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mai 13, 2015

Le libéralisme avec le tsar Alexandre II! (Abolition servage, Éradique le terrorisme, Réforme adm., judiciaire, Militaire; nihilisme et populisme)

L'Université Liberté, un site de réflexions, analyses et de débats avant tout, je m'engage a aucun jugement, bonne lecture, librement vôtre. Je vous convie à lire ce nouveau message. Des commentaires seraient souhaitables, notamment sur les posts référencés: à débattre, réflexions...Merci de vos lectures, et de vos analyses.



Sommaire:

A) Alexandre II Romanov (1818 - 1881) : de l’espoir à la tragédie - André Larané

B) Alexandre II de Wikiberal

C) ALEXANDRE II « LE LIBERATEUR » (1855-1881) - datcha-kalina





A) Alexandre II Romanov (1818 - 1881) : de l’espoir à la tragédie
 
Alexandre II, tsar le plus libéral de l'histoire russe, a tenté non sans courage d'engager son empire dans la voie de la démocratie et de la modernisation.


En un quart de siècle, il a multiplié les réformes mais son règne s'est achevé sur son tragique assassinat. La bêtise de quelques anarchistes a ruiné les espoirs de démocratisation du plus grand État européen et l'un des derniers à être encore gouverné de façon autoritaire.


André Larané


Quelques dates :

1825,
prend le titre de Tsarévitch.

1837, voyage à travers la Russie et l'Europe.
1855,
monte sur le trône.
1856, traité de Paris et fin de la guerre de Crimée.
1861, abolition du servage.
1864, création des Zemtsva, des assemblées locales.
1867, l'Alaska est cédée aux Etats-Unis.
1877, déclaration de guerre aux Ottomans.
1880, décret impérial afin d'éradiquer le terrorisme.
1881, assassiné.




Le «tsar libérateur»
Né le 29 avril 1818, Alexandre II monte sur le trône le 2 mars 1855, à 37 ans, tandis que son armée subit d'humiliantes défaites face aux Français et aux Anglais, devant Sébastopol.


Sitôt couronné, le tsar engage des réformes courageuses pour moderniser son pays : libération des serfs (50 millions de personnes sont concernées !), humanisation de la justice et abolition du knout (fouet), mise en place d'assemblées locales, ouverture des universités à la petite bourgeoisie... Ces réformes, bien que mal appliquées, lui valent le surnom de «tsar libérateur». Elles s'accompagnent d'une effervescence littéraire et intellectuelle dans le pays avec l'émergence de grands poètes et romanciers : Léon Tolstoï, Fédor Dostoïevski, Ivan Tourgueniev. Mais parallèlement se développe un mouvement révolutionnaire brouillon chez les étudiants de la petite bourgeoisie. Il prône rien moins que la destruction radicale de l'ordre ancien. Le poète Ivan Tourgueniev invente à ce propos le terme de «nihilisme» (du latin nihil, rien).


Suspension des réformes Le 4 avril 1866, un étudiant, Dimitri Karakosov, tire sur Alexandre II et le manque de peu.



Cet attentat contre la personne sacrée du tsar suscite la consternation dans le pays. C'en est désormais fini des réformes libérales. Le tsar, aigri, cherche une consolation dans les bras d'une jeune fille de 30 ans sa cadette, Catherine Dolgorouki, dite Katia, dont il aura trois enfants au grand scandale de la Cour. Le 1er juin 1867, Alexandre II arrive à Paris, à l'occasion d'une Exposition universelle. Il veut renouer des liens avec Napoléon III après la brouille occasionnée quelques années plus tôt entre les deux pays par la répression d'une insurrection en Pologne. Mais voilà que sur l'hippodrome de Longchamp, un réfugié polonais tire sur le tsar.


Ce nouvel attentat est lourd de conséquences pour la France. Il fait échouer le rapprochement entre la France et la Russie et le soutien du tsar fera cruellement défaut à Napoléon III lors de son affrontement avec la Prusse en 1870. Alexandre garde toutefois de son séjour à Paris le souvenir délicieux de ses retrouvailles avec sa chère Katia... Il l'épouse en secret après son veuvage, soit quelques mois avant sa propre mort (un film, Katia, avec l'inévitable Romy Schneider dans le rôle titre, retrace leur amour romanesque et tragique).



Visées impérialistes Déçu par l'accueil que reçoivent ses réformes, le tsar se consacre désormais à la grandeur de son empire. Ses armées soumettent le Turkestan, aux portes de la Chine, ainsi que les peuples insoumis du Caucase, y compris un célèbre chef tchétchène du nom de Chamil. Alexandre II vend aux États-Unis l'Alaska dont il n'a que faire mais reporte ses visées sur Constantinople, ville glorieuse de l'orthodoxie, capitale d'un empire turc en pleine décomposition. En 1878, le vieux tsar engage une guerre meurtrière et brouillonne contre les troupes du sultan. Celui-ci signe des préliminaires de paix à San Stefano, aux portes d'Istamboul (Constantinople). Mais la menace d'une intervention anglaise contre la Russie oblige toutefois cette dernière à renoncer à la plupart de ses avantages chèrement gagnés. La déception est grande dans le peuple russe, avide de gloires militaires plus que de démocratie.

Agitation anarchiste
Bakounine et Pierre-Joseph Proudhon, prône dans son Catéchisme révolutionnaire l'anéantissement de l'État et l'assassinat des opposants. Beaucoup de jeunes bourgeois se proposent d'aller vers les moujiks des campagnes afin de les inviter à se soulever contre le régime. Cette «Marche vers le peuple» finit en mascarade. Il n'empêche que naissent différentes organisations secrètes dont certaines, comme «Narodnaïa Volia» (La Volonté du Peuple), se donnent pour but d'assassiner le tsar en personne et multiplient les attentats contre sa personne. Par un décret du 12 février 1880, Alexandre II confie des pouvoirs dictatoriaux au comte Loris-Mélikov, héros de la guerre contre la Turquie, avec mission d'éradiquer le nihilisme et d'achever la réforme des institutions.


Jours sombres Le 18 juillet 1880, le tsar épouse en secret sa jeune maîtresse. Dans son désir de la faire couronner impératrice, il songe à une grande réforme qui lui vaudrait l'indulgence de son peuple. Il s'apprête donc à renouer avec le libéralisme de sa jeunesse en instituant des commissions de notables pour préparer l'avènement d'une monarchie constitutionnelle. Las, les anarchistes qui le traquent depuis plusieurs années ont finalement raison de lui et l'assassinent le 13 mars 1881. Prenant le contre-pied de son père, le nouveau tsar, Alexandre III (36 ans), renonce à publier le manifeste convoquant les commissions de notables, contre l'avis de Loris-Mélikov. Il abroge la plupart des réformes libérales, il tente de russifier par la force les provinces périphériques de l'Empire, il encourage aussi l'émergence de nouveaux démons tels que l'antisémitisme pour détourner la colère du peuple. C'est le retour à l'autocratie. Les étudiants révolutionnaires issus de la petite bourgeoisie y voient un encouragement à étendre leur action. En Russie comme dans l'ensemble de l'Europe continentale, un vent mauvais se lève dans les années 1880, où se mêlent les idées anarchistes, socialistes, nationalistes, antisémites, colonialistes, racistes et antireligieuses.



Alexandre II Romanov (1818 - 1881) : de l’espoir à la tragédie
Source: Mon blog Humanitas via Hérodote



B) Alexandre II de Wikiberal

Alexandre II Nikolaïevitch (Moscou, 29 avril 1818 – Saint-Pétersbourg, 13 mars 1881) empereur de Russie (1855-1881) n’a pas su mener à son terme les réformes libérales qui auraient pu sauver l’Empire russe.
Fils et successeur de Nicolas Ier, il montre de grandes capacités dans les responsabilités politiques et militaires que lui confie son père. 
Ayant terminé la désastreuse guerre de Crimée par le traité de Paris (1856), il comprend la nécessité de réformer les structures politiques et sociales archaïques de la Russie.  

Le Tsar libérateur

Dès son avènement, il déclare vouloir aborder le problème du servage « d’en haut » sans « attendre qu’il commence à se dissoudre lui-même par en bas ». Le 3 mars 1861, un rescrit impérial proclame l’émancipation des 47 millions de serfs. L’oukaze du 17 avril 1863 supprime les châtiments corporels, le fouet et la marque imposée aux condamnés de droit commun. Les solovnié, tribunaux de caste, sont remplacés le 2 décembre 1864 par des tribunaux communs pour dispenser « une justice rapide, équitable, humaine, égale pour tous ». Des institutions locales élus, les zemstvos, sont créées le 13 janvier 1864. Un effort considérable est accompli dans le domaine de l’enseignement avec libre accès des femmes aux études secondaires et supérieures, multiplication par trois du nombre des lycées et fondation de nouvelles universités. En 1870 l’institution de conseils municipaux élus marque la fin de l’ère libérale.

Des réformes incomplètes

Beaucoup de ces réformes étaient incomplètes. Les serfs obtenaient la liberté personnelle mais sans aucun droit sur la terre qui restait aux mains des propriétaires. L’insurrection polonaise de 1863-1864 et la tentative d’assassinat du tsar par Karakosov (4 avril 1866) vont tempérer le zèle réformateur d’Alexandre II. La censure est renforcée, l’enseignement soumis à un sévère contrôle tandis que se développent les mouvements anarchistes et nihilistes. 

La politique extérieure du tsar vise à redonner au pays sa puissance. Le Caucase et l’Asie centrale sont soumis, l’alliance avec l’Allemagne favorisée (1873). Les succès de la guerre russo-turque (1877-1878) qui amènent les armées russes aux portes de Constantinople sont effacées par le Congrès de Berlin à l’initiative des Anglais, inquiets de la politique russe sur leurs frontières de l’Inde, Bismarck lâchant son allié. 

Les tendances constitutionnelles regagnent du terrain. La guerre avait permis la création d’un régime constitutionnel en Bulgarie et il paraissait contradictoire de le refuser au peuple russe. D’un autre côté, l’agitation révolutionnaire redouble et les terroristes préparent l’assassinat du tsar. Le terrorisme pouvait détourner les milieux gouvernementaux de la réalisation de réformes libérales mais aussi les inciter à se rapprocher des éléments modérés de la société. Le projet du ministre de l’Intérieur, Loris-Mélikov, prévoit la création d’une commission générale avec des membres élus, représentants les assemblées provinciales et les doumas des villes, pouvant émettre des avis consultatifs sur les projets de loi. Ce premier pas vers un régime constitutionnel n’ira pas à terme. Après avoir échappé à quatre attentats, Alexandre périt déchiqueté par une bombe. 

Son successeur Alexandre III devait rejeter toute idée d’un passage à un régime constitutionnel et réaffirmer sa croyance dans l’autocratie.

Sources: Victor Léontovitch, Histoire du libéralisme en Russie, Fayard 1986

 

C) ALEXANDRE II « LE LIBERATEUR » (1855-1881)
 

I) LES GRANDES REFORMES... D’UN CONSERVATEUR 

1861, émancipation des serfs,
1864 & 1870, administration locale,  

1864, Justice,
1874, Armée.

=Libéralisation instruction publique et censure, mais
1866, mécontentement=politique libérale<0
1863, répression révolte PL.
1877-1878, victoire sur TR=réorganisation carte Balkans. Extension Caucase, Asie centrale, Extrême-Orient. Mais revers diplomatiques et crainte de D ! 




I.1. ABOLITION DU SERVAGE

- Attente des paysans chimériques (la terre à ceux qui travaillent).  
- Noblesse divisée sur compensations : dotations territoriales, droits politiques en retour. 
 
1858, assemblées en province en province=projet d’émancipation des serfs.

  • -  Sud/Centre-Sud : terres riches (tchernozions). Propriétaires veulent donc les
    conserver.
  • -  Nord/Centre-Nord : terres pauvres ; redevance des serfs principale source de
    revenus=fort dédommagement exigé en échange de terre. 

    ++ Menace de sédition

    1861, 19 février, Acte d’émancipation des serfs.
    - Texte plus favorable aux serfs que ne l’attendait la noblesse.
    -Paysannerie classe à part régie par communauté rurale (мир, община) :
    capitation, droit coutumier3

     
    2 Libération des serfs sans migration dans les terres S/CS. Au N, où les serfs font de petits travaux artisanaux afin de payer la redevance, pour le propriétaire conserver la terre de sert à rien, puisque l’impôt en espèces ne rentrera plus.
    3 Les chefs de famille siègent dans la communauté rurale, à laquelle appartiennent les bois, les rivières etc... La répartition des ressources se fait en fonction des bras valides. Le мир a une fonction sociale et judiciaire,

o Le serf possède une maison avec un enclos attenant et un lot de terres cultivables (doit être racheté).
o Partage des terres pour moitié au propriétaire, pour moitié au paysan.
o Crédit de l’Etat sous forme de « bons du Trésor » aux propriétaires, remboursables par les paysans ... en 49 ans !

o « La part du mendiant » : 1⁄4 du lot normal gratuitement (insuffisant) 

= Résultats mitigés :

  • -  Lots insuffisants
  • -  Surpeuplement des campagnes
  • -  Chômage ++
  • -  Indemnités de rachat trop élevées
  • -  Communauté rurale : archaïsme
  • -  Noblesse de plus en plus endettée
  • -  Mœurs patriarcales<0 ancien="" cultivateur="" est="" et="" l="" libre="" mais="" n="" pas="" serf="" span=""> digne
  • -  Décomposition du tissu social 

    I. 2. REFORME DE L’ADMINISTRATION LOCALE (1864, 1870) 

    Afin de sauver l'autocratie, la réforme vise à assurer une plus grande liberté politique pour les nobles avec le développement d'une bureaucratie compétente. 

    1864, janvier, Zemstvo (земство) = assemblée + bureau exécutif 
                                                                         province (губерния)
                                                                         district (уезд)
o Assemblée de députés élus pour trois ans, comprenant trois collèges : 
     + propriétaires fonciers (représentés +++, suffrage masculin universel) 
     + citadins élus soumis au cens
     +communes paysannes (suffrage indirect à 2 ou 3 niveaux).

o Maréchal de la noblesse nommé par le pouvoir central.
o Bureau = 6 membres élus par l’assemblée.
o Contrôle par le pouvoir central (gouverneur).
o Pouvoirs restreints (levée d’impôts, pouvoirs budgétaires).
o Services publics (ponts et chaussées, hygiène, santé, assistance sociale,
écoles4, activités économiques).
o Embryon de société civile. 

1870, principe étendu aux municipalités. Election au suffrage censitaire d’un conseil (дума) pour 4 ans. 

appliquant le droit coutumier, c’est-à-dire la loi orale. Cette communauté constitue en même temps une entrave pour le serf, qui doit obtenir l’autorisation du мир tout entier pour s’en affranchir. In LTL.
4 L'enseignement primaire est détaché de la tutelle de l'Église et pris en charge par les zemstvos (plus de 10 000 écoles créées). Les gymnases (lycées) sont divisés en deux catégories, classique et moderne, ouverts théoriquement à tous les élèves sans distinction d'origine ou de religion. Des collèges avec un seul cycle de quatre ans accueillent les enfants des milieux les moins favorisés. In http://fr.wikipedia.org/wiki/Alexandre_II_de_Russie. 






I. 3. REFORME JUDICIAIRE

1863, châtiments corporels & marque pour les condamnés de droit commun <0.

1864, « justice rapide, équitable, humaine, égale pour tous » (modèle Occident)
- Justice séparée administration.
- Inamovibilité des juges.
- Procédure publique et contradictoire
- Ordre des avocats.
- Procès criminels : jury (суд жных).
- Juge de paix ( й ) élu pour 3 ans (propriétaires fonciers).  

- Appel :


o Congrès juges de paix = district o Cour d’appel (délits, crimes)
o Cour de cassation = Sénat 


LES PLUS
- < 0 coercition, châtiments corporels, marquage.
- Pouvoir judiciaire séparé de l’exécutif ( ?) =acte de naissance société civile en R.
- Un des meilleurs systèmes contemporains en Europe

LES MOINS
- Exil administratif et peine de mort maintenus.  
- Egalité théorique devant la loi (tribunaux militaires et ecclésiastiques, loi coutumière).
- Les plus riches favorisés 


I. 4. REFORME MILITAIRE...TARDIVE 1874, 20 ans après la déroute de Crimée

- Remplacement des serfs dans l’armée.
- Service militaire obligatoire/ tirage au sort, exemptions, réductions de service,
rachat.
- de 25 à 5 ou 3 ans + 9 ans de réserve.
- Châtiments corporels<0.
- Formation officiers>(écoles infanterie, cavalerie, artillerie, génie).  

- Commandement décentralisé (circonscriptions militaires - округа). 
 - 800 000 H temps de paix =1400 000 en temps de guerre.
- Mixité sociale 


BILAN DES REFORMES : TROP OU PAS ASSEZ
venues d’en haut (+)
Intelligentsia radicale et bureaucratie les rejettent (-) 

Société rapidement déçue (-) 



II) POLITIQUE EXTERIEURE 

II. 1. INSURRECTION POLONAISE 

1863-1864, « Insurrection de janvier »

  • -  PL demande rétablissement Constitution 1815. Constantin (frère A II) nommé vice-roi=amnistie proscrits. Mais patriotes « rouges » demandent indépendance et retour frontières de 1792. Romuald Traugutt mène révolte. Etendue à LIT, BL.
  • -  Membres gouvernement provisoire pendus. Déportation clergé catholique. Russification. Influence noblesse<0, distribution terres aux paysans.
II. 2. REVISION TRAITE DE PARIS 

1871, mars, Conférence de Londres annule la neutralisation de la mer Noire et autorise TR et R à y entretenir une flotte militaire (mais passage des navires de guerre au gré du sultan).
1873, 22 octobre, R-D (Allemagne)-A, Entente des trois empereurs
- Convention militaire D-R : un attaqué, l’autre amène 200 000 H.
- Convention politique A-R : consultation des deux empereurs en cas de divergence ou si menace puissance étrangère.

  = Mais volonté hégémonique D et visée A sur Balkans 

II. 3. CRISE D’ORIENT- GUERRE RUSSO-TURQUE DU « PANSLAVISME » 

1877-1878, R soutenue par RO et G attaque vers Constantinople et dans Caucase vers Arménie.
1878, mars, traité San Stefano, R annexe Bessarabie et reçoit Kars, Ardahan, Batoumi (Caucase) 

II. 4. EXPANSIONNISME ASIE a) Conquête Asie centrale 

1864, occupation Kirghizie,
1868, protectorat aux khanats ouzbeks,
1879-1881, soumission pays turkmènes après une guerre de deux ans.

= activités de pillage<0, contrôle ancienne route de la soie, et mainmise sur la production de coton. 

b) Pénétration Extrême-Orient
1858, traité d’Agun, souveraineté R sur rive gauche Amour,
1860, traité de Pékin, R possession du territoire de l’Ossouri,
1867, cession de l’Alaska aux USA (pour cause de difficultés financières et de
continuité territoriale),
1875, J cède à R sud Sakhaline contre Kouriles. 

III) HISTOIRE DES IDEES 

III. 1. LE NIHILISME5

a) Génération des années 60 ( тники)

- Déjà roturiers et « hommes de trop » (лишние люди) sous Alexandre I.
- Années 1870 : « intelligentsia » ( нция)6 (Boborykin) ; Berdjaev : classe de schismatiques (maximalisme)
- A la mort de Nicolas Ier = prise de conscience en tant que classe => « génération des années 60 » ( тники)
- Les modèles Tchernychevski ( вский) puis Dobrolioubov ( бов) et Pisarev (Писарев) - critiques littéraires - prônent révolte contre les normes admises → « nihilistes » (нигилисты).
- Sciences physiques et naturelles +++, 0 conformisme social, société savoir et raison, selon les principes socialistes.
- Querelle des pères et des fils - « Pères et fils» (Отцы и дети) Tourgueniev. 


b) Tchernychevski ( вский)
- Séminariste.
1855, thèse : beauté de l'art car utile, fournit un tableau de la réalité et indique les moyens de l’améliorer (Belinski).
1862-1863, « Que faire ? »(Что лать?)7 = société idéale et moyens de changement. Héroïne Vera Pavlovna8



5 Ce mouvement radical et intolérant n'est pas porté au débat mais à la négation de toute idée qui n'est pas la sienne : ce nouvel esprit radical illustre tout à la fois la tendance de l'époque au matérialisme et au positivisme et la situation particulière de la Russie (une manière de réagir à l'asphyxie de la vie intellectuelle sous le règne de Nicolas Ier). In http://fr.wikipedia.org/wiki/Alexandre_II_de_Russie
6désignait toute personne instruite, même si elle n’exerce pas une profession intellectuelle, et appartenant à une classe marginalisée . LTL
7 Le roman se veut une réponse à Pères et Fils (Tourgueniev). Rakhmetov, le héros,est devenu un emblème du matérialisme et de la noblesse du radicalisme russe. Le roman décrit aussi dans les rêves de Vera Pavlovna, guidés par une déesse (féminisme), une société ayant atteint une « joie éternelle » plutôt terre-à- terre. Evolution vers le socialisme (atelier de couture coopératif de VP ; cité de verre, phalanstère des rêves de VP)

8 « Que faire » : Vera Pavlovna, féministe (mariage blanc de VP ; déesse guidant VP dans ses rêves), socialisme (atelier de couture coopératif de VP ; cité de verre, phalanstère des rêves de VP) 


c) L’héritage du nihilisme
1862, vagues d'incendies, décès Dobrolioubov
1863, soutien à la révolte PL → abandonnés par l’opinion publique. 1864, Tchernychevski bagne à vie= Sibérie.
1866, attentat de Karakozov.

  • -  Mythe d’un avenir radieux méritant un sacrifice hic et nunc (des individualistes qui deviennent les chantres du sacrifice à la cause).
  • -  Reposent les problèmes de la société → reflet littéraire (défavorable) : Pères et fils (Отцы и дети) de Tourgenev (Тургенев), Les carnets du sous-sol (Запискииз лья) et Les démons (Бесы) de Dostoïevski (Достоевский), L’impasse (Некуда) de Leskov (Лесков).
- Réapparition des problèmes éternels :
o la mort (Dostoïevski, Les frères Karamazov (Братья Карамазовы),
o les rapports moi-autres (Dostoïevski, Les carnets du sous-sol),
o la place de la femme dans la société (Tolstoï, Anna Karénine - Анна
Каренина).

III. 2. LE POPULISME
(народничество)


a) Repentir

  • -  Peuple dépositaire de vertus proprement russes et plus vertueux que les élites (Записки охотника -Tourgenev, Очарованный странник - Leskov, Nekrasov...).
  • -  Abolition du servage → mouvement massif d’auto-accusation des nobles : le servage leur a permis de développer leur culture = «nobles repentants» (кающиеся дворяне).
    - Remboursement de leur dette au peuple en diffusant l’instruction.
    1874, marche au peuple (хождение в народ) des narodniki (народники): « apprendre au peuple et apprendre du peuple » (учить народа и учиться у народа).
    1883, <0 avec="" du="" groupe="" marxiste.="" naissance="" nbsp="" premier="" span="">


    b) Propagandisme
    - Lavrov (Лавров, 1823-1900), son penseur, « individualité à l’esprit critique » (критически мыслящая личность) ; faire atteindre le peuple entier à ce niveau de conscience → propagande dans le peuple.
    -Mikhaïlovski (Михайловский, 1842-1904), journaliste : urgence de la propagande face à la « lèpre européenne » (monde ouvrier) ; rôle du mir. 

     
    9 Le populisme désigne un type de discours et de courants politiques, critiquant les élites et prônant le recours au peuple (d’où son nom), s’incarnant dans une figure charismatique et soutenu par un parti acquis à ce corpus idéologique. Il suppose l'existence d'une démocratie représentative qu’il critique. C'est pourquoi il est apparu avec les démocraties modernes, après avoir connu selon certains historiens une première existence sous la République romaine. In http://fr.wikipedia.org/wiki/Populisme_%28politique%29
c) Anarchisme : Bakounine (Бакунин)
  • -  Principe fondateur du peuple russe = chaos (anarchisme) + communisme (la communauté rurale) + instinct de justice.
  • -  Romantisme révolutionnaire : la révolution doit être faite par les des individus en dehors de la société, des asociaux, c’est-à-dire des brigands. «C'est le fait social qui crée la liberté»10.
    - Mythe de la grande apocalypse rouge. d) Terrorisme : Tkatchov (Ткачѐв)
  • -  Les paysans n’ont pas répondu à la propagande des populistes (vie encore dans le système de valeurs traditionnel ; ils ne peuvent pas faire la révolution).
  • -  Révolutionnaires : quelques assassinats judicieux = dommages pour le pouvoir, leçon à la société.
    1876, « Terre et Liberté » (Земля и воля) : société où la souveraineté reposerait sur de petites unités économiques autonomes de communes de village confédérées, remplaçant l'État.
    Nous interrompons ici ce rapide survol chronologique de cette partie de l’Histoire de la Russie, qui s’achève avec la disparition tragique du libéral Alexandre II à qui succédera son fils Alexandre III, avant dernier tsar de la dynastie des Romanov, définitivement éteinte avec l’assassinat, le 17 juillet 1918, de Nicolas II.
10 « La liberté d'autrui, loin d'être une limite ou la négation de ma liberté, en est au contraire la condition nécessaire et la confirmation. Je ne deviens libre vraiment que par la liberté d'autres, de sorte que plus nombreux sont les hommes libres qui m'entourent et plus profonde et plus large est leur liberté, et plus étendue, plus profonde et plus large devient ma liberté. » La véritable liberté n'est pas possible sans l'égalité de fait (économique, politique et sociale). La liberté et l'égalité ne peuvent se trouver qu'en dehors de l'existence d'un Dieu extérieur au monde ou d'un État extérieur au peuple. L'État, le Capital et Dieu sont les obstacles à abattre. In http://fr.wikipedia.org/wiki/Mikha%C3%AFl_Bakounine 

 

mars 21, 2015

Revue de presse sur l'ouvrage de Chantal Delsol « Populisme. Les demeurés de l’Histoire »

L'Université Liberté, un site de réflexions, analyses et de débats avant tout, je m'engage a aucun jugement, bonne lecture, librement vôtre. Je vous convie à lire ce nouveau message. Des commentaires seraient souhaitables, notamment sur les posts référencés: à débattre, réflexions...Merci de vos lectures, et de vos analyses.






 Le Figaro : Plaidoyer pour le populisme

Les jeunes gens qui voudraient connaître un de ces admirables professeurs que fabriquait la France d’avant — et qui la fabriquaient en retour — doivent lire le dernier ouvrage de Chantal Delsol. Tout y est : connaissance aiguë du sujet traité ; culture classique ; perspective historique ; rigueur intellectuelle ; modération dans la forme et dans la pensée, qui n’interdit nullement de défendre ses choix philosophiques et idéologiques. Jusqu’à cette pointe d’ennui qui se glisse dans les démonstrations tirées au cordeau, mais que ne vient pas égayer une insolente incandescence de plume. L’audace est dans le fond, pas dans la forme. On s’en contentera.

Notre auteur a choisi comme thème de sa leçon le populisme. Thème dangereux. Pour elle. Dans le Dictionnaire des idées reçues de Flaubert revisité aujourd’hui, on aurait aussitôt ajouté au mot populisme : à dénoncer ; rejeter ; invectiver ; ostraciser ; insulter ; néantiser. Non seulement Chantal Delsol ne hurle pas avec les loups, mais elle arrête la meute, décortique ses injustes motifs, déconstruit son mépris de fer. À la fin de sa démonstration, les loups ont perdu leur légitimité de loups. « Que penser de ce civilisé qui, pour stigmatiser des sauvages, les hait de façon si sauvage ? »

Pourtant, les loups sont ses pairs, membres comme elle de ces élites culturelles, universitaires, politiques, ou encore médiatiques, qui depuis des siècles font l’opinion à Paris ; et Paris fait la France, et la France, l’Europe. Chantal Delsol n’en a cure. Elle avance casquée de sa science de la Grèce antique. Se sert d’Aristote contre Platon. Distingue avec un soin précieux l’idiotès de l’Antiquité grecque, qui regarde d’abord son égoïste besoin, au détriment de l’intérêt général du citoyen, de l’idiot moderne, incapable d’intelligence. Dépouille le populiste de l’accusation de démagogie. Renvoie vers ses adversaires la férocité de primate qui lui est habituellement attribuée par les donneurs de leçons démocratiques :
« Dès qu’un leader politique est traité de populiste par la presse, le voilà perdu. Car le populiste est un traître à la cause de l’émancipation, donc à la seule cause qui vaille d’être défendue. Je ne connais pas de plus grande brutalité, dans nos démocraties, que celle utilisée contre les courants populistes. La violence qui leur est réservée excède toute borne. Ils sont devenus les ennemis majuscules d’un régime qui prétend n’en pas avoir. Si cela était possible, leurs partisans seraient cloués sur les portes des granges. »
Chantal Delsol analyse avec pertinence le déplacement des principes démocratiques, depuis les Lumières : la raison devient la Raison ; l’intérêt général de la cité, voire de la nation, devient celui de l’Humanité ; la politique pour le peuple devient la politique du Concept. Les progressistes veulent faire le bien du peuple et s’appuient sur lui pour renverser les pouvoirs ancestraux ; mais quand ils découvrent que le peuple ne les suit plus, quand ils s’aperçoivent que le peuple juge qu’ils vont trop loin, n’a envie de se sacrifier ni pour l’humanité ni pour le règne du concept, alors les élites progressistes liquident le peuple. Sans hésitation ni commisération. C’est Lénine qui va résolument basculer dans cette guerre totale au peuple qu’il était censé servir, lui qui venait justement des rangs des premiers « populistes » de l’Histoire. Delsol a la finesse d’opposer cette « dogmatique universaliste » devenue meurtrière à l’autre totalitarisme criminel du XXe siècle : le nazisme. Avec Hitler, l’Allemagne déploiera sans limites les « perversions du particularisme ». Ces liaisons dangereuses avec la « bête immonde » ont sali à jamais tout regard raisonnablement particulariste. En revanche, la chute du communisme n’a nullement entaché les prétentions universalistes de leurs successeurs, qu’ils s’affichent antiracistes ou féministes ou adeptes de la théorie du genre et du « mariage pour tous ». Le concept de l’égalité doit emporter toute résistance, toute précaution, toute raison.

Alors, la démocratie moderne a tourné vinaigre : le citoyen, soucieux de défendre sa patrie est travesti en idiot : celui qui préfère les Autres aux siens, celui qui, il y a encore peu, aurait été vomi comme traître à la patrie, « émigré » ou « collabo », est devenu le héros, le grand homme, le généreux, l’universaliste, le progressiste. De même l’égoïste d’antan, l’égotiste, le narcissique, qui préférait ses caprices aux nobles intérêts de sa famille, au respect de ses anciens et à la protection de ses enfants, est vénéré comme porte-drapeau flamboyant de la Liberté et de l’Égalité. Incroyable renversement qui laisse pantois et montre la déliquescence de nos sociétés : « Le citoyen n’est plus celui qui dépasse son intérêt privé pour se mettre au service de la société à laquelle il appartient ; mais celui qui dépasse l’intérêt de sa société pour mettre celle-ci au service du monde... Celui qui voudrait protéger sa patrie face aux patries voisines est devenu un demeuré, intercédant pour un pré carré rabougri ou pour une chapelle. Celui qui voudrait protéger les familles, au détriment de la liberté individuelle, fait injure à la raison. La notion d’intérêt public n’a plus guère de sens lorsque les deux valeurs primordiales sont l’individu et le monde. »

Les élites progressistes ont déclaré la guerre au peuple. En dépit de son ton mesuré et de ses idées modérées, Chantal Delsol a bien compris l’ampleur de la lutte : « Éduque-les, si tu peux », disait Marc-Aurèle. Toutes les démocraties savent bien, depuis les Grecs, qu’il faut éduquer le peuple, et cela reste vrai. Mais chaque époque a ses exigences. « Aujourd’hui, s’il faut toujours éduquer les milieux populaires à l’ouverture, il faudrait surtout éduquer les élites à l’exigence de la limite, et au sens de la réalité. » Mine de rien, avec ses airs discrets de contrebandière, elle a fourni des armes à ceux qui, sous la mitraille de mépris, s’efforcent de résister à la folie contemporaine de la démesure et de l’hubris [la démesure en grec].

Quand ils découvrent que le peuple ne les suit plus, quand ils s’aperçoivent que le peuple juge qu’ils vont trop loin, n’a envie de se sacrifier ni pour l’humanité ni pour le règne du concept, alors les élites progressistes liquident le peuple.

Sud-Ouest : Ce diable de populisme
Le nouvel essai de Chantal Delsol n’est pas franco-français. On a bien sûr en tête, en le lisant, l’exemple du Front national, surtout à l’heure où la classe politique se dispute à nouveau sur l’attitude à tenir en ce dimanche de second tour électoral dans une circonscription du Doubs. Mais le propos de cette intellectuelle libérale et catholique, à la pensée claire et ferme, va au-delà de nos contingences puisqu’il s’agit de s’interroger sur la démocratie.

Celle-ci est-elle fidèle à ses valeurs lorsqu’elle ostracise un courant politique ? Car tel est le sort des partis ou mouvements décrits sous le terme « populistes ». Et dans la bouche de ceux qui les combattent, le mot ne désigne pas un contenu précis, mais claque comme une injure. Du coup, aucun de ces partis — très divers — ne revendique l’adjectif, sauf par bravade, alors qu’au XIXe siècle, le populisme n’avait pas de connotation péjorative et s’affichait sans complexes, en Russie avec les « Narodniki » ou aux États-Unis avec les « Granger ».

Car c’est à une réflexion historique d’ampleur que se livre Chantal Delsol. Des tribuns de la plèbe dans l’Antiquité aux courants protestataires qui agitent notre Europe de 2015, l’essayiste s’interroge sur les raisons qui font que la démocratie, dont Aristote explique — contre Platon — qu’elle n’est pas fondée sur le règne de la vérité, mais sur celui de l’opinion, en est arrivée à diaboliser des expressions politiques se réclamant justement de ce « peuple » qui est pourtant sa raison d’être.

L’explication qui vient à l’esprit, ce sont les dérives totalitaires de ceux qui ont utilisé la démocratie pour la détruire. Bien sûr, l’auteur se range parmi ceux qui encouragent les démocraties à se défendre. Mais les « populismes » que dénoncent aujourd’hui les élites sont-ils vraiment ennemis de la démocratie ? Chantal Delsol ne le croit pas. Selon elle, ce que veulent ces partis contestataires, c’est précisément un débat démocratique où puissent se faire entendre d’autres opinions que les dominantes. Bref, une alternative.

Credo de l’enracinement
Or, tout se passe comme si certaines opinions n’étaient pas jugées recevables, notamment celles qui privilégient l’enracinement des individus et des sociétés à rebours du credo dominant des élites, celui de l’émancipation et du dépassement des cadres et repères traditionnels. Présentées comme une « frileuse » tendance au repli identitaire, ces opinions répandues dans les milieux « populaires » sont qualifiées de « populistes ». Cela les disqualifie d’avance alors qu’elles sont porteuses de leur sagesse propre ; et cela fait de ceux qui les affichent non pas des enfants, comme feraient des technocrates qui considèrent la politique comme une science inaccessible au vulgaire (et donc récusent la démocratie), mais des idiots dont les idées n’ont pas droit de cité.

Risque de « démagogie »
Non seulement il y a là une perversion de la démocratie, qui est par nature la confrontation d’idées entre gens ayant également voix au chapitre ; mais il y a aussi un risque, celui de dessécher le débat public ou le radicaliser. Bien sûr, Delsol soupèse l’autre risque, inhérent à la démocratie depuis ses origines grecques, et que dénonçait déjà Platon, celui de la « démagogie ». Mais la démocratie étant le pire système... à l’exception de tous les autres, il faut en accepter aussi les inconvénients...

Figaro Magazine : « Non, le populisme n’est pas la démagogie »
Marine Le Pen aux marches de l’Élysée en 2017 ? La Gauche radicale au pouvoir en Grèce ? Le populisme semble avoir de beaux jours devant lui... Mais que faut-il entendre exactement par ce mot ? Et comment a-t-il été instrumentalisé par les élites en place ? La philosophe Chantal Delsol nous l’explique.

— Marine Le Pen en tête du premier tour de la présidentielle de 2017, mais battue au second tour selon un sondage CSA ; explosion du terrorisme islamique fondamentaliste sur notre territoire ; avènement de la gauche radicale en Grèce... De quoi ces événements sont-ils le symptôme ?

Chantal Delsol — La concomitance de ces événements est le fruit d’un hasard, on ne saurait les mettre sur le même plan, et pourtant ils sont révélateurs d’un malaise des peuples. Que Marine Le Pen arrive au second tour est à présent presque une constante dans les différents sondages. Comme dans le roman de Houellebecq, il est probable cependant qu’on lui préférera toujours même n’importe quel âne ou n’importe quel fou : mon travail sur le populisme tente justement d’expliquer ce rejet incoercible.

Le terrorisme issu du fondamentalisme islamique ressortit quant à lui à un problème identitaire. Pour ce qui est des attentats, depuis des décennies, les grands partis s’entendent à étouffer la vérité, à tout lisser à l’aune du politiquement correct, c’est ainsi qu’on refuse de voir les problèmes dans nos banlieues où Les Protocoles des Sages de Sion sont couramment vendus, et que l’on persiste à imputer l’antisémitisme au seul Front national, alors qu’il est depuis bien longtemps le fait de l’islamisme. À force de tout maintenir sous une chape de plomb, il ne faut pas s’étonner que la pression monte et que tout explose.

En ce qui concerne la Grèce, c’est la réaction d’une nation qui en a assez d’être soumise aux lois européennes. C’est une gifle administrée à une technocratie qui empêche un pays de s’organiser selon son propre modèle. On observe une imparable logique dans l’alliance de la gauche radicale avec le parti des Grecs indépendants dès lors que ces deux formations sont souverainistes, qu’elles refusent l’austérité, et sont animées d’une semblable volonté de renégociation de la dette.

Rien d’étonnant non plus à voir Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon saluer quasi de concert le nouveau Premier ministre grec, les extrêmes se retrouvant sur ce même créneau. Centralisatrice et souverainiste, Marine Le Pen a, au reste, gauchisé son programme économique. La souffrance identitaire des banlieues, tout comme l’émergence d’une France périphérique, ou bien encore la revendication par les Français de leurs propres racines et, par-delà nos frontières, le réveil du peuple en Grèce, sont autant de preuves de l’échec du politique.

— D’où cette montée des populismes, pourtant âprement décriée...
Le vocable est devenu aujourd’hui synonyme de démagogie, mais ce n’est qu’un argument de propagande. Il est employé comme injure pour ostraciser des partis ou mouvements politiques qui seraient composés d’imbéciles, de brutes, voire de demeurés au service d’un programme idiot, ce terme d’idiot étant pris dans son acception moderne : un esprit stupide, mais aussi, dans sa signification ancienne, un esprit imbu de sa particularité. L’idiotès grec est celui qui n’envisage le monde qu’à partir de son regard propre, il manque d’objectivité et demeure méfiant à l’égard de l’universel, à l’inverse du citoyen qui, lui, se caractérise par son universalité, sa capacité à considérer la société du point de vue du bien commun. L’idiot grec veut conserver son argent et refuse de payer des impôts. Il cultive son champ et se dérobe face à la guerre, réclamant que l’on paye pour cela des mercenaires. À l’écoute des idiotès, les démagogues grecs attisaient les passions individuelles au sein du peuple, jouant sur le bien-être contre le Bien, le présent contre l’avenir, les émotions et les intérêts primaires contre les intérêts sociaux, si bien qu’au fond, les particularités populaires peuvent être considérées comme mauvaises pour la démocratie. Voilà l’origine. Rien de plus simple, dès lors, pour nos modernes élites, de procéder à l’amalgame entre populisme et démagogie, avec ce paradoxe que les électeurs des « populismes » seront les premiers à se sacrifier lors d’une guerre, car ils ne renonceront jamais à leurs racines ni au bien public, au nom de valeurs qu’ils n’ont pas oubliées. Il est absolument normal qu’une démocratie lutte contre la démagogie, qui représente un fléau mortifère, mais ici il ne s’agit pas de cela : les électeurs des « populismes » ne sont pas des gens qui préfèrent leurs intérêts particuliers au bien commun, ce sont des gens qui préfèrent leur patrie au monde, le concret à l’universel abstrait, ce qui est autre chose. Et cela, on ne veut pas l’entendre.

Chez les Grecs, comme plus tard chez les chrétiens, l’universel (par exemple celui qui fait le citoyen) est une promesse, non pas un programme écrit, c’est un horizon vers lequel on tend sans cesse. Or il s’est produit une rupture historique au moment des Lumières, quand l’universalisme s’est figé en idéologie avec la théorie émancipatrice : dès lors, toute conception ou attitude n’allant pas dans le sens du progrès sera aussitôt considérée non pas comme une opinion, normale en démocratie, mais comme un crime à bannir. Quiconque défendra un enracinement familial, patriotique ou religieux sera accusé de « repli identitaire », expression désormais consacrée. C’est la fameuse « France moisie ». Les champs lexicaux sont toujours éclairants...

— Diriez-vous que nous vivons dans un nouveau terrorisme intellectuel ?
Un terrorisme sournois, qui se refuse à considérer comme des arguments tout ce qui défend l’enracinement et les limites proposées à l’émancipation. On appelle populiste, vocable injurieux, toute opinion qui souhaite proposer des limites à la mondialisation, à l’ouverture, à la liberté de tout faire, bref à l’hubris en général. L’idéologie émancipatrice fut le cheval de bataille de Lénine, populiste au sens premier du terme (à l’époque où populiste signifiait populaire — aujourd’hui, la gauche est populaire et la droite populiste, ce qui marque bien la différence), ne vivant que pour le peuple ; mais quand il dut reconnaître que ni les ouvriers ni les paysans ne voulaient de sa révolution, limitant leurs aspirations à un confort minimal dans les usines, à la jouissance de leurs terres et à la pratique de leur religion, il choisit délibérément la voie de la terreur. Il s’en est justifié, arguant que le peuple ne voyait pas clair.

Mutatis mutandis, c’est ce que nous vivons aujourd’hui avec nos technocraties européennes et, particulièrement, nos socialistes qui estiment connaître notre bien mieux que nous. M. Hollande et Mme Taubira nous ont imposé leur « réforme de civilisation » avec une telle arrogance, un tel mépris, que le divorce entre les élites et le peuple est désormais patent. À force de ne pas l’écouter, la gauche a perdu le peuple. L’éloignement de plus en plus grand des mandataires démocratiques pousse le peuple à se chercher un chef qui lui ressemble, et on va appeler populisme le résultat de cette rupture. Si par « gauche » on entend la recherche de la justice sociale, à laquelle la droite se consacre plutôt moins, le peuple peut assurément être de gauche, mais dès lors que l’élite s’engouffre dans l’idéologie, le peuple ne suit plus, simplement parce qu’il a les yeux ouverts, les pieds sur terre, parce qu’il sait d’instinct ce qui est nécessaire pour la société, guidé qu’il est par un bon sens qui fait défaut à nos narcissiques cercles germanopratins. Ce n’est pas au cœur de nos provinces qu’on trouvera les plus farouches défenseurs du mariage entre personnes du même sexe, de la PMA, de la GPA, voire du transhumanisme. Je ne suis pas, quant à moi, pour l’enracinement à tout crin (n’est-ce pas cette évolution qui a fini par abolir l’esclavage au XIXe, et par abolir récemment l’infantilisation des femmes ?), mais il faut comprendre que les humains ne sont pas voués à une liberté et à une égalité anarchiques et exponentielles, lesquelles ne manqueront pas de se détruire l’une l’autre, mais à un équilibre entre émancipation et enracinement. Équilibre avec lequel nous avons rompu. C’est une grave erreur.

— N’entrevoyez-vous pas une possibilité de sortie du purgatoire pour le populisme ?
Ne serait-ce que par son poids grandissant dans les urnes, il sera de plus en plus difficile de rejeter ses électeurs en les traitant de demeurés ou de salauds, et cela d’autant plus qu’une forte frange de la France périphérique définie par le géographe Christophe Guilluy vote désormais Front national. Marine Le Pen se banalise et, toutes proportions gardées, son parti apparaît de plus en plus comme une sorte de post-RPR, celui qui existait il y a vingt ans, avec les Séguin, Pasqua et autres fortes têtes centralisatrices et souverainistes — la presque seule différence étant dans l’indigence des élites FN : qui, parmi nos intellectuels, se réclame aujourd’hui de ce parti ? Mon analyse est que l’Europe court derrière une idéologie émancipatrice qui, au fond, est assez proche d’une suite du communisme, la terreur en moins : un dogme de l’émancipation absolue, considérée non plus comme un idéal, mais comme un programme. Ainsi sont récusées toutes les limites, ce qui rend la société d’autant plus vulnérable à des éléments durs comme le fondamentalisme islamique. Depuis quelques années, un fossé immense se creuse entre des gens qui, du mariage pour tous au transhumanisme, n’ont plus de repères, et des archaïsants qui veulent imposer la charia. Mais nous ne voulons rien entendre. Nous ne voulons pas comprendre que ces archaïsants sont des gens qui réclament des limites. Il est pathétique de penser que devant le vide imposé par la laïcité arrogante, cet obscurantisme irréligieux, le besoin tout humain de religion vient se donner au fondamentalisme islamique — dans le vide imposé, seuls s’imposent les extrêmes, parce qu’ils ont tous les culots.

Dans ce contexte, il n’est pas impossible que les pays anglo-saxons, et notamment les États-Unis, s’en sortent mieux que nous, car il y perdure une transcendance et nombre de règles fondatrices repérables dans les constitutions, et qui structurent les discours politiques.

— Au point qu’une certaine américanisation de nos mœurs pourrait nous retenir ?
Si paradoxal que cela paraisse, je répondrai par l’affirmative. Au fond, même si l’on en constate les prodromes chez les Anciens, et notamment dans La République de Cicéron, le progrès émancipateur est venu du christianisme, mais il ne saurait demeurer raisonnable sans une transcendance au-dessus. Je dirais que l’élan du temps fléché allant au progrès, qui est né ici en Occident, a été construit pour avancer sous le couvert de la transcendance, qui garantit son caractère d’idéal et de promesse, l’enracine toujours dans la terre, et l’empêche de dériver vers des utopies mortifères. Tranchez la transcendance pour ne conserver que l’émancipation et vous voilà à bord d’un bateau ivre. C’est pourquoi je préfère les Lumières écossaises et américaines, qui sont biblico-révolutionnaires, aux Lumières françaises, forcément terroristes.

— À propos de limites, comment analysez-vous l’adoption par le président de la République et le gouvernement du slogan : « Je suis Charlie » ?
Le pouvoir a surfé sur la vague, avec succès d’ailleurs, mais on n’était que dans la communication et l’artifice : gros succès pour la réunion des chefs d’État, avec une manifestation dont les chiffres augmentaient avant même que les gens ne soient sur place ! François Hollande a fait en sorte que sa cote grimpe dans les sondages, et tel fut le cas, mais tout cela risque de se déballonner dès lors que le pays se retrouvera avec ses soucis majeurs. Quant à la caricature de Mahomet réitérée après l’attentat, même avec son caractère ambigu et doucereux, elle demeure pour le milliard six cent millions de musulmans — presque un quart de la population planétaire — une provocation. Il est étrange de voir des gens qui se disent constamment éloignés de l’idée du « choc de civilisations » en train de susciter, avec enthousiasme (par bravade, par sottise : voyez l’âge mental de ces dessins...), une guerre de civilisations...

FigaroVox : « L’Union européenne est une variante du despotisme éclairé »
La certitude de détenir la vérité conduit les dirigeants de l’UE à négliger le sentiment populaire, argumente l’universitaire.
— Faut-il analyser les élections en Grèce comme un réveil populiste ?
Il est intéressant de voir que le parti Syriza n’est pas appelé « populiste » par les médias, mais « gauche radicale ». Le terme « populiste » est une injure, et en général réservé à la droite. Ce n’est pas une épithète objective. Personne ne s’en prévaut, sauf exception. On ne peut donc pas dire de Syriza qu’il est populiste. Et cela affole les boussoles de nos commentateurs : le premier à faire un pied de nez à l’Europe institutionnelle n’est pas un parti populiste…

— Comment expliquer la défiance des peuples européens qui s’exprime d’élections en sondages vis-à-vis de l’Union européenne ?
Les peuples européens ont le sentiment de n’être plus maîtres de leur destin, et ce sentiment est justifié. Ils ont été pris en main et en charge par des super-gouvernants qui pensent connaître leur bien mieux qu’eux-mêmes. C’est ni plus ni moins une variante du despotisme éclairé, ce qui à l’âge contemporain s’appelle une technocratie : le gouvernement ressortit à une science, entre les mains de quelques compétents.

Avant chaque élection, on dit aux peuples ce qu’ils doivent voter, et on injurie ceux qui n’ont pas l’intention de voter correctement. S’ils votent mal, on attend un peu et on les fait voter à nouveau jusqu’à obtenir finalement le résultat attendu. Les instances européennes ne se soucient pas d’écouter les peuples, et répètent que les peuples ont besoin de davantage d’explications, comme s’il s’agissait d’une classe enfantine et non de groupes de citoyens.

L’Action française 2000 : Les Lumières contre le populisme, les Lumières comme messianisme
Extrait de son entretien :

« Le moment des Lumières est crucial. C’est le moment où le monde occidental se saisit de l’idéal émancipateur issu du christianisme, et le sépare de la transcendance : immanence et impatience qui vont ensemble – le ciel est fermé, tout doit donc s’accomplir tout de suite. C’est surtout vrai pour les Lumières françaises. Ce qui était promesse devient donc programme. Ce qui était un chemin, lent accomplissement dans l’histoire terrestre qui était en même temps l’histoire du Salut, devient utopie idéologique à accomplir radicalement et en tordant la réalité. Pour le dire autrement : devenir un citoyen du monde, c’était, pour Socrate (et pour Diogène, ce Socrate devenu fou), un idéal qui ne récusait pas l’amour de la cité proche (dont Socrate est mort pour ne pas contredire les lois). Être citoyen du monde, pour les chrétiens, c’était une promesse de communion, la Pentecôte du Salut.

Mais pour les révolutionnaires des Lumières, dont nos gouvernants sont les fils, être citoyen du monde signifie tout de suite commencer à ridiculiser la patrie terrestre et les appartenances particulières – la famille, le voisinage, etc. Lénine a bien décrit comment s’opère le passage dans Que faire ? – il veut faire le bien du peuple, mais il s’aperçoit que le peuple est trade-unioniste, il veut simplement mieux vivre au sein de ses groupes d’appartenance, tandis que lui, Lénine, veut faire la révolution pour changer le monde et entrer dans l’universel : il va donc s’opposer au peuple, pour son bien, dit-il. C’est le cas de nos élites européennes, qui s’opposent constamment au peuple pour son bien (soi-disant). Pour voir à quel point l’enracinement est haï et l’universel porté aux nues, il suffit de voir la haine qui accompagne la phrase de Hume citée par Le Pen “Je préfère ma cousine à ma voisine, ma sœur à ma cousine, etc.”, pendant qu’est portée aux nues la célèbre phrase de Montesquieu : “Si je savais quelque chose utile à ma famille et qui ne le fût pas à ma patrie, je chercherais à l’oublier. Si je savais quelque chose utile à ma patrie, et qui fût préjudiciable à l’Europe, ou bien qui fût utile à l’Europe et préjudiciable au genre humain, je le regarderais comme un crime.” Or nous avons besoin des deux, car nous sommes des êtres à la fois incarnés et animés par la promesse de l’universel. »

« Populisme. Les demeurés de l’Histoire » de Chantal Delsol, aux Éditions du Rocher, à Monaco,
en 2015, 267 pages, 17,90 €.
Chantal Delsol est membre de l’Institut, philosophe et historienne des idées. 




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