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Je vous convie à lire ce nouveau message. Des commentaires seraient souhaitables, notamment sur les posts référencés: à débattre, réflexions...Merci de vos lectures, et de vos analyses.
Sommaire:
A) Prélèvements obligatoires TVA - Cour des comptes
B) Impôt de Wikiberal
A) Prélèvements obligatoires TVA
Le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) rend public un rapport
sur la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). La TVA est le premier impôt en
termes de rendement, avec un produit attendu de 156 Md€ en 2016). Elle
concerne l’ensemble des agents économiques et représente l’une des
principales réalisations de l’harmonisation fiscale européenne. Elle a
constitué une innovation fiscale majeure : aujourd’hui, 153 des 193 pays
du monde ont adopté une taxe inspirée de la TVA française. Le CPO s’est
attaché à analyser dans quelle mesure la TVA est restée ou non conforme
à ses objectifs fondamentaux : la neutralité économique et fiscale, la
simplicité administrative et le rendement budgétaire. À l’issue de ses
travaux, il réaffirme que la couverture des dépenses publiques doit
demeurer l’objectif prioritaire de la TVA, a fortiori dans un contexte
de crise des finances publiques. La nécessaire amélioration de son
rendement invite à un réexamen de la pertinence des dispositifs
dérogatoires en termes d’assiette et de taux réduits, et à un
renforcement de la lutte contre la fraude.
Un impôt toujours dynamique mais éloigné de ses objectifs initiaux
Créée
en 1954, la TVA a été conçue comme un impôt à assiette large destiné à
alimenter le budget de l’État sans pénaliser l’activité économique.
Malgré
certaines avancées récentes, la directive européenne « TVA » semble
aujourd’hui figée, alors que des points en suspens, comme
l’assujettissement de certaines activités des personnes publiques à la
TVA, méritent d’être tranchés par les États membres.
La TVA représente plus de la moitié des recettes de l’État, mais connaît
une situation atypique en France : sa part dans le PIB (6,9 % en 2014)
et dans les prélèvements obligatoires (15,3 %) s’est dégradée au cours
des dernières années, et les taux en vigueur y sont désormais inférieurs
à la moyenne européenne. Cette situation s’explique par l’existence de
près de 150 mesures dérogatoires, représentant un coût annuel d’environ
48 Md€. En outre, la fraude à la TVA constitue un manque à gagner non
négligeable pour le budget de l’État, estimé à au moins 10 Md€ par an.
Simple dans son principe, la TVA est devenue complexe dans son application, ce qui peut entraîner une insécurité juridique pour les entreprises qui la collectent.
Simple dans son principe, la TVA est devenue complexe dans son application, ce qui peut entraîner une insécurité juridique pour les entreprises qui la collectent.
Un instrument d’incitation économique et de redistribution peu efficace
La TVA n’apparaît pas adaptée à la poursuite d’objectifs de politique économique ou de redistribution.
D’une part, son effet de lissage du cycle conjoncturel s’avère faible.
D’autre
part, ses taux réduits ne sont pas l’instrument le plus pertinent pour
subventionner un secteur particulier. Ils constituent en outre des
instruments coûteux et peu efficaces de la politique de l’emploi. Ainsi,
dans la restauration, l’introduction du taux réduit a coûté, par emploi
créé, deux à trois fois plus cher que les dispositifs de soutien direct
à l’emploi.
Enfin, ses effets distributifs en font un impôt
régressif, c’est-à-dire que les taux réduits procurent toujours un
avantage supérieur aux ménages les plus aisés.
Le nécessaire recentrage de la TVA sur sa finalité budgétaire
Faute
d’être un instrument d’incitation économique et de redistribution
efficace, la TVA doit être recentrée sur sa vocation budgétaire,
d’autant plus que son potentiel de rendement reste insuffisamment
exploité.
Le CPO a examiné différentes options possibles pour
dynamiser les recettes de TVA, à l’exclusion d’une augmentation générale
du taux normal ou des taux réduits. La plupart de ces pistes relève de
la compétence du législateur national.
Un axe de progrès concerne
la sécurisation des recettes dues. L’administration fiscale dispose de
moyens nouveaux pour prévenir, détecter et lutter contre les différents
types de fraude ; elle doit les utiliser complètement, en liaison
étroite avec l’autorité judiciaire.
Une réflexion plus approfondie
doit également être conduite sur les activités de commerce en ligne,
qui bouleversent le cadre traditionnel de calcul et de collecte de
l’impôt. Le cadre juridique applicable aux ventes à distance, aux petits
envois et aux prestations de services fournies par voie électronique
est à cet égard très insuffisant.
Le CPO recommande notamment
l’élargissement de l’assiette de la TVA et la suppression des taux
réduits inefficaces. Parmi ceux-ci figurent deux dispositifs
représentant un montant total de 6,3 Md€ : celui pour les travaux
d’amélioration, de transformation, d’aménagement et d’entretien portant
sur des logements, et celui bénéficiant aux hôtels-cafés-restaurants.
Synthèse
décembre 2015
La taxe sur la valeur ajoutée (TVA) est
un impôt général sur la consommation
directement facturée aux clients sur
les biens qu’ils consomment et les
services qu’ils utilisent.
Plus de soixante ans après sa mise en œuvre en France, la TVA occupe toujours une place à part dans le système des prélèvements obligatoires français en raison de plusieurs de ses singularités :
- avec un produit net attendu de 156 Md€ en 2016, elle constitue le premier impôt en termes de rendement et le deuxième prélèvement obligatoire, après les cotisations sociales ;
- elle concerne l’ensemble des agents économiques, qu’ils soient redevables ou contribuables, même si la charge fiscale est essentiellement supportée, d’un point de vue comptable, par les ménages ;
- elle représente, avec les accises, l’une des principales réalisations de l’harmonisation fiscale européenne, les règles applicables étant largement définies à l’échelle de l’Union.
Plus de soixante ans après sa mise en œuvre en France, la TVA occupe toujours une place à part dans le système des prélèvements obligatoires français en raison de plusieurs de ses singularités :
- avec un produit net attendu de 156 Md€ en 2016, elle constitue le premier impôt en termes de rendement et le deuxième prélèvement obligatoire, après les cotisations sociales ;
- elle concerne l’ensemble des agents économiques, qu’ils soient redevables ou contribuables, même si la charge fiscale est essentiellement supportée, d’un point de vue comptable, par les ménages ;
- elle représente, avec les accises, l’une des principales réalisations de l’harmonisation fiscale européenne, les règles applicables étant largement définies à l’échelle de l’Union.
Compte tenu de ces enjeux, le Conseil
des prélèvements obligatoires (CPO)
a décidé de consacrer une étude à la
TVA dans toutes ses dimensions –
juridique, économique et budgétaire –,
en articulant ses travaux autour de la
problématique suivante : dans un
contexte de crise économique et de
fortes tensions budgétaires, quelle
peut être la place de la TVA dans le
système des prélèvements obligatoires
français ?
Pour répondre à cette interrogation, le CPO s’est attaché à analyser dans quelle mesure la TVA était restée ou non conforme à ses objectifs fonda- teurs : la neutralité, entendue au sens économique et fiscal, la simplicité administrative et le rendement budgétaire.
À l’issue de ses travaux qui ont donné lieu à six rapports particuliers théma- tiques également consultables en ligne, le CPO, ayant constaté que la TVA s’était éloignée de ces objectifs fondateurs, formule des orientations pour l’en rapprocher davantage.
Pour répondre à cette interrogation, le CPO s’est attaché à analyser dans quelle mesure la TVA était restée ou non conforme à ses objectifs fonda- teurs : la neutralité, entendue au sens économique et fiscal, la simplicité administrative et le rendement budgétaire.
À l’issue de ses travaux qui ont donné lieu à six rapports particuliers théma- tiques également consultables en ligne, le CPO, ayant constaté que la TVA s’était éloignée de ces objectifs fondateurs, formule des orientations pour l’en rapprocher davantage.
Un impôt toujours dynamique
mais éloigné de ses objectifs
initiaux
La TVA a été conçue comme un impôt
à assiette large destiné à alimenter le
budget de l’État sans pénaliser excessivement l’activité économique. Créée
en 1954, elle s’est substituée à une
multitude de taxes sur la production
qui, sans possibilité de déduction,
pesaient sur la compétitivité des
entreprises et sur les exportations.
Un impôt harmonisé à l’échelle européenne
La mise en œuvre du marché commun à partir de la fin des années 1960 a rendu nécessaires la généralisation et l’harmonisation de la TVA à l’échelle de la Communauté économique euro- péenne. Si elle est aujourd’hui très encadrée par le droit de l’Union, les États membres n’en disposent pas moins de marges de manœuvre importantes, notamment sur le champ d’application de la taxe, les taux et les droits à déduction. Sources de complexité pour les entreprises, celles-ci sont de nature à engendrer des situations de distorsion de concurrence qui nuisent au bon fonctionnement du marché intérieur. Ainsi, selon la Commission européenne, les coûts de conformité à la législation pour les entreprises représenteraient entre 2 % et 8 % des montants de TVA perçus.
Un impôt harmonisé à l’échelle européenne
La mise en œuvre du marché commun à partir de la fin des années 1960 a rendu nécessaires la généralisation et l’harmonisation de la TVA à l’échelle de la Communauté économique euro- péenne. Si elle est aujourd’hui très encadrée par le droit de l’Union, les États membres n’en disposent pas moins de marges de manœuvre importantes, notamment sur le champ d’application de la taxe, les taux et les droits à déduction. Sources de complexité pour les entreprises, celles-ci sont de nature à engendrer des situations de distorsion de concurrence qui nuisent au bon fonctionnement du marché intérieur. Ainsi, selon la Commission européenne, les coûts de conformité à la législation pour les entreprises représenteraient entre 2 % et 8 % des montants de TVA perçus.
Malgré certaines avancées récentes,
concernant en particulier le lieu
d’imposition des prestations de services
électroniques, la « directive TVA »
semble aujourd’hui figée alors que
certains points en suspens méritent
d’être tranchés par les États membres,
comme l’assujettissement de certaines
activités des personnes publiques à la
TVA, et que les règles sont encore
insuffisamment harmonisées.
Cette situation de blocage favorise l’autonomie et la créativité de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne. Elle contribue à entretenir une forme d’insécurité juridique pour les redevables dans un contexte où, par ailleurs, l’hétérogénéité des systèmes de TVA s’est accrue au sein de l’Union.
La Commission européenne a engagé depuis 2010 un mouvement de réforme pour « un système de TVA plus simple, plus robuste et plus efficace » mais les avancées sont faibles en raison de la règle de l’unanimité qui prévaut en matière fiscale au sein du Conseil de l’Union européenne.
Cette situation de blocage favorise l’autonomie et la créativité de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne. Elle contribue à entretenir une forme d’insécurité juridique pour les redevables dans un contexte où, par ailleurs, l’hétérogénéité des systèmes de TVA s’est accrue au sein de l’Union.
La Commission européenne a engagé depuis 2010 un mouvement de réforme pour « un système de TVA plus simple, plus robuste et plus efficace » mais les avancées sont faibles en raison de la règle de l’unanimité qui prévaut en matière fiscale au sein du Conseil de l’Union européenne.
Une ressource dynamique mais
fragile
Avec un produit attendu de près de 156 Md€ en 2016, la TVA représente plus de la moitié des recettes de l’État, et de ce fait, apporte une contribution essentielle au finance- ment des dépenses publiques. Elle est moins sensible à la conjoncture que d’autres impôts, notamment l’impôt sur les sociétés, et donc plus aisément prévisible. Ses coûts de gestion, estimés à environ 700 M€, sont inférieurs à ceux des autres grands impôts, en raison de leur externalisation partielle aux entreprises qui en supportent la collecte et le reversement au Trésor public.
Avec un produit attendu de près de 156 Md€ en 2016, la TVA représente plus de la moitié des recettes de l’État, et de ce fait, apporte une contribution essentielle au finance- ment des dépenses publiques. Elle est moins sensible à la conjoncture que d’autres impôts, notamment l’impôt sur les sociétés, et donc plus aisément prévisible. Ses coûts de gestion, estimés à environ 700 M€, sont inférieurs à ceux des autres grands impôts, en raison de leur externalisation partielle aux entreprises qui en supportent la collecte et le reversement au Trésor public.
Malgré un triplement de la recette entre
1971 et 2014, le potentiel de rendement
de la TVA reste insuffisamment
exploité. La France se trouve aujourd’hui
dans une situation atypique par rapport
à la moyenne des autres pays européens
et industrialisés : la part de la TVA
dans le PIB (6,9 % en 2014) et dans
les prélèvements obligatoires
(15,3 %) s’est dégradée au cours des
dernières années et les taux en
vigueur sont désormais inférieurs à la
moyenne européenne. Ainsi, par
exemple, le taux nominal normal
s’établit à 20 % en France contre
21,8 % en moyenne dans l’Union. Le
taux moyen pondéré (15,4 %) est
parmi les plus faibles en Europe et le
taux réduit moyen pondéré (5,7 %) est
inférieur de plus de deux points à celui
de la moyenne des états européens.
Part de la TVA dans les prélèvements obligatoires (1965-2013)
Source : CPO (données : OCDE).
Cette situation s’explique par l’existence
de près de 150 mesures dérogatoires –
exonérations ou taux réduits bénéficiant
à un secteur ou à une zone géogra-
phique –, représentant un coût total
annuel d’environ 48 Md€. Ces mesures,
auxquelles il conviendrait d’ajouter
les franchises, érodent le rendement
potentiel total brut de la TVA. Ce dernier qui est estimé pour la France
par la Commission européenne et
l’OCDE entre 297 et 323 Md€, corres-
pond à la taxation à taux normal de
l’ensemble de l’assiette potentiellement
taxable (incluant les services financiers
et les prestations réalisées par les
administrations publiques par exemple).
En outre, la fraude à la TVA, qui peut
revêtir de nombreuses formes, constitue
un manque à gagner non négligeable
pour le budget de l’État, estimé au moins
à 10 Md € par an. Le CPO n’a pas été en
mesure de fournir une évaluation plus
précise en raison des limites méthodo-
logiques et de l’absence de données
publiques disponibles. À cet égard, il
est regrettable que l’administration française ne publie pas, sur une base
régulière, d’estimation officielle de
la fraude à la TVA. Des marges de
progrès existent pour mieux lutter
contre la fraude si l’on considère les
résultats décevants du contrôle fiscal
au cours des dernières années,
notamment en ce qui concerne la
programmation des contrôles.
Un impôt simple dans son
principe mais en pratique de plus
en plus complexe
Simple dans son principe, la TVA est devenue plus complexe dans son appli- cation. Or l’exigence de simplicité est supérieure pour la TVA à ce qu’elle est pour les impôts directs, dès lors qu’elle frappe toutes les transactions et que sa collecte est assurée par les opérateurs économiques.Au regard de cette exigence particulière, le système de TVA est devenu plus complexe malgré des mesures de simplification récemment adoptées.
La complexité des règles applicables, en matière de taux comme de droits à déduction, peut engendrer une insécurité pour les assujettis et introduire une certaine subjectivité dans le traitement des biens et des services, selon leur mode de production ou de distribution. Dans un souci de simplification et d’objectivation de l’impôt, une revue générale des taux réduits pourrait être effectuée pour limiter les situations dans lesquelles un même produit peut être taxé à plusieurs taux différents.
Compte tenu du fait que la TVA est collectée pour le compte de l’État par ses assujettis, l’administration fiscale doit veiller avec une diligence particulière à répondre aux demandes de rescrits qu’ils formulent à son attention. Au-delà de la qualité et de la fluidité des échanges entre l’administration et les redevables, ce sont les règles elles-mêmes qui doivent être simplifiées. Le CPO en a identifié quelques-unes à titre d’illustrations.
Simple dans son principe, la TVA est devenue plus complexe dans son appli- cation. Or l’exigence de simplicité est supérieure pour la TVA à ce qu’elle est pour les impôts directs, dès lors qu’elle frappe toutes les transactions et que sa collecte est assurée par les opérateurs économiques.Au regard de cette exigence particulière, le système de TVA est devenu plus complexe malgré des mesures de simplification récemment adoptées.
La complexité des règles applicables, en matière de taux comme de droits à déduction, peut engendrer une insécurité pour les assujettis et introduire une certaine subjectivité dans le traitement des biens et des services, selon leur mode de production ou de distribution. Dans un souci de simplification et d’objectivation de l’impôt, une revue générale des taux réduits pourrait être effectuée pour limiter les situations dans lesquelles un même produit peut être taxé à plusieurs taux différents.
Compte tenu du fait que la TVA est collectée pour le compte de l’État par ses assujettis, l’administration fiscale doit veiller avec une diligence particulière à répondre aux demandes de rescrits qu’ils formulent à son attention. Au-delà de la qualité et de la fluidité des échanges entre l’administration et les redevables, ce sont les règles elles-mêmes qui doivent être simplifiées. Le CPO en a identifié quelques-unes à titre d’illustrations.
La complexité de la TVA se retrouve
également dans les formalités déclaratives, parfois inutilement complexes,
auxquelles les entreprises sont soumises.
Pouvant constituer une charge importante
pour les opérateurs économiques, elles
devraient être aussi simples que possible,
tout en tenant compte des impératifs
légitimes de lutte contre la fraude.
Un impôt visant à préserver l’efficacité productive
Sur le plan économique, l’assiette de la TVA, contrairement à ce que la dénomination de cet impôt laisse penser, est plus proche de la consommation que de la valeur ajoutée. Les principes fondateurs de la TVA, posés par la loi du 10 décembre 1954, visaient à taxer la consommation des ménages, tout en s’affranchissant des inconvénients inhérents aux différentes taxes en cascade sur la consommation. Chaque fraction de la chaîne de production n’est en effet taxée qu’une seule fois et l’impôt est collecté par portions à chaque étape de la création de valeur. En pratique, ce ne sont pas les contribuables qui reversent la taxe au Trésor public, mais les assujettis (les vendeurs de biens et prestataires de services), via le mécanisme des paiements fractionnés1.
Un impôt visant à préserver l’efficacité productive
Sur le plan économique, l’assiette de la TVA, contrairement à ce que la dénomination de cet impôt laisse penser, est plus proche de la consommation que de la valeur ajoutée. Les principes fondateurs de la TVA, posés par la loi du 10 décembre 1954, visaient à taxer la consommation des ménages, tout en s’affranchissant des inconvénients inhérents aux différentes taxes en cascade sur la consommation. Chaque fraction de la chaîne de production n’est en effet taxée qu’une seule fois et l’impôt est collecté par portions à chaque étape de la création de valeur. En pratique, ce ne sont pas les contribuables qui reversent la taxe au Trésor public, mais les assujettis (les vendeurs de biens et prestataires de services), via le mécanisme des paiements fractionnés1.
(1) Cette dissociation entre les redevables et les contribuables existe également pour les cotisations
sociales salariales par exemple. Elles sont dues par les salariés mais étant prélevées à la source, ces
derniers ne sont pas chargés de les verser à l’État ou aux administrations de sécurité sociale.
L’assiette économique réelle de la TVA
se compose de la consommation des
ménages, des dépenses publiques et
d’un reliquat d’achats des entreprises.
Les exportations ne sont pas exonérées
de TVA, alors que les importations y
sont assujetties au moment de leur
entrée sur le territoire. Cette assiette
est proche, sans être strictement
équivalente, de celle des cotisations
sociales employeurs. Elle est différente
de celle de la cotisation sur la valeur
ajoutée (CVAE), impôt local qui a
remplacé la taxe professionnelle. En
effet, cette dernière s’applique à la
valeur ajoutée brute de la dépréciation
du capital. À la différence de la TVA, la
CVAE pèse sur les exportations et sur
l’investissement. Le mécanisme des
paiements fractionnés ou le droit à
déduction distinguent également la
TVA d’une taxe sur le chiffre d’affaires,
comme par exemple la contribution
sociale de solidarité des sociétés, ou
d’une taxe sur les ventes (sales tax),
comme celle appliquée par exemple
aux États-Unis. À long terme, la TVA
pèse ainsi peu sur le capital productif.
Sa neutralité économique en termes
d’efficacité productive confère à la
TVA un caractère relativement peu
« distorsif » de la TVA : elle est théoriquement neutre pour les producteurs
qui ont la possibilité de la déduire de
leurs intrants. Elle ne perturbe donc
pas les choix de production. Cette
neutralité est en réalité imparfaite en
raison des rémanences, c’est-à-dire
des dépenses de TVA non récupérables,
auxquelles font face les entreprises,
notamment financières ainsi que les
administrations publiques. Ces
rémanences peuvent avoir des
effets « distorsifs » selon la capacité
des assujettis à les répercuter plus ou
moins sur les prix de consommation.
Un instrument d’incitation
économique et de redistribution
peu efficace
La multiplication des taux réduits
sectoriels, les mesures de dévaluation
fiscale – auxquelles s’apparente la
« TVA sociale » – ou encore les débats
relatifs aux effets redistributifs de la
TVA, témoignent de son utilisation
comme outil de politique économique.
Pourtant, la TVA n’apparaît pas
comme un impôt adapté à la poursuite
d’objectifs de politique économique tels
que la régulation du cycle économique,
le soutien à des secteurs spécifiques ou
encore comme un outil de redistribution.
Un impôt dont l’effet de régulation du cycle économique est limité
L’efficacité de la TVA en termes de régulation « passive » du cycle écono- mique - c’est-à-dire en l’absence de mesures nouvelles sur l’assiette ou les taux - paraît d’abord limitée : elle n’exerce en effet qu’un faible effet de stabilisateur automatique, l’élasticité de ses recettes au PIB étant quasi unitaire. L’effet de lissage du cycle conjoncturel par la TVA s’avère ainsi faible compara- tivement, par exemple, à l’impôt sur les sociétés.
Au-delà de sa fonction de stabilisateur automatique, la TVA peut potentiellement être employée comme un instrument de régulation « active » du cycle économique, en modifiant les taux ou l’assiette selon la conjoncture. En bas de cycle, l’effet contra-cyclique théorique d’une baisse de taux pourrait être significatif, mais elle n’est pas fréquemment utilisée à cet effet. En outre, une utilisation expansionniste de la TVA en phase de conjoncture basse présente des risques déflationnistes. Symétriquement, elle ne semble pas non plus être utilisée comme un instrument de régulation de la conjoncture en haut de cycle. La TVA est au contraire plus communé- ment utilisée comme instrument de consolidation budgétaire. Son taux normal a ainsi augmenté de deux points en moyenne entre 2008 et 2014 dans l’ensemble des pays de l’Union européenne (pour s’établir à 21,4 % en 2014).
Un impôt dont l’effet de régulation du cycle économique est limité
L’efficacité de la TVA en termes de régulation « passive » du cycle écono- mique - c’est-à-dire en l’absence de mesures nouvelles sur l’assiette ou les taux - paraît d’abord limitée : elle n’exerce en effet qu’un faible effet de stabilisateur automatique, l’élasticité de ses recettes au PIB étant quasi unitaire. L’effet de lissage du cycle conjoncturel par la TVA s’avère ainsi faible compara- tivement, par exemple, à l’impôt sur les sociétés.
Au-delà de sa fonction de stabilisateur automatique, la TVA peut potentiellement être employée comme un instrument de régulation « active » du cycle économique, en modifiant les taux ou l’assiette selon la conjoncture. En bas de cycle, l’effet contra-cyclique théorique d’une baisse de taux pourrait être significatif, mais elle n’est pas fréquemment utilisée à cet effet. En outre, une utilisation expansionniste de la TVA en phase de conjoncture basse présente des risques déflationnistes. Symétriquement, elle ne semble pas non plus être utilisée comme un instrument de régulation de la conjoncture en haut de cycle. La TVA est au contraire plus communé- ment utilisée comme instrument de consolidation budgétaire. Son taux normal a ainsi augmenté de deux points en moyenne entre 2008 et 2014 dans l’ensemble des pays de l’Union européenne (pour s’établir à 21,4 % en 2014).
Un instrument d’incitation économique peu efficace
Les taux réduits de TVA sont utilisés comme un instrument de politique économique dans une grande variété de secteurs et pour des objectifs multiples : soutien à l’emploi, au pouvoir d’achat des consommateurs ou aux entreprises, lutte contre l’activité non déclarée, etc.
D’un point de vue théorique, les cas dans lesquels ils sont pertinents paraissent limités, d’autres instruments comme les accises ou la fiscalité directe apparaissant plus efficaces pour atteindre certains objectifs comme la correction d’externalités.
D’un point de vue empirique, l’utilisation
de taux réduits sectoriels constitue
fréquemment une réponse face à
l’impossibilité de recourir, pour des
motifs juridiques, à des baisses de
charges ciblées sur un domaine
d’activité spécifique. Le taux réduit
de TVA n’apparaît pourtant pas
comme l’instrument le plus pertinent
pour subventionner un secteur en
particulier. Le partage de l’effet de la
baisse de TVA entre le producteur et
le consommateur est en effet difficile
à prévoir ex ante. Il n’est le plus souvent
pas mesuré non plus ex post. Les
taux réduits liés à des considérations
d’efficacité économique restent très
insuffisamment évalués.
En outre, plusieurs taux réduits fixés pour des considérations d’efficacité économique, comme le taux réduit dans la restauration et les hôtels ou celui pour les travaux de rénovation et d’entretien des logements, constituent des instruments peu efficaces de la politique de l’emploi. Dans la restauration,l’abaissement du taux de TVA a été répercuté à hauteur de 20 % sur les prix TTC à moyen terme (entre juillet 2009 et décembre 2011) et un peu moins de 30 % de l’effet aurait conduit à des revalorisations salariales. La répercussion sur les marges des entreprises aurait ainsi été forte, alors que le nombre d’emplois créés serait de l’ordre de 6 000 à 9 000 emplois supplémentaires par an. Le coût par emploi créé par le taux réduit dans la restauration (175 000 € à 262 000 €) dépasse ainsi largement celui estimé pour les dispositifs de soutien direct à l’emploi auxquels il s’est substitué (86 000 € par emploi pour la prime forfaitaire à l’emploi sectorielle) ou avec lesquels il coexiste (entre 34000 € et 42000 € par emploi pour les exonérations de cotisations sociales sur les bas salaires en évaluation exante).
En outre, plusieurs taux réduits fixés pour des considérations d’efficacité économique, comme le taux réduit dans la restauration et les hôtels ou celui pour les travaux de rénovation et d’entretien des logements, constituent des instruments peu efficaces de la politique de l’emploi. Dans la restauration,l’abaissement du taux de TVA a été répercuté à hauteur de 20 % sur les prix TTC à moyen terme (entre juillet 2009 et décembre 2011) et un peu moins de 30 % de l’effet aurait conduit à des revalorisations salariales. La répercussion sur les marges des entreprises aurait ainsi été forte, alors que le nombre d’emplois créés serait de l’ordre de 6 000 à 9 000 emplois supplémentaires par an. Le coût par emploi créé par le taux réduit dans la restauration (175 000 € à 262 000 €) dépasse ainsi largement celui estimé pour les dispositifs de soutien direct à l’emploi auxquels il s’est substitué (86 000 € par emploi pour la prime forfaitaire à l’emploi sectorielle) ou avec lesquels il coexiste (entre 34000 € et 42000 € par emploi pour les exonérations de cotisations sociales sur les bas salaires en évaluation exante).
La TVA2 applicable aux travaux de
rénovation et d’entretien des logements correspond à la création ou à la
sauvegarde de 32 000 emplois, dont
14 000 dans le bâtiment. Le coût brut
ex post pour les finances publiques
par emploi créé ou maintenu s’élève-
rait à 160 000 €, soit nettement plus
que par le biais d’une baisse de
cotisations sociales.
Indépendamment de toute appréciation portée sur l’opportunité de soutenir ces secteurs spécifiques, le recours à la TVA se révèle peu efficace. Une baisse ciblée du taux, dont les effets ne se font sentir que de manière indirecte, conduit les assujettis à arbitrer entre plusieurs objectifs - amélioration des marges, baisse des prix à la consommation, soutien au salaire ou à l’emploi -, rendant d’autant plus incertaine la réalisation de l’objectif poursuivi.
Indépendamment de toute appréciation portée sur l’opportunité de soutenir ces secteurs spécifiques, le recours à la TVA se révèle peu efficace. Une baisse ciblée du taux, dont les effets ne se font sentir que de manière indirecte, conduit les assujettis à arbitrer entre plusieurs objectifs - amélioration des marges, baisse des prix à la consommation, soutien au salaire ou à l’emploi -, rendant d’autant plus incertaine la réalisation de l’objectif poursuivi.
(2) Taux réduit et, depuis 2012, taux intermédiaire.
Un outil de redistribution peu
pertinent
La TVA n’apparaît pas non plus être un outil de redistribution pertinent. Ses effets distributifs, c’est-à-dire la mesure par laquelle son assujettissement ou non modifie la répartition des revenus des ménages, concluent que la TVA est régressive. Le taux d’effort3 s’élève à 12,5 % pour le premier décile de niveau de vie, diminue jusqu’à 4,7 % environ pour le décile le plus élevé.
La régressivité de la TVA par rapport au revenu s’explique essentiellement par la très forte augmentation du taux d’épargne selon le décile de niveau de vie. Le poids de la TVA dans la consommation des ménages est d’abord croissant avec le niveau de vie. Le taux de taxation apparent4 fait ainsi apparaître une légère progressivité de la TVA. Il varie en effet très peu selon le décile de niveau de vie : de 12,6 % pour le premier décile de niveau de vie à 13,4 % pour le dernier décile.
Ensuite, l’effet régressif de la TVA serait atténué en prenant en compte une perspective de cycle de vie, c’est-à-dire une mesure à un moment donné. L’approche par le cycle de vie permet de neutraliser les effets de l’épargne « transitoire », qui n’échappe à la TVA que de façon temporaire puisqu’elle sera consommée par la suite. Enfin, l’effet distributif d’une hausse de la TVA ne se limite pas à l’impact sur les prix de consommation. Du fait de mécanismes d’indexation différenciés et plus ou moins automatiques des différents types de revenus (SMIC, prestations sociales, etc.), les ménages seraient impactés à des degrés divers par une variation des taux de TVA entraînant une variation des prix à la consommation.
La TVA n’apparaît pas non plus être un outil de redistribution pertinent. Ses effets distributifs, c’est-à-dire la mesure par laquelle son assujettissement ou non modifie la répartition des revenus des ménages, concluent que la TVA est régressive. Le taux d’effort3 s’élève à 12,5 % pour le premier décile de niveau de vie, diminue jusqu’à 4,7 % environ pour le décile le plus élevé.
La régressivité de la TVA par rapport au revenu s’explique essentiellement par la très forte augmentation du taux d’épargne selon le décile de niveau de vie. Le poids de la TVA dans la consommation des ménages est d’abord croissant avec le niveau de vie. Le taux de taxation apparent4 fait ainsi apparaître une légère progressivité de la TVA. Il varie en effet très peu selon le décile de niveau de vie : de 12,6 % pour le premier décile de niveau de vie à 13,4 % pour le dernier décile.
Ensuite, l’effet régressif de la TVA serait atténué en prenant en compte une perspective de cycle de vie, c’est-à-dire une mesure à un moment donné. L’approche par le cycle de vie permet de neutraliser les effets de l’épargne « transitoire », qui n’échappe à la TVA que de façon temporaire puisqu’elle sera consommée par la suite. Enfin, l’effet distributif d’une hausse de la TVA ne se limite pas à l’impact sur les prix de consommation. Du fait de mécanismes d’indexation différenciés et plus ou moins automatiques des différents types de revenus (SMIC, prestations sociales, etc.), les ménages seraient impactés à des degrés divers par une variation des taux de TVA entraînant une variation des prix à la consommation.
En l’état actuel, les exonérations et les
taux réduits de TVA présentent un faible
impact redistributif car l’effet plutôt
régressif du taux intermédiaire à 10 %
tend à compenser partiellement le
faible effet progressif du taux réduit à
5,5 %. Pour autant, même avec un
meilleur ciblage des exonérations et
des taux réduits, la TVA ne constituerait
pas un puissant instrument de redistribution, notamment en raison de la
faible différenciation des structures
de consommation.
(3) Le taux d’effort rapporte à leur revenu disponible le montant de TVA payé par les ménages
une année donnée.
(4) Le taux de taxation apparent rapporte le montant de TVA payé par les ménages une année donnée à leur consommation totale hors loyers.
(4) Le taux de taxation apparent rapporte le montant de TVA payé par les ménages une année donnée à leur consommation totale hors loyers.
De plus, l’avantage moyen procuré
par chaque taux réduit est toujours
supérieur pour le dixième décile par
rapport au premier décile de niveau
de vie, même pour les biens et les
services pour lesquels le taux réduit
est redistributif.
Ces écarts sont particulièrement importants pour les postes restauration et hôtellerie où ils sont de l’ordre de 1 à 10. L’avantage procuré par le taux de TVA à 10 % sur les services de restauration est de 11 € en moyenne par ménage pour le premier décile de revenus, il va jusqu’à 121 € pour le dernier décile. Sur l’ensemble des biens et des services imposés à taux réduits, l’avantage total s’élève en moyenne à 720 € pour un ménage du premier décile contre 2 015 € pour un ménage du dixième décile. Ces éléments doivent conduire à préférer la fiscalité directe plutôt que la TVA comme instrument de redistribution. Ils confortent le constat du Conseil des impôts sur la TVA dans son rapport de 2001 invitant à « garder à l’esprit qu’elle n’est pas adaptée à la poursuite d’objectifs redistributifs ».
Ces écarts sont particulièrement importants pour les postes restauration et hôtellerie où ils sont de l’ordre de 1 à 10. L’avantage procuré par le taux de TVA à 10 % sur les services de restauration est de 11 € en moyenne par ménage pour le premier décile de revenus, il va jusqu’à 121 € pour le dernier décile. Sur l’ensemble des biens et des services imposés à taux réduits, l’avantage total s’élève en moyenne à 720 € pour un ménage du premier décile contre 2 015 € pour un ménage du dixième décile. Ces éléments doivent conduire à préférer la fiscalité directe plutôt que la TVA comme instrument de redistribution. Ils confortent le constat du Conseil des impôts sur la TVA dans son rapport de 2001 invitant à « garder à l’esprit qu’elle n’est pas adaptée à la poursuite d’objectifs redistributifs ».
Ces constats conduisent ainsi à remettre en question un certain nombre de
taux réduits.
Avantage absolu procuré à chaque décile de niveau de vie
par le taux à 5,5 % et le taux à 10 % (en Md€)
Lecture : par rapport à une imposition au taux normal, le taux réduit à 5,5 % procure un avantage de 1,2 Md€ au premier décile de niveau de vie, à comportements inchangés.
Source : CPO, à partir du module « taxes indirectes » du modèle Ines (Insee-DREES), enquête Budget de famille 2011.
Lecture : par rapport à une imposition au taux normal, le taux réduit à 5,5 % procure un avantage de 1,2 Md€ au premier décile de niveau de vie, à comportements inchangés.
Source : CPO, à partir du module « taxes indirectes » du modèle Ines (Insee-DREES), enquête Budget de famille 2011.
Une utilisation possible de la TVA
comme un instrument de
dévaluation fiscale qui renvoie
plus largement aux politiques de
compétitivité et d’emploi
La TVA est fréquemment présentée comme pouvant être le support d’une politique de dévaluation fiscale alternative à la dévaluation monétaire dans un régime de changes fixes tel que la zone euro. Les effets attendus d’une telle politique dépendent en premier lieu de la modification du système fiscal choisi qui peut prendre différentes formes (diminution de l’impôt sur les sociétés ou des cotisations sociales employeurs en contrepartie d’une imposition accrue des revenus ou de la consommation voire d’une baisse des dépenses publiques). Les exportations en étant exonérées, une hausse de TVA concomitante à une baisse de la fiscalité pesant sur les facteurs de production doit permettre d’améliorer la compétitivité-prix à l’exportation. Les mesures de type « TVA sociale » constituent l’une des modalités de la dévaluation fiscale.
À long terme, un basculement du financement de la protection sociale sur la TVA aurait des effets d’autant plus importants que la baisse des cotisations sociales employeurs combinée à une hausse de la TVA (« TVA sociale ») induirait d’abord une baisse du taux de prélèvements obligatoires pesant sur le facteur travail, et se traduirait ensuite par une hausse de l’emploi et non par une hausse du pouvoir d’achat des travailleurs. L’impact d’une dévaluation fiscale via la TVA dépend également de l’effet sur le commerce extérieur et de la réaction des partenaires économiques. Empiriquement, une dévaluation fiscale s’appuyant sur la TVA pourrait avoir des effets significatifs à court terme, qui toutefois s’estomperaient à moyen-long terme.
La TVA est fréquemment présentée comme pouvant être le support d’une politique de dévaluation fiscale alternative à la dévaluation monétaire dans un régime de changes fixes tel que la zone euro. Les effets attendus d’une telle politique dépendent en premier lieu de la modification du système fiscal choisi qui peut prendre différentes formes (diminution de l’impôt sur les sociétés ou des cotisations sociales employeurs en contrepartie d’une imposition accrue des revenus ou de la consommation voire d’une baisse des dépenses publiques). Les exportations en étant exonérées, une hausse de TVA concomitante à une baisse de la fiscalité pesant sur les facteurs de production doit permettre d’améliorer la compétitivité-prix à l’exportation. Les mesures de type « TVA sociale » constituent l’une des modalités de la dévaluation fiscale.
À long terme, un basculement du financement de la protection sociale sur la TVA aurait des effets d’autant plus importants que la baisse des cotisations sociales employeurs combinée à une hausse de la TVA (« TVA sociale ») induirait d’abord une baisse du taux de prélèvements obligatoires pesant sur le facteur travail, et se traduirait ensuite par une hausse de l’emploi et non par une hausse du pouvoir d’achat des travailleurs. L’impact d’une dévaluation fiscale via la TVA dépend également de l’effet sur le commerce extérieur et de la réaction des partenaires économiques. Empiriquement, une dévaluation fiscale s’appuyant sur la TVA pourrait avoir des effets significatifs à court terme, qui toutefois s’estomperaient à moyen-long terme.
Du fait de son caractère non coopératif,
la dévaluation fiscale est porteuse d’un
effet de contagion : les pays qui
connaissent une baisse de leur volume
d’exportation en raison de la dévaluation
fiscale pratiquée par d’autres pays, sont
incités à adopter cette mesure à leur tour
pour rétablir leur compétitivité-prix.
Depuis 2006, quinze États membres de
l’Union européenne ont mis en œuvre
une politique de dévaluation fiscale en
basculant une part de leur assiette fiscale
des facteurs de production vers la
consommation : l’Allemagne, le Nord de
l’Europe, la Grèce, le Royaume-Uni, et la
plupart des pays d’Europe centrale et
orientale.
Dans le contexte de dévaluation fiscale multilatérale qui caractérise l’Union européenne au cours des dernières années, une politique de dévaluation fiscale en France aurait pu se justifier dans une logique de rattrapage et de compensation de la perte de compéti- tivité liée aux politiques de dévaluation fiscale opérées ces dernières années par ses partenaires européens. Le crédit d’impôt compétitivité-emploi et les mesures décidées dans le cadre du Pacte de responsabilité et de solidarité ont désormais réduit l’acuité du débat sur la dévaluation fiscale en France.
Dans le contexte de dévaluation fiscale multilatérale qui caractérise l’Union européenne au cours des dernières années, une politique de dévaluation fiscale en France aurait pu se justifier dans une logique de rattrapage et de compensation de la perte de compéti- tivité liée aux politiques de dévaluation fiscale opérées ces dernières années par ses partenaires européens. Le crédit d’impôt compétitivité-emploi et les mesures décidées dans le cadre du Pacte de responsabilité et de solidarité ont désormais réduit l’acuité du débat sur la dévaluation fiscale en France.
Le nécessaire recentrage de la
TVA sur sa finalité budgétaire
La TVA ne constitue pas un instrument d’incitation économique et de
redistribution efficace. Elle doit par
conséquent être recentrée sur vocation
budgétaire, d’autant plus que son
potentiel de rendement reste insuffisamment exploité.
Plutôt que de procéder à une aug- mentation générale du taux normal ou des taux réduits, susceptible de nuire, au moins à court terme, à l’activité économique, le potentiel de la TVA peut être relevé « à taux constants » en renforçant l’efficacité de cet impôt.
Le CPO a examiné les différentes options possibles pour dynamiser les recettes de TVA sans se prononcer toutefois sur l’affectation des ressources ainsi dégagées.
La plupart des pistes d’amélioration du rendement de la TVA suggérées par le Conseil relève de la compétence du législateur national et non des institutions de l’Union européenne.
La sécurisation de la recette légalement due
Le renforcement de l’efficacité de la TVA passe tout d’abord par une sécurisation de la recette légalement due, c’est-à-dire celle qui devrait en tout état de cause être collectée compte tenu du droit en vigueur. L’administration fiscale dispose de moyens nouveaux pour prévenir, détecter et lutter contre les différents types de fraude ; elle doit les utiliser complètement en liaison étroite avec l’autorité judiciaire, qui dispose également d’instruments efficaces, et avec les administrations fiscales des autres États membres. Certaines propositions innovantes mises en place dans d’autres pays européens, comme la déclaration électronique d’achats, devraient faire l’objet d’un examen attentif.
Plutôt que de procéder à une aug- mentation générale du taux normal ou des taux réduits, susceptible de nuire, au moins à court terme, à l’activité économique, le potentiel de la TVA peut être relevé « à taux constants » en renforçant l’efficacité de cet impôt.
Le CPO a examiné les différentes options possibles pour dynamiser les recettes de TVA sans se prononcer toutefois sur l’affectation des ressources ainsi dégagées.
La plupart des pistes d’amélioration du rendement de la TVA suggérées par le Conseil relève de la compétence du législateur national et non des institutions de l’Union européenne.
La sécurisation de la recette légalement due
Le renforcement de l’efficacité de la TVA passe tout d’abord par une sécurisation de la recette légalement due, c’est-à-dire celle qui devrait en tout état de cause être collectée compte tenu du droit en vigueur. L’administration fiscale dispose de moyens nouveaux pour prévenir, détecter et lutter contre les différents types de fraude ; elle doit les utiliser complètement en liaison étroite avec l’autorité judiciaire, qui dispose également d’instruments efficaces, et avec les administrations fiscales des autres États membres. Certaines propositions innovantes mises en place dans d’autres pays européens, comme la déclaration électronique d’achats, devraient faire l’objet d’un examen attentif.
Une réflexion plus approfondie doit
également être conduite à l’échelle
européenne mais aussi nationale sur
les conditions dans lesquelles la TVA
due doit être prélevée sur les activités
de commerce en ligne qui bouleversent
le cadre traditionnel de calcul et de
collecte de l’impôt. Le cadre juridique
applicable aux ventes à distance,
aux petits envois et aux prestations
de services fournies par la voie
électronique est à cet égard très
insuffisant. La récente proposition
formulée par la commission des
finances du Sénat d’un « prélèvement
à la source » mériterait d’être étudiée
plus avant, même si elle présente a
priori des difficultés, notamment
d’ordre technique.
L’élargissement de l’assiette
La TVA a été conçue pour s’appliquer à l’assiette la plus large possible afin de garantir sa neutralité. Demeurent pourtant de nombreuses exonérations dont le bien-fondé est insuffisamment évalué à l’instar de celle, coûteuse pour le budget de l’État (de l’ordre de 400 M€), bénéficiant aux services à la personne. De plus, même si une remise en cause d’une telle disposition serait neutre pour le solde des administrations publiques, la question de l’assujettisse- ment de certaines activités publiques concurrentielles peut être posée. Une baisse du plafond de la franchise en base, actuellement fixé à 82 000 € de chiffre d’affaires, au niveau de la moyenne européenne (32 000 €), sans pénaliser excessivement les entreprises concernées, dégagerait un surplus de recettes non négligeable pour le budget de l’État (au moins 2 Md€).
La suppression des taux réduits inefficaces
Les mesures dérogatoires portant sur les taux de TVA applicables à certains biens ou services méritent une attention toute particulière compte tenu du coût important qu’elles représentent pour les finances publiques (au moins 48 Md€). Chacune d’entre elles doit faire l’objet d’un examen à l’aune de quatre critères portant sur leur coût budgétaire, leur efficacité économique, leur finalité et leur caractère plus ou moins redistributif.
La TVA a été conçue pour s’appliquer à l’assiette la plus large possible afin de garantir sa neutralité. Demeurent pourtant de nombreuses exonérations dont le bien-fondé est insuffisamment évalué à l’instar de celle, coûteuse pour le budget de l’État (de l’ordre de 400 M€), bénéficiant aux services à la personne. De plus, même si une remise en cause d’une telle disposition serait neutre pour le solde des administrations publiques, la question de l’assujettisse- ment de certaines activités publiques concurrentielles peut être posée. Une baisse du plafond de la franchise en base, actuellement fixé à 82 000 € de chiffre d’affaires, au niveau de la moyenne européenne (32 000 €), sans pénaliser excessivement les entreprises concernées, dégagerait un surplus de recettes non négligeable pour le budget de l’État (au moins 2 Md€).
La suppression des taux réduits inefficaces
Les mesures dérogatoires portant sur les taux de TVA applicables à certains biens ou services méritent une attention toute particulière compte tenu du coût important qu’elles représentent pour les finances publiques (au moins 48 Md€). Chacune d’entre elles doit faire l’objet d’un examen à l’aune de quatre critères portant sur leur coût budgétaire, leur efficacité économique, leur finalité et leur caractère plus ou moins redistributif.
Au moins deux dispositifs, étudiés de
façon approfondie par le CPO et
représentant un montant total de
6,3 Md€, n’ont pas démontré leur
efficacité d’un point de vue écono-
mique, ne répondent à aucun objectif
tutélaire légitime et présentent un
profil clairement anti-redistributif : le
taux de 10 % pour les travaux
d’amélioration, de transformation,
d’aménagement et d’entretien portant
sur des logements et le taux de 10 %
bénéficiant aux hôtels-cafés-restaurants.
Source : CPO. Projet de loi de finances pour 2016, tome II du
rapport relatif à l’évaluation des voies et moyens.
CONCLUSION
La TVA occupe une place majeure
dans le système des prélèvements
obligatoires en France et constitue
l’une des principales réalisations de
l’Union européenne en matière
d’harmonisation fiscale. Plus de
soixante ans après sa création, elle
affiche un bilan contrasté. Le principe
d’un impôt sur la consommation à
paiement fractionné et donnant lieu à
un droit à déduction pour les opérateurs
économiques a été adopté par la quasi-
totalité des pays, à l’excepion toutefois
des État-unis d’Amérique.
Toutefois, l’évolution du droit, concomitant au bouleversement de la nature des échanges économiques, et l’utilisation de cet impôt à des fins de politique économique, l’ont en partie éloignée de ses objectifs fondateurs : la neutralité, la simplicité et le rendement.
Toutefois, l’évolution du droit, concomitant au bouleversement de la nature des échanges économiques, et l’utilisation de cet impôt à des fins de politique économique, l’ont en partie éloignée de ses objectifs fondateurs : la neutralité, la simplicité et le rendement.
Dans la continuité du rapport du
Conseil des impôts de 2001, le CPO
souhaite en particulier réaffirmer que,
a fortiori, dans un contexte de crise
des finances publiques, la couverture
des dépenses publiques doit demeurer
l’objectif prioritaire de la TVA. La
nécessaire amélioration de son rende-
ment invite à un réexamen de la
pertinence des dispositifs dérogatoires
à la fois en termes d’assiette et de taux
réduits et à un renforcement de la lutte
contre la fraude.
Détails ici en lien:
B) Impôt de Wikiberal
L'impôt est un prélèvement autoritaire et sans contrepartie directe en vue de couvrir les charges publiques (celles de l'État ou d'une collectivité publique).
L'Impôt strictement encadré (position libérale)
Qu'est-ce que la justice fiscale ?
Adam Smith établit quatre règles fiscales immuables dans son Essai sur la richesse des nations (1776), conditions minimales pour ne pas tomber dans l’arbitraire fiscal :
- égalité : chaque sujet contribue en proportion de ses facultés, c’est-à-dire en proportion de son revenu ;
- certitude : la portion d’impôt que chaque individu est tenu de payer doit être certaine, et non arbitraire (quand et comment s'effectue le paiement, pour quelle quantité) ;
- commodité : tout impôt doit être perçu à l’époque et selon le mode qui convient le mieux au contribuable ;
- économie : tout impôt doit être conçu de manière qu’il fasse sortir des mains du peuple le moins d’argent possible au-delà de ce qui entre dans le Trésor d'État.
Taxation et représentation
Un des principes libéraux concernant la fiscalité est "pas de
taxation sans représentation" : celui qui subit la fiscalité a le droit
de prendre part aux affaires publiques (au moins indirectement, par la démocratie représentative). C'est la Révolution américaine qui a consacré ce principe déjà énoncé dans le Bill of Rights anglais, les colons américains s'insurgeant contre de nouvelles taxes lors de la Boston Tea Party.
Contre la progressivité de l'impôt
Les libéraux non libertariens sont en général en faveur d'un impôt proportionnel (du type flat tax),
qui laisse intacts les rapports entre les différents revenus nets. En
revanche, ils sont opposés à l'impôt progressif, qu'ils jugent
confiscatoire et illégitime. La taxation est considérée comme une charge
pour couvrir les frais de la production des services offerts par
l'État. Au demeurant, l'impôt progressif avait été préconisé par Marx
et Engels comme une des premières mesures brutales que devrait prendre
le gouvernement révolutionnaire en vue de centraliser les décisions
économiques et de renverser in fine la « société capitaliste ».
Dans L'Action humaine, Ludwig von Mises
explicite admirablement l'une des raisons de l'opposition libérale à la
progressivité de l'impôt, en montrant qu'elle ferme l'accès à la
constitution de nouvelles fortunes et profite en fait aux fortunes
établies :
« Mais aujourd'hui, les impôts absorbent la plus grande part des profits « excessifs » du nouveau venu. Il ne peut accumuler du capital ; il ne peut étendre sa propre affaire ; il ne deviendra jamais une grande affaire et le rival des situations établies. Les firmes anciennes n'ont pas à redouter sa concurrence, elles sont abritées par le percepteur. Elles peuvent sans danger rester dans la routine, se moquer des désirs du public et refuser le changement. Il est vrai que le percepteur les empêche, elles aussi, d'accumuler du capital neuf. Mais le plus important pour elles est que le dangereux nouveau venu ne puisse pas accumuler de capitaux. Elles sont virtuellement privilégiées par le régime fiscal. En ce sens, la fiscalité progressive entrave le progrès économique et favorise la rigidité sociale. Alors que dans l'économie de marché non entravée la possession d'un capital est une source d'obligation forçant le possesseur à servir les consommateurs, les méthodes modernes de fiscalité la transforment en privilège. »
— Ludwig von Mises, L'Action humaine, 1949
Pour Friedrich Hayek, la progressivité est "une invitation à la discrimination et le prétexte à un pur arbitraire" (The Constitution of Liberty,
1960). Hayek donnait une autre conséquence provoquée par l'instauration
de l'impôt progressif : la déspécialisation. Quelqu'un sachant qu'il
sera beaucoup plus imposé en travaillant plus sera désincité à fournir
des efforts supplémentaires et préfèrera donc occuper autrement ses
heures qu'il aurait normalement consacrées à son labeur. Il optera pour
des loisirs ou pour des travaux qu'il exécutera lui-même, évitant ainsi
de devoir payer un homme du métier qu'il aurait dû rétribuer normalement
avec le salaire récompensant ses propres heures de travail spécialisé.
De plus, Hayek fait un sort à la croyance selon laquelle l'impôt
progressif serait bénéfique aux pauvres. Il invoque trois arguments à
l'appui de sa thèse :
- Les recettes obtenues par l'imposition des tranches élevées des revenus sont plutôt négligeables en comparaison des autres sources fiscales. Elles pourraient tout aussi bien être obtenues en instituant une légère hausse de la proportionnalité.
- Les vrais bénéficiaires de l'impôt progressif sont les classes moyennes, et non les indigents.
- Par sa propagande laissant croire aux classes moyennes que l'essentiel de la charge fiscale reposait sur les plus fortunés, l'État a réussi à rendre plus tolérable aux contribuables l'augmentation générale de la fiscalité en légitimant ainsi le sentiment d'envie.
Pour Pascal Salin (L'arbitraire fiscal), l'impôt proportionnel ne représente rien d'autre qu'un cas de discrimination sociale,
et la progressivité renforce encore ce caractère arbitraire et
inégalitaire. Les arguments avancés pour justifier la progressivité de
l'impôt sont généralement les suivants :
- égalisation des sacrifices ("il est normal de demander plus à ceux qui ont plus") ;
- l'État doit assumer une fonction de "redistribution" et de "solidarité" des "riches" envers les "moins riches".
Le premier argument invoque la loi de l'utilité marginale
décroissante, mal comprise et appliquée avec une vision mécaniciste de
la société, car l'utilité
est un jugement de valeur personnel et il est impossible de comparer
l'utilité entre individus différents ; de plus on ne peut parler de
"sacrifices", car il n'y a pas de consentement. Le second argument impose une solidarité
obligatoire, sans valeur morale ; il n'y a par ailleurs aucune preuve
qu'il y ait une redistribution effective vers ceux qui ont réellement
besoin d'être aidés.
Maurice Allais, quant à lui, souligne le côté rétrograde de l'impôt progressif :
« L'impôt progressif sur le revenu pénalise les plus capables et favorise indûment les moins capables en les affranchissant de l'impôt. Il constitue un obstacle à la promotion sociale. C'est un impôt conservateur et réactionnaire qui protège la fortune acquise et compromet la constitution de patrimoines pour tous ceux qui ne disposent d'autres ressources que celles de leur travail. »
— Maurice Allais, Le Figaro du 23 novembre 1975
L'impôt, c'est le vol (position libertarienne)
Impôt et libéralisme
L’impôt n’est pas conforme au principe du libéralisme car il constitue une atteinte à la propriété privée et à la liberté individuelle (comme son nom l'indique, l'impôt est « imposé »[1]). Le prélèvement de l'impôt est fondé par la coercition. La propriété privée concerne à la fois ce qu’un individu possède à un instant donné, et les revenus qu’il retire de son travail ou des biens qu’il possède. Ainsi, l’impôt sur le revenu est une atteinte à la propriété de l’individu sur le fruit de son travail ; l’impôt sur les dividendes est une atteinte à la propriété sur les revenus de ce qu’il possède ; l’impôt sur la fortune est une atteinte à la propriété des biens eux-mêmes :
« L'impôt est contraire au principe de base [du libertarisme] parce qu'il implique une agression contre les citoyens non agressifs qui refusent de le payer. Que le gouvernement offre des biens et services en échange de l'argent des impôts n'y change absolument rien. Le point important est que le soi-disant "échange" (impôt contre services publics) est coercitif : l'individu n'est pas libre de le refuser. Qu'une majorité de citoyens soient d'accord pour la coercition fiscale n'y change rien non plus. L'initiation de l'agression, même supportée par la majorité des gens, est illégitime. »
— Walter Block, Defending the Undefendable
Alors que beaucoup de personnes estiment que les impôts sont justifiés, soit parce qu'ils réaliseraient une redistribution plus « juste » des revenus (mais on se demande au nom de quel principe d'égalité,
puisque le taux de prélèvement est toujours fixé arbitrairement), soit
parce qu'ils seraient la contrepartie de services rendus par l'État (éducation, sécurité, voirie, etc.) selon la théorie des biens publics, les libertariens estiment qu'il s'agit d'une extorsion. L'individu ne paye pas en fait des services à un juste prix, il est transformé en payeur aveugle au nom d'un principe collectiviste :
fiscalement, il n'y a pas d'affectation des ressources aux dépenses (le
butin volé est partagé arbitrairement), et toutes les cours de justice
précisent bien que l’impôt est dû « sans contrepartie ». Il n'y a plus
pour le citoyen que le choix entre être un esclave (auquel on vole le fruit de son travail) ou un receleur (s'il est bénéficiaire net de l'argent volé).
En résumé, l'impôt est toujours immoral pour les raisons suivantes :
- absence de consentement : il faudrait que celui qui paie l’impôt y consente librement, et ait la possibilité de refuser ;
- absence d'affectation : l'impôt devrait être affecté à des dépenses approuvées par celui qui le paie, qui pourrait de plus en vérifier l'affectation (alors qu'en pratique le contribuable ne peut contester le montant de ses impôts en invoquant son désaccord avec l’affectation de tout ou partie des deniers publics)
- absence d'efficacité : il faudrait que les biens ou les services fournis par l'impôt ne puissent être fournis à de meilleures conditions par le secteur privé, ce que les monopoles publics empêchent ;
- absence de rétribution : l'impôt devrait être considéré comme un prêt volontaire fait par le contribuable à l'État, il conviendrait donc de le rétribuer par un intérêt conforme aux lois du marché.
Les discussions entre économistes quant à savoir si tel type d'impôt,
direct ou indirect, proportionnel ou progressif, serait plus juste que
tel autre type d'impôt, sont donc totalement absurdes.
Illusion fiscale
Article principal : illusion fiscale.
L'illusion fiscale empêche le citoyen de remettre en question la
pertinence de l'impôt qui est levé par le pouvoir et l'emploi qui en est
fait.
Social-démocratie
La social-démocratie, tendant vers le socialisme,
a tendance à admettre l'idée que l'État a par principe un droit de
propriété sur tout ce que possède le citoyen. On parlera par exemple de
« cadeau fiscal » lorsqu'il s'agit de baisser tel ou tel impôt. Derrière
le mot « cadeau fiscal »
il y a l'idée que la totalité des revenus du citoyen appartient en
réalité à l'État : l'individu est apparemment censé être content que
l'État lui laisse généreusement de quoi vivre, alors qu'avec la taxation
il s'agit bien d'une réduction autoritaire et arbitraire de sa
propriété en faveur de l'État ! L'État, qui est une cleptocratie,
s'ingénie à forger des expressions pour brouiller les idées de ses
sujets (un non-vol serait un « cadeau ») et ainsi éviter d'être mis en
cause.
L'impôt volontaire, auquel le citoyen est présumé « consentir librement » (article 14 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du citoyen) est un mythe qui ne vise qu'à cacher l'oppression fiscale (essayez, pour voir, de « ne pas consentir » à payer l'impôt, voir Consentement à l'impôt).
Les impôts sont une continuation, avec certaines transformations purement formelles, de l'esclavage : c'est le tribut exigé par quiconque exerce le pouvoir
sur les autres. Un esclave, au sens moderne, est celui qui remet la
totalité de sa production à son "maitre-propriétaire". Le citoyen
contemporain verse la moitié de sa production à l'État, il est donc un
semi-esclave de l'État.
L'alternative à l'impôt
Il est évident que certaines fonctions de l’État sont utiles et qu'on
ne peut les supprimer, la question est de savoir s'il est nécessaire de
les financer par la coercition
fiscale et s'il est nécessaire que ce soit la fonction publique (ou le
parapublic) qui les prenne en charge. Les solutions libertariennes sont
les suivantes :
- privatisation du maximum d'activités étatiques (par exemple il n'y a aucune raison que l'enseignement, la santé, le réseau routier, la télévision et la radio, la banque, etc. soient pris en charge par l’État) ;
- les secteurs peu justifiés économiquement (par exemple la culture, le sport, l'assistanat...) seraient pris en charge sur une base volontaire soit par le marché, soit par le milieu associatif (associations culturelles, sportives, caritatives...), soit disparaîtraient d'eux-mêmes (faisant ainsi la preuve de leur inutilité) ;
- cessation de toute subvention aux associations, aux entreprises, aux syndicats, aux partis, aux églises, etc.
- concernant les fonctions régaliennes (défense, police, justice), il n'y a pas d'unanimité ; Ayn Rand suggère un impôt volontaire, ce qui est jugé en général illusoire. Dans tous les cas, doivent être respectés :
- le principe de neutralité de l'impôt : l’État doit laisser jouer les mécanismes du marché et rester en dehors de l'activité économique ;
- le principe de l'égalité devant l'impôt : impôt égal à capacité contributive égale ;
- des règles stables dans le temps [2].
Il a existé historiquement plusieurs cas d'États dépourvus de tout
impôt et gérés comme des entreprises, comme l'État bernois jusqu'à la
fin du XVIIIe siècle, qui était « un État-entrepreneur domanial »[3] :
- Berne était la plus grande république au nord des Alpes, s’étendant des portes de Genève aux portes de Zurich. Ses ressources financières étaient la propriété foncière, les émoluments des offices, les contributions aux routes et le commerce du sel et du blé. En plus, au XVIIIe siècle, les placements à l’étranger fournissaient un septième du budget. (Beat Kappeler, La fin de l’État idéal, Le Temps, 2 juillet 2011)
Courbe de Laffer
Article principal : Courbe de Laffer.
La courbe de Laffer montre qu'au-delà d'un certain seuil, plus la
pression fiscale augmente, plus les recettes fiscales diminuent, en
raison de l'effet désincitatif sur l'offre de travail (trop d'impôt tue l'impôt).
Synthèse
Dans une perspective libérale classique, un état minimal
conduit nécessairement à un impôt minimal, qui n'entrave pas le
développement économique (le taux d'imposition est plus proche de 0% que
de 100%). En revanche, dans une social-démocratie,
l'histoire montre qu'il n'y a pas de limite au taux d'imposition, si ce
n'est la désincitation que traduit la courbe de Laffer.
Tel que le conçoivent les libertariens, l'axiome de non-agression aboutit à rejeter le principe même de l'impôt. Les partisans du contrat social, libéraux ou non, arguent que l'impôt fait partie d'un contrat libre passé entre le gouvernement et la population : quiconque n'est pas d'accord peut toujours se libérer du contrat en quittant le pays. En réponse à cette objection, certains libertariens (tendance anarcho-capitaliste) soulignent le caractère fictif du contrat social, qui n'est qu'une justification de l'agression étatique. D'autres (tendance minarchiste) comptent davantage sur la concurrence fiscale entre pays pour « limiter » cette agression.
Il est intéressant d’observer que les origines des droits de l'homme sont liées à la résistance à l'impôt : la Grande Charte (Magna Carta, 1215), la Déclaration d'Indépendance des États-Unis (4 juillet 1776) et la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen (20 Août 1789) ont leurs origines respectives dans la résistance fiscale, sans compter le plus ancien symbole de la liberté connu, le Ama-gi. Max Stirner l'explique ainsi :
«La propriété fut l'étincelle qui mit le feu à la Révolution. Le gouvernement avait besoin d'argent. Il devait dès lors, pour être logique, montrer qu'il était absolu, et par conséquent maître de toute propriété, en reprenant possession de son argent, dont les sujets avaient la jouissance, mais non la propriété. Au lieu de cela, il convoqua des états généraux, pour se faire accorder l'argent nécessaire. En n'osant pas être conséquent jusqu'au bout, on détruisit l'illusion du pouvoir absolu : le gouvernement qui doit se faire « accorder » quelque chose ne saurait plus passer pour absolu. Les sujets s'aperçurent que les véritables propriétaires étaient eux, et que c'était leur argent qu'on exigeait d'eux. »
— Max Stirner, L’unique et sa propriété
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