L'Université Liberté, un site de réflexions, analyses et de débats avant tout, je m'engage a aucun jugement, bonne lecture, librement vôtre.
Je vous convie à lire ce nouveau message. Des commentaires seraient souhaitables, notamment sur les posts référencés: à débattre, réflexions...Merci de vos lectures, et de vos analyses.
Sommaire:
B) - Les villes flottantes: la dernière utopie des marxistes de droite - Slate par Emmanuel Haddad
C) - Micro-Etats, villes flottantes : le projet fou des nouveaux maîtres du monde - N-Obs par Dominique Nora
D) - La "Panarchie" par Alain GENESTINE
A) - Faut-il prendre les libertariens au sérieux ?
Preuve que le français reste une langue bien vivante, l'édition 2014 du Petit Larousse illustré s'est enrichie de plus de 150 mots. Qui vont de "botoxé" à "subclaquant", en passant par "lombricompostage" et "textoter" . Dans le domaine économique, plusieurs mots ont fait leur apparition. Deux d'entre eux feront plaisir à Arnaud Montebourg : "démondialisation" et "réindustrialisation". Autre entrant, le mot "libertarien", avec la définition suivante : "Libertarien, enne, n. et adj. (angl. libertarian ). Partisan d'une philosophie politique et économique (princip. répandue dans les pays anglo-saxons) qui repose sur la liberté individuelle conçue comme fin et moyen. Les libertariens se distinguent des anarchistes par leur attachement à la liberté du marché et des libéraux par leur conception très minimaliste de l'État. Adj. Relatif à cette philosophie."Les auteurs du Larousse ont pris une heureuse initiative. D'abord parce que quand, en français, le libertarien n'est pas confondu avec le libertin, il l'est avec le libertaire. Ce qui n'a pas grand-chose à voir, puisque le libertaire, anticapitaliste radical, se situe tout à la gauche de la gauche. Ensuite parce que le mot libertarien apparaît de plus en plus fréquemment dans les journaux. On a ainsi pu lire dans Le Monde un portrait du conseiller économique de Marine Le Pen titré : "Bernard Monot, l'économiste "libertarien" de Marine Le Pen". Les deux auteurs de l'article y soulignaient qu'il y avait quelque chose d'un peu contradictoire à ce que M. Monot se proclame libertarien alors que les thèses de ce courant de pensée anglo-saxon sont aux antipodes de celles défendues par le Front national. Au nom de la libre circulation des marchandises et des hommes, les libertariens condamnent les obstacles à l'immigration et ils sont viscéralement antiprotectionnistes. Bref, quand le conseiller économique de Marine Le Pen se dit libertarien, on n'est pas loin du détournement d'héritage, une tradition, il est vrai, bien ancrée au FN.Non, s'il faut surtout se familiariser avec les idées libertariennes, c'est parce qu'elles ont le vent en poupe aux États-Unis, portées haut et fort par un sénateur du Kentucky, Rand Paul, 51 ans. Début mars, au cours d'une consultation organisée pour départager les éventuels prétendants républicains à la Maison-Blanche en 2016, Rand Paul est arrivé en tête, avec 31 % des voix. Se montrant aussi critique vis-à-vis de la présidence Obama que vis-à-vis des huit années de mandat Bush - qualifiées d'"échec lamentable" -, il défend avec fougue des idées iconoclastes qui lui valent de compter à peu près autant d'adversaires chez les républicains que chez les démocrates.En matière de politique étrangère, par exemple, Rand Paul se déclare non interventionniste. Plus question à ses yeux que les États-Unis se mêlent des affaires des autres pays et jouent le rôle, financièrement insupportable et moralement condamnable, de gendarme du monde. Son père, avant lui, s'était ainsi farouchement opposé aux guerres en Irak et en Afghanistan, avec cet argument : "Je ne vois aucune raison d'envoyer de jeunes hommes à 10 000 kilomètres d'ici pour attaquer un pays qui n'a commis aucune agression contre le nôtre."Au nom de la défense des libertés individuelles, les libertariens dénoncent les procédures de surveillance informatiques des citoyens mises en place par Bush et Obama au nom de la lutte contre le terrorisme. En 2013, Rand Paul avait fait le buzz médiatique en menant au Sénat une opération de filibuster (obstruction parlementaire)- il avait parlé sans interruption durant treize heures - pour s'opposer à la nomination du nouveau patron de la CIA.C'est aussi au nom de la défense des libertés individuelles que les libertariens souhaitent la dépénalisation des drogues, ce qui fait grincer quelques dents dans les rangs des ultraconservateurs républicains : Mitt Romney les a même traités un jour d'"oiseaux cinglés". Il est vrai que les libertariens n'hésitent pas à faire dans la provocation : dans la province de l'Alberta, au Canada, un de leurs candidats avait choisi d'écrire ce slogan osé sur ses affiches : "Je veux que les couples gays mariés puissent défendre leurs plants de marijuana avec leurs fusils." En matière économique, les libertariens défendent un principe très simple : le moins d'État possible. Le moins de dépenses publiques possible, le moins d'État-providence possible, le moins d'impôts possible. Moins l'État se montre interventionniste, mieux cela vaut. Il faut laisser faire le marché. Il estime que les plans de sauvetage des banques décidés à la suite de la faillite de Lehman Brothers ont été à la fois inefficaces et extraordinairement coûteux.Il considère surtout que la dette publique américaine est "out of control" et menace toute l'économie. Non seulement la Fed mène, selon lui, une politique insensée en faisant fonctionner la planche à billets, mais il juge scandaleux de transmettre en héritage les dettes actuelles aux jeunes Américains. Et quand on reproche à Rand Paul le fait que ses solutions sont extrêmes, il rétorque que c'est la situation des finances américaines et les 17 000 milliards de dollars de dette de l'État fédéral qui sont extrêmes. Hier considéré comme totalement farfelu, le message libertarien est aujourd'hui écouté avec de plus en plus d'attention aux États-Unis. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, on pourrait imaginer qu'il le soit un jour en France. On peut s'y préparer en achetant la dernière édition du Petit Larousse.
Par Pierre-Antoine Delhommais
B) - Les villes flottantes: la dernière utopie des marxistes de droite
Les libertariens américains engouffrent des
millions de dollars pour construire d’utopiques cités en mer où une
seule loi serait imposée: le libre-marché.
Les villes flottantes,
c’est du sérieux. The Economist y
dédie un dossier entier, leur principal financeur est Peter Thiel, le
cofondateur multimillionnaire de Paypal, et le Seasteading Institute, un lobby
de recherche et de promotion sur le «seasteading»
(«seasted communities» se réfère aux futures villes
flottantes) se dédie complètement à leur réalisation technologique, légale et
financière.
«Beaucoup
de fous»
L’idée d’aller vivre au
milieu de l’océan pour y développer «des
communautés permanentes et autonomes dans l’océan pour
permettre d’expérimenter divers systèmes sociaux, politiques et
légaux innovants» n’a rien de burlesque ni
d’utopique pour les fondateurs du Seasteading
Institute.
D’ailleurs, sur le papier, on se demande presque pourquoi les
futures villes flottantes ne comptent pas déjà des milliers d’inscrits sur
liste d’attente. D’une part parce que le cofondateur de ce lobby n’est autre
que Patri Friedman, le petit-fils du père du néolibéralisme Milton Friedman. De
l’autre, parce que son principal créancier est Peter Thiel et que «si Peter Thiel finance quelque chose,
ça va forcément être grandiose et de pointe», comme s’en enthousiasme la
journaliste de Reasons.com avant d’énumérer son flair d’entrepreneur: outre PayPal, il a entre
autres été impliqué dans Linked In et a été le premier investisseur de
Facebook. Enfin, parce que cette fois, promis les gars, c’est du sérieux:
«Il y a dans l’histoire beaucoup de
fous qui ont essayé ce genre de trucs et l’idée est de le faire d’une manière
qui ne soit pas folle», juge bon de préciser Joe Lonsdale,
ex-président de l’Institut et directeur de hedge fund.
Car des projets de
communautés libertariennes perdues au milieu de l’océan pour échapper aux
griffes (et aux impôts) de l’Etat, l’histoire du XXe siècle en regorge. Si
les nouveaux concepteurs des villes flottantes s’en démarquent en qualifiant
leurs prédecesseurs de fous, c’est qu’aucun n’a jamais réussi à dépasser le stade
de l’utopie.
«L’Amérique,
tu la détestes, et tu la quittes!»
Le point commun des
premiers adeptes de la possibilité d’une
île libertarienne, c’est d’être assez farfelus et impatients pour désirer
voir leur utopie se réaliser de leur vivant. Dans sa thèse sur «Le
mouvement libertarien aux Etats-Unis», Sébastien Caré, professeur de sciences
politiques à l’université catholique de
Lille, n’aborde le cas des cités-flottantes qu’après avoir évoqué
la «désagrégation annoncée»
du mouvement libertarien, en introduisant cette «tentative de repli communautaire» de la sorte:
«Rattrapés par leur penchant individualiste,
que leur engagement dans un mouvement collectif les incitait à réprimer,
certains libertariens n’ont pas voulu attendre que leurs congénères se
convertissent à leur doctrine pour la réaliser.»
Tom Marshall édite un
magazine libertarien dans les années 1960, The
Innovator. En 1969, il décide de
mettre en pratique les conseils qu’il distille au fil des pages de son magazine
et part vivre reclus dans les bois de l’Oregon, loin de la civilisation. Avant
de disparaître, l’ermite avait pensé à fonder une île où tous les libertariens
pourraient échapper à l’Etat américain, Preform.
En 1968, Werner Stiefel lance l’Opération Atlantis pour donner vie au
projet Preform. Pour cela, il réunit
de jeunes militants libertariens dans un hôtel de luxe et les fait bûcher pour «créer une île artificielle aussi proche des
côtes états-uniennes que les lois internationales l’eussent permis, et l’Oncle
Sam toléré». En 1970, il jette son
dévolu sur les îles Prickly Pear Cays, puis sur les Silver Shoals, également revendiquées par les Bahamas et par le dictateur haïtien Jean-Claude
Duvalier. Le début d’une suite d’échecs d’un projet dont la
seule réalisation finale, après avoir fait échoué un bateau, sera sa constitution,
Orbis.
C’est dans l’Etat
autoproclamé indépendant de Somaliland (au nord-ouest de la Somalie) que la
constitution Orbis a failli dépasser le stade de l’utopie. Mais là encore, la
principauté de Freedonia ne sera rien
de plus qu’un rêve dans l’imaginaire bien rempli d’un étudiant texan, John
Kyle, qui se fait rebaptiser Prince John Ier pour l’occasion.
Mettre en
application le titre du dernier numéro de The
Illustrator, «L’Amérique, tu la
détestes, et tu la quittes» et les préceptes de l’icône de la pensée
libertarienne Ayn Rand, ce fut aussi le projet de Michael Oliver: la République
de Minerve. Décidé à créer un Etat libertarien, il va d’abord essayer de
l’implanter sur les îles de Turks et Caicos. Puis, après le refus des autorités
britanniques, il se retourne vers un atoll situé à la limite du territoire de
l’île Tonga. La République indépendante de Minerve est proclamée en novembre
1972 sur cet îlot inhabitable, mais peu après le roi des Tonga reprend la chose
en main et l’île finit par se dissoudre dans l’océan... Et avec elle le rêve
d’Etat libertarien de Michael Oliver.
D’autres tentatives plus ou moins
farfelues connaîtront la même fin. Un projet se démarque: dans le
Millennial Project, vivre au milieu de l’océan n’est pas une fin en soi mais la
deuxième des huit étapes à suive pour coloniser la galaxie, théorisées par
Marhall T. Sauvage dans le livre The
Millennial Project: Colonizing the Galaxy in Eight Easy
«Gated-communities»
sur mer
Outre le fait que toutes
les tentatives plutôt extravagantes et mégalomanes de villes flottantes
ont jusqu’ici échoué, certains libertariens critiquent l’essence même de ce
projet, vu comme une perversion de leur idéal de liberté. Sébastien Caré, dont
le dernier livre s’intitule Les Libertariens aux États-Unis: Sociologie d'un mouvement asocial, en souligne un élément majeur:
«Les micronations libertariennes reprennent
très souvent le modèle étatique auquel s’opposent les principes censés présider
leur constitution.»
Ainsi John Kyle devient Prince John Ier et
Michael Olivier se rêve Prince Lazarus et leurs communautés plagieraient les
monarchies d’antan. Mais surtout, ces projets ne sont possibles que selon
«la conviction que l’Etat
libertarien n’est applicable qu’à une communauté de libertariens», une
conception qui, rappelle le chercheur, s’éloigne de la défense du pluralisme de
la majorité des penseurs libertariens. A l’exception notable d’Ayn Rand.
Or c’est cette
libertarienne, auteure d’Atlas Shrugged, le deuxième livre le plus
influent pour les Américains selon une étude de la bibliothèque du Congrès en
1991 (après la Bible), dont la philosophie objectiviste fait l’objet d’un culte chez les adeptes
du seasteading. Publié en 1957, ce
récit dévoré par Alan Greespan et adapté au cinéma relate comment la vie en communauté séparée du reste du
monde des entrepreneurs, scientifiques et créateurs les plus innovants fait
sombrer le monde dans le chaos. L’influence du livre est
soulignée par un article du Daily Mail qui revient sur le soutien de Peter Thiel à l’aventure
des villes flottantes:
«Peter
Thiel, fondateur de PayPal, a été si inspiré par Atlas Shrugged –le roman d’Ayn
Rand sur le capitalisme et le marché libre– qu’il essaye de faire de son titre
une réalité.»
Certains qualifient sa
philosophie d’«égoïsme rationnel». China Miéville préfère y voir
une «philosophie typiquement
américaine de la dissidence petite-bourgeoise et vénale». Les
libertariens «érigent une avarice
toute banale –la réticence à payer des impôts– en combat de principe pour la
liberté politique», écrit l’auteur britannique de romans de
science-fiction dans le recueil Paradis infernaux dirigé par Mike Davis et Daniel B. Monk.
Selon l’écrivain, l’utopie
qui pousse les libertariens à investir l’océan se résume au refus de payer des
impôts et à la peur panique du conflit social qui pousse les classes moyennes
américaines à s’isoler derrière les grilles de «gated-communities» pour vivre avec leur famille. Le dernier
échec en date de ville-flottante en est un emblème peu flatteur.
Freedom Ship devait être plus gros que le Titanic, accueillir 50.000
locataires, tous exemptés d’impôts, pour la somme généreuse de 11 milliards de
dollars. Le bateau de 25 étages aurait dû se balader sur les mers depuis 2003,
mais aux dernières nouvelles, «la
liberté est en retard», comme le résume China Miéville, qui s’est
amusé à aller déceler les dessous peu reluisants de cet énième projet avorté
d’utopie flottante.
«Freedom Ship
Inc. n’a rien caché de son arrangement avec les autorités du Honduras pour
construire le vaisseau à Trujillo, invoquant les avantages géographiques et la
main d’œuvre bon marché des dix à vingt mille ouvriers imaginaires qu’ils
imaginent exploiter.»
Une manifestation a même été organisée par la
minorité garifuna, des descendants
d’esclaves africains et améridiens, dénonçant les confiscations de leurs terres
à cause de la construction du bateau. «Le Freedom Ship est et restera un château dans les airs –ou sur la mer–
mais il a déjà posé ses fondations, sur la terre de quelqu’un d’autre»,
claironne
l’écrivain britannique. Mais dans l’affaire, les garifunas ne risquent
pas d’être les seuls à se plaindre: 4.000 personnes avaient déjà réservé
leur ticket pour la liberté des mers pour
des sommes allant de 80.000 à 5
millions de dollars.
«L’imagination
utopique gratuite n’a pas bonne presse»
Tout reste donc à faire
pour les adeptes d’Ayn Rand, ces «marxistes
de droite» déçus du conservatisme politique américain et désireux de
redonner au libéralisme ses lettres de noblesse. Et cette fois, il semble que
les nouveaux penseurs du seasteading aient davantage les pieds sur terre. Pire, pour China Miéville, qui ne cache pas s’être
délecté à la découverte des farfelues Millenial Project et autres opération
Atlantis, «de nos jours,
l’imagination utopique gratuite n’a pas bonne presse, il faut donc lui
adjoindre une justification matérielle, aussi peu convaincante soit-elle».
Le Seasteading Institute la joue donc raisonnable: ils vendent une utopie pragmatique. L’idée est de «permettre aux futures générations de
pionniers de tester de nouvelles idées de gouvernement. La meilleure peut
ensuite inspirer des changements de gouvernements partout dans le monde».
Un objectif louable, déjà visé par des think tanks dans le monde
entier.
Mais l’entreprise de Peter Thiel et Patri Friedman veut aller plus loin, car
«la nature du gouvernement est sur
le point de changer à un niveau fondamental», préviennent-ils.
Plus question donc de
fuite petite-bourgeoise de la réalité ni de communauté réservée aux seuls
libertariens, les futures villes flottantes promues par la recherche de
l’institut accueilleront quiconque est intéressé par l’expérience, toute
idéologie politique confondue.
«Nous
n’avons pas de recommandation politique et je ne crois pas qu’une idéologie
unique soit une bonne chose. L’idée serait donc d’expérimenter différentes
formes de gouvernement et de garder la meilleure. Par exemple, une communauté
avec des taxes, l’autre sans, une communiste, l’autre non», résume
Michael Keenan, l’actuel président de l’institut.
Toujours est-il que
l’anti-étatisme transpire dans le discours du jeune président qui confie voir «la société comme un système et la
politique comme un problème technique»:
«Le problème de fond est qu’il n’y a pas
assez de place pour l’innovation dans un gouvernement qui n’est pas assez
compétitif. Si tu considères l’Etat comme une entreprise, elle représente 50%
du PIB. Or si on peut choisir ses chaussures et son parfum, pourquoi ne pas
pouvoir choisir aussi son mode de gouvernement?»
Après la disparition de
l’île de la République de Minerve ou l’échec de Laissez-Faire City, une île privatisée qui
devait être habitée par des entrepreneurs fans d’Ayn Rand, les concepteurs du Seasteading Institute se veulent prudents et les 2 millions de dollars de Peter Thiel sont
dépensés avec parcimonie dans la recherche et développement. L’utopie doit
prendre forme en trois temps, prophétise Michael Keenan:
«Dans
deux ans, des seasteds basés sur des bateaux accueilleront des communautés de
mille personnes; dans dix ans, des plateformes maritimes pourront loger
des petites villes. Dans quelques décennies, des millions de personnes vivront
dans des villes de la taille de Honk-Kong au milieu de l’océan.»
«Rejoignez le monde réel et combattez pour la
liberté chez vous»
Les limites légales et
technologiques ne manquent pas avant le passage à la deuxième étape. The Economist souligne que les
communautés auront intérêt à rester proches des limites des eaux territoriales
d’un Etat (22km) pour faciliter les allers-retours, quand bien même la zone
économique exclusive d’un Etat lui permet de réguler jusqu’à 200 miles
(321,8km). Certains pays, dont les Etats-Unis, se réservent même le droit
d’étendre leur juridiction sur toute la planète, rappelle l’hebdomadaire britannique. Quant aux limites technologiques, Michael
Keenan les dit déjà dépassées, mais les risques d’ouragan et les vagues de
fond seront des ennemis récurrents; le mal de mer un danger permanent.
Ce qui nous ramène à la
première étape, plus pratique: faire vivre une petite communauté dans un
bateau. Plus pragmatique encore, le site du Seasteading Institute précise que
«les premiers seasteaders seront
des entrepreneurs, des employés de station balnéaire, des marins, des
ingénieurs et des membres d’autres professions liées à l’économie du
seasteading».
Blueseed sera la première graine
du rêve marin des libertariens. Ses fondateurs entendent éviter les lois
américaines sur les visas pour permettre aux meilleurs entrepreneurs du monde
entier de réunir leurs talents de créateurs sur une plateforme située au large
de la Silicone Valley. Là encore, l’utopie est au service de l’intérêt
général: «Blueseed bénéficiera à
tout le monde en apportant des nouvelles technologies au marché, augmentant le
niveau général de prospérité, et c’est pourquoi des gens de tous les moyens
économiques supportent notre projet», nous explique son cofondateur Max
Marty.
Il n'y a plus qu’à attendre 2014 pour savoir si le
vaisseau Blueseed sera une utopie plus flottante que le Freedom Ship. Et
continuer à se boucher les oreilles devant le négativisme du libertarien Murray
Rothbard, qui clamait dès 1972, en plein fiasco de l’opération Atlantis:
«Cela fait maintenant plus de dix ans
que j’entends parler d’un nouvel Eden, d’une île, naturelle ou artificielle,
qui vivrait de manière anarchique ou randienne. […] L’échec total et abject de
toutes ces tentatives farfelues devrait envoyer un message à ses participants:
rejoignez le monde réel et combattez pour la liberté chez vous.»
Emmanuel Haddad
C) - Micro-Etats, villes flottantes : le projet fou des nouveaux maîtres du monde
Les géants de la Silicon Valley imaginent des territoires
off-shore pour y instaurer une société à leur image : riche,
technologique et libertarienne. Au péril de la démocratie ?
Ils ont déstabilisé des industries entières, amassé
des milliards, maîtrisé vos données et s’immiscent de manière de plus en
plus intime dans votre vie quotidienne… Mais les seigneurs de
la Silicon Valley voient encore plus loin : ils imaginent à présent
de créer des "pays" à eux, des communautés offshore, où la technologie
règne en maître. Leur projet fétiche ? Une myriade de cités marines, ne
dépendant d’aucun gouvernement souverain. Dans ces villes flottantes
modulaires, on ne paierait pas d’impôts, on réglerait ses factures en
bitcoins, on ne consommerait que de l’énergie verte, on apprendrait en
ligne, on serait livré par drone et soigné à coups de thérapie
génomique…
Délirant ? Non : face à la faillite
des économies occidentales, les fondateurs et dirigeants de Google,
Facebook, Amazon ou Apple et leurs financiers californiens pensent
qu’ils feraient mieux que les politiques. Persuadés d’être les nouveaux
maîtres du monde, les oligarques de la technologie jugent les
gouvernements de la planète incapables de suivre le rythme de leurs
innovations "de rupture". Ils rêvent de s’émanciper des lois qui
s’appliquent au commun des mortels. Et expriment, parfois, des velléités
sécessionnistes. Au péril de la démocratie ?
Les Etats-Unis, "Microsoft des nations"
Le 19 octobre dernier, à Cupertino,
dans la Silicon Valley, le fondateur de l’entreprise de génomique
Counsyl, Balaji Srinivasan, s’est fait applaudir par une salle comble
d’apprentis entrepreneurs en qualifiant les Etats-Unis de "Microsoft des
nations". Comprenez : un géant désuet et obsolescent, destiné à être
balayé par l’histoire. Quand une entreprise de technologie est dépassée,
a-t-il insisté au cours de sa conférence intitulée "Silicon Valley’s
Ultimate Exit", vous n’essayez pas de la réformer de l’intérieur, vous
la quittez pour créer votre propre start-up ! Pourquoi ne pas faire la
même chose avec le pays ?
Srinivasan exprime juste avec brutalité ce que les champions de
l’économie numérique pensent souvent sans le crier sur les toits.
Il y a beaucoup, beaucoup de choses importantes et excitantes
que nous pourrions faire, mais nous en sommes empêchés parce qu’elles
sont illégales, disait Larry Page, le cofondateur de Google, en mai
dernier lors de sa conférence de développeurs. […] En tant que
spécialistes de la technologie, on devrait disposer d’endroits sûrs où
l’on pourrait essayer des choses nouvelles et juger de leurs effets sur
la société et les gens, sans avoir à les déployer dans le monde normal."
Les seigneurs du numérique n’ont certes pas formé un parti.
Mais ils sont nombreux à se réclamer, comme le créateur de
l’encyclopédie internet Wikipédia, Jimmy Wales, d’une culture
"libertarienne". Une école de pensée qui abhorre l’Etat et les impôts et
sacralise la liberté individuelle, "droit naturel" qu’elle tient pour
LA valeur fondamentale des relations sociales, des échanges économiques
et du système politique. Historiquement marginale, cette mouvance gagne
en influence aux Etats-Unis, avec des adeptes aussi bien dans le Tea
Party qu’au sein des partis républicain et démocrate. Selon un sondage
Gallup du 14 janvier 2014, 23% des Américains (contre 18% en 2000) sont
en phase avec les valeurs des libertariens. A Washington, leur héros,
Ron Paul, député républicain du Texas et ex-candidat à l’élection
présidentielle, veut abolir la banque centrale américaine – la Federal Reserve – et prône le retour à l’étalon-or.
La Californie divisée en six nouveaux Etats
Les plus modérés restent dans le cadre du jeu politique
conventionnel, comme Tim Draper, avec sa campagne "Six Californias".
Partenaire de la prestigieuse société de capital-risque Draper Fisher
Jurvetson (qui a financé des succès comme Hotmail, Skype ou Tesla
Motors), Draper juge le Golden State "de plus en plus ingouvernable et
sous-représenté à Washington". Il veut donc soumettre au suffrage
populaire, en novembre prochain, une initiative pour éclater ce colosse
en six nouveaux Etats à part entière, dont la Silicon Valley. Sa
motivation ?
La Californie taxe beaucoup ses citoyens pour une performance
médiocre, nous explique-t-il. Parmi les 50 Etats américains, la
Californie est celui qui dépense le plus pour l’éducation, alors qu’elle
ne se classe que 46e pour ses résultats. Elle compte parmi les Etats
qui consacrent le plus d’argent aux prisons, alors qu’elle affiche parmi
les pires statistiques en matière de récidive."
Tim Draper veut donc remplacer l’administration bureaucratique
de Sacramento, la capitale de l’Etat, par six nouveaux gouvernements
plus en phase avec les intérêts économiques des grandes régions. Pour
faire de la Silicon Valley le paradis des cyber-yuppies ? "Non,
rétorque-t-il. Cette idée est aussi très populaire dans les zones
les plus pauvres de Californie, qui estiment ne pas bénéficier des
fruits de la redistribution." Selon lui, "six nouveaux Etats pourraient
innover, échanger les meilleures pratiques, et se faire concurrence pour
séduire les comtés limitrophes".
Des "micro-nations" offshore
Performance, concurrence : ce sont les mots-clés d’initiatives
plus audacieuses encore, qui préconisent de sortir carrément du cadre
politique. Patri Friedman, petit-fils du célèbre économiste libéral
Milton Friedman, a ainsi créé en 2008 le Seasteading Institute, qui
milite pour couvrir la planète de "villes-nations flottantes" échappant à
la souveraineté des Etats.
Ces micro-nations permettront à une génération de pionniers de
tester de nouvelles idées de gouvernement, nous explique le directeur
exécutif de l’Institut, Randolph Hencken. Celles qui réussissent le
mieux pourraient alors inspirer des changements aux gouvernements autour
de la planète."
Techno-utopie ? Pas si sûr… Deux anciens cadres de l’Institut, Dario Mutabdzija et Max Marty, ont créé la société BlueSeed pour
contourner la loi américaine sur l’immigration. Ils projettent de
fonder un village incubateur de start-up, avec une communauté de geeks
vivant et travaillant sur un navire géant ancré à la limite des eaux
territoriales américaines, à 22 kilomètres au large de Half Moon Bay, au
sud de San Francisco. "Cet emplacement permettrait aux entrepreneurs du
monde entier de créer et de développer leur société près de la Silicon
Valley, sans avoir besoin de visas de travail américains", lit-on sur
leur site web
Les résidents de ce bâtiment battant pavillon des îles Marshall
ou des Bahamas pourraient rallier le continent par ferry, munis d’un
simple visa business, plus facile à décrocher. La PME, qui a déjà levé
plus de 9 millions de dollars, négocie le leasing d’un navire et
pourrait se lancer dès l’été 2014, si elle parvient à récolter
18 millions supplémentaires.
Paradis des geeks
De son côté, le Seasteading Institute, qui a déjà levé
1,5 million de dollars auprès du multimilliardaire libertarien Peter
Thiel, pousse son projet de "Ville flottante". L’Institut a mandaté le
bureau d’études néerlandais DeltaSync pour imaginer un concept sûr,
financièrement abordable, confortable et modulaire. Son étude de faisabilité de 85 pages, publiée en décembre 2013, préconise
des unités architecturales en béton renforcé, pouvant s’agglomérer ou
se détacher à la guise de leurs occupants. Ces micro-communautés,
paradis des geeks, où le prix du foncier avoisinerait 4.000 euros/m2,
développeraient leur économie autour des technologies de l’information,
mais aussi du tourisme médical, de l’aquaculture et des énergies
alternatives.
Avant d’envisager d’établir leurs communautés en haute mer – ce
qui est compliqué et coûteux –, Patri Friedman et ses partenaires
songent à établir la première ville flottante dans les eaux plus calmes
du golfe de Fonseca, en Amérique centrale. Selon la presse américaine,
ils négocient avec le Honduras, dont le gouvernement compte des
sympathisants du mouvement libertarien. "On a encore beaucoup de
travail, mais je suis optimiste : si tout va bien, la première
communauté flottante pourrait être inaugurée à la fin de la décennie",
annonce Randolph Hencken.
La liberté… contre la démocratie
En attendant, le Seasteading Institute a recruté des dizaines
d’ambassadeurs bénévoles pour prêcher sa cause sur la planète. Et il
s’est lancé dans une évaluation des candidats potentiels :
"1.200 citoyens de 57 pays – à 45% non américains – nous ont déjà dit
qu’ils étaient volontaires", affirme son directeur exécutif. Il faut
dire que les vidéos promotionnelles de son site web sont alléchantes : de vrais bijoux marketing, qui racontent une fable à laquelle tout le monde a envie de croire.
A écouter Friedman et ses amis, en effet, seul le système
politique sclérosé et ses vieilles lois terrestres empêchent de résoudre
les grands problèmes de notre civilisation. Selon eux, repartir d’une
"feuille blanche", comme les pères fondateurs, permettrait de "libérer
le génie inhérent à la race humaine". Des "esprits éclairés formeraient
des centaines de cités-laboratoires, pour expérimenter", ils
inventeraient de nouvelles formes de gouvernance et développeraient les
technologies permettant de "nourrir les gens qui ont faim, enrichir les
pauvres, guérir les malades, restaurer les océans, nettoyer
l’atmosphère, se débarrasser des énergies fossiles."
Problème : il y a un gouffre béant entre les objectifs
humanitaires et environnementaux affichés par le Seasteading Institute…
et l’idéologie hypercapitaliste que ses promoteurs et financiers
libertariens appellent de leurs vœux ! Patri Friedman ne cesse de
critiquer la démocratie comme "inadaptée" à la création d’un Etat
libertarien. Quant à son principal mécène, Peter Thiel, il assène en
avril 2009, sur le site du think tank Cato Institute : "La liberté n’est
pas compatible avec la démocratie." Et se dit convaincu que nous sommes
dans une "course à mort entre la technologie et la politique".
Thiel, dont la famille a émigré d’Allemagne quand il avait un
an, déplore le ralentissement technologique américain, dont il fait une
analyse très personnelle. "Les hommes ont atterri sur la Lune en juillet
1969, et Woodstock a commencé trois semaines plus tard.
Rétrospectivement, on peut voir que c’est le moment où les hippies ont
pris le contrôle du pays et où la vraie guerre culturelle sur le progrès
a été perdue", écrivait-il en 2011 dans le "National Review". Pour lui,
le sort de la planète pourrait donc "dépendre des efforts d’une seule
personne [lui-même ?], qui construise et propage la machinerie de
liberté susceptible de rendre le monde sûr pour le capitalisme". Diable…
Sentiment de toute-puissance
Ses pairs ne sont pas tous aussi radicaux. Mais, enivrés par
leurs performances boursières (avec respectivement 476 et 371 milliards
de dollars, Apple et Google sont deux des trois premières
capitalisations américaines) et leur spectaculaire réussite personnelle
(10 des 29 milliardaires de moins de 40 ans sur la planète viennent du
monde de la technologie), les nouveaux tycoons du numérique souffrent
indubitablement d’un complexe de supériorité. Ils en viennent à regarder
de haut ces chefs d’Etat qui les reçoivent en égaux et quémandent leurs
investissements.
Page et Brin (Google), Bezos (Amazon)
ou encore Zuckerberg (Facebook) n’ont-ils pas, en moins de deux
décennies, créé des sociétés plus riches – et mieux gérées – que nos
trésors publics ? Leur software n’est-il pas en train de "dévorer le
monde", selon l’expression de Marc Andreessen, inventeur du premier
navigateur internet Mosaïc ? Leurs technologies de rupture n’ont-elles
pas déjà déstabilisé des industries aussi puissantes que la téléphonie,
la musique, le cinéma, la télé, la publicité, les médias ? Et même des
institutions comme l’éducation supérieure, la médecine, la monnaie ? Ils
pensent donc que c’est au système politique qu’il faut désormais
s’attaquer !
Ce sentiment de toute-puissance s’est déjà clairement
manifesté, à l’automne dernier, quand un conflit sur le budget a forcé
le gouvernement fédéral américain à fermer provisoirement une partie de
ses services.
Les entreprises transcendent le pouvoir, lançait alors Chamath
Palihapitiya, un ancien employé de Facebook qui a créé son fond de
capital-risque, lui aussi soutenu par Peter Thiel. Si elles ferment, le marché boursier
s’effondre. Si le gouvernement ferme, rien n’arrive, et nous continuons
à avancer, parce que cela n’a pas d’importance. La paralysie du
gouvernement est en réalité bonne pour nous tous."
De même, Balaji Srinivasan a-t-il rappelé, lors de sa
conférence, que l’Amérique de l’après-guerre était dominée par Boston
pour l’éducation supérieure, New York pour la finance, la publicité et
l’édition, Los Angeles pour le divertissement et Washington DC pour les
lois. "Nous avons mis une tête de cheval dans chacun de leurs lits,
a-t-il plaisanté, en référence à la scène mythique du film 'le Parrain'.
Nous sommes devenus plus forts que l’ensemble de toutes ces villes".
Il n’est pas sûr que ces idées, répandues dans la blogosphère,
se traduisent dans la vie réelle. Mais même si tous les fantasmes de ces
techno-oligarques ne se concrétisent pas, ils attirent l’attention sur
de vrais glissements qu’il serait dangereux d’ignorer. Une réelle perte
de légitimité des Etats et de la classe politique, l’émergence d’une
génération nomade de travailleurs numériques souvent plus loyaux à des
communautés virtuelles qu’à leur propre nation. Et l’arrogance d’une
hyperclasse entrepreneuriale tentée de s’affranchir des contraintes de
la démocratie. Et qui en aura les moyens.
Menace d'un techno-fascisme
Les pessimistes lisent dans ces tendances la menace d’un
techno-fascisme 2.0. Mais pour les optimistes, ces tentations
isolationnistes pourraient au contraire annoncer un retour de balancier.
Jusqu’ici, en effet, les Steve Jobs, Larry Page et autres Elon Musk
(Tesla, Space X) sont des héros populaires : les incarnations modernes
du rêve américain. A ceci près que, contrairement aux Rockefeller ou aux
Rothschild (et à l’exception d’un Gates ou d’un Zuckerberg, récemment
devenus philanthropes), ces seigneurs du numérique se préoccupent comme
d’une guigne de rendre une partie de leur bonne fortune à la société.
Ils mènent un train de vie de plus en plus ostentatoire, à l’image du cofondateur de Facebook
Sean Parker s’organisant un mariage princier inspiré du "Seigneur des
anneaux" ou du financier Vinod Khosla, privatisant une plage publique
californienne pour une fête. Ils mettent le feu au marché immobilier de
San Francisco. Font fortune en exploitant à leur insu les données
personnelles des usagers de leurs services. Ouvrent en catimini leurs
serveurs aux agences de sécurité. Tous, bien sûr, sont obsédés par la
réduction de leur facture fiscale, partout sur la planète.
Et si ces techno-milliardaires devenaient aussi
détestés que les banquiers de Wall Street ou les barons du pétrole ?
Pour Bill Wasif, du magazine "Wired", ce serait le début de leur perte.
Car contrairement aux magnats de l’industrie ou des matières premières,
le succès des géants du numérique dépend de l’adhésion de leurs millions
d’usagers à leur marque, aux applications, réseaux sociaux et
communautés virtuelles qu’ils créent. "Si le service est gratuit, c’est
que le produit, c’est toi", dit l’adage de l’économie numérique. Alors,
ne l’oublions pas, ce qui fait leur valeur… c’est nous !
Le mouvement libertarien
Ni
de droite ni de gauche, ce courant politique est "hyperlibéral" sur le
plan économique, et "hyperlibertaire" sur le plan des mœurs. Les
libertariens militent pour la pure loi capitaliste, la liberté complète
des échanges et la coopération entre individus. Contrairement à leurs
cousins conservateurs, ils respectent les choix de vie privée, pour
autant qu’ils ne nuisent pas à la liberté d’autrui. Mais, comme eux, ils
dénoncent la coercition exercée par le gouvernement et les
institutions : ils exècrent impôts et taxes et rejettent toute forme de
redistribution de richesses. Le rôle du gouvernement fédéral, à leurs
yeux, devrait se limiter à la défense nationale, aux affaires
extérieures et à la justice.
Les libertariens puisent leur
inspiration chez des penseurs comme le Français Frédéric Bastiat
(1801-1850) ou les économistes de l’école autrichienne Friedrich Hayek
(1899-1992) et Ludwig von Mises (1881-1973). Leur roman culte, c’est
"Atlas Shrugged" (en français "la Grève", Ed. Les Belles Lettres) de la
philosophe d’origine russe Ayn Rand (1905-1982), qui met en scène une
grève des "hommes de l’esprit", sans lesquels le monde ne peut plus
tourner. D. N.