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A ceux qui
faisaient de Nicolas Sarkozy l’espoir libéral pour la France, à ceux en
contrepoint qui l’affublent, comme Laurent Fabius
récemment, du qualificatif infamant d’«ultra-libéral», il est
fortement conseillé de lire le discours prononcé par le candidat
proclamé à l’élection présidentielle le 12 octobre 2006 à Périgueux
et intitulé « Notre République ». Les libéraux seront certes ravis
d’y trouver quelques idées qui sont les leurs : souveraineté de
l’individu, respect de la propriété comme condition de la
liberté, application stricte du principe de subsidiarité, ou encore
liberté d’entreprendre, de choisir l’école de ses enfants ou de leur
léguer le fruit de son travail. Mais l’essentiel est
ailleurs. La presse en a justement fait ses choux gras : « Sarkozy
propose de nouveaux droits sociaux », commente Le Figaro (13
octobre 2006) ; « Nicolas Sarkozy multiplie les promesses sociales », résume Le Monde (14 octobre 2006).
Le
président de l’UMP entend que la République s’attaque aux nouvelles
inégalités : « Depuis des années, au nom de la morale républicaine, on
proclame des droits qui ne sont pas suivis d’effet »,
qu’il s’agisse de l’hébergement d’urgence, du logement, de la garde
des enfants ou de la dépendance des personnes âgées. « Il faut passer
des droits virtuels aux droits réels », « de l’obligation
de moyens à l’obligation de résultats ». Nicolas Sarkozy « propose
que pour chaque droit nouveau une collectivité responsable soit
désignée, de telle sorte que la responsabilité politique soit
clairement établie ». Il ajoute : « Les citoyens pourront faire
valoir leurs droits devant les tribunaux face aux collectivités ou aux
institutions qui ne se seraient pas donné les moyens de
rendre effectifs les droits dont elles sont responsables ». Suivant
les cas, au bout de cinq ou dix ans (fin du premier ou du second
quinquennat de Nicolas Sarkozy…), le droit au logement, le
droit à la garde de ses enfants, le droit à la prise en charge de la
dépendance deviendront « opposables ». « C’est cela la rupture »,
conclut l’orateur.
Ce
discours est-il celui d’un libéral, voire d’un « ultra-libéral » ?
Rassurons Nicolas Sarkozy : certes non ! Pour s’en convaincre, il
suffit de rappeler quelques grands principes libéraux.
Historiquement,
il existe deux catégories de droits de l’homme : les vrais et les faux.
Les vrais droits de l’homme, ce sont les droits-libertés : liberté,
propriété, résistance à l’oppression,
etc.. Ce sont ceux qui ont été déclarés à partir du XIIème siècle
dans les grands textes anglais, puis à la fin du XVIIIème siècle en
Amérique et en France. Les faux droits de l’homme, ce sont
les droits-créances : droit au travail, au logement, aux prestations
sociales, à un environnement sain, etc.. Ce sont ceux qui ont été
inventés en permanence depuis plus de deux siècles dans les
textes à caractère socialiste. A l’image de la monnaie, les faux
droits chassent les bons. Certes, dans les deux cas, les droits sont «
opposables », mais de manière totalement différente. Les
droits-libertés sont opposables à l’Etat dans le sens où ils
participent du grand mouvement du constitutionnalisme. Les constitutions
ont été écrites, les droits de l’homme ont été déclarés pour
que l’arbitraire, qui des monarques, qui des églises, soit combattu.
Il s’agit d’interdire aux autorités d’empiéter sur les libertés des
individus. Ainsi, l’Etat, au sens large du terme, a-t-il
par exemple l’obligation de respecter le droit de propriété, la
liberté d’expression ou de religion. Aucun de ses agents ne saurait
l’enfreindre sauf à verser dans l’arbitraire. Les
droits-libertés sont des droits contre l’Etat, des « droits de ».
Les droits-créances sont d’une tout autre nature. Ils sont opposables à
l’Etat dans le sens où chaque individu ou groupe peut
légalement attendre de l’Etat une prestation particulière : un
travail, un logement, une retraite, un environnement sain, etc.. Les
droits-créances sont des droits par l’Etat, des « droits à
».
Reprenons le
discours de Nicolas Sarkozy. Ce n’est pas tant au nom de la « morale
républicaine » - foin d’hypocrisie ! Appelons un chat un chat – qu’au
nom de principes à caractère
socialo-communiste que des droits sont inventés. Certes, comme
l’expose notre orateur, ces droits ne sont pas suivis d’effet pour
certains d’entre eux… et heureusement ! C’est qu’ils sont
inapplicables ! Certes, ils sont proclamés à titre publicitaire.
Mais, ce que l’on doit regretter, ce n’est point qu’ils ne soient pas
suivis d’effet ; c’est le fait qu’ils soient inventés et que
des hommes politiques veuillent ultérieurement tenter coûte que
coûte de leur donner une impossible effectivité ! Lorsque Nicolas
Sarkozy avance qu’ « il faut passer des droits virtuels aux
droits réels », il ne fait que reprendre une vieille lune marxiste.
Les dirigeants des pays du « socialisme réel » et leurs affidés
n’avaient pas de mots trop cruels pour brocarder le caractère «
formel » des libertés occidentales. Il ne servait à rien,
disaient-ils, de proclamer le droit de propriété si les plus pauvres n’y
avaient pas accès (« le pauvre n’est pas libre », s’exclame
d’ailleurs Nicolas Sarkozy un peu plus haut…). Qu’est-ce que le «
droit au logement » ? C’est le droit d’un « citoyen » d’obtenir de l’«
Etat » un « logement social ». Qu’est-ce que le « droit au
travail » ? C’est le droit d’un « citoyen » d’obtenir de l’ « Etat »
un poste de fonctionnaire ou un « emploi bidon ». Car la question est
bien de savoir qui va fournir ces droits. Ce ne peut
être que l’« Etat ». Nicolas Sarkozy ne s’en cache pas : « Pour
chaque droit nouveau (sic), une collectivité responsable (sic) » doit
être désignée. Les conséquences sont adamantines la «
responsabilité politique » doit être clairement établie. La
promotion des droits-créances s’analyse en effet comme un vaste
mouvement de politisation de la société. Certes, objectera-t-on, le
Président de l’UMP ne parle pas du « droit au travail ». Mais qui
empêchera la croissance indéfinie des droits-créances ? A partir du
moment où tout individu ou groupe détient un droit sur la «
société », celui-ci peut se décliner à l’infini. Il n’existe plus
aucune limite à l’extension de l’Etat qui agit selon son bon vouloir,
dans l’arbitraire le plus total. Or, aux fondements du
libéralisme se trouve une césure radicale entre l’Etat et la société
civile. Défendre les droits-créances, c’est élargir la sphère de l’Etat
aux dépens de la société civile ; c’est réduire la
Liberté ; c’est porter atteinte à la subsidiarité bien entendue.
Disons-le sans détours : augmenter les droits-créances, c’est augmenter
le socialisme.
Nicolas
Sarkozy entend, nous dit-il, incarner le « renouveau » et la « rupture
». En réalité, il ne fait du vin nouveau que dans de
vieilles outres. Les socialistes en ont rêvé, Nicolas Sarkozy l’a
fait.
Par Jean-Philippe Feldman
Professeur agrégé des facultés de droit
Avocat à la Cour de Paris.
Nicolas Sarkozy
De Wikiberal
Nicolas Sarkozy est un homme politique français, président de la république française de 2007 à 2012. Aux yeux de certains, il passe pour un libéral, voire un « ultralibéral ».
Il suffit de consulter ses discours et ses propositions pour voir qu'il
n'en est rien. C'est un interventionniste autoritaire, un étatiste qui
propose parfois certaines mesures plus ou moins libérales en économie, mais qui ne conçoit la société que dans la perspective d'un encadrement fort de l'Etat.
C'est ce qu'exprime son prospectus du second tour, où l'on peut lire
cette déclaration que la gauche étatiste pourrait faire également
sienne :
- « Le rêve français, c'est une France où la réussite est au service de la solidarité. »
Sa politique n'est ni libérale économiquement, ni socialement, politiquement ou sociétalement.
En politique
- Il propose un catalogue étendu de « droits à » :
- droit opposable à l’hébergement
- droit opposable au logement (il a initié l'idée, reprise au vol tant par Ségolène Royal que par Jacques Chirac)
- droit opposable à la garde d’enfants
- que l'État garantisse l’emprunt de celui qui n’a pas de relations
- Il propose « un système de cautionnement public qui mutualise les risques et permette d’emprunter à tous ceux qui ont un projet », des prêts à taux zéro avec la garantie de l’Etat pour tous les jeunes.
- Il veut « moraliser le capitalisme » ; il veut un « gouvernement économique » à l'échelle de l'Europe.
- Il veut instaurer un service civique obligatoire de 6 mois (rétablissement de l'esclavage étatique).
- Il veut que la politique se mette « au service du bonheur des hommes » (interventionnisme et paternalisme).
Il prône un État fort :
- « Je ne crois pas à la doctrine de l'État minimum. Je ne crois pas à la doctrine du laissez-faire. Je ne crois pas qu’en France l'État puisse être réduit à un rôle secondaire. Je ne crois pas que la nation puisse conserver son unité avec un État faible ».
- « Je ne crois pas que la République puisse continuer d’exister sans un État fort. Je ne crois pas que le capitalisme puisse survivre si le marché est tout et l'État rien. A ce moment-là, ce n’est pas le capitalisme que nous aurons, c’est la caricature du capitalisme ».
- « C'est le rôle de l'État de s'occuper de toutes les préoccupations des Français. »
Peu favorable à la liberté de circulation, il veut une « immigration choisie », mais il promet la citoyenneté française à toutes les femmes martyrisées.
Il était favorable en 2005 au volumineux « Traité établissant une constitution pour l'Europe », exemple de constructivisme étatiste européen.
Il semble que Nicolas Sarkozy ait une conception de la justice assez peu libérale, faisant fi de la proportionnalité des peines. Sans tomber dans une reductio ad Hitlerum facile[1],
on peut en effet s'étonner de cette menace de Nicolas Sarkozy à
l'encontre des instigateurs (inconnus) de l'affaire Clearstream :
- « Un jour, je finirai par retrouver le salopard qui a monté cette affaire et il finira sur un crochet de boucher. » [2]
Il dit ne "pas vouloir se laisser impressionner par les ultra-libéraux". [3]
En économie
On le dit libéral économiquement, pourtant il veut « donner à l’Etat
les moyens de prendre des participations temporaires dans des
entreprises stratégiques qui traversent une passe difficile ». On se
souvient par ailleurs de ses demandes autoritaires aux grandes surfaces
de baisser les prix de 3% à 5% en 2004 [4], qui montre bien sa conception de la liberté du commerce.
Nicolas Sarkozy envisage de rétablir l'échelle mobile des
salaires (l'indexation des salaires sur les prix), retour en arrière
extraordinaire vers un mécanisme autoritaire et inflationniste,
abandonné depuis Jacques Rueff.
Il a nommé plusieurs commissaires à la réindustrialisation chargés de "coordonner les actions de l’Etat dans les bassins d’emploi en difficulté" et "de
prévenir les restructurations, d’accompagner les entreprises et les
salariés en difficultés et de favoriser la création et le développement
d’activités" [5]. Voir Interventionnisme
Les impôts ont augmenté de 1.1%[6] de 2008 à 2009.
Il est également favorable à une loi sur les « parachutes dorés » des dirigeants d'entreprises,
méprisant ouvertement le seul point de vue légitime, qui pour un
libéral est celui du propriétaire de l'entreprise (personne d'autre que
le conseil d'administration ou l'assemblée générale n'étant capable
d'évaluer si une indemnité de départ est décente et légitime au regard
du travail accompli).
Nicolas Sarkozy se donne, en cas d'élection à l'Élysée, deux ans pour expérimenter la TVA sociale,
censée contribuer, selon lui, à financer la protection sociale par le
biais de la taxation des importations, oubliant que ce n'est pas
l'importateur qui est ainsi taxé, mais bien le consommateur.
Il refuse de supprimer l'ISF
(impôt sur la fortune) : « Il est tout à fait normal que quelqu’un qui
gagne beaucoup d’argent paye beaucoup d’impôts. Je ne veux donc pas
supprimer l’ISF. »
Il n'est pas favorable à la fin effective du monopole de la Sécurité sociale que préconisent les libéraux en application des directives européennes et il évite de répondre à toute question à ce sujet (Fin effective du monopole de la Sécurité sociale), se bornant à proposer des mesurettes de renflouement du navire en perdition telles qu'une franchise santé de 50 euros par an.
Laurence Boone, chef économiste France de Barclays Capital qui a
établi, à l'attention de ses clients, un « indice du libéralisme des
candidats ». Notés de - 4 à + 4 (pour le moins libéral au plus libéral)
la note obtenue par Sarkozy est de + 1,6 (Ségolène Royal
obtient - 1,8), ce qui fait de lui un libéral pas même modéré, mais
franchement timoré, à peine au-dessus de l'axe médian, fortement antilibéral dans un pays comme la France.
Liberté d'expression
C'est sans doute du côté de la liberté d'expression que la dérive antilibérale de Nicolas Sarkozy est la plus flagrante.
Nicolas Sarkozy est pour la liberté d'expression
tant qu'elle ne le dérange pas personnellement. On rapporte que la
maison d'édition First a dû mettre au pilon une biographie de Cecilia
Sarkozy, Cécilia Sarkozy, entre le coeur et la raison, sur pression directe du candidat, qui aurait convoqué l’éditeur dans son bureau de ministre.
On cite également le cas de l'ancien directeur de la rédaction de
Paris Match, Alain Genestar, en 2006, licencié pour « dérive
déontologique », un peu plus d'un an après avoir publié en couverture du
magazine, le 25 août 2005, une photo de Cécilia Sarkozy au côté du
publicitaire Richard Attias (illustrant ainsi les déboires conjugaux de
Nicolas Sarkozy). Alain Genestar affirme : « le ministre de l'intérieur,
quand il affirme n'être pour rien dans mon licenciement, ne dit pas la
vérité. »
Des réformes libérales ?
Jacques Marseille estimait dans Le Spectacle du Monde
en mai 2007 que deux réformes telles que celle portant sur le service
public minimum et celle des régimes spéciaux de retraite (qui
privilégient certaines catégories de personnes au détriment des employés
du secteur privé), ainsi qu'un budget en équilibre en 2008,
constitueraient trois « signaux forts ». Les autres « réformes »
possibles évoquées lors de la campagne électorale seraient une remise en
cause partielle (et timide) de la carte scolaire
(mais en gardant un objectif de « mixité sociale » !) et quelques
allègements fiscaux à la marge (impôt sur les successions, bouclier
fiscal contre les excès de l'impôt sur la fortune).
Outre que ces points n'ont été que très partiellement tenus face
aux divers conservatismes qui bloquent la société française, il n'y a
aucune réforme radicale envisagée concernant la dette, le train de vie
de l'État, l'État-providence, les privatisations, la fin effective du
monopole de la Sécurité sociale, les retraites par capitalisation, etc. Nicolas Sarkozy n'est ni Margaret Thatcher ni Ronald Reagan, mais l'héritier de ses prédécesseurs de la Ve République. Sa volonté de « rupture » reste pour l'instant purement verbale.
Il faut souligner par ailleurs que la mince « rupture » promise
est tout sauf au rendez-vous : pour reprendre la formule d'un
économiste, David Thesmar, « La rupture, ce sont souvent des réformes transgressives en symboles mais marginales sur la substance »[7]. Au dela du symbole, aucune service minimum effectif, aucune sélection à l'université, etc.
De même, le chroniqueur économique du journal Le Monde, Éric Le Boucher,
a salué certaines initiatives timides mais lui reproche un manque de
clarté et le côté brouillon de ses réformes, complexes, mal ficelées et
qui, in fine, créent de nouvelles usines à gaz. Il écrit ainsi dans Le Monde
du 5 avril 2008 : « Sa politique sociale est si embrouillée, si
contradictoire, et si mal expliquée, qu'elle percute aujourd'hui le
débat sur "la rigueur" et donne le pire de ce que la France pouvait
redouter : une contre-pédagogie des réformes. »[8]
Pour beaucoup de personnes, notamment certains libéraux, il
s'avère que Sarkozy n'est qu'un politicien dont ses idées sont sans fond
et ne servent que ses besoins électoralistes. En effet, Sarkozy est
capable un jour de tenir un discours keynésien, un discours libéral, le
lendemain un discours mondialiste, ou encore un discours nationaliste
pour la récupération d'électeurs nationalistes. Sarkozy s'adapte à la
situation, au problème, et adapte son discours selon, sans fond
cohérent.
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