La rétrospective des événements de 2025 n'offre pas d'espoirs très
réjouissants pour 2026. Mais Jacques Attali nous rappelle qu'une seule
chose nous sépare de désastres plus funestes encore : notre volonté de
réagir. Et si l'année qui vient se révélait bien plus favorable que nous
pouvons aujourd'hui l'imaginer…
Rêvons un peu : 2026 pourrait être l’année du Bien.
Certains diront que ce n’est pas le scénario le plus probable et que, compte tenu des événements de l’année écoulée, il faut s’attendre à bien pire au cours des douze prochains mois.Le scénario le plus probable est que 2026 sera marquée par une aggravation du dérèglement climatique, une accélération des pénuries d’eau dans de nombreuses régions du monde, une artificialisation croissante des terres et de l’alimentation, une extension du théâtre des conflits de l’Europe de l’Est aux pays baltes, de nouveaux massacres au Soudan et au Nigeria, et une détérioration de la situation des femmes en Afghanistan, en Iran et dans de nombreux autres pays.On peut également s’attendre à la domination mondiale des fausses informations, à l’instauration d’une dictature à la Néron aux États-Unis, au recours à la tromperie et à la terreur pour remporter les élections de novembre, qui n’auront aucune signification ;on peut aussi anticiper le départ de la plupart des troupes américaines d’Europe, leur débarquement au Groenland, des attentats terroristes d’une ampleur sans précédent, une montée de l’antisémitisme à gauche comme à droite, et la poursuite des politiques criminelles et suicidaires du gouvernement israélien actuel.On peut s'attendre à ce que le démantèlement de l'Union européenne se poursuive, sous l'impulsion de gouvernements de plus en plus nationalistes.On peut également envisager la probabilité d'une victoire extrémiste aux élections locales en France, et le ralliement manifeste d'une large part des employeurs européens et des partis libéraux de droite à l'extrême droite, préparant ainsi le terrain pour une confrontation, au second tour de l'élection présidentielle l'année suivante, entre deux partis identitaires, tous deux nationalistes-populistes, hostiles à la construction européenne et pro-russes.
À cela, on pourrait ajouter, à l'échelle mondiale, l'accélération de l'évolution de l'IA jusqu'à ce qu'elle atteigne l'autonomie par rapport à l'humain, avec toutes les conséquences cauchemardesques que l'on peut imaginer dès l'année prochaine.
Tout cela est parfaitement plausible, c'est même le scénario le plus probable.
Mais rien n'est certain.Au contraire, nous pouvons imaginer, espérer et réaliser un avenir radicalement différent en 2026 :
Aux États-Unis, les Républicains anti-Trump pourraient s’allier aux Démocrates pour mettre un terme à la folie d’un président qui viole chaque jour davantage la Constitution et qui est de plus en plus ouvertement entouré d’agents russes ;cette alliance pourrait faire basculer le Sénat et la Chambre des représentants du côté démocrate, réduisant considérablement les pouvoirs du président et restaurant une partie de la grandeur perdue de la démocratie américaine.
En Israël, les partis de centre et de gauche pourraient remporter les élections de 2026, envoyer Netanyahu en prison et les partis religieux replonger dans leur obscurantisme intolérable, retrouvant ainsi l’esprit du sionisme laïque des débuts ;en Palestine, nous pouvons encore espérer voir des dirigeants courageux et intègres éliminer enfin le Hamas et les autres forces terroristes et renouer avec la voie de la paix grâce à la solution à deux États.
En Russie, nous pouvons imaginer qu’une partie de l’élite prenne conscience de l’impasse dans laquelle sont menées les politiques suicidaires des dirigeants actuels et les voie contraindre les autorités à un cessez-le-feu durable.et même une libéralisation du régime, condition nécessaire pour que la Russie retrouve enfin la place qui lui revient au sein du concert des nations.
En Europe, l'année prochaine, de plus en plus de dirigeants prendront peut-être enfin conscience de l'isolement du continent et lanceront un vaste programme de souveraineté militaire et technologique dans les secteurs d'avenir, tout en respectant l'identité culturelle et démocratique de chacun et en élargissant leur Union à tous les autres pays du continent, y compris l'Ukraine et les Balkans.
On peut également espérer qu'ils comprendront que leur avenir démographique dépend autant de leurs politiques du logement et de la famille que des mesures qu'ils prendront pour intégrer sérieusement et durablement à leur culture et à leurs valeurs les étrangers qu'ils continueront nécessairement d'accueillir.
En France, les partis démocratiques peuvent remporter les élections locales de mars 2026, démontrant ainsi qu'ils bénéficient toujours d'une large majorité dans l'opinion publique et qu'ils peuvent contrer les tentations identitaires de l'extrême gauche et de l'extrême droite, assurer le triomphe d'une laïcité exigeante et présenter des candidats crédibles à l'élection présidentielle de l'année suivante.Des programmes seront élaborés en 2026, prenant en compte la nécessité de réduire drastiquement les innombrables gaspillages de fonds publics, les subventions injustifiées aux groupes de pression, les lourdeurs bureaucratiques et les doublons intolérables, d'alléger les impôts et de réduire les déficits, tout en allouant davantage de ressources à tous les secteurs de l'économie, et en priorité à la santé, à l'éducation, à l'alimentation saine, au logement, à la protection de l'environnement et à la sécurité.
Enfin, nous pouvons espérer que d'ici 2026, l'humanité aura découvert et mis en œuvre de nouvelles méthodes pour mieux protéger la nature, promouvoir l'agriculture locale, manger sainement, traiter et guérir des maladies jusqu'alors incurables, soulager la douleur et transmettre à tous, avec moins d'efforts et de manière bien plus efficace, le savoir nécessaire à chacun.
Qu'est-ce qui distinguera l'année du bien de l'année du mal ?
La même chose qui distingue, en chacun de nous, la lâcheté de la volonté de réagir face à une menace ;la résignation face à l'inévitable de son refus.La désignation de boucs émissaires, fruit d'une recherche lucide d'une réponse courageuse ;la capitulation face aux forces du monde, fruit d'une décision de se rebeller contre elles.Sans attendre la catastrophe pour tenter de s'en prémunir.
Oui, 2026 peut être l'année du Bien : il n'est pas nécessaire d'attendre la défaite pour rejoindre la résistance.
Jacques ATTALI
Jacques Attali est docteur en sciences économiques, diplômé de l'École Polytechnique et conseiller d'État.Conseiller spécial du président français François Mitterrand pendant dix ans, il est le fondateur de quatre institutions internationales : Action contre la Faim, Eureka, la BERD et Positive Planet.
Jacques Attali est l'auteur de 86 ouvrages (dont plus de 30 consacrés à la prospective), vendus à plus de 10 millions d'exemplaires et traduits en 22 langues.Il est chroniqueur pour les quotidiens économiques Les Echos et Nikkei, après avoir également collaboré avec L'Express.
Jacques Attali dirige régulièrement des orchestres à travers le monde.
Let’s dream a little: 2026 could be the year of Good.
Some will say that this is not the most likely scenario and that,
given what has happened over the past year, we should expect much worse
over the next twelve months. The most likely scenario is that 2026 will
be marked by worsening climate disruption, accelerating water shortages
in large parts of the world, increasing artificialization of land and
food, an expansion of the theater of conflict from Eastern Europe to the
Baltic states, more massacres in Sudan and Nigeria, and a worsening
situation for women in Afghanistan, Iran and many other countries. We
can also expect the global reign of fake news, the open installation of a
Nero dictatorship in the United States, using trickery and terror to
win the meaningless November elections; we can also anticipate the
departure of most American troops from Europe, their landing in
Greenland, terrorist attacks on an unprecedented scale, a rise in
anti-Semitism on both the left and the right, and the continuation of
the criminal and suicidal policies of the current Israeli government. We
can expect the dismantling of the European Union to continue, by
increasingly nationalistic governments. We can also imagine the
likelihood of an extremist victory in local elections in France, and the
open rallying of a large proportion of European employers and
right-wing liberal parties to the far right, paving the way for a
confrontation, in the second round of presidential elections the
following year, between two identitarian parties, both national
populists, hostile to European construction and pro-Russian.
To this we could add, on a global scale, the acceleration of the
evolution of AI until it reaches autonomy from humans, with all the
nightmarish consequences we can imagine as early as next year.
All this is perfectly plausible, in fact it’s the most likely.
But it’s not certain. On the contrary, we can imagine, hope and succeed in a completely different 2026:
In the USA, the anti-Trump Republicans could join forces with the
Democrats to put a stop to the madness of a president who violates the
Constitution more and more every day, and who is increasingly openly
surrounded by Russian agents; this alliance could swing the Senate and
the House of Representatives to the Democrats, significantly reducing
the president’s powers and restoring some of the lost grandeur of
American democracy.
In Israel, the center and left parties could win the 2026 elections,
send Netanyahu to prison and the religious parties back to their
intolerable obscurantism, regaining the soul of early secular Zionism;
in Palestine, we can still hope to see courageous, uncorrupted leaders
finally eliminate Hamas and the other terrorist forces and return to the
path of peace through the two-state solution.
In Russia, we can imagine part of the elite becoming aware of the
impasse reached by the suicidal policies of the current leaders, and
seeing them force the authorities into a lasting ceasefire; and even a
liberalization of the regime, a condition for Russia to finally regain
its rightful place in the concert of nations.
In Europe, next year, more and more leaders may at last become aware
of the continent’s solitude and finally launch a major program of
military and technological sovereignty, in the sectors of the future,
while respecting the cultural and democratic identity of each of them,
and while enlarging their Union to all the other countries of the
continent, including Ukraine and the Balkans.
We can also hope that they will understand that their demographic
future depends as much on their housing and family policies as on what
they do to seriously and sustainably integrate into their culture and
values the foreigners they will necessarily continue to welcome.
In France, democratic parties can win the local elections of March
2026, demonstrating that they still have a large majority in public
opinion and that they can push back the identity-based temptations of
the far left and far right, ensure the triumph of a demanding secularism
and produce credible candidates for the presidential elections the
following year; with programs to be drawn up in 2026, taking note of the
need to massively reduce the innumerable wastes of public money,
unwarranted subsidies to lobbies, useless layers of bureaucracy and
intolerable duplication of effort, lightening taxes and reducing
deficits, while giving far more resources to all sectors of the life
economy, and first and foremost to health, education, healthy food,
housing, environmental protection and safety.
Last but not least, we can expect that by 2026, humanity will have
discovered and implemented new ways to better protect nature, to promote
local agriculture, to eat healthily, to treat and cure hitherto
incurable diseases, to reduce pain, to ‘teach with less effort and much
better to all the erudition necessary to everyone.
What will separate the year of good from the year of evil?
The same thing that separates, in each of us, cowardice from the will
to react to a threat; resignation to the inevitable from its refusal;
the naming of scapegoats from the lucid search for a courageous
response; surrender to the forces of the world from the decision to
rebel against them. Without waiting for disaster to strike before trying
to guard against it.
Yes, 2026 can be the year of the Good: you don’t have to wait until you’ve lost a war to join the resistance.
Jacques ATTALI
Jacques Attali has a PhD in economics, is a graduate from the Ecole
Polytechnique and a State Councillor. Special advisor to French
President François Mitterrand for ten years, he is the founder of four
international institutions: Action Against Hunger, Eureka, EBRD,
Positive Planet.
Jacques Attali is the author of 86 books (including more than 30
specifically dedicated to the future analysis), sold to more than 10
million copies and translated into 22 languages. He is a columnist for
the financial newspapers Les Echos and Nikkei, after having also been one for L’Express.
Jacques Attali also regularly conducts orchestras around the world.
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