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Alain Madelin donne son point de vue sur la réforme des collèges.
A) Education : parlez-vous le nouveau programme ? Un quizz par et - Libération
C) Fabrice Luchini et le bateau ivre de l'Éducation nationale - Par
Vincent Tremolet de Villers - Le Figaro
D) Réforme du collège : la novlangue obligatoire! - Par Julia Sereni - Le Figaro
E) Nouveaux programmes d'histoire : atomisation sociale, culpabilité et haine de soi - Par
Madeleine Bazin de Jessey - Le Figaro
F) Les écoles d'ingénieurs les plus touchées par le tour de vis budgétaire - Sandrine Chauvin - Capital.fr
G) Initiez-vous aux obscurs jargons des métiers - Christine Halary - Management
H) Une institution - Institut de France
I) Éducation de Wikiberal
I) Éducation de Wikiberal
J) Réformer l’Éducation nationale : questions de méthode - Par Vincent Feré -
K) Réforme du collège : quelles évolutions ?
A) Education : parlez-vous le nouveau programme ? Un quizz
«Jargon», «termes abscons», «vacuité du vocabulaire» :
depuis leur publication, le 13 avril, les nouveaux programmes scolaires
font l’objet de critiques virulentes pour leur manque de clarté. Elaborés par le Conseil supérieur des programmes, ces textes, censés guider les enseignants, entreront en vigueur à la rentrée 2016.
Mais avant cela, ils doivent encore être présentés aux profs, entre
le 11 mai et le 12 juin, pour être amendés. Nul doute que des
clarifications seront nécessaires.
Ainsi, la section qui concerne l’enseignement du sport est pour le
moins alambiquée. Lundi, le journal de 20 heures de France 2 consacrait
un reportage à une obscure formule, régulièrement reprise depuis, qui invite à «traverser l’eau en équilibre horizontal par immersion prolongée de la tête» dans un «milieu aquatique profond standardisé». Comprendre : nager dans une piscine.
Les profs d’EPS ont peu apprécié ce coup de projecteur. Le Snep-FSU,
syndicat majoritaire, a ainsi adressé une lettre ouverte à David
Pujadas, pour dénoncer une «critique, soi-disant humoristique, ciblée uniquement» sur sa discipline, sur la chaîne publique et dans d’autres médias. Le courrier s’insurge d'«une
forme de condescendance et d’ignorance bienséante lorsqu’il s’agit
d’EPS et de sport à l’école. Un enseignement se préoccupant du corps
(donc considéré comme de bas niveau intellectuel ?) devrait forcément
s’écrire dans un langage trivial et non se théoriser».
Si on parle de «milieu standardisé», c’est pour «rendre explicite le fait qu’on n’apprend pas à nager en rivière par exemple», poursuit le courrier. Cela peut être «bien sûr une piscine, mais aussi un bord de mer calme, sans courant, délimité comme dans les DOM», explique le syndicat. Il existe aussi «des piscines ou des bassins» où «on a pied ! Or, apprendre à nager nécessite de se confronter à la profondeur», ajoute-t-il. «Les programmes devraient d’abord être écrits pour les enseignants», leurs «premiers utilisateurs», pas pour le grand public, estime le syndicat.
Néanmoins, la ministre de l’Education, Najat Vallaud -Belkacem, et le
Conseil supérieur des programmes ont depuis reconnu que ces textes
devraient être écrits «dans une langue que tout le monde peut comprendre», selon les termes de la ministre, dans un entretien au Point.
Bon élève, Libération s’est plongé dans les programmes de collège, et en a extrait quelques formules énigmatiques. Saurez-vous les décrypter ?
QUIZ et réponses
Rendus publics mi-avril, les textes, qui doivent encore être amendés avant leur entrée en vigueur à la rentrée 2016, ont été moqués pour leur vocabulaire jargonnant. Venez tester votre compréhension de la novlangue éducative.
1) Qu'est-ce que «l'articulation d'activités réfléchies et d'automatisation des procédures» ?
Dans le programme de français, cette activité est censée aider à «comprendre le fonctionnement syntaxique». De quoi s'agit-il?
- Des activités intelligentes, pour une fois, ça les changera, ces saligauds
- Je n'y bite rien sans traduction
- L'étude de phrases, bien construites ou pas, pour tout piger à la syntaxe (Bien vu! Le programme invite à décortiquer un ensemble de phrases, et à en extraire ce qui est correct ou pas, pour en déduire la règle générale.)
- L'amélioration de l'écriture, grâce à l'utilisation du correcteur automatique des smartphones
2) Qu'est-ce que «l'élaboration de cartes mentales pour mémoriser, structurer, synthétiser, rapporter»?
Cette activité est censée améliorer l'expression dans une langue étrangère.
- S'entraîner mentalement à reproduire la géographie des Balkans (ça occupe)
- Cela ne veut rien dire, c'est un piège!
- Le fait de montrer les liens qui existent entre différents mots (On peut aussi parler de cartes heuristiques.)
- Connaître par coeur les capitales européennes
3) Si on te dit de «t'organiser pour construire une continuité spatio-temporelle d'actions», que fais-tu?
En sport, cet acquis est considéré comme nécessaire dans les activités athlétiques.
- Tu te débrouilles pour enchaîner un peu de course à pieds et du saut en longueur (Bien vu, jeune fayot! Tu as dû pratiquer l'athlétisme comme personne!)
- Tu imites Marty Mc Fly à bord d'une DeLorean DMC-12
- Tu enchaînes le cours de sport et une partie de console
- Tu fais du lancer de poids et de javelot simultanément
4) De quelle activité parle-t-on : «Se déplacer dans un milieu aquatique profond standardisé»
Indice: c'est une compétence qui doit être acquise en cours de sport.
- D'une initiation à la plongée sous-marine
- De l'apprentissage de la pêche à la ligne
- De natation à la piscine (Trop facile, m'dame, la réponse était dans l'article!)
- De marche sur l'eau
5) On vous dit de «conduire, en milieu naturel ou artificiel, un déplacement rapide, économique, sécurisé». Quid?
C'est une activité de pleine nature, qui entre dans les enseignements de sport.
- De la course d'orientation (Savoir se répérer, rallier un point en empruntant l'itinéraire adapté.)
- De l'autostop, comme dans Pékin express
- Les transports en commun, bêta!
- Du vélo
6) Qu'entend-on par «vaincre un adversaire en lui imposant une domination corporelle symbolique et codifiée»
On parle d'une compétence attendue dans l'apprentissage des sports de combat.
- Défoncer sa gueule au premier de la classe
- Maîtriser les échecs
- Lutter comme des acharnés dans la boue
- Gagner au judo ou au karaté (Mettre KO en respectant les règles, tout un art!)
7) L'acquisition des compétences sur les médias est «organisée de manière spiralaire». Qu'est-ce que cela veut dire?
Un précieux indice pour bien comprendre comment sensibiliser au fonctionnement des médias.
- Faire revenir régulièrement dans des cours des compétences déjà abordées (L'inverse serait d'empiler des connaissances, sans forcément les faire intervenir de nouveau dans des cours))
- Les médias français tournent en rond
- Les élèves doivent former une ronde pour lire Libé chaque matin
- Le ministère veut faire tourner les profs en bourrique
8) Quand on parle de «s'inscrire dans un projet de transformation motrice ou corporelle», de quoi s'agit-il?
Les cours de sport sont censés contribuer à cet apprentissage.
- De développer la maîtrise de ses mouvements (Quoi de mieux que se bouger pour cela?)
- De maîtriser le relooking
- De sculpter son corps en faisant de la muscu
- De s'inscrire à une compétition sportive au moins au cours de l'année
9) On conseille au prof le «travail sur texte lacunaire pour problématiser en réception l'étude de l'élément linguistique visé.» Que doit-il faire?
Cette activité doit aider à construire des compétences langagières.
- Combler ses propres lacunes
- Faire travailler la classe sur un livre dont il manque des pages
- Invoquer un génie magique pour préparer ses cours à sa place.
- Faire compléter des textes à trous aux élèves. (Exact ! On a tous connu cet exercice.)
10) Qu'est-ce que le «départ différé» ?
Attention, réfléchis bien avant de répondre!
- En athlétisme, le fait d'attendre le signal «partez» pour entamer la course
- En langues vivantes, le fait d'effectuer un séjour à l'étranger en fin d'année
- Une fonction offerte par la plupart des machines à laver (On t'a bien eu, c'était un piège (ah ah ah))
- Un cours de mathématiques sur les probabilités
B) Un collège unique plus retouché que réformé
La ministre de l’Education, Najat Vallaud-Belkacem,
présente ce mercredi sa réforme du collège, prévue pour la rentrée 2016.
Un premier train de mesures, avant la présentation des nouveaux
programmes qui devrait intervenir dans quelques semaines.
Lire aussi:
Parmi les annonces, une seconde langue obligatoire dès la 5e et des élèves toujours plus suivis.
La deuxième langue vivante dès la cinquième
Aujourd’hui, l’enseignement de la deuxième langue étrangère n’est obligatoire qu’à partir de la quatrième. Seuls les élèves des classes bilangues commencent l’apprentissage en sixième. En généralisant la deuxième langue en cinquième, le ministère supprimerait du même coup les classes bilangues, souvent détournées pour avoir des classes de niveaux, chères aux parents mais désastreuses en termes de mixité sociale. «La deuxième langue en cinquième, oui, pourquoi pas. Mais si c’est pour s’en tenir à une petite heure, cela ne sert à rien, les expérimentations l’ont montré», pointe Jean-Rémi Girard du Snalc, syndicat classé à droite. Pour l’instant, rien n’est tranché. «Cela fait partie des dosages qui restent à faire, répond-on au cabinet de la ministre. Mais en aucun cas, cette réforme ne se traduira par un emploi du temps plus chargé pour les élèves.» Traduction : cet enseignement se fera au détriment d’un autre.Un accompagnement personnalisé
La ministre en fait un point fort de sa réforme, même si en réalité, ça existe déjà. Aujourd’hui, les petits sixièmes ont deux heures de soutien par semaine. L’idée serait de passer à trois heures et de systématiser un accompagnement par petits groupes, selon les difficultés des élèves. Pour les autres (5e, 4e, 3e), le soutien sera d’une heure «garantie».Des enseignements interdisciplinaires
Le ministère veut encourager une pratique déjà existante : faire des ponts entre les disciplines, «décloisonner» et tenter de nouvelles méthodes, comme la classe à plusieurs profs (lire ci-contre). Les enseignants ne se saisiraient pas suffisamment de la liberté pédagogique, assure le ministère, qui veut par conséquent leur imposer un «cadre». A la rentrée 2016, ces nouvelles façons d’enseigner devront représenter au moins 20% du temps scolaire au lieu de 7% aujourd’hui, selon le ministère. Christian Chevalier, de l’Unsa, applaudit des deux mains : «C’est un message politique fort. La ministre dit : "Enseignants, allez-y, lâchez-vous."»Favoriser les classes en petits groupes
Les profs vont être heureux : ils plébiscitent le fonctionnement en demi-classe. Est-ce que cette mesure dépassera l’effet d’annonce ? L’application risque de buter sur la contrainte budgétaire. La réforme, toutes mesures comprises, se traduira par l’équivalent de 4 000 profs à temps complet, décomptés des 60 000 créations de postes promises par le Président.Et, en vrac…
La ministre veut une pause déjeuner d’au moins une heure trente mais aussi plus de moments solennels : des commémorations, des remises de diplômes… Et son dada : «mieux associer les parents» avec, gadget du jour, «un livret unique et digital».Lire aussi:
- InterviewFrançois Baluteau, sociologue, acte l’émergence de nouvelles priorités, chez les parents et les élèves :
- Un vieux traité oblige l’enseignement du français en Allemagne et de l’allemand en France. Un diktat qui hérisse.
- ReportageA Bobigny (Seine-Saint-Denis), un collège tourne à vide depuis une grosse semaine. Les parents ont décidé en bloc de ne plus envoyer leurs enfants en cours, pour réclamer plus de moyens.
C) Fabrice Luchini et le bateau ivre de l'Éducation nationale
Pendant que nos gouvernants dépouillent les programmes des grands
auteurs, Fabrice Luchini fait un triomphe au théâtre des Mathurins en
disant Rimbaud, Baudelaire, Proust et Labiche.
Entre un spectacle d'improvisation et une baignade dans un «milieu
aquatique standardisé» Manuel Valls et Najat Vallaud-Belkacem devraient
aller faire un tour au Théâtre des Mathurins. Depuis des semaines,
chaque soir plus de quatre cents personnes se pressent pour entendre un
homme seul en scène dire Rimbaud et Labiche, Céline et Proust. Les
réservations sont closes jusqu'au mois d'octobre et les demandes de
prolongation se succèdent. S'ils parviennent à éteindre leur iPhone, à
s'asseoir pendant deux heures ils écouteront un ancien garçon coiffeur
qui, par les mots, déploie des paysages, écrit des silences, fixe des
vertiges. Fabrice Luchini leur rappellera qu'il a quitté l'école à 14
ans mais que l'aventure de son existence est née d'une découverte: une
langue plus vive que le courant d'une onde pure. La Fontaine,
Baudelaire, Pascal, Cioran et une pléiade innombrable ont aiguisé son
esprit, nourri sa méditation, et fécondé une passion dévorante. Depuis
il a fait sienne la maxime de Molière: «plaire et instruire».
Dira-t-il que c'était mieux
avant? C'est tout le contraire. Le spectacle commence par une charge de
Paul Valéry (nous sommes dans les années 1930) contre l'école qui force
les enfants à ânonner Racine en se débarrassant de ce qui en fait la
beauté: les assonances, le rythme, la chair du verbe. Valéry cependant
ne conseille pas de remplacer les humanités par l'interdisciplinarité ou
les travaux en groupe sur le tri sélectif et le développement durable.
Il plaide plutôt pour une véritable éducation au goût, aux nuances, à la
beauté. Ce trésor mal exploité par nos anciens prend désormais la
poussière dans les caves du ministère. En troisième, les programmes de
lecture piochent dans les rentrées littéraires les plus récentes, et
l'étude approfondie de Bajazet sera bientôt considérée comme
humiliante pour l'élément en voie d'apprentissage, cette chose fragile
que nous appelions autrefois l'élève. Les disciples de Bourdieu verront
dans le succès de Fabrice Luchini une preuve supplémentaire de la
reproduction des élites.
Les tenants du «tout est culture»
refuseront malgré tout d'établir une hiérarchie entre le
savoureux«Cours… Asterixsme»de Jamel Debbouze et les Illuminations de
Rimbaud. Ceux qui, en entendant le comédien, sentiront battre en eux le
cœur de La Fontaine ou de Baudelaire, se désoleront d'un gigantesque
gâchis. Comment une succession de chefs-d'œuvre peuvent ainsi être
laissés à l'abandon? Pourquoi refuser de les faire connaître aux
Français venus d'ailleurs à qui l'on ne donne qu'une équipe de football
pour se sentir des nôtres? Augustin d'Humières professeur en
Seine-et-Marne et auteur de Homère et Shakespeare en banlieue (Grasset)
le répète suffisamment: le génie souffle où il veut. Dans les quartiers
chics comme dans les cités. Luchini raconte qu'il a eu l'idée de ce
spectacle après avoir récité Le Bateau ivre dans un taxi. Son chauffeur
lui aurait lâché: «C'est magnifique, mais je n'ai rien compris.»«Moi,
non plus, lui a répondu le comédien, mais là n'est pas l'important.»
L'important en effet était de faire vibrer quelques minutes les êtres et
les choses. Rappeler aux hommes qu'ils ont en eux ce que les uns
nomment l'esprit, les autres l'âme. Que la culture n'est ni un ornement,
ni un snobisme, mais l'oxygène de l'intelligence et du cœur.
Manuel Valls affirme dans une
interview au mensuel L'Œil, que la culture est constitutive de la
gauche. Il faudrait lui rappeler qu'elle est tout sauf le fruit de
l'improvisation. «Il n'y a pas de génération spontanée» dit en substance
Roland Barthes quand il parle des poètes. Rimbaud savait le latin et le
grec à 14 ans. Il connaissait suffisamment Hugo et Musset pour les
mépriser à 16 et jugeait à 17 Baudelaire «un peu mesquin» dans sa forme.
Le feu de son génie monte cependant de braises anciennes, celle du
travail, de l'effort, de la discipline, de la sélection. Ces vertus que
Luchini a éprouvées aux côtés de ses maîtres Jean-Laurent Cochet ou
Michel Bouquet. Depuis, l'élève est devenu l'un des leurs et donne à son
tour ce qu'il a reçu. Quand il improvise, c'est prodigieux. Il n'est
pas professeur, le Théâtre des Mathurins n'est pas une salle de classe,
mais toutes les générations viennent y chercher ce que le pédagogisme
s'acharne à enfouir et peut-être même à détruire: leur héritage.
Vincent Tremolet de Villers est rédacteur en chef des pages Débats/opinions du Figaro et du FigaroVox.
D) Réforme du collège : la novlangue obligatoire!
Les nouveaux programmes scolaires dévoilés le 13 avril sont riches en jargon pédagogiste estime Julia Sereni. Elle y voit le produit d'une idéologie qui s'attaque à la transmission du savoir.
«Aller de soi et de l'ici vers l'autre et l'ailleurs». Non, ce n'est pas le titre de la brochure d'une secte post-Raélienne mais bien celui des nouveaux programmes de collège pour les langues étrangères et régionales (cycle 4, page 17). Ce jargon «pédagogiste» fait son grand retour dans les nouveaux programmes scolaires pour l'école primaire et le collège.
Ce jargon «pédagogiste» fait son grand retour dans les nouveaux programmes scolaires pour l'école primaire et le collège.
Ainsi, dans la section consacrée à l'éducation physique et sportive
le lecteur apprend avec bonheur que l'élève ne nage pas, non, il
«traverse l'eau en équilibre horizontal par immersion prolongée de la
tête» (page 22). Pas question non plus de s'adonner à de vulgaires jeux
de raquettes, l'objectif c'est de «rechercher le gain d'un duel médié
par une balle ou un volant» (page 23). Toujours dans cette section
l'élève est invité lors des activités de combat à «vaincre un adversaire
en lui imposant une domination corporelle symbolique et codifée». Une
prose digne des plus belles pages de Cinquante nuances de Grey.
Au-delà
de ces citations absconses qui amusent et inquiètent les réseaux
sociaux, ces programmes sont le révélateur d'une réalité bien plus
inquiétante: la déconnexion consommée entre ceux qui les rédigent et les
autres, qui les subissent au quotidien. En effet, comment ne pas
s'inquiéter du fait que personne, au sein du conseil supérieur des
programmes, n'ait perçu le caractère risible des intitulés et la vacuité
du vocabulaire employé?
Choix conscient ou non, l'emploi d'une
telle novlangue est par essence le produit d'une idéologie déréalisante,
c'est également un moyen de tenir à l'écart les parents en rendant, par
l'utilisation d'un charabia scientiste, extrêmement compliqué ce qui
pourrait être simple et clair. Au fond, les programmes sont réalisés non
pas pour les élèves et les enseignants, mais bien au nom d'une certaine
conception du système éducatif, d'une certaine idée de l'enfant.
Dans ce document, l'élève est
défini dès les premières pages (p.3) non plus par son statut d'
«apprenant» mais déjà par celui d' «adolescent» qui «vit un nouveau
rapport à lui-même» et donc doit être placé par les enseignants dans un
«climat de confiance». Il n'est plus là pour apprendre -activité
rétrograde et tellement verticale, mais pour être au monde, «manifester
sa sensibilité», «questionner le monde» (page 7 et suivante). On est
dans la quintessence même du pédagogisme qui célèbre l'idée selon
laquelle l'enfant doit construire son propre savoir -ce qui explique
donc fort logiquement l'absence de clarté des programmes et l'effacement
progressif de leur contenu.
Le but est de bannir au maximum
toute référence à des connaissances sûres et précises. Le café
pédagogique, tribune militante du «pédagogisme» se félicite d'ailleurs
de cet abandon «des longues énumérations de connaissances à acquérir»
jugées par ailleurs élitistes.
On est dans la quintessence même du pédagogisme qui célèbre l'idée selon laquelle l'enfant doit construire son propre savoir.
Ainsi, la grammaire et ses règles imposées, sont remplacées par
«l'étude de la langue» qui n'est que la version réchauffée de
«l'observation réfléchie de la langue» introduite par Jack Lang dans les
programmes de 2002. Fini les règles apprises par coeur, c'est à
«l'enfant» d'observer les phrases pour «dégager des régularités, et
formuler des regles», l'objectif, comme le précisait un document de
formation destiné aux enseignants, est ainsi de «mettre en mots leur
pensée et leur sensibilité».
Les futurs programmes rajoutent la
consigne suivante «l'inflation terminologique doit être évitée» (page
10), ce qui signifie qu'il n'est pas opportun de s'attarder sur des
termes trop techniques comme le complément d'objet et autres COD. C'est
le ménage par le vide.
Bien sur, ce pédagogisme est lui-même le
paravent de l'égalitarisme. Puisque la transmission du savoir reste
vécue comme une violence reproductrice d'inégalités, c'est à la
transmission elle-même que l'on s'attaque pour diminuer les inégalités.
Cruel syllogisme, qui justifie pêle-mêle les attaques envers les classes
préparatoires, le latin, la culture générale, les classes européennes,
les internats d'excellence...
Tout cela s'opérant au nom de la
«liberté pédagogique de l'enseignant», à qui il faut donc souhaiter bon
courage, mais dont on ne doute pas qu'il pourra faire sien cet objectif,
asséné comme un clin d'œil: «l'abstraction et la modélisation sont bien
plus présentes désormais, ce qui n'empêche pas de rechercher les
chemins concrets qui permettent de les atteindre» (Les objectifs de la
formation du cycle 4, page 4).
Par Julia Sereni est chercheur associé au CERU (Centre d'études et de recherches universitaires), collaboratrice parlementaire et ancienne membre de cabinet ministériel.
et aussi:
- Les nouvelles perles de la «novlangue» pédagogiste
- Lettre du Magicien des couleurs à Najat Vallaud-Belkacem
- Réforme de Najat Vallaud-Belkacem: du collège unique au collège uniforme?
- Marc Fumaroli: «Le latin est victime des fanatismes égalitaires et utilitaires» 1/2
- Marc Fumaroli: «Les humanités au péril d'un monde numérique» 2/2
E) Nouveaux programmes d'histoire : atomisation sociale, culpabilité et haine de soi
Madeleine de Jessey s'interroge sur la pertinence des nouveaux programmes d'histoire et craint que ces derniers n'enferment les élèves dans une logique de repentance.
Après avoir unanimement indigné les professeurs de Langues anciennes et
irrité les tenants de l'amitié franco-allemande, la réforme du collège
risque à nouveau de faire parler d'elle, sur le front de l'histoire
cette fois. Tant qu'à faire, autant énerver tout le monde, égalité
oblige.
L'Education nationale a en effet mis au point de nouveaux programmes
d'histoire pour le collège. On saluera le souci de ne pas faire
«disparaître de cet enseignement le cadre national ni la perspective
chronologique propre à l'histoire». Alors que la France se divise en
communautés disparates sans parvenir à forger une destinée et une fierté
communes, on approuvera aussi la visée poursuivie par ces nouveaux
programmes: «Dans un ordre chronologique, le programme permet de mieux
lire et comprendre le monde d'aujourd'hui en insistant sur des moments
forts, des traits marquants des sociétés du passé et des problématiques
indispensables à la formation du citoyen.»
C'est en parcourant
ensuite la liste des sujets abordés que l'inquiétude surgit: le Conseil
supérieur des programmes (CSP) distingue les sujets «obligatoirement
étudiés» des sujets «traités au choix de l'enseignant». Ainsi, l'étude
de l'Islam sera obligatoire, mais celle du christianisme médiéval
facultative - ceux qui choisiront de l'enseigner devront le faire
uniquement sous l'angle de l' «emprise de l'Eglise sur les mentalités
rurales». Dans une société en mal d'intégration et de cohésion
nationale, on ne manquera pas de s'étonner d'une curiosité si grande
pour les religions venues d'ailleurs, et d'une révulsion si manifeste
pour nos racines judéo-chrétiennes. N'est-ce pas pourtant en redonnant à
l'élève ces racines que nous le rendrons d'autant plus ouvert à
l'altérité? Par ailleurs, où est-il passé, ce «cadre national» que le
CSP évoquait précédemment?
Il apparaît ensuite, nous
objectera-t-on. C'est vrai, le cadre national est abordé à travers
l'étude obligatoire des heures sombres ou controversées du passé
(esclavage, colonisation, génocides, déportation…). En revanche,
l'enseignement de l'humanisme et des Lumières, problématiques qu'on
croirait pourtant «indispensables à la formation du citoyen», n'est que
facultatif. Nos repères communs seront donc extraits des cultures venues
d'ailleurs et des tragédies de notre histoire. Plutôt que d'amener
l'élève à puiser à la source du christianisme, de l'humanisme et des
Lumières, le CSP préfère écouler ses stocks de repentance amère et
éculée.
Il ne s'agit pas ici de mettre en cause l'importance du
«devoir de mémoire» ; nous affirmons seulement que la mémoire ne formera
le citoyen qu'à condition de l'inspirer et de le libérer, en lui
proposant le terreau vivant d'une action positive et généreuse. Plutôt
que de séquestrer l'élève dans l'obscurité des fautes et des blessures
passées, que ne lui propose-t-on des épopées nationales, des modèles,
des figures de courage, d'unité et de résistance, dans lesquels il
pourra puiser des valeurs incarnées? Les jeunes générations ont droit,
aujourd'hui, à se fondre dans une histoire de France qu'ils pourront
enfin connaître et admirer.
Or, loin d'évoquer les plus belles
pages de notre histoire, le CSP entend une nouvelle fois enfermer
l'élève dans le culte de la culpabilité et de la haine de soi. Le fait
n'est pas nouveau: il y a bien longtemps que l'enseignement de
l'histoire se fourvoie chez nous dans un travail de sape et
d'auto-flagellation prodigieusement masochiste. Avec la réforme du
collège, un nouveau cap est franchi. Ne cherchez plus la crise de la
France: elle est là, dans ce retournement de soi contre soi.
Par Madeleine Bazin de Jessey est agrégée de Lettres classiques. Porte-parole de Sens Commun, elle est secrétaire nationale en charge des programmes de formation à l'UMP.
Aussi: Pascal Bruckner : les nouveaux programmes d'histoire ou l'effacement de la France
F) Les écoles d'ingénieurs les plus touchées par le tour de vis budgétaire
La liste des établissements d'enseignement supérieur qui vont devoir se
serrer la ceinture est désormais officielle. Et l'addition s'avère
encore plus salée que prévue pour les écoles d'ingénieurs.
C'est officiel : la cure d'austérité est sévère pour les
écoles d'ingénieurs. Au total, 22 écoles d'ingénieurs verront leur
épargne fondre de 23,452 millions d'euros en 2015. "A elles seules,
elles vont donc financer près d'un quart des 100 millions d'euros
d'économies prévues dans l'enseignement supérieur dans la loi de
finances 2015", calcule
François Cansell, le président de la Conférence des écoles françaises d'ingénieurs (CEDFI), qui ne décolère pas.
"Une aberration alors qu'elles ne représentent que 7% du budget total de l'enseignement supérieur", tempête-t-il.
Pourquoi sont-elles dans le viseur ? Eh bien, tout simplement parce qu'elles sont "trop riches" aux yeux du Ministère. Elles disposent d'un fonds de roulement, c'est-à-dire d'une épargne importante. "Cela fait des années que nous nous serrons la ceinture pour assainir nos comptes afin d'anticiper nos futurs investissements", justifie François Cansell. Pour constituer ces fonds de roulement, les établissements ont en effet souvent épargné durant plusieurs années afin, notamment, de préparer des achats immobiliers ou des créations de nouveaux programmes.
L'école la plus pénalisée est Centrale Nantes, qui va voir son budget fondre de 2,7 millions d'euros; suivi par l'INP de Toulouse (-2,51 millions d'euros) et Centrale Lille (2,13 millions d'euros). Au total, 11 écoles vont perdre plus de 11 millions d'euros, comme le montre le tableau ci-dessous, dont celle dirigée par François Cansell, l'INP Bordeaux, qui va perdre près de 1,6 million d'euros.
Pourquoi sont-elles dans le viseur ? Eh bien, tout simplement parce qu'elles sont "trop riches" aux yeux du Ministère. Elles disposent d'un fonds de roulement, c'est-à-dire d'une épargne importante. "Cela fait des années que nous nous serrons la ceinture pour assainir nos comptes afin d'anticiper nos futurs investissements", justifie François Cansell. Pour constituer ces fonds de roulement, les établissements ont en effet souvent épargné durant plusieurs années afin, notamment, de préparer des achats immobiliers ou des créations de nouveaux programmes.
L'école la plus pénalisée est Centrale Nantes, qui va voir son budget fondre de 2,7 millions d'euros; suivi par l'INP de Toulouse (-2,51 millions d'euros) et Centrale Lille (2,13 millions d'euros). Au total, 11 écoles vont perdre plus de 11 millions d'euros, comme le montre le tableau ci-dessous, dont celle dirigée par François Cansell, l'INP Bordeaux, qui va perdre près de 1,6 million d'euros.
Montant des fonds de roulement mobilisés dans 22 écoles d'ingénieurs
"C'est scandaleux et incompréhensible", s'étouffe-t-il. "Pourquoi prélever les établissements qui forment des jeunes dont les compétences sont reconnues dans le monde entier, alors que le président de la République a annoncé en début de mandat, que sa priorité était la jeunesse et le redressement industriel ?", s'interroge-t-il, un brin amer.
Les directeurs d'école ont donc sorti leurs calculettes. Concrètement, cela risque de se traduire par la fermeture des programmes les moins rentables, une réduction des effectifs consacrés à la recherche. Pour éviter de finir dans le rouge à la fin de l'année, ils seront autorisés à prélever dans leur fonds de roulement pour financer leurs frais de fonctionnement et leur masse salariale.
Les écoles d'ingénieurs ne sont évidemment pas les seules mises à contribution. Au total, 11 universités sur 76 et 12 grands établissements comme l'Observatoire de Paris (-,1,25 million d'euros) sont aussi concernés. Parmi les fac les plus touchées : l'université d'Artois (Pas-de-Calais) qui perd pas moins de 24 millions d'euros ; Lille II (-8,75 millions d'euros) ; ParisII-Panthéon-Assas (-7,66 millions d'euros). Ces coupes budgétaires seront présentées à la CNESER lundi. Un avis qui est seulement consultatif...
Sandrine Chauvin
G) Initiez-vous aux obscurs jargons des métiers
Notre univers économique est une sorte de tour de Babel où chaque corporation invente sa novlangue. Kit de survie.
"Je trouve les culs de bus un peu "bordeline". Si nous
voulons rester dans la "short-list", il faut les rendre plus appétents."
"Ça va être chaud : ils sont overbookés. Même charrette, ils ne
tiendront jamais la “deadline”." La scène se déroule dans une agence de
pub. Présente, Babette Auvray-Pagnozzi jubile ! Pendant trois ans, cette
rédactrice chevronnée s’est appliquée à consigner les amphigouris de
ses congénères. Elle en a tiré un livre truculent, "Langue de pub", où
même les initiés se surprennent à découvrir de nouveaux mots. Chaque
métier, bien sûr, cultive son jargon. "Mais communiquer, rappelle Jeanne
Bordeau, fondatrice de l’Institut de la qualité de l’expression, c’est
mettre en commun. On devrait toujours veiller à parler pour être
compris." A lire ce tour d’horizon des tics de langage propres à chaque
profession, on est loin du compte. Morceaux choisis.
Les informaticiens abrègent à haut débit
Les SSII sont un monde d’acronymes. Chez Aubay, dont l’effectif est constitué à 95% d’ingénieurs informaticiens, les IHM (interfaces hommes/machines), GDB (gestion de bases de données), FAQ ("frequently asked questions") et FAI (fournisseurs d’accès à Internet) fusent. Chacun son camp : les uns se rangent dans la MOA (maîtrise d’ouvrage), les autres dans la MOE (maîtrise d’œuvre). Le virus touche même la définition des postes : Le DP (directeur de projet) coiffe le CP (chef de projet). L’AP (analyste programmateur) côtoie l’IR (ingénieur réalisation). Les informaticiens jargonnent sans vergogne : ils ne disent pas relancer mais "rebooter" un PC. Ils ne programment pas mais «instancient» telle ou telle fonction. Et quand ils se perdent en conjectures dans un projet nébuleux, ils disent "stop au vaporware" ! "Mais, s’interroge malicieusement Jeanne Bordeau, faut-il vraiment s’étonner d’entendre parler d’ADSL et de RAM quand la commission nationale informatique et liberté elle-même se laisse appeler Cnil ?"
Les informaticiens abrègent à haut débit
Les SSII sont un monde d’acronymes. Chez Aubay, dont l’effectif est constitué à 95% d’ingénieurs informaticiens, les IHM (interfaces hommes/machines), GDB (gestion de bases de données), FAQ ("frequently asked questions") et FAI (fournisseurs d’accès à Internet) fusent. Chacun son camp : les uns se rangent dans la MOA (maîtrise d’ouvrage), les autres dans la MOE (maîtrise d’œuvre). Le virus touche même la définition des postes : Le DP (directeur de projet) coiffe le CP (chef de projet). L’AP (analyste programmateur) côtoie l’IR (ingénieur réalisation). Les informaticiens jargonnent sans vergogne : ils ne disent pas relancer mais "rebooter" un PC. Ils ne programment pas mais «instancient» telle ou telle fonction. Et quand ils se perdent en conjectures dans un projet nébuleux, ils disent "stop au vaporware" ! "Mais, s’interroge malicieusement Jeanne Bordeau, faut-il vraiment s’étonner d’entendre parler d’ADSL et de RAM quand la commission nationale informatique et liberté elle-même se laisse appeler Cnil ?"
Les industriels adorent le "globish english"
"Dans
l’industrie, on s’exprime avec la tête, pas avec les tripes", résume un
ingénieur d’une entreprise publique. Et c’est vrai qu’en règle
générale, dans cette corporation, on réfléchit avant de prendre la
parole. Les échanges sont synthétiques, y compris à l’heure des pauses,
où l’on manie un humour lapidaire. On use d’un langage technique précis,
rigoureux, voire élitiste. "Nous nous comprenons entre pairs et
éprouvons un sentiment de supériorité à maîtriser des termes que les
autres ignorent", confirme le même ingénieur. Jusqu’à ce que cela
coince… Ainsi, un autre ingénieur qui exposait son parcours à un
représentant de la DRH a été prié de s’expliquer après avoir annoncé :
"A la direction de la stratégie, j’ai fait de l’équilibre entre
demandes." Dans les multinationales, ce sont bien sûr les anglicismes
qui font fureur. Chez Airbus à Toulouse où coexistent plus de 100
nationalités, on se réunit à la FAL ("final assembly line"), quand on ne
se donne pas rendez-vous au "mock-up", c’est-à-dire au centre de
maquettes. L’avionneur a même inventé un terme franglais, "la
communalité", pour évoquer la similitude entre deux cockpits.
Les banquiers
poétisent le cash-flow
A
moins d’être un ha bitué des salles de marché, difficile de comprendre
le sabir des traders. "Il y a une "greenshoe" de 10%, ça va nous
permettre de ravaler le "flow back"", commente l’un d’eux en découvrant
un cours de Bourse chahuté. Les chartistes (c’est quand même plus chic
qu’analystes graphiques) ont le vocabulaire le plus imagé, puisqu’ils
ont le bonheur de jongler avec des "chandeliers japonais" (rectangles
représentant les variations d’un cours) ou des «Adam et Eve» (figures
indiquant un retournement de tendance). "Nous avons aussi
nos
expressions familières", s’amuse Jean-Emmanuel Vernay, directeur
général délégué de la société de Bourse Invest Securities. Et de citer
deux exemples : "Y a de la colle" (lorsque les titres ne se vendent pas)
et "Il a fait un gros doigt" (quand un confrère a tapé un mauvais
chiffre en passant un ordre). Il faut revenir dans le monde des banques
de réseau pour retrouver des échanges plus feutrés. Les conseillers
bancaires comparent rituellement leurs "états du matin" – autrement dit,
la comptabilité des écritures enregistrées au-delà des normes. Et, en
fin de semaine, ils sont priés de rendre leur "production" – comprenez
le détail des ventes de leurs produits financiers.
Les pubards carburent à la branchitude
Cette
tribu ultratendance est peuplée de monomaniaques passionnés. Entre eux,
les publicitaires parlent de qui a fait quoi, de tel directeur de
création sur le départ, du dernier spot ou du réalisateur en vogue. On
frime beaucoup en abusant du "name dropping" – ou "lâcher de noms" –,
histoire de simuler une familiarité avec les grands du métier. En
réunion interne, on s’autorise aussi des expressions triviales du genre
"Tu branles le mammouth" ou "Tu peignes la girafe". Traduction : "Tu
parles pour ne rien dire." On invente des mots branchés : "Trop kitchos
cette annonce !" – comprenez : trop deuxième degré. On multiplie les
abréviations occultes : "Les setras (seniors traditionalistes) sont
cœurs de cible." Et quand un chef de pub demande à un stagiaire de
"faire péter le Kadapak", ce dernier a intérêt à courir ventre à terre
lui chercher le carton renforcé sur lequel on colle les maquettes de
projets. Qui sait ? Peut-être que parmi elles le client identifiera une
pépite. Pardon : une "nugget".
La grande distribution se gave d’images crues
Au
détour d’une travée d’hypermarché, vous croiserez vers 16 heures des
chefs de rayon en pleine "réouverture" (rangement à mi-parcours d’une
journée de chiffre d’affaires), en train de remettre de l’ordre dans
leur "came" (marchandise) et de trier les "ovnis" (produits étrangers au
rayon). Dans le monde
très concret de la distribution, le
vocabulaire
est imagé, plein de
bon sens et il est partagé par tous.
"Même sur un
site de 600 salariés, tout le monde se connaît et
les échanges sont très
francs, d’un bout à l’autre de la hiérarchie", souligne Nathalie Roche,
la directrice du magasin Auchan de Fontenay-sous-Bois. L’univers est
rugueux et les expressions parfois martiales, voire triviales. "On a la
gagne au CUG (code unitaire de gestion) !" exhorte le patron pour
signifier qu’on ne peut faire de chiffre d’affaires qu’en s’intéressant à
chaque produit. "Peux-tu dégerber cette palette avec ton Clark ?"
demande-t-on pour retirer un lot de marchandises de l’entrepôt grâce au
chariot élévateur. Sur le terrain, on s’exprime par raccourcis : le
panneau d’affichage au-dessus d’une tête de gondole ? Un 60 x 60. Le
terminal portable sur lequel chacun suit ses stocks ? Le TP. Il arrive
même que les acronymes se transforment en verbes. Ainsi le POS (plan
d’occupation des sols du magasin) vient récemment d’inspirer
l’expression "posser une opération", qui signifie la mettre
immédiatement en tête de gondole. Dans les supermarchés, le vocabulaire
n’en finit pas de se réinventer.
Christine Halary
L'ouvrage "Mots et maux du management" recense les abréviations et les
anglicismes qui fleurissent en entreprise et que nous utilisons parfois à
plus ou moins bon escient. Extraits choisis.
Êtes-vous bilingue en jargon d'entreprise ? Pour vous aider à
mieux comprendre les nouvelles expressions utilisées à tort et à
travers au bureau, Christophe Chaptal de Chanteloup publie un
dictionnaire insolite "Mots et maux du management" (éd. Vuibert).
"On est passé d'un langage quasi militaire – on donne un ordre clair et précis – à une langue délicate emplie de codes et de sens au second degré," constate cet expert en marketing et dirigeant du cabinet de conseil CC&A. Dans son ouvrage, il passe en revue une centaine de définitions, parfois complètement absurdes. Sa façon à lui de militer pour un langage plus simple en entreprise.
1. Analyse transactionnelle : Non, il ne s'agit pas du dernier bilan comptable mais d'une méthode psychanalytique très en vogue auprès des managers. L'idée : approfondir les relations interpersonnelles à partir des états du moi (parent, adulte, enfant) et d'adapter son schéma de communication en fonction de son interlocuteur. A manier avec prudence tout de même.
2. Back-office : littéralement arrière-bureau, structure qui n'est pas en contact avec le client. Une bonne excuse pour ne pas justifier une livraison en retard ou un dysfonctionnement, selon cet expert.
3. Benchmarking : regarder ce qui est fait autour de soi pour ne pas refaire inutilement, ou faire encore mieux. Dans les faits, "cela permet de copier outrageusement le concurrent".
4. Brainstorming : Cette "tempête de cerveau" est un exercice de créativité pour libérer des idées novatrices, duquel ressort une note de synthèse que... personne ne lit.
5. "Copil" : cette abréviation désigne le comité de pilotage, qui regroupe les managers représentants différents métiers de l'entreprise, sélectionnés pour plancher sur une décision stratégique. "Sauf que les participants poursuivent rarement un but commun", déplore l'auteur. Ou comment accoucher d'une souris...
6. Débriefing : Aujourd'hui, cet anglicisme est plus "branché" et semble moins militaire que le traditionnel "aller au rapport". Dans les faits, l'objectif est le même, il s'agit d'informer sa hiérarchie ou un client, voire de justifier ses bourdes.
7. Downsizing : faire aussi bien – voire mieux – avec moins de moyens. C'est l'expression en vogue à l'heure du "cost-killing" et de la compression des effectifs..
8. "PMT" pour Plan moyen terme : il est censé fixer une batterie d'objectifs. L'exercice consiste à éviter "l'embûche du court terme et le pénible effort de la projection à long terme", plaisante Christophe Chaptal.
9. N+x : concept algébrique désignant un être humain en fonction de sa position hiérarchique. Objectif : mesurer la distance. A opposer au N-1 "corvéable à merci et interchangeable". CQFD.
10. Bottom-up : flux d'informations alland du bas vers les hautes sphères du management. L'idée est de permettre à la base de s'exprimer. A opposer au "top-down", qui résume de façon polie à donner des ordres aux salariés.
Ces deux dernières confirment la définition du "management" vue par Christophe Chaptal : "l'art de faire faire à autrui ce qu'il aurait refusé de faire de lui-même". A méditer…
"On est passé d'un langage quasi militaire – on donne un ordre clair et précis – à une langue délicate emplie de codes et de sens au second degré," constate cet expert en marketing et dirigeant du cabinet de conseil CC&A. Dans son ouvrage, il passe en revue une centaine de définitions, parfois complètement absurdes. Sa façon à lui de militer pour un langage plus simple en entreprise.
1. Analyse transactionnelle : Non, il ne s'agit pas du dernier bilan comptable mais d'une méthode psychanalytique très en vogue auprès des managers. L'idée : approfondir les relations interpersonnelles à partir des états du moi (parent, adulte, enfant) et d'adapter son schéma de communication en fonction de son interlocuteur. A manier avec prudence tout de même.
2. Back-office : littéralement arrière-bureau, structure qui n'est pas en contact avec le client. Une bonne excuse pour ne pas justifier une livraison en retard ou un dysfonctionnement, selon cet expert.
3. Benchmarking : regarder ce qui est fait autour de soi pour ne pas refaire inutilement, ou faire encore mieux. Dans les faits, "cela permet de copier outrageusement le concurrent".
4. Brainstorming : Cette "tempête de cerveau" est un exercice de créativité pour libérer des idées novatrices, duquel ressort une note de synthèse que... personne ne lit.
5. "Copil" : cette abréviation désigne le comité de pilotage, qui regroupe les managers représentants différents métiers de l'entreprise, sélectionnés pour plancher sur une décision stratégique. "Sauf que les participants poursuivent rarement un but commun", déplore l'auteur. Ou comment accoucher d'une souris...
6. Débriefing : Aujourd'hui, cet anglicisme est plus "branché" et semble moins militaire que le traditionnel "aller au rapport". Dans les faits, l'objectif est le même, il s'agit d'informer sa hiérarchie ou un client, voire de justifier ses bourdes.
7. Downsizing : faire aussi bien – voire mieux – avec moins de moyens. C'est l'expression en vogue à l'heure du "cost-killing" et de la compression des effectifs..
8. "PMT" pour Plan moyen terme : il est censé fixer une batterie d'objectifs. L'exercice consiste à éviter "l'embûche du court terme et le pénible effort de la projection à long terme", plaisante Christophe Chaptal.
9. N+x : concept algébrique désignant un être humain en fonction de sa position hiérarchique. Objectif : mesurer la distance. A opposer au N-1 "corvéable à merci et interchangeable". CQFD.
10. Bottom-up : flux d'informations alland du bas vers les hautes sphères du management. L'idée est de permettre à la base de s'exprimer. A opposer au "top-down", qui résume de façon polie à donner des ordres aux salariés.
Ces deux dernières confirment la définition du "management" vue par Christophe Chaptal : "l'art de faire faire à autrui ce qu'il aurait refusé de faire de lui-même". A méditer…
Créé par la loi du 3 brumaire an IV (25 octobre 1795) sur
l’organisation de l’instruction publique, l’Institut de France est placé
depuis le 1er janvier 2006 sous la responsabilité du chancelier Gabriel de Broglie.
Il est le regroupement de cinq académies :
- l’Académie française
(fondée en 1635) - l’Académie des inscriptions et belles-lettres
(fondée en 1663) - l’Académie des sciences
(fondée en 1666) - l’Académie des beaux-arts
(créée en 1816 par la réunion de l’Académie de peinture et de sculpture, fondée en 1648, de l’Académie de musique, fondée en 1669 et de l’Académie d’architecture, fondée en 1671) - l’Académie des sciences morales et politiques
(fondée en 1795, supprimée en 1803 et rétablie en 1832)Dans une approche pluridisciplinaire de la connaissance, l’"Institut national des sciences et des arts" était initialement destiné : - à perfectionner les sciences et les arts par des recherches non interrompues, par la publication des découvertes, par la correspondance avec les sociétés savantes et étrangères ;
- à suivre les travaux scientifiques et littéraires ayant pour objet l’utilité générale.
Il était également prévu que l’Institut national des sciences et
des arts distribuât chaque année des prix et des récompenses "aux
inventions et découvertes utiles, aux succès distingués dans les arts,
aux belles actions et à la pratique des vertus domestiques et sociales".
Aujourd’hui, parallèlement à ces missions génitrices, l’Institut de
France gère le millier de dons, legs et fondations dont il est
dépositaire.
L’Institut est une chose qui est propre à la France. Plusieurs pays ont des académies qui peuvent rivaliser avec les nôtres pour l’illustration des personnes qui les composent et l’importance de leurs travaux. La France, seule, a un Institut où tous les efforts de l’esprit humain sont comme liés en un faisceau, où le poète, le philosophe, l’historien, le critique, le mathématicien, le physicien, l’astronome, le naturaliste, l’économiste, le juriste, le sculpteur, le peintre, le musicien peuvent s’appeler confrères.
Ernest Renan (1867)
I) Éducation
L'éducation est l'ensemble des moyens permettant le développement des facultés physiques, morales et intellectuelles d'un être humain. Par extension, l'éducation désigne également les moyens mis en place pour permettre cet apprentissage.
L’État, bien loin de ses obligations régaliennes, prétend se charger de l'éducation des enfants : l'Éducation Nationale a ainsi succédé, en France et dans d'autres pays, à la plus modeste Instruction Publique, ce que les libéraux considèrent comme une immixtion dans la sphère privée et familiale.
Le financement des études qui pourrait résulter de ce système est aussi supérieur à la formule de l'instruction publique gratuite. Ce marché, en plus d'intéresser les banques, pourrait voir fleurir les associations délivrant des bourses aux étudiants. Dans les deux cas, l'obtention de prêts serait soumise à la capacité des candidats à convaincre les prêteurs, et donc à fournir des résultats. Ce principe de responsabilisation favoriserait la réussite scolaire et permettrait aux plus méritants de poursuivre des études.
La conséquence directe montrerait l'inutilité voire le caractère nocif d'un ministère de l’Éducation Nationale, dont la mainmise idéologique et politique sur les jeunes esprits n'est pas le moindre défaut.
Pour certains libertariens, comme Murray Rothbard, l'école publique représente un réel danger pour la liberté, car elle repose sur des croyances d'un faux libéralisme issu du dix-neuvième siècle et par des auteurs utilitaristes comme Jeremy Bentham et des auteurs positivistes.
Cet égalitarisme forcené conduit à la baisse continue du niveau des élèves, à la dévalorisation des diplômes et au découragement des enseignants. L'absence de toute sélection en est à la fois le symptôme et la cause :
L'éducation est l'ensemble des moyens permettant le développement des facultés physiques, morales et intellectuelles d'un être humain. Par extension, l'éducation désigne également les moyens mis en place pour permettre cet apprentissage.
L’État, bien loin de ses obligations régaliennes, prétend se charger de l'éducation des enfants : l'Éducation Nationale a ainsi succédé, en France et dans d'autres pays, à la plus modeste Instruction Publique, ce que les libéraux considèrent comme une immixtion dans la sphère privée et familiale.
Position libérale
Pour certains libéraux, l'État a un rôle à jouer dans l'éducation, en permettant aux personnes issues des milieux les moins favorisés d'accéder à un niveau d'instruction qui dépend plus d'eux-mêmes que des ressources de leur famille. Cependant, et contrairement à la pratique répandue, cette participation de l'État ne se ferait pas par l'existence et le maintien d'établissements scolaires publics mais par une distribution de moyens directement auprès des personnes concernées - par exemple sous forme de chèque éducation, acceptés par certains établissements privés. C'est par exemple la position que défend Friedrich Hayek dans La Constitution de la liberté (Chap. 24) et dans Droit, législation et liberté (Chap. 14). Il écrit ainsi dans ce dernier ouvrage :«Concernant l'éducation, l'argument primordial en faveur de son assistance par le gouvernement est que les enfants ne sont pas encore des citoyens responsables et ne peuvent être supposés capables de savoir ce dont ils ont besoin, ni ne possèdent de ressources qu'ils pourraient consacrer à l'acquisition du savoir. […] Ce raisonnement s'applique seulement aux enfants et mineurs. Mais il est complété par une autre considération qui s'applique aussi aux adultes, c'est que l'éducation peut éveiller en ceux qui la reçoivent des capacités dont ils n'avaient pas encore conscience. […] Qu'il y ait de solides arguments pour que le gouvernement finance au moins une instruction générale n'implique pas que cette éducation doive aussi être administrée par l'État, et encore moins qu'il doive en avoir le monopole »Les libéraux sont en général opposés aux règlementations étatiques contraignantes qui aboutissent à l'absence de sélection au mérite (et, partant, à la dévalorisation des diplômes), au « collège unique », à la « carte scolaire » (interdiction de choisir son établissement), au monopole universitaire, à l'enseignement indifférencié, etc.
— Friedrich Hayek, Droit, législation et liberté[1]'
Position libertarienne
Pour les libertariens, il est injuste de forcer une personne, via l'impôt, à financer l'éducation d'autrui. L'enseignement est donc un service comme les autres, que des individus ou des entreprises vendent à des clients. S'il était appliqué, ce modèle aurait de nombreux avantages sur le plan de la qualité de l'enseignement. Outre les bénéfices tirés de la concurrence entre établissements scolaires et écoles de pédagogie, la délivrance des principaux diplômes ne serait plus un monopole, ce qui permettrait de valoriser de manière optimale les acquis des étudiants.Le financement des études qui pourrait résulter de ce système est aussi supérieur à la formule de l'instruction publique gratuite. Ce marché, en plus d'intéresser les banques, pourrait voir fleurir les associations délivrant des bourses aux étudiants. Dans les deux cas, l'obtention de prêts serait soumise à la capacité des candidats à convaincre les prêteurs, et donc à fournir des résultats. Ce principe de responsabilisation favoriserait la réussite scolaire et permettrait aux plus méritants de poursuivre des études.
La conséquence directe montrerait l'inutilité voire le caractère nocif d'un ministère de l’Éducation Nationale, dont la mainmise idéologique et politique sur les jeunes esprits n'est pas le moindre défaut.
Pour certains libertariens, comme Murray Rothbard, l'école publique représente un réel danger pour la liberté, car elle repose sur des croyances d'un faux libéralisme issu du dix-neuvième siècle et par des auteurs utilitaristes comme Jeremy Bentham et des auteurs positivistes.
«Le libertarien, alors, se fondant sur la tradition libérale classique ancienne, ne doit pas seulement abandonner l'utilitarisme et le positivisme; il doit aussi abandonner cette tendance du culte de la démocratie et d'une haine irraisonnée envers le catholicisme qui le mène, entre autres défauts, vers la croissance d'un vaste fardeau d'étatisme et de tyrannie, l'école publique. »
— Murray Rothbard, Conservatism and Freedom: A Libertarian Comment[2]
L'enseignement en France
Au XIXe siècle le monopole public a été graduellement réduit, le plus souvent par l'action des libéraux :- la loi Guizot libéralise l'enseignement primaire en 1832 ;
- la loi Falloux, nommée d'après le catholique libéral Alfred de Falloux (1811-1886), libéralise l'enseignement secondaire en 1850 ;
- la loi Dupanloup (1802-1878) libéralise l'enseignement supérieur en 1875.
Cet égalitarisme forcené conduit à la baisse continue du niveau des élèves, à la dévalorisation des diplômes et au découragement des enseignants. L'absence de toute sélection en est à la fois le symptôme et la cause :
« Nul ne soutiendrait que l'on peut devenir un bon skieur en se contentant de s'inscrire à une école de ski, sans effort musculaire dans l'application des instructions du moniteur. Mais l'effort intellectuel n'est plus considéré comme indispensable pour devenir un bon étudiant. Déplorer cette omission est devenu "réactionnaire". La "société" porterait seule la responsabilité du résultat des études. D'ailleurs on ne dit plus qu'un élève est paresseux, on dit qu'il est "en échec scolaire", fléau anonyme qui s'abat sur le malheureux comme la pluie ou la rougeole. »On peut dire qu'au XXe siècle le monopole public a été renforcé. L'offre "privée" apparemment existante est presque toujours "sous contrat" avec l’État : les enseignants du soi-disant privé sont en fait payés par l’État et enseignent les programmes exigés par l’État. La "contractualisation" est parvenue à stériliser et neutraliser l’enseignement privé :
— Jean-François Revel, Le voleur dans la maison vide, Plon, 1997
« Il n’existe pas de véritable choix éducatif en France, le privé n’étant que le délégataire du service public. »
— Anne Coffinier
Citations
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« Aujourd'hui, dans quel objet précis et bien déterminé frapperait-on tous les citoyens, comme une monnaie, à la même effigie ? Est-ce parce qu'ils se destinent tous à des carrières diverses ? Sur quoi se fonderait-on pour les jeter dans le même moule ?.... et qui tiendra le moule ? Question terrible, qui devrait nous faire réfléchir. Qui tiendra le moule ? S'il y a un moule (et le Baccalauréat en est un), chacun en voudra tenir le manche, M. Thiers, M. Parisis, M. Barthélemy Saint-Hilaire, moi, les rouges, les blancs, les bleus, les noirs. Il faudra donc se battre pour vider cette question préalable, qui renaîtra sans cesse. N'est-il pas plus simple de briser ce moule fatal, et de proclamer loyalement la Liberté ? »
— Frédéric Bastiat[3]
-
« Une éducation générale et étatisée n'est qu'un appareil à façonner les gens pour qu'ils soient exactement semblables entre eux ; et le moule utilisé est celui qui plaît aux pouvoirs prépondérants dans le gouvernement, que ce soit un monarque, un clergé, une aristocratie, ou la majorité de la génération en cours, et dans la mesure où l'appareil est efficace et où il est réussi, il établit un despotisme sur les esprits qui, par une pente naturelle, conduit à un despotisme sur les corps. »
— John Stuart Mill, De la liberté[4]
-
« L'Éducation Nationale se charge quant à elle de l'embrigadement des enfants. Cette structure tentaculaire est parfaite dans ce rôle. 99% des professeurs sont acquis corps et âme à la gauche la plus à gauche qui soit, et ils ont parfaitement conscience de leur place stratégique. Ils mettent donc la plus grande attention à diffuser des versions historiques remaniées, expurgées, triturées, afin que la vérité en cours au sein de l'État soit bien diffusée dans les générations suivantes. Si cette vérité venait à changer, le conditionnement reçu interdit toute lecture critique de la presse et les informations reçues sont automatiquement assimilées en lieu et place de l'ancienne vérité. »
— Hervé Duray, L'État est une secte[5]
-
« Au lendemain de la guerre, en 1947, les communistes Langevin et Wallon proposèrent de réaliser en France l'école unique, creuset de l'homme nouveau socialiste. Repoussé par deux fois à la Chambre sous la IVe République, ce projet fut mis en œuvre, paradoxalement, par De Gaulle au début de la Ve. […] Dès cette date, l'Éducation ne fut plus nationale. Elle fut, de jure, cogérée par le ministère et les syndicats. De facto, elle fut gérée par les syndicats seuls, car les ministres passaient (et souvent sautaient), alors que les syndicats restaient. Je dis bien que l'Éducation « nationale » usurpe désormais ce qualificatif, car la nation, qui n'a d'autre organe d'expression que le suffrage universel, et d'autres représentants légitimes que le Parlement et le Gouvernement, n'eut plus jamais, de ce jour, son mot à dire dans la politique éducative du pays. »
— Philippe Nemo, Une trop longue erreur[6]
-
« Comme on interdit à un employeur d'embaucher un enfant de moins de 16 ans, les élèves n'ont d'autre solution que de fuir l'école ou, s'ils sont contraints d'y aller par la force, de résister par la violence à un système scolaire qui les agresse. S'ils n'ont pas envie d'aller à l'école et que les employeurs légaux n'aient pas le droit de les embaucher, ils se tournent vers le marché noir et la délinquance. Que l'on supprime la scolarité obligatoire, que l'on autorise le travail des enfants en deçà de 16 ans, et ces maux disparaîtront comme par enchantement. […] Nous avons le problème classique d'un législateur qui se substitue aux individus et aux familles en croyant savoir mieux qu'eux-mêmes ce qui est bon pour eux. Ils sont alors surpris de voir la réaction de ces jeunes. Quand on utilise la violence pour forcer quelqu'un à faire quelque chose qu'il n'a pas envie de faire, il ne faut pas s'étonner des conséquences que cela engendre. »
— Bertrand Lemennicier, Analyse marginale[7]
-
« La propagande nationalo-étatiste décrit la santé et l’éducation comme des « biens sociaux », c’est-à-dire le contraire d’un simple bien de consommation ou, pour employer un terme encore plus dénigré, une « marchandise ». C’est ce qui justifierait la mainmise des bureaucrates sur ces secteurs, au profit de la collectivité tout entière. Comme lorsque les bureaucrates planifient les récoltes de patates, ce qui arrive en pratique est que les services de santé et d’éducation sont rationnés et qu’il faut se contenter de services moindres et de moins bonne qualité que ce que l’on souhaiterait obtenir. D’une réforme majeure à l’autre, ces secteurs sont presque constamment en crise. »
— Martin Masse
-
« L'éducation, aussi bien que la charité, est devenue, chez la plupart des peuples de nos jours, une affaire nationale. L'État reçoit et souvent prend l'enfant des bras de sa mère pour le confier à ses agents ; c'est lui qui se charge d'inspirer à chaque génération des sentiments, et de lui fournir des idées. L'uniformité règne dans les études comme dans tout le reste ; la diversité, comme la liberté en disparaissent chaque jour. »
— Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique[8]
-
« La transformation de l'instruction publique en éducation nationale est la plus fasciste de mes réformes. »
— Benito Mussolini
-
« L'homme naît ignorant, mais pas stupide ; c'est l'éducation qui le rend stupide. »
— Bertrand Russell
-
« Si vous pensez que l'éducation coûte cher, essayez l'ignorance ! »
— Derek Bok (humour)
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« La fausse apparence donne l’impression que le but de l’éducation publique est de donner aux jeunes des connaissances et d’éveiller leur intelligence et, ainsi, de les rendre aptes à revêtir les devoirs de la citoyenneté de manière éclairée et indépendante. Rien ne pourrait être plus éloigné de la vérité. Le but de l’éducation publique n’est pas d’éclairer du tout, c’est tout simplement de réduire autant d’individus que possible, au même niveau sécurisant [pour le gouvernement], d’élever et de former une citoyenneté standardisée, de brimer toute dissension et originalité. »
— H. L. Mencken
-
« Aujourd'hui, un petit prof démago vous assure que votre cerveau n'a pas la capacité de penser, que vos sens ne perçoivent rien et que vous devez obéir aveuglément à la volonté toute-puissante de la Société, comme force surnaturelle. Mais il s'agit toujours du même numéro pour atteindre le même objectif : faire de vous une loque renonçant à croire que sa conscience ait une quelconque validité. »
— Ayn Rand, La Grève
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« La France est l’un des très rares pays développés où il soit interdit de créer une université privée : c’est le monopole absolu de l’État. Cela favorise la diffusion dominante d’une pensée largement étatique. »
— Pascal Salin
-
« La devise de l'école post-moderne : "Pourquoi enseigner quelque chose plutôt que rien ?" »
— Adrien Barrot, 2000
-
« De même qu'un apparatchik était jadis incapable fût-ce d'envisager que l'improductivité de l'agriculture soviétique pût provenir du système même de la collectivisation, ainsi les bureaucrates du ministère de l'Education Nationale ne peuvent pas concevoir que l'écroulement de l'école puisse être dû au traitement idéologique qu'ils lui infligent depuis trente ans. »
— Jean-François Revel, La Grande Parade
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« Le totalitarisme européen est une conséquence de la prééminence de la bureaucratie dans le domaine de l'éducation. Les universités ont frayé la route aux dictateurs. »
— Ludwig von Mises, La Bureaucratie
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« Dans les sociétés capitalistes, les méthodes d’éducation, qui sont basées sur la discipline et la contrainte, trahissent un « défaut dans la cuirasse ». En effet, comment inculquer à un enfant la valeur de l’initiative et du contrat – notions libérales par excellence – si l’on emploie pour cela des méthodes répressives ? Les sociétés communistes ne souffrent pas de telles contradictions. On veut que l’enfant apprenne à commander et à obéir, et les méthodes d’enseignement sont en parfait accord avec le but recherché. »
— Thomas Szasz
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« L'État, en proclamant la « liberté de l'enseignement », proclame simplement que quiconque enseigne comme le veut l'État ou plus exactement comme le veut le pouvoir de l'État est dans son droit. »
— Max Stirner
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« Tout système éducatif contrôlé par les politiciens et les bureaucrates inculquera tôt ou tard la doctrine de la suprématie étatique. À partir du moment où cette doctrine a été intégrée par les individus, il devient extrêmement difficile de renverser le pouvoir qu'exerce l’État sur leur vie. Un tel système éducatif, étatique et obligatoire, est donc le parfait modèle d’État totalitaire. »
— Isabel Paterson
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« Si nous enfermons la jeunesse dans de vastes prisons en guise "d'éducation", avec des professeurs et des administrateurs en guise de geôliers, pourquoi alors ne pas nous attendre au mécontentement et à la rébellion de la jeunesse ? »
— Murray Rothbard
J) Réformer l’Éducation nationale : questions de méthode -
« Il faut régionaliser l’Éducation nationale » et « c’est par le bas qu’il faut commencer »
(Nelly Guet)
, en rendant les établissements progressivement autonomes. La récente réforme du collège irait donc dans le bon sens en laissant 20% des horaires à la libre disposition des équipes pédagogiques pour construire des enseignements pratiques interdisciplinaires et en passant d’une logique de programme à une logique de projet.
Si nul ne devrait plus contester la nécessité d’un Big Bang dans le système éducatif français, il n’est pas sûr pour autant que la méthode des petits pas soit la mieux adaptée à la réalité de la situation ni aux attentes des Français attachés par une longue histoire à leur École.
La perte de sens de l’enseignement
La réforme du collège présentée par Madame Vallaud-Belkacem vient après beaucoup d’autres qui, depuis trente ans, ont, par effet d‘accumulation, fait perdre à l’École le sens de ses missions. L’empilement des mesures, sans aucune mise en perspective, a eu en effet des conséquences dévastatrices pour les différents acteurs, parents, élèves et enseignants.
Soutien et itinéraires de découverte au collège, travaux pratiques encadrés et accompagnement personnalisé au lycée, sans oublier la réforme des rythmes scolaires dans les écoles primaires devant permettre le développement d’activités péri éducatives tout en négligeant de les financer ; à quoi s’ajoutent, liste non exhaustive, les multiples projets en tous genres, l’éducation à la santé, à l’orientation, les voyages et autres sorties culturelles… De tout cela il a résulté un éclatement des enseignements – pauvres enseignants qui ignorent en quoi consiste désormais leur métier et à qui leur administration répète tous les jours qu’ils le font mal ! -, plus grave encore, une dispersion des élèves qui ne savent plus distinguer l’essentiel de l’accessoire – comment le pourraient-ils ? – et à qui on a négligé de faire acquérir les connaissances fondamentales – qui peut, sans mauvaise foi, s’étonner du recul régulier de la France dans les classements PISA en mathématiques et en maîtrise de la langue ? Des élèves qui ne savent plus non plus à quel adulte se référer – il arrive que 18 professeurs différents interviennent dans une même classe de seconde ! –. L’enfer est pavé de bonnes intentions : à force de vouloir secondariser le primaire et de rapprocher le secondaire du supérieur, on a semé, à tous les niveaux, la plus extrême confusion. Éduquer n’est-ce pas respecter les âges de la vie ? La jeunesse de 2015, en dépit de certaines apparences trompeuses, est en réalité beaucoup moins autonome que celle d’il y a trente ans.
Comme parallèlement à cette déstructuration volontaire de l’enseignement, on a conservé le cadre classique sans en redéfinir les objectifs – peu ou prou le système est orienté vers la préparation d’études supérieures longues via la voie générale -, l’École demeure une machine à sélectionner et à exclure, tôt ou tard, par l’échec.
On ne saurait donc s’étonner de l‘inquiétude des parents et des enseignants devant une énième réforme qui conduit à aggraver les défauts accumulés depuis trente ans plutôt que de les corriger !
La nécessité de mobiliser les acteurs par un projet politique fort
La France n’est pas la Finlande et elle entretient depuis plus d’un siècle de République une relation particulière avec son École. Le fameux modèle finlandais est sans doute admirable mais ses thuriféraires oublient que, pour des raisons historiques, l’École est en France une question éminemment politique : incarnant depuis Jules Ferry les valeurs du « modèle républicain » (S. Berstein), ses dysfonctionnements alimentent la défiance des Français à l’égard des institutions et minent leur vouloir vivre ensemble.
La réforme en commençant « par le bas » risque donc de continuer à alimenter cette défiance nourrie par trente ans de réformes inabouties. Du reste, changer un élément sans s’attaquer à l’ensemble n’est guère efficient, l’épisode récent des rythmes scolaires l’a montré. Surtout, la crise de l’École étant fondamentalement une crise du sens, il appartient au politique de répondre à ces questions auxquelles l’École de Jules Ferry avait su répondre en son temps : que faut-il enseigner ? A qui ? Comment ? Pourquoi ? Avec qui ?
Sans réponse à ces interrogations, ni l’indispensable régionalisation régulée de l’Éducation nationale, ni son ouverture sur d’autres acteurs sociaux, ni la redéfinition du métier d’enseignant n’ont de chances de déclencher une dynamique positive chez les différents acteurs. Pire, ces changements risquent d’être interprétés comme la simple volonté de l’État de se décharger sur d’autres d’une dépense qu’il n’a plus les moyens d’assumer. Ainsi toute réforme des statuts du corps enseignant est interprétée – à tort ? – dans les salles de professeurs comme une tentative de faire des économies sur une profession mal rémunérée à qui on n’a pourtant pas cessé d’en demander davantage depuis vingt ans !
Le rétablissement des finances publiques est certes une nécessité mais il ne saurait tenir lieu de grand dessein pour la nation tandis que l’abandon pur et simple de l’École à des collectivités territoriales financièrement exsangues risque d’avoir des conséquences politiques redoutables, renforçant le sentiment d’abandon de la part de populations défavorisées. C’est justement son inégalité fondamentale qui alimente le rejet du système actuel ; il ne faudrait pas que sa juste réforme soit perçue comme son aggravation. Les politiques ne doivent donc pas éluder certaines questions : qui décide ? Qui finance ? Qui contrôle
Les Français attendent une parole politique forte sur l’École, une parole politique qui soit à la hauteur de son passé et qui soit tournée vers l’avenir. Car c’est bien le grand défi de l’École du XXIème siècle, élever le niveau général de tous en proposant à chacun des parcours diversifiés de réussite, qui nécessite une transformation radicale du système de formation. C’est bien l’avenir de la jeunesse et du pays qui est en jeu. A qui appartient-il d’en convaincre les Français sinon aux politiques eux-mêmes ? Si l’on veut faire l’École de tous et pour tous, faut-il en confier l’élaboration à la représentation nationale ou à des experts autoproclamés qui ne s’adressent jamais au peuple dans son entier ? A qui appartient-il de mobiliser les forces vives du pays autour de son avenir et d’un projet éducatif ?
Dans un tel contexte, il est à la fois singulier et inquiétant de constater
« le silence assourdissant qui a régné sur les questions d’éducation pendant la campagne des municipales et des départementales »
(Nelly Guet).
On voit mal du reste pourquoi il en irait autrement lors des prochaines échéances régionales et on attend avec impatience de voir quel candidat à l’élection présidentielle saura se montrer à la hauteur de l’avenir du pays et de ses défis !
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