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Les racines de la démocratie moderne
Le libre marché doit venir d'abord afin d'établir les conditions favorables à la naissance de la démocratie.
Michael Mandelbaum
La liberté et la souveraineté du peuple sont les deux
composantes de la démocratie, dit Michael Mandelbaum. Le libre marché
doit venir d'abord afin d'établir les conditions favorables à la
naissance de la démocratie, note-t-il. M. Mandelbaum est professeur
de politique étrangère américaine, titulaire de la chaire Christian A.
Herter, à l'Ecole de hautes études internationales de
l'université Johns Hopkins à Washington ; il est l'auteur de
Democracy's Good Name : The Rise and Risks of the World's Most Popular
Form of Government [La bonne réputation de la démocratie :
Grandeur et risques d'effondrement de la forme de gouvernement la
plus populaire du monde] (Public Affairs, 2007).
Au cours des trois dernières décennies, la démocratie a connu une
remarquable croissance. En 1900, seuls 10 pays pouvaient être considérés
comme des démocraties. Au milieu du siècle, leur nombre
était de 30, et ce chiffre n'avait pas changé 25 ans plus tard. En
2005, toutefois, 119 des 190 pays du globe étaient des démocraties.
Comment cela s'est-il produit ? La réponse à cette question
exige, avant toute chose, que l'on comprenne bien ce qu'est la
démocratie.
Pour ceux qui emploient ce terme, c'est-à-dire pratiquement tout le
monde, la démocratie est un système politique unique, intégré,
facilement identifiable. Du point de vue historique, toutefois,
comme je le décris dans mon ouvrage Democracy's Good Name : The Rise and Risks of the World's Most Popular Form of Government,
la démocratie est issue de la fusion de deux traditions
politiques qui, jusqu'à une époque couvrant une bonne part du XIXe
siècle, étaient non seulement distinctes, mais largement considérées
comme parfaitement incompatibles.
Ces deux traditions sont la liberté et la souveraineté populaire. La
liberté se situe au niveau individuel alors que la souveraineté
populaire appartient à l'ensemble de la communauté. La liberté
concerne ce que font les gouvernements ou, plus précisément, ce
qu'ils n'ont pas le droit de faire à leurs citoyens, à savoir limiter
les libertés individuelles. Quant à la souveraineté du
peuple, elle fait référence aux modalités du choix des gouvernants,
qui sont choisis par l'ensemble du peuple. Elle répond donc à la
question de savoir qui gouverne, et la liberté prescrit des
règles déterminant ce que les gouvernants sont autorisés à faire,
règles qui imposent des limites à leur pouvoir.
Ces deux composantes ont des antécédents historiques distincts. La
liberté, la plus ancienne des deux, s'est développée en trois étapes. La
liberté économique, sous la forme de la propriété
privée, remonte dans la tradition de l'Europe occidentale à
l'antiquité romaine. La liberté de religion, dans cette tradition, est
née en grande partie du schisme survenu dans l'Europe chrétienne
du fait de la réforme protestante des XVIe et XVIIe siècles. La
liberté politique a fait son apparition plus tard, la Grande-Bretagne du
XVIIIe siècle étant le premier pays où l'on a pu voir une
situation qui ressemblait à la liberté politique moderne, situation
où le gouvernement n'exerce pas de contrôle sur l'expression des
pensées, les réunions et la participation à la vie politique.
La souveraineté populaire a fait irruption dans le monde lors de la
Révolution française de 1789, qui a lancé l'idée selon laquelle c'est le
peuple, et non pas un monarque héréditaire, qui doit
être détenteur du pouvoir souverain. Étant donné les difficultés
pratiques qu'il y aurait à ce que l'ensemble du peuple gouverne
directement en tous temps, on a conçu un véhicule d'exercice de la
souveraineté populaire qui est le gouvernement représentatif,
formule selon laquelle le peuple choisit ses représentants au moyen
d'élections libres, régulières et ouvertes auxquelles tous les
adultes ont le droit de participer.
Jusqu'à la deuxième moitié du XIXe siècle, on considérait
généralement que la souveraineté populaire étoufferait la liberté. Si le
peuple accédait au pouvoir suprême, pensait-on, il saisirait les
biens des classes nanties et imposerait à tous un strict conformisme
politique et social. Deux ouvrages classiques d'analyse politique du
XIXe siècle, l'étude en deux volumes de l'aristocrate
français Alexis de Tocqueville intitulée De la démocratie en Amérique et l'essai de l'Anglais John Stuart Mill De la liberté
traitent précisément de ce danger. Une fois le XXe
siècle arrivé, toutefois, il est clairement apparu que la liberté et
la souveraineté populaire pouvaient coexister harmonieusement, comme
elles le font actuellement dans de nombreux pays de par
le monde.
Filet de sécurité social
L'une des grandes raisons du succès de la fusion des deux
composantes décrites ci-dessus tient à la mise en œuvre, à la fin du
XIXe et au début du XXe siècles, de programmes publics de protection
sociale qui offraient notamment des pensions de vieillesse, une
assurance chômage et des assurances médicales, constituant
collectivement ce que l'on a appelé le filet de sécurité social
caractéristique de l'État-providence. Étant donné que tous les
citoyens ont droit à ces avantages sociaux, l'État-providence a en fait
universalisé la distribution des biens, ce qui a eu pour
effet de rendre la propriété privée plus acceptable qu'elle ne l'eût
été dans d'autres circonstances.
Cette combinaison de la protection sociale, de la liberté et de la
souveraineté populaire a beaucoup ajouté au charme de la démocratie.
Celle-ci a bénéficié également de l'évolution de l'histoire
moderne, durant laquelle ce sont des démocraties qui sont devenues
les pays les plus riches et les plus puissants du globe, notamment la
Grande-Bretagne au XIXe siècle et les États-Unis au XXe.
Il n'est rien qui attire autant que le succès, et comme les pays qui
ont le mieux réussi durant la deuxième moitié du XXe siècle sont des
démocraties, à savoir les pays d'Europe de l'Ouest, le
Japon, les États-Unis et la Grande-Bretagne, cette forme de
gouvernement a eu des adeptes.
Toutefois, aspirer à établir un système de gouvernement démocratique
est une chose, y parvenir en est une autre. À ce sujet, il convient de
s'arrêter sur une différence entre les deux composantes
de la démocratie qui revêt une pertinence toute particulière. La
souveraineté populaire est un principe politique dont l'application est
relativement facile, car on peut organiser des élections
libres et à peu de frais pratiquement partout.
La liberté, en revanche, est bien plus difficile à instaurer. Elle
exige des institutions et, en bonne place parmi celles-ci, un appareil
juridique complet en bonne et due forme, ainsi que des
gens possédant les connaissances et l'expérience requises pour
assurer le fonctionnement de ces institutions. La liberté ne peut
fleurir que dans une société où les valeurs sur lesquelles
reposent ces institutions, telles que le respect de l'état de droit,
sont largement répandues. Ces institutions, ces connaissances et ces
valeurs ne peuvent pas naître du jour au lendemain et
elles sont difficilement importables de l'étranger. En
Grande-Bretagne, par exemple, elles ont été le produit d'une évolution
au fil de plusieurs siècles. Ceci pose la double question de savoir
d'où viennent les institutions et les pratiques démocratiques, et
comment les sociétés d'où elles sont absentes parviennent à s'en doter.
La principale source de la démocratie politique, comme je l'explique dans Democracy's Good Name,
est une économie fondée sur l'économie de marché. S'il y a eu et s'il
existe toujours des
pays qui pratiquent l'économie de marché mais pas la démocratie en
politique, il n'existe au XXIe siècle aucun pays qui soit une démocratie
et dont l'économie ne soit pas axée sur le libre
marché. La plupart des pays où la démocratie a fait son apparition
durant le dernier quart du XXe siècle, en particulier en Europe
méridionale, en Amérique latine et en Asie de l'Est et du
Sud-Est, ont une expérience d'au moins une génération en matière de
conduite d'une économie de marché.
Le libre marché, facteur de démocratie
Le libre marché appuie la démocratie de quatre façons distinctes.
En
premier lieu, au cœur de toute économie de marché se situe
l'institution de la propriété privée, celle-ci étant elle-même une
forme de liberté. Le pays qui possède une économie de marché
effective possède donc déjà aussi l'une des composantes essentielles de
la démocratie politique.
En second lieu, les libres marchés génèrent des richesses, et de
nombreuses études ont démontré que plus un pays est riche, plus il est
susceptible d'avoir un régime démocratique. Les gens riches
ont le temps qu'il faut consacrer à la participation politique dans
les démocraties, temps que les pauvres n'ont pas. La richesse crée ce
qui a toujours été historiquement l'armature sociale de
la démocratie, à savoir une classe moyenne.
En troisième lieu, le libre marché se trouve au cœur même de ce que
les sociologues appellent la société civile, qui est constituée des
organisations et des groupements de la société ne relevant
pas du gouvernement, tels que les syndicats du travail, et les
associations religieuses et professionnelles. La société civile est
située entre le gouvernement et l'individu. Elle limite le
pouvoir du gouvernement et offre l'espace social nécessaire à
l'exercice d'activités indépendantes du gouvernement. Les organisations
de la société civile dépendent de l'économie de marché pour
se procurer les fonds dont elles ont besoin pour fonctionner. Il ne
peut y avoir de démocratie sans société civile, ni de société civile
sans économie de marché.
En quatrième et dernier lieu, le libre marché cultive deux habitudes
qui sont essentielles à la vie politique démocratique. La première est
la confiance. Les citoyens d'un État démocratique
doivent pouvoir faire confiance au gouvernement quant au respect de
leurs droits, et les minorités doivent faire confiance à la majorité en
sachant que celle-ci ne leur nuira pas et ne les
persécutera pas. Dans une économie de marché, acheteurs et vendeurs
doivent se faire confiance mutuellement en ce qui concerne l'exécution
des contrats qu'ils passent entre eux, faute de quoi il
ne saurait y avoir de commerce.
L'autre habitude découlant du libre marché qui est essentielle à la
démocratie est celle du compromis. On peut en fait définir la démocratie
comme le régime politique dans lequel le compromis, et
non la violence ou la coercition, est la modalité selon laquelle se
règlent les différends qui surviennent inévitablement dans toute
société. Dans le déroulement des activités quotidiennes de
l'économie de marché, les gens apprennent à transiger : l'acheteur
et le vendeur doivent toujours négocier pour parvenir à un compromis sur
le prix de l'objet de leur contrat étant donné que le
vendeur veut toujours être payé le plus possible, et que l'acheteur
veut toujours payer le minimum.
À partir du dernier tiers du XXe siècle, on en est venu à considérer
pratiquement partout que le libre marché était la meilleure forme
d'organisation économique pour aboutir à la prospérité.
Toutes les sociétés souhaitent prospérer et elles ont donc, presque
toutes, établi ou essayé d'établir un régime économique fondé sur le
libre marché. Étant donné que la première tendance tend à
promouvoir la seconde, l'expansion du libre marché a fait davantage
que tout autre facteur pour favoriser la remarquable expansion de la
démocratie de par le monde.
Marché libre
De Wikiberal
Dans les théories économiques, un
marché libre est un modèle économique idéal dans lequel les
échanges sont libérés de toute mesure
coercitive, y compris les interventions gouvernementales comme les tarifs, les
taxes, et les régulations, à l'exception de celles qui autorisent la
propriété privée des terres, des ressources naturelles et du spectre de radiodiffusion, ainsi que la
propriété intellectuelle, les
entreprises et autres fictions légales.
La philosophie du
laissez-faire économique en
politique
épouse approximativement ces conditions dans le monde réel en éliminant
les tarifs, en minimisant et en simplifiant la taxation et en
minimisant ou éliminant les règlementations étatiques et les
restrictions telles que celles relevant du droit du
travail (
salaire minimum et conditions de travail, mais pas les
lois qui restreignent l'organisation des travailleurs) ainsi que le
monopole légal et les lois antitrust. Dans le domaine de l'
économie politique, le « marché libre » est simplement le contraire conceptuel d'une économie
dirigiste, dans laquelle tous les biens et services sont produits, tarifés et distribués sous la maîtrise de l'
État.
Libre marché et moralité
D'après mon expérience personnelle, celui qui, à cette époque, essaye
de parler de libre marché sur les campus universitaires se trouve
enseveli sous une avalanche de critiques envers la mondialisation.
L'opposition des enseignants et des étudiants à l'expansion des marchés
mondiaux dérive pour une large part d'un sens de l'altruisme, qui dérive
de leur souci des questions sociales et morales. Synthétiquement, ils
pensent que la mondialisation n'est pas à visage humain. Je pense le
contraire. La mondialisation, je le montrerai, conduit non seulement à
la prospérité et à sa diffusion mais aussi à des conséquences éthiques
et à une plus grande moralité parmi ses acteurs.
Nombre de ses critiques croient que la mondialisation défait
certaines avancées sociales ou éthiques comme la réduction du travail
des enfants et de la pauvreté dans les pays pauvres ou la promotion de
l'égalité des sexes et la protection de l'environnement dans le monde
entier. Cependant, quand j'ai examiné ces questions et d'autres dans mon
livre En défense de la mondialisation, j'ai trouvé que les conséquences réelles étaient à l'opposé de ces craintes.
Par exemple, nombreux sont ceux qui croyaient que les paysans
réagiraient aux opportunités apportées par la mondialisation en retirant
leurs enfants de l'école et en les faisant travailler. L'expansion du
libre marché agirait alors comme une force négative. Mais j'ai montré
que c'est l'opposé qui était vrai. Il s'est avéré que, dans de nombreux
cas, les gains supplémentaires permis par la mondialisation - bénéfices
croissants des planteurs de riz au Vietnam par exemple - ont incité les
parents à laisser leurs enfants à l'école. Après tout, ils n'avaient
plus besoin du maigre revenu supplémentaire que le travail d'un enfant
peut rapporter.
Considérons l'égalité des sexes : avec la mondialisation, les
industries qui produisent des biens et des services échangés sur le
marché mondial doivent faire face à une concurrence internationale
avivée. Cette concurrence a réduit le fossé béant qui existait dans de
nombreux pays en développements entre les salaires payés, à
qualification égale, à un homme et à une femme. Pourquoi? Parce que les
entreprises confrontées à une concurrence mondiales réalisent rapidement
qu'elles ne peuvent se permettre cette préférence masculine. Obligées
de réduire leurs coûts et de fonctionner de manière plus efficace, elles
passent de plus en plus d'une main d'œuvre masculine chère à une main
d'œuvre féminine bon marché. Ce faisant, elles augmentent le salaire des
femmes et réduisent celui des hommes. La mondialisation n'a pas encore
produit l'égalité salariale mais elle en a certainement réduit
l'importance.
Il y a désormais des preuves nombreuses que la Chine et l'Inde,
deux nations avec d'immenses problèmes de pauvreté, ont réussi à croître
si rapidement en prenant avantage du commerce et des investissements
extérieurs et que, par là, elles ont réduit la pauvreté de façon très
importante. La route est encore longue mais la mondialisation a permis
d'améliorer les conditions de vie de centaines de millions de leurs
habitants. Certains détracteurs ont attaqué l'idée de réduire la
pauvreté par la croissance économique, lui reprochant d'être une
stratégie conservatrice de trickle-down (NdT: Moins imposer les
plus riches en espérant que cela profitera aux plus pauvres). Ils
évoquent des images de riches suralimentés et gloutons ou de bourgeois
mangeant du gigot quand les serfs et les chiens se contentent des
miettes à leurs pieds. En réalité, se concentrer sur la croissance
économique est une stratégie activiste qui tire tout le monde vers le
haut ("pull-up" strategy).
Même s'ils reconnaissent que la mondialisation permet
généralement l'accomplissement de certains objectifs sociaux, certains
critiques soutiennent qu'elle corrode la moralité de ses acteurs. Selon
eux, l'expansion du libre marché élargit le domaine sur lequel la
poursuite du profit règne et cette recherche du profit rend les
individus égoïstes et malfaisants. Cela est à peine plausible. Regardons
les bourgeois calvinistes décrits par Simon Schama dans son histoire
des Pays-Bas. Ils ont construit leur fortune sur le commerce
international mais ont cédé à l'altruisme et non à leurs appétits
personnels, montrant ce que Schama appela avec justesse des "embarras de
la richesse" ("embarassment of riches"). Une telle auto-limitation peut
aussi être observé chez les Jaïns du Gujarat, cet état indien dont
était originaire le Mahatma Gandhi. Les richesses que les Jaïns tirèrent
de leurs activités commerciales ont servi leurs valeurs et non
l'inverse.
Quant à l'influence que la mondialisation continue à avoir sur le
caractère moral, permettez moi de citer les merveilleux sentiments de
John Stuart Mill. Comme il l'écrivit dans ses Principes d'économie politique (1848):
Les avantages économiques du commerce sont surpassés par ses
effets d’ordre moral et intellectuel. Il est difficile d’estimer trop
haut, dans l’état actuel, relativement primitif, de la civilisation,
l’avantage de mettre des hommes en contact avec des hommes différents
qui ont des habitudes de pensée et d’action autres que les leurs … Il
n'est aucune nation qui n'ait pas besoin d'emprunter aux autres. Pas
uniquement des talents ou des pratiques mais des traits de caractère
essentiels dans lesquels son propre type est inférieur. ... On peut dire
sans exagération que l'extension immense et rapide du commerce
international, en étant la principale garantie de la paix dans le monde,
est la première sécurité permanente pour un progrès ininterrompu des
idées, des institutions et du caractères de la race humaine.
Dans l'économie mondialisée contemporaine, on voit
continuellement des signes du phénomène décrit par Mill. Quand les
multinationales japonaises s'étendirent dans les années 1980, les cadres
dirigeants masculins emmenèrent avec eux leurs femmes à New York,
Londres ou Paris. Quand ces femmes japonaises traditionnelles virent
comment les femmes étaient traitées dans les pays occidentaux, elles
firent leurs ces idées de droits des femmes et d'égalité. A leur retour
au Japon, elles devinrent agents de changement social. De nos jours, la
télévision et Internet ont joué un rôle considérable en étendant notre
conscience sociale et morale au delà des limites de nos communautés et
des états-nations.
Adam Smith écrivit de façon célèbre sur un "homme européen plein
d'humanité" qui "ne dormirait pas ce soir" s'il "devait perdre son petit
doigt demain" mais "ronflerait avec la plus profonde sérénité" si une
centaine de millions de Chinois étaient "soudainement avalés par un
tremblement de terre" car "il ne les avait jamais vu". Les chinois ne
nous sont plus invisibles, vivant à l'extérieur de la frontière de ce
que David Hume appelait les cercles concentriques de notre empathie. Le
séisme de l'été dernier en Chine, dont les conséquences tragiques ont
été instantanément retransmises sur nos écrans, a rencontré non
l'indifférence du reste du monde mais l'empathie et le sens profond
d'une obligation morale envers ces victimes chinoises. Cela était le
sommet de la mondialisation.
Jagdish Bhagwati
Nous vous proposons un débat sur le thème "Le marché libre corrode-t-il
le caractère moral ?" entre Jagdish Bhagwati, John Gray,Garry Kasparov,
Quinqlian He, Michael Waltzer, Michael Novak, Bernard-Henri Levy, Kay S.
Hymowitz, Tyler Cowen, Robert B. Reich, Ayaan Hirsi Ali, John C. Bogle
et Rick Santorum. Ce débat a été organisé par la Fondation Templeton.
Cliquez le lien ci-dessous l'image ci-bas
Le marché libre ou bien la guerre
La seule crise, c’est celle de l’anticapitalisme
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« Les gouvernements et parlements européens se sont efforcés,
depuis plus de soixante ans, de gêner le jeu du marché, d’intervenir
dans la vie économique et de paralyser le capitalisme. […] Ils ont
dressé des barrières douanières ; ils ont encouragé l’expansion de
crédit et une politique d’argent facile ; ils ont eu recours au contrôle
des prix, aux salaires minima et aux procédés subsidiaires. Ils ont
transformé la fiscalité en confiscation et expropriation ; ils ont
proclamé que les dépenses imprudentes étaient le meilleur moyen
d’accroître richesse et bien-être. Mais quand les conséquences
inévitables de telles politiques […] devinrent de plus en plus
évidentes, l’opinion publique ne porta pas son blâme sur ces politiques
chéries, elle accusa le capitalisme. Aux yeux du public, ce ne sont pas
les politiques anticapitalistes mais le capitalisme qui est la cause
profonde de la dépression économique, du chômage, de l’inflation et de
la hausse des prix, du monopole et du gaspillage, du malaise social et
de la guerre ».
Nous sommes en 1944. Lorsque Ludwig von Mises écrit ces quelques lignes qui introduisent son Omnipotent Government
où il décrit les causes de la montée du national-socialisme en
Allemagne et les politiques qui ont précipité le monde dans une des
guerres les plus destructrices de l’Histoire, les gouvernements du monde
libre s’apprêtent à parapher les accords de Bretton-Woods qui entreront
en vigueur le 22 juillet et négocient les premiers accords de
libre-échange − qui seront signés en 1947 à Genève sous le nom de GATT.
Pour ceux qui ont vécu l’entre-deux-guerres, cela ne fait aucun doute :
si on veut sauver la paix dans le monde, il faut à tout prix éviter un
retour au nationalisme économique, au protectionnisme et aux politiques
de dévaluations compétitives.
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