaction est telle que chaque conducteur a devant lui quelqu'un d'autre qui par exemple conduit lentement alors qu'il s'aimerait conduire vite (ou inversement). Le conducteur a donc un choix entre deux stratégies: ou il adapte sa vitesse au conducteur qui est devant lui (respectivement derrière lui) ou il maintient sa vitesse en changeant de voie. Par exemple il double sur la gauche le conducteur qui est devant ou laisse le conducteur qui est derrière le doubler en se rabattant sur la droite.

Il y a trois complications dans ce processus d'interaction:

1) premièrement, la population de conducteurs n'est pas homogène, quelques conducteurs ont un coût du temps très élevé, d'autres non;

2) deuxièmement, l'interaction entre conducteurs peut être dans toutes les directions: en arrière, devant, à gauche et à droite;

3) troisièmement, la vitesse moyenne et la dispersion des vitesses tuent.

Pour simplifier l'analyse commençons par regarder l'interaction entre conducteurs lorsque ceux-ci sont dans l'impossibilité de doubler sur une route à une voie dans un sens ou l'autre, une glissière interdisant une telle pratique. Nous abandonnerons cette hypothèse après. Pour capturer l'essence de ce problème de coordination utilisons la matrice suivante:
 
Autre Conducteur
 roule viteroule lentement
 y1-y
roulez viteV-mDV - mD - (1-Ø)(œ)D<0 td="">
Vous  
roulez lentement(V - ß) - (Ø)œ D <0 td="">(V - ß)
 

V mesure la valeur de l'économie de temps en roulant vite pour vous (V) ( l'interaction est symétrique pour les autres conducteurs). Conduire lentement implique une perte de temps dont la valeur est ß. Les automobilistes décident simultanément et indépendamment de l'un l'autre s'ils roulent vite ou non. Les conducteurs sont assortis de manière aléatoire. Tout le monde connaît la structure des gains et des coûts attendus et les conducteurs n'ont aucun moyen d'anticiper le comportement de l'autre. Ces hypothèses sont simplificatrices à l'extrême mais vont nous montrer l'essentiel de ce jeu de coordination.

Supposez que vous vouliez conduire lentement. Si l'autre conducteur devant vous, ou derrière vous, conduit lentement, pendant que vous, vous conduisez lentement, rien ne se passe. Les vitesses sont coordonnées et il n'y a aucun risque d'accident dû à une dispersion des vitesses. Comme la vitesse moyenne n'est pas assez rapide pour induire un accident grave, le gain est de V-ß . Par contraste, si vous conduisez lentement alors que l'autre conducteur, derrière vous, roule vite, la probabilité d'un accident mortel, œ, est très élevée. Si nous supposons que l'autre conducteur entre sur la route derrière vous avec la probabilité Ø, le gain attendu à rouler lentement est brutalement diminué de (Ø)œ D où œ est la probabilité d'être tué dans l'accident et Ø est la probabilité que l'autre conducteur entre sur la route derrière vous, D mesure le dommage encouru (valeur de votre vie telle qu'elle est estimée par les ayant droits). Si l'autre conducteur qui roule rapidement entre dans la voie devant vous, rien ne se passe. Il n'y a aucun risque d'accident mortel puisque vous conduisez lentement. Par hypothèse, la valeur de vie D est plus élevée que le gain à rouler vite ,V. Mais la valeur attendue de la vie œD ou mD n'est pas nécessairement plus élevée que V.

Supposons maintenant que vous vouliez conduire rapidement. Quand vous roulez vite pendant que l'autre conducteur (derrière ou devant vous) fait de même, un accident s'il a lieu est dû principalement à une vitesse moyenne élevée en soi.. La probabilité d'un accident consécutivement à une vitesse moyenne élevée est de m . L'économie de temps d'une valeur de V est réduite de mD, la probabilité de perdre la vie à la suite d'un accident mortel à cette vitesse. Si vous roulez vite et que l'autre conducteur, entre sur la voie devant vous, avec probabilité (1-Ø), en conduisant lentement, le risque de collision consécutivement à une différence de vitesse est élevé. Il faut alors ajouter le dommage attendu supplémentaire par suite de ce comportement de l'autre conducteur.. Nous supposons que les deux risques, consécutif à la différence de vitesse et à la vitesse moyenne, sont additifs de telle sorte que le gain attendu dans ce cas est de : V - mD - (1-Ø)(œ)D . Par définition nous supposons que V - m D - (1-Ø)(œ)D<0 -="" admettra="" ainsi="" comme="" d="" deux="" en="" est="" gatif="" md="" n="" on="" positifs.="" que="" revanche="" sont="" tous="" tout="" v-="" v="">0, V-mD>0. ß est supérieur ou inférieur à mD selon l'individu concerné.

Maintenant adoptons la simplification habituelle: vous conduisez vite ou lentement quand le gain attendu de conduire rapidement dépasse le gain attendu à conduire lentement. Conduire vite ou lentement est conditionné par le comportement de l'autre conducteur. Votre croyance sur le comportement de l'autre conducteur ( est-ce qu'il va roulez vite ou lentement ) est mesurée par , y . Compte tenu de votre expérience et des quelques informations que vous pouvez obtenir en regardant l'autre voiture (si la plaque de la licence est de l'Angleterre ou la Belgique, vous savez que le conducteur choisira de conduire lentement, si la plaque de la licence est d'Allemagne ou d'Italie vous pouvez vous attendre à ce que le conducteur roule vite) vous vous forgez une opinion sur la probabilité y avec laquelle l'autre conducteur va roulez vite ou lentement. Si vous pensez qu'il va roulez vite la seule stratégie rationnelle est de roulez vite même si pour vous cela implique une perte comparativement au fait de roulez lentement. Nous allons éliminer cette information et supposez que mesure la fraction de la population des automobilistes qui conduisent vite et 1-y celle qui conduit lentement. Alors nous pouvons résoudre cette interaction entre les automobilistes en supposant que chaque conducteur choisit de conduire vite ou lentement en choisissant le comportement qui donne l'utilité attendue la plus élevée compte tenu de l'estimation qu'il se fait de la proportion d'automobilistes qui roulent vite ou lentement sur la route où il se trouve.

La valeur attendue en conduisant vite pour une estimation donnée de y est:
E(U)vite = y (V -mD) + (1-y ) {(V-mD) - (1-Ø) (œ)D}
La valeur attendue en roulant lentement est:
E(U) lentement = y {(V - ß) - (Ø)(œD)} + (1-y ) (V-ß)
L'automobiliste sera indifférent entre rouler vite ou lentement si y, la probabilité que l'autre voiture roule vite telle qu'elle est estimée par le conducteur concerné est telle que les deux stratégies donnent la même utilité attendue: E(U) vite = E(U) lentement.
Calculons y* tel que :
y(V - mD) + (1-y ) {(V-mD) - (1-Ø) (œ)D}= y{(V - ß) - (Ø)(œD)} + (1- y) (V-ß)

La valeur y* qui égalise les deux utilités attendues est donc:
y*= (mD - ß + (1-Ø) œD / œD )= (1-Ø) + ( m/œ) - ß/œD

Nous pouvons représenter ces deux stratégies ou équations par des droites sur le diagramme de Schelling de la manière suivante .



Sur l'axe vertical, nous représentons la valeur attendue à rouler vite ou lentement. L'axe horizontal représente la proportion d'automobilistes qui roulent vite selon l'estimation de chaque conducteur. La droite AB d'inclinaison positive donne la gain attendu à rouler vite en fonction du nombre estimé d'automobilistes qui roulent vite. La droite CD donne la valeur attendue en roulant lentement en fonction du nombre estimé d'automobilistes qui roulent vite. Cette droite ,CD a une inclinaison négative.

Quand y = 0 l'autre conducteur roule lentement, il est clair que la valeur attendue en conduisant lentement , V-ß. excède celle en conduisant vite V - m D - (1-Ø)(œ)D<0 -="" .="" aussi="" autre="" clair="" conducteur="" d="" donne="" est="" il="" l="" md="" plus="" que="" roule="" rouler="" si="" utilit="" v="" vite="" y="1">0, que de rouler lentement (V - ß) - (Ø)œ D (qui est négatif dans notre exemple). Si Ø, qui est la probabilité pour les autres conducteurs d'entrer sur la route par derrière, est égal à un, la droite AB est horizontale. La stratégie pure conduire vite est dominante. Si Ø = 0, les conducteurs entrent toujours sur la route par devant, la droite CD est horizontale, et la stratégie quasi dominante est de conduire lentement.

La figure précédente montre clairement l'existence d'un équilibre bimorphique en stratégies pures: point C (V-ß) et point B, ( V-mD). La stratégie mixte , y* n'est pas stable. Imaginons que le conducteur estime que la proportion des conducteurs rapides sur cette route est y°, d'un montant inférieur à la proportion y* qui rendrait indifférent les deux stratégies, conduire lentement est donc la bonne stratégie, tous les conducteurs font face au même problème et adoptent la stratégie de rouler lentement. De manière identique si l'automobiliste estime que la proportion de voitures rapides excède y *, par exemple en y1, son intérêt est de rouler vite. Il adapte sa vitesse à celle des autres. Si ß est supérieur à mD , rouler vite est Pareto optimal, s'il est inférieur c'est l'inverse. La valeur de la perte de temps comparée au dommage attendu en cas d'accident mortel décide donc du point B ou du point C lequel des deux est préférable.

Nous pouvons analyser maintenant la façon dont les limites de vitesse agissent sur le comportement des conducteurs. Supposons optimal le fait de rouler lentement Le point C donne une satisfaction plus élevée que le point B.

Sous une telle interaction, une limite de vitesse maximale modifie le comportement des automobilistes par la modification de leurs croyances dans le comportement des autres. Il suffit de montrer par des campagnes publicitaires que les autres respectent cette limites de vitesse. Les conducteurs anticipent un y° inférieur à leur y *. Ils décident de rouler lentement. Il n'est nul besoin de consacrer des ressources à sanctionner l'automobiliste récalcitrant tant que les croyances sur le comportement d'autrui ont été ainsi modifiée. Evidemment cela suppose que les planificateurs de la prévention routière soient certains que rouler lentement est la situation Pareto optimale, sinon c'est une limite de vitesse minimale qu'il faut imposer. La limite de vitesse présente deux défauts majeurs :

1) les conducteurs ne sont pas identiques quant aux paramètres , V, ß ,D, y , dans un tel cas les limites de vitesse minimale ou maximale redistribuent le bien-être entre conducteurs en imposant à certains conducteurs pour qui il est optimal de rouler vite (respectivement lentement) de rouler lentement ( respectivement rouler vite)

2) les planificateurs de la sécurité routière n'ont aucun accès à la connaissance commune du processus d'interaction sur les routes entre automobilistes. Ils doivent réaliser la coordination des vitesses sans connaître la structure des paiements décrite dans la matrice ci-dessus.


Un tel problème de coordination est résolu, sans intervention de l'État, par des règles spontanées de priorités.

Ordre spontané et règles de priorité.

Supposez que vous adoptiez la règle suivante: entrez toujours sur la route derrière une voiture, pas devant. C'est une règle de priorité, celui qui est sur la route a la priorité. Vous lui cédez le passage. Dans ce cas: Ø = 1 et la droite AB, rouler vite, est maintenant horizontale. Elle domine la droite CD. Le conducteur sur la route adopte toujours la stratégie pure: conduire vite. Si rouler vite est l'état Pareto optimal, celui-ci est atteint grâce à cette règle de priorité. Tous les automobilistes adoptent spontanément cette règle de priorité. Une limite de vitesse (minimale) ici n'a aucune influence sur le résultat de l'interaction puisque la stratégie dominante est de rouler vite. .Si tout le monde suit la convention, l'interaction est coordonnée. Le jeu a un équilibre de Nash en stratégies pures. Donc le problème de la coordination est conditionnée par le nombre d'automobilistes dans la population, Ø, qui suivent la règle de priorité. Quand Ø diffère considérablement de 1, la coordination des vitesses dépend des croyances y du conducteur à propos du comportement des autres, y est comparé à y*, le seuil critique où les deux stratégies deviennent équivalentes.

Maintenant supposons que l'état Pareto optimal est celui où il faut conduire lentement. Dans ce cas: "entrez toujours sur une route devant une voiture" est la règle. La droite CD (conduire lentement) devient horizontale et domine la droite AB (rouler vite). Tout le monde joue la stratégie pure: "conduire lentement". La convention se fait respecter d'elle-même. Cette convention veut dire aussi: "donnez la priorité aux gens qui entrent sur la route ". Le jeu de la coordination de la vitesse peut être résolu spontanément par les conventions sans utiliser de limites de vitesse.

En résumé, lorsque l'automobiliste pénètre sur une voie où conduire lentement est optimal, la priorité est à ceux qui entre sur la voie. Quand rouler vite est optimal, la priorité est à ceux qui sont sur cette voie.

Dans cette première structure, nous avons montré facilement que les politiques de limites de vitesse (minimale ou maximale) sont concurrencées par des règles de priorité en matière de conduite automobile. Il était indispensable de passer par cette première structure car le problème fondamental est que pour certains conducteurs rouler vite est optimal alors que pour d'autres c'est l'inverse :rouler lentement est optimal. C'est la raison pour laquelle l'infrastructure joue un rôle non négligeable dans la coordination des vitesses et c'est aussi la raison d'être des autoroutes.
.
Pour quelques conducteurs il est optimal de conduire vite parce que pour eux ß> mD, tandis que pour les autres il est optimal de conduire lentement parce que, pour eux: ß < mD! Dans ce cas une politique de la limite de vitesse ne résoudra pas le problème de coordination de la vitesse parce que l'équilibre Nash entre V-ß et V- mD n'est pas le même pour chaque conducteur. Imposer, à travers des limites de vitesse, un des deux équilibres de Nash n'est pas Pareto optimal parce que l'on augmente le bien-être d'un groupe de conducteurs en diminuant le bien-être de l'autre groupe.

La solution est connue, on construit des routes de telle sorte que les deux groupes de conducteurs puissent conduire à leur vitesse optimale: vite et lentement. Ce sont les routes à deux voies minimum : les autoroutes. On observe une variabilité dans les vitesses sur des voies différentes, mais homogénéité sur chaque voie. Cette configuration de la route est le moyen par lequel les deux groupes de conducteurs minimisent le coût qu'ils imposent aux autres par suite de leurs vitesses optimales différentes. La dispersion des vitesses est essentielle pour atteindre un état Pareto optimal quand les conducteurs ne sont pas identiques.

Revenons à notre interaction fondamentale. Dans la structure initiale il y avait seulement une voie. Quand quelqu'un d'autre entre sur la voie devant ou derrière vous, vous avez été contraint d'adapter votre vitesse au nouveau venu. Maintenant il y a deux voies: la voie de gauche et la voie de droite (LL et RL pour left lane et right lane). Il y a désormais quatre stratégies conditionnelles: être rapide ou lent sur la voie de gauche : FLL ou SLL, et être rapide ou lent sur la voie de droite, FRL, SRL. Les gains attendus conditionnellement au comportement de l'autre conducteur peuvent être résumés dans la matrice suivante:



 
L'autre conducteur
  FLLSLLFRLSRL
 FLL V-m D(V- mD) - (1-Ø)œDV- mDV- mD
 SLL(V-ß)-ØœDV-ß V-ß V-ß
vous     
 FRLV- mDV- mDV- mD(V- mD) - (1-Ø)œD
 SRLV-ß V-ß (V-ß) - Ø œDV-ß

 

Choisissez la première ligne. Vous décidez de conduire vite sur la voie de gauche . Si l'autre conducteur roule vite sur la voie de gauche ou lentement sur la voie de droite , vous ne risquez rien. En revanche, s'il conduit lentement devant vous, quand vous roulez vite, l'accident est un événement que vous devez prendre en considération. Vous pouvez répéter le même exercice avec chaque ligne et colonne le même processus de l'interaction. Regardez la matrice des gains attendus, on voit facilement que les deux groupes de conducteurs peuvent atteindre leur vitesse optimale: les conducteurs lents sont sur la voie de droite et les conducteurs rapides sont sur la voie de gauche. Maintenant sur chaque voie, rapide ou lente, chaque automobiliste fait face au même problème que dans notre première structure d'interaction: c.-à-d. être assorti avec un conducteur qui entre sur sa voie derrière lui ou devant lui à une vitesse différente: rapide ou lente. De la première structure nous avons déduit que ceux qui pénétraient sur une route où les gens roulent vite, voie rapide, ces derniers avaient la priorité ; en revanche, ceux qui roulent lentement sur une voie lente donnent la priorité à ceux qui y entrent. Alors Ø =1 sur la voie de gauche et Ø=0 sur la voie de droite, conduire rapidement est une stratégie dominante pure sur la voie de gauche, conduire lentement est une stratégie dominante pure sur la voie de droite. Les vitesses sont parfaitement coordonnées. Les conducteurs lents seront localisés sur la voie de droite et les conducteurs rapides sur la voie de gauche.

Si les règles de priorité sont respectées, la variabilité dans les vitesses et / ou une vitesse moyenne élevée: ne sont pas une source d'accidents mortels. Le risque d'accidents mortels impliquant un tiers apparaît si cette variabilité opère sur la même voie. Paradoxalement la variabilité dans les vitesses, sur voies différentes, permet d'atteindre un état Pareto optimal pour les deux conducteurs.

Une fois compris comment fonctionne la coordination des vitesses, une limite de vitesse minimale ou maximale est un non-sens. Si ces limites de vitesse sont mises en vigueur, elles réduiront le bien-être d'un groupe de conducteurs, et elles augmenteront la mortalité sur les routes. Les règles de priorités: laisser la priorité sur la voie de gauche à ceux qui roulent vite et avoir la priorité en entrant sur la voie de droite qui est lente ne peuvent plus être respectées puisque les deux voies sont lentes (ou rapides si la limite de vitesse est un minimum).

Comme l'on a besoin nécessairement de changer de voies, et que les conducteurs cherchent à rouler à leur vitesse optimale, vite ou lentement, les automobilistes rouleront lentement sur la voie de gauche comme sur la voie de droite, et ceux qui veulent rouler vite parce qu'il est optimal pour eux de le faire passeront d'une voie à l'autre sans respecter la règle de priorité. La convention qui coordonne les vitesses et sauve des vies est maintenant brisée. Le résultat est une augmentation du nombre d'accidents mortels dû à la dispersion des vitesses sur la même voie! Le maximum (ou minimum) la limite de vitesse est une source de mortalité sur les autoroutes (sur les routes à une voie dans chaque sens il n'y a pas de coordination des vitesses possibles donc la limite de vitesse ne permet pas d'atteindre un état Pareto optimal).

Comme les automobilistes préfèrent survivre sur la route, ils préfèrent respecter les règles de priorité et ne pas respecter les limites de vitesses. Ceci explique aussi les raisons pour lesquelles une fraction importante d'automobilistes, au grand désespoir de nos planificateurs de la sécurité routière, roule au dessus des limites de vitesse. Cela explique aussi que l'alourdissement des sanctions en dehors des effets d'annonces restera inefficace.

L'efficacité de la loi vient quand celle-ci renforce les conventions spontanées qui émergent de l'interaction entre les conducteurs pour coordonner leurs vitesses. Elle vient en renforçant les règles de priorité par la responsabilité civile et non pas par l'imposition d'un montant arbitraire de précautions que prétend être une limite de vitesse, d'ailleurs pourquoi 130 et pas 100 ou 50 km/h ou encore 150km/h sur une autoroute ? En choisissant une limite plutôt qu'une autre le décideur politique est dans l'incapacité de démontrer que cette norme n'est pas arbitraire. Comment peut-il affirmer qu'une vie sauvée au delà de 130 km/h vaut plus qu'un décès accepté en de ça de 130 km/h?

Les moyens disponibles pour réduire la mortalité sur les routes

Le législateur lorsqu'il veut réglementer la fabrication comme la commercialisation de produits dangereux ou d'activités à risques ou considérés comme tels dispose de plusieurs moyens pour contraindre à la fois les producteurs de voitures et les automobilistes à respecter les objectifs qu'il s'est fixé. Il peut agir sur les fabricants d'automobiles, sur l'infrastructure routière et sur le comportement des automobilistes. Par exemple, en matière d'accidents de la route un gros effort a été fait pour faire peur aux automobilistes soit par des campagnes chocs de publicité télévisuelle soit par l'imposition d'avertissements sur les routes. Il a aussi accentué sa politique répressive à la fois en termes de dissuasion et de sévérité des sanctions. Il n'hésite pas non plus à instaurer des camps de rééducation pour les automobilistes repentis ou qui désirent échapper à une certaine forme de sanction. Il pense aussi à brider les moteurs de voiture ou à soutenir les efforts des fabricants qui investissent dans des airbag, des ABS, des ceintures de sécurité, des boites noires etc. Le choix de réglementer plutôt que de laisser jouer la responsabilité civile et l'assurance en dit long sur la façon dont les législateurs de tous les bords politiques conçoivent la vie en société. Nous avons développé plus haut les raisons pour lesquelles on pouvait s'opposer aux limites de vitesse. Dans ce qui suit nus allons souligner un autre aspect de la réglementation : son coût d'opportunité.

Le coût de la réglementation

On peut prendre un exemple simple où le coût direct de la réglementation excède largement les bénéfices attendus dans les termes mêmes posés par la notion du " prix d'une vie humaine " : celui du test de l ' alcoolémie. Nous avons vu précédemment qu'il y avait 7925 604 dépistages pratiqués dans l'année 1999. Sur ce montant seulement 111934 dépistage ont été positifs. Il va de soi que les conducteurs déclarés positifs auraient pu être responsable d'un accident de la route suite à leur taux excessif d'alcool dans le sang. On peut admettre que s'il n'y avait pas eu de contrôle une fraction de ces conducteurs auraient été à l ' origine d ' un accident mortel sur la route. C ' est une hypothèse drastique puisque la même année il y a eu 6% de tués consécutivement à des accidents où des conducteurs en état alcoolique étaient impliqués et ce en dépit des contrôles d ' alcoolémie. Supposons qu ' en absence de ces contrôles on aurait eu un nombre de tués supplémentaires identiques : 451 ( le contrôle diviserait par deux le nombre de tués consécutivement à une conduite en état d'ivresse). Hypothèse là aussi héroïque en faveur du dépistage. Cette mesure aurait donc économisé 451 000 000 d'euros puisque que le coût d ' un décès est évalué par le gouvernement à 1 000 000 d'euros . Maintenant comparons le coût de pratiquer le dépistage. Un dépistage mobilise des policiers ou gendarmes et coûte donc de l ' argent aux contribuables et fait perdre du temps aux automobilistes non alcoolisés (dix minutes par automobiliste). Prenons simplement le temps que l'on fait perdre aux automobilistes. Si le coût du temps est en moyenne de 60 euros de l'heure, chaque contrôle fait perdre 10 euros par personne contrôlée.7 925 604 contrôles font une somme de 79 256 040euros. Si chaque contrôle coûte 100 euros, il faut ajouter 700 925 604 euros à 79 256 040 cela fait 780 182 000, une somme largement supérieure à 451 000 000 d'euros. Pour simplement équilibrer l'opération il faudrait que chaque contrôle coûte moins de 57 euros ( 451 millions d'euros divisé par 7 millions 925. Dès que le nombre de morts économisé diminue, il va de soi que le dépistage apparaît pour ce qu'il est : un gaspillage énorme d'argent et de temps. nLe coût direct de la réglementation n'est rien, c'est le coût d'opportunité de cette réglementation qui nous intéresse.
Par exemple, les limites de vitesse soulèvent trois problèmes :- en interférant avec les règles de priorité , elles entraînent une mauvaise coordination des vitesses sur les routes, elles sont donc une source d'accidents. Si les conducteurs ne respectent pas les limites de vitesse c'est qu ' ils ont conscience que ces limitations sont dangereuses.- elles ne contrôlent qu'un paramètre la vitesse et ne disent rien sur l'expérience, l'attention et la vigilance du conducteur. -elles sont arbitraires pourquoi 130km/h sur les autoroutes et pas 150 ou 100? Si les limites de vitesse économisent des morts sur les routes, pourquoi accepter des morts en dessous de cette vitesse et ne pas les accepter au dessus, et pourquoi pas la vitesse zéro ? En fait la limitation de vitesse à un coût d ' opportunité bien connu qui est la perte de temps qu'elle impose à certains : ceux dont le coût du temps est élevé. -Il en va de même avec la ceinture de sécurité dont l'efficacité n'est pas établie de manière certaine ( elle vous sauve que dans 42% des cas) Celle-ci en diminuant la probabilité d'un accident grave incite à rouler plus vite et à prendre moins de précautions, ce qui se traduit par un déplacement de la mortalité vers les personnes non protégées : piétons, cyclistes, motocyclistes. On constate aussi que les automobilistes s'il décident de rouler lentement ne mettent pas leur ceinture de sécurité. En fait elle semble inutile à vitesse lente et élevée. En agglomération 20 à 28 % des automobilistes ne la portent pas. Par ailleurs, avec un choc à 50 km /h la ceinture de sécurité ou le airbag ne protège plus rien car le cerveau va heurter la boite crânienne qui peut entraîner des dommages irréversibles au cerveau.

Les remèdes existent, ils reposent sur l'infrastructure, la responsabilité civile et les mécanismes d'assurance.

L'infrastructure

Une des causes principales de la mortalité sur les routes est le réseau routier lui même. Par définition l'augmentation des routes nationales à deux voies et la suppression des routes nationales avec une voie au milieu, -suppression des points noirs- l'augmentation des autoroutes de liaisons qui évitent les centres urbains et l'augmentation du nombre de ronds-points, - l'amélioration du macadam, choix d'un bitume antireflet, bandes lumineuses, éclairage des autoroutes, -autoroutes à trois voies et autoroutes séparées pour les camions. En zone urbaine séparation des voies entre piétons, bicyclettes, motos et voitures -Suppression de tous les ambiguïtés d'interprétation quant à la question de savoir qui a la priorité sur la route etc. Evidemment pour faire tous ces investissements l'élus local ou la DDE doivent y avoir un intérêt, 40 après à la Sicaudais en Loire Atlantique, le point noir existe toujours ! La seule dépense faite est un panneau d'avertissement indiquant le nombre de personnes tuées dasn l'année dans cette portion de la route particulièrement dangereuse. Ce panneau distrait l'automobiliste, ce qui risque d'allonger le nombre de morts à cet endroit.

La réglementation elle-même en détournant des ressources et faisant croire qu'elle est efficace prive les individus entreprenants d'imaginer et de mettre en oeuvre des solutions alternatives plus efficaces comme la privatisation des routes et des rues comme de l'implication plus grande des mécanismes d'assurance et de responsabilité.

Responsabilité civile et assurance
Le juge en responsabilité civile détermine qui est en faute dans l'accident et permet ainsi de faire respecter les règles de priorité qui engendreront une coordination spontanée des vitesses optimales y compris en rendant responsable les propriétaires des routes ou l'Etat si le réseau routier n'a pas été amélioré pour faciliter la coordination des vitesses. L'assurance se charge d'inciter l'automobiliste à prendre davantage de précautions en négociant avec son client la prime d'assurance en contrepartie d'une bonne conduite et l'installation d'une boite noire dans son véhicule qui permet de contrôler tous les paramètres de la conduite et d'état du véhicule. Ainsi l ' assureur et le client pourront discriminer la prime d'assurance en récompensant les bons conducteurs par des prix plus faibles.

Pourquoi les moyens utilisés pour lutter contre la mortalité sur les routes sont-ils immoraux et inefficaces ?

Ces moyens sont inefficaces parce que :
1) les hommes politiques n'ont aucun intérêt à promouvoir des solutions "efficaces" mais qui les privent de leur pouvoir. Le pouvoir des hommes de l'Etat ne s'accroît que s'ils font la guerre : aux etats voisins, au chômage, à la pauvreté, à la consommation de drogue, de tabac, à la pollution etc.
2)La bureaucratie concernée par la lutte contre l'insécurité routière (les organismes étatiques et para étatiques de la prévention routière) cherche à accroître son budget et donc milite pour la réglementation quel qu'en soit le coût.
3) L'irresponsabilité des élus et des bureaucrates en charge de la gestion des routes est la caractéristique fondamentale de la lutte contre l'insécurité routière.

Dans une firme, par définition, le chef d'entreprise est responsable de ces actes. Il l'est au sens où une erreur de décision de sa part se termine par une perte de revenu via une faillite ou un licenciement. Il ne peut reporter ses fautes et les conséquences de ses fautes sur d'autres personnes. Le contrat qui le lie aux propriétaires de l'entreprise prévoit ce contrôle et la sanction qui va avec. Il n'en va pas de même avec le bureaucrate ou l'homme de l'État.

En effet, le bureaucrate, du fait qu'il ne peut s'approprier la différence entre les revenus et les coûts de son activité et que par ailleurs les revenus qui alimentent le budget dont il a la charge sont obtenus grâce à l'usage de la coercition, ne supporte pas le coût d'opportunité de ses actions. Le coût de ses actions ou décisions est supporter par d'autres : essentiellement le contribuable et la fraction des élus qui sera pénalisée par son intervention. L'homme de l'État (bureaucrate ou homme politique en dernier ressort) est par définition un irresponsable institutionnel.
Cette irresponsabilité institutionnelle est particulièrement visible en matière de choix risqués. Prenons l'exemple de l'insécurité routière. L'obligation du port de la ceinture de sécurité économise des vies sur la route lors d'un accident frontal sur un obstacle fixe ou mobile. Mais une meilleure protection du conducteur l'incite à rouler plus vite et d'une manière plus dangereuse pour les autres (piétons, cyclistes et motards) Ne pas obliger les conducteurs à porter cette ceinture c'est accepter un certain nombre de décès supplémentaires en cas d'accidents graves, obliger au port de la ceinture c'est accepter des décès supplémentaires de piétons, cyclistes ou motards. Chacune de ces deux décisions comporte un risque.

Le bureaucrate ou l'homme politique confronté à un tel choix, c'est-à-dire à une alternative entre deux actions risquées, prend la décision qui aura les meilleures conséquences pour lui. L'homme politique craint avant tout que sa décision entraîne un revirement de l'opinion publique à son encontre et donc à une perte de votes lors de sa prochaine réélection. Il choisit donc d'imposer le port de la ceinture de sécurité parce qu'il est facile de montrer à l'opinion publique que cette ceinture économise des vies, alors qu'il est plus difficile de démontrer qu'elle tue des piétons supplémentaires. Il prendra donc une décision, nécessairement porteuse de risques, comme toute décision, dont il pense que les risques ne retomberont pas sur lui. Il choisit l'action qui réduit les risques qui sont visibles et qui sensibilisent l'opinion au détriment des risques "invisibles" ou qui laissent indifférent l'opinion publique. C'est ce que Bastiat a démontré depuis longtemps avec ces sophismes sur " Ce que l'on voit et ce que l'on ne voit pas".
Cette pratique a un revers. Dans ce contexte d'irresponsabilité, le bureaucrate ou l'homme politique ( l'expert de la sécurité routière et /ou le ministre des transports) ne cherche plus à se demander quels risques comporte une décision dont il ne s'attend pas à subir les conséquences. Donc, en évitant les risques qui peuvent retomber sur lui, il perd la conscience de ceux qu'il impose aux autres en ayant cessé de voir que tout choix est risqué. D'où son illusion de toujours vouloir "prendre le moins de risques possibles" et la dénomination du prétendu "principe de précaution", qui désigne en réalité le choix de ne prendre que les risques dont la conscience échappe à l'opinion publique.
Il y a un corollaire à ce théorème de Bastiat. Comme on ne se rend pas compte que c'est l'irresponsabilité institutionnelle qui a faussé la prise de risques, on attribuera à une "insuffisance de précautions" la mortalité supplémentaire des piétons, cyclistes et motards, alors qu'elle est en réalité due au fait que l'homme politique, qui impose le port de la ceinture de sécurité, n'est pas responsable des décès supplémentaires de piétons engendrés par sa prise de décision alors qu'il craint que l'opinion publique (quelle opinion publique ?) lui tienne rigueur des morts consécutifs à la non obligation du port de la ceinture de sécurité. Si l'homme politique ou le bureaucrate du ministère de l'équipement était responsable de la mortalité sur les routes, gestion dont en tant que ministre des transports il a la charge, très rapidement il prendrait conscience que la question de l'obligation de porter sa ceinture n'est pas une décision étatique mais individuelle à régler avec son assureur.






D) - Citations

« L'auto est un formidable instrument de liberté. Grâce à elle, l'individu peut parcourir le monde, aller où bon lui semble, au moment qui lui convient. Elle a transformé la vie en permettant aux hommes de se rencontrer, de se connaître, d'échanger leurs idées, de transporter les fruits de leur activité. Mais elle est aussi un espace de liberté. Bien protégé dans son automobile, chacun se sent chez soi. Personne d'autre que lui n'y a accès en dehors de ceux qu'il y invite. »

 « A plusieurs reprises, la presse a relaté le cas d'hommes politiques, de gauche ou de droite, qui ont été verbalisés à Paris, parce qu'ils empruntaient les couloirs d'autobus au volant de leur voiture. Ils ont généralement réagi vigoureusement aux observations des agents de la circulation et ils ont cherché à justifier leur comportement en disant qu'ils étaient très pressés. Pressés, ils l'étaient certainement, comme la plupart de ceux qui roulent en voiture à Paris ou dans les grandes villes. Pourtant, s'ils ont précédemment eu l'occasion d'exercer le pouvoir, ils ont certainement entonné le refrain de la « priorité aux transports collectifs ». Mais ils supportent mal de redevenir de simples citoyens, démunis de voitures officielles et de gyrophares, obligés de subir les contraintes qu'ils ont imposées aux autres. Car dans ce domaine comme dans tant d'autres, les collectivistes imposent des tabous que presque personne n'ose dénoncer ou transgresser. Parmi ces tabous, la guerre contre la voiture individuelle tient une place éminente. » 
Pascal Salin qui par ailleurs met en garde contre « l’autophobie

« Remarque libérale incontournable: L'automobile, c'est un instrument de liberté individuelle; pas étonnant que les étatistes veuillent l'interdire où ils peuvent, sinon la taxer, la règlementer, limiter son usage, réduire le plaisir de conduire, instaurer la peur, contrôler les routes, corrompre les usagers, les empêcher de s'organiser, etc.
« Remarque psychologique non moins incontournable: l'automobile, c'est aussi un plaisir qui remplace avantageusement les jeux vidéos d'arcade; elle fait appel aux réflexes moteurs, à l'apprentissage de perceptrons-movitrons par boucle de rétroaction; elle oriente l'action immédiate en lui donnant un sens précis à terme; elle fait appel à l'attention périphérique et parfois aux mécanismes d'alarme, mais laisse sinon assez de latitude à l'esprit pour vaquer à diverses ruminations, écouter de la musique, etc. Bref, quand on conduit son automobile, on a plus besoin de tout l'opium du peuple dont nous abreuvent les uns et les autres.
« Remarque onirique (vœu pieu), tout aussi incontournable: Mon rêve, c'est toujours le car-pooling en direct, pour rentabiliser au maximum l'automobile, faire des rencontres intéressantes au dernier moment tout en restant libre de ses mouvements; peut-être la killer app pour la téléphonie mobile numérique?
« Petit calcul statistique, pour faire rager les étatistes: faire perdre une minute par jour à chacun des 60 millions de français, que ce soit en limitant leur vitesse sur la route, ou par toute autre contrainte administrative, c'est faire disparaître en moyenne 520 vies par an (avec une espérance de vie de 80 ans). Combien de morts sur les routes qu'on ne voit pas, à cause des limitations de vitesse? »
 les « ambulations automobiles » de François-René « Faré » Rideau

 
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