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octobre 29, 2025

Histoire - Shoah - Babi Yar - Nazisme - Conflit en Ukraine - Stalinisme !!

Le massacre de Babi Yar, qui s'est déroulé sur deux jours en septembre 1941, reste l'un des exemples les plus horribles de massacres commis pendant la Shoah. 
 
 

 
À Kiev, en Ukraine, près de 34 000 Juifs, hommes, femmes et enfants, ont été rassemblés par les Einsatzgruppen nazis (unités mobiles d'extermination) et des collaborateurs ukrainiens locaux. Ils ont été conduits jusqu'au ravin de Babi Yar, à la périphérie de la ville, où ils ont été contraints de se déshabiller, conduits au bord du ravin et abattus de sang-froid. Leurs corps ont été abandonnés dans des fosses communes. 
 
Cette atrocité marqua le début des exécutions massives systématiques en Union soviétique occupée et préfigura des massacres encore plus répandus en Europe de l'Est. L'ampleur brutale du massacre fut aggravée par le fait qu'il eut lieu au cœur d'une grande ville, au vu et au su des civils et des habitants des environs. 
 

 
 
Malgré les tentatives des autorités soviétiques d'effacer la mémoire de Babi Yar et de ses horreurs, le massacre est finalement devenu un symbole de la brutalité et de la collaboration nazies. Il a été immortalisé dans la littérature, l'art et l'histoire, rappelant brutalement l'ampleur de la cruauté humaine pendant l'Holocauste.
 
 
Sur cette photo fournie par le bureau de presse présidentiel ukrainien, le président ukrainien Volodymyr Zelensky assiste à une cérémonie lors de la Journée de commémoration de la Shoah au monument aux victimes juives des massacres nazis du ravin de Babi Yar, à Kiev, en Ukraine, le 27 janvier 2025. (Bureau de presse présidentiel ukrainien via AP)

84 ans après le massacre de Babi Yar, les noms de 1 000 victimes ont été révélés

Malgré l'invasion russe, les chercheurs ont numérisé des artefacts de la vie juive en Ukraine, avec de nouvelles informations sur l'assassinat de 33 771 Juifs à Kiev en septembre 1941

 Ce lundi, lorsque les institutions commémoratives de la Shoah se sont réunies à l’occasion du 84e anniversaire du massacre de Babi Yar, au cours duquel les nazis et leurs collaborateurs ont exécuté plus de 33 000 Juifs en l’espace de deux jours, les noms d’un millier de victimes jusque-là non identifiées ont, pour la toute première fois, été lus grâce aux découvertes faites dans de nouveaux documents d’archives.

Depuis février 2022, date du début de l’invasion russe, l’Ukraine a largement ouvert ses archives gouvernementales, par ailleurs cibles de bombardements russes, explique au Times of Israel Natan Sharansky, président du Centre commémoratif de la Shoah de Babi Yar. Cela a permis à une équipe internationale de chercheurs de rassembler des données éparses et de découvrir ces noms, poursuit-il.

« L’Ukraine est riche de centaines d’années d’histoire juive, sans compter ses plus de 20 millions de documents sur la vie juive », poursuit Sharansky, ancien refuznik russe et politicien israélien par ailleurs président de l’Institut pour l’étude de l’antisémitisme et de la politique mondiale (ISGAP) et du Mouvement de lutte contre l’antisémitisme.

« En partenariat avec la Bibliothèque nationale d’Israël, nous avons déjà numérisé plus de 7 millions de pages issues de plusieurs fonds. Cela nous donne des informations non seulement sur la Shoah mais aussi sur les mariages, les décès, les procédures judiciaires et tous les aspects de la vie juive. »

Lundi, le Centre commémoratif de la Shoah de Babi Yar et la Marche internationale des vivants ont lu 1 031 noms découverts il y a peu sur le site du massacre à Kiev, lors d’une cérémonie qui a fait la part belle à un Kaddish.

À la Bibliothèque nationale de Jérusalem, une lecture similaire a eu lieu suivie d’une discussion sur la question de la mémoire de la Shoah en temps de guerre avec Sharansky, le président de Yad Vashem, Dani Dayan, le président de la Bibliothèque nationale, Sallai Meridor, et l’ambassadeur d’Ukraine en Israël, Yevgen Korniychuk.

La base de données du Centre commémoratif de la Shoah de Babi Yar contient à ce jour 29 671 noms de victimes, d’un âge compris entre neuf mois et 102 ans, avec des détails tels que l’adresse, les parents, la profession et les circonstances du décès.

Babi Yar, ce ravin situé dans la capitale ukrainienne, est le plus grand champ de bataille de la Shoah en dehors des camps de concentration nazis et le site de l’un des massacres les plus sanglants de la guerre.

Une photo d’archive de 1944 d’une partie du ravin de Babi Yar, dans la périphérie de Kiev, en Ukraine, où l’Armée rouge a déterré les corps de 14 000 civils tués par les nazis en fuite, en 1944. L’Einsatzgruppe C est responsable de l’un des massacres les plus notoires, la fusillade de près de 34 000 personnes à Babi Yar, un ravin situé au nord-ouest de la ville ukrainienne de Kiev, les 29 et 30 septembre 1941. (Photo AP, fichier)
 

Les 29 et 30 septembre 1941, à la veille de Yom Kippour, 33 771 Juifs ont été assassinés en l’espace de deux jours.

Durant 36 heures, les Juifs des environs ont reçu l’ordre de se diriger vers le ravin, où ils ont été déshabillés, abattus et enterrés. De nombreuses victimes – essentiellement des femmes, des enfants et des personnes âgées – ont été forcées de s’allonger face contre terre sur d’autres cadavres ensanglantés afin que leurs assassins n’aient pas à les déplacer.

Dans les deux années qui ont suivi, ce ne sont pas moins de 70 000 personnes qui ont été assassinées dans ce ravin – Juifs, Roumains, nationalistes ukrainiens ou prisonniers de guerre soviétiques – ce qui porte le nombre de victimes assassinées par les Allemands et leurs collaborateurs locaux à plus de 100 000.

Les opérations de mise à mort ont été interrompues en 1943, lorsque Berlin a ordonné que tous les sites d’exécutions de masse soient fouillés afin que les cadavres soient détruits mais les nouvelles technologies ont récemment permis d’identifier l’emplacement exact de ces atrocités.

« Babi Yar est la plus grande fosse commune d’Europe, le symbole de la Shoah par balles », rappelle Sharansky en utilisant le terme consacré pour désigner les 1,5 million de Juifs tués à l’époque par les forces nazies ou leurs collaborateurs dans l’Union soviétique occupée et ses républiques.

Natan Sharansky à la synagogue symbolique fondée par le Centre commémoratif de Babi Yar (Centre commémoratif de Babi Yar)
 

Après la guerre, l’Union soviétique a tenté de murer la mémoire de Babi Yar, en exhumant les corps et en construisant par-dessus, poursuit Sharansky.

« Ils ont interdit aux gens d’y organiser des cérémonies commémoratives afin qu’ils ne connaissent pas l’histoire. Moi qui suis né là-bas et qui y ait grandi, quand on m’a approché il y a de cela 10 ans pour y ériger un centre commémoratif, cela m’a parlé », confie-t-il.

Pour l’heure, le site du Centre commémoratif de la Shoah de Babi Yar comprend des monuments en hommage à son passé, dont une synagogue originale, conçue pour s’ouvrir et se re fermer à la manière d’un livre, utilisée lors d’occasions spéciales. Plus de 300 000 personnes, dont des dirigeants étrangers et des citoyens ukrainiens, s’y sont rendus depuis le début de la guerre entre la Russie et l’Ukraine, en 2022, selon l’institution.


 

Les travaux de construction de ce qui veut être un vaste musée, plus grand encore que Yad Vashem et d’autres mémoriaux internationaux, ont commencé il y a plusieurs années, mais la guerre les a mis entre parenthèses.

Pour autant, le Centre commémoratif de la Shoah de Babi Yar redouble d’efforts pour développer ses archives, aidé par l’accès aux archives gouvernementales.

Le Centre commémoratif de la Shoah de Babi Yar souhaite créer les archives les plus complètes du genre en Europe de l’Est, avec des chercheurs travaillant dans plus d’une dizaine d’endroits, souvent sous le feu des critiques, pour protéger les documents.

Au-delà des 1 031 nouveaux noms, plus de 2 000 documents ont été mis à jour et corrigés depuis le début de la guerre, souligne le Centre commémoratif de la Shoah de Babi Yar.

Parmi les documents récemment découverts figurent des demandes d’adoption d’enfants rendus orphelins par l’assassinat de leurs parents à Babi Yar, des pétitions de citoyens demandant la reconnaissance légale de la mort de parents à des fins d’héritage, de remariage ou d’aide financière, et des certificats de naissance des années 1920 et 1930 qui ont aidé à identifier les enfants assassinés en même temps que leurs parents.

Conséquences du massacre de Babi Yar à Kiev, en Ukraine, les 29 et 30 septembre 1941, où 33 771 Juifs ont été assassinés en deux jours. (Domaine public)
 

« Dans certains cas, on a trouvé des correspondances entre des certificats de naissance d’un endroit et des noms écrits dans les registres d’autres villes », explique Sharansky. « Les chercheurs d’Odessa et d’ailleurs sont entravés dans leur action par la guerre mais ils savent que c’est sans doute la dernière occasion de sauvegarder ces documents. »

En atteste ce dossier judiciaire de 1946 qui reprend in extenso le plaidoyer de Zindel Kravetsky, qui demande la reconnaissance de la mort de sa femme et de ses trois enfants – Aron, 8 ans, Zoya, 6 ans, et Vova, 4 ans – tous assassinés à Babi Yar. Un autre document évoque le cas de Rakhil Meirovna Kravets, née en 1863, qui a fui Korosten pour se rendre à Kiev au début de la guerre, avant d’y être assassinée dans le ravin de la mort.

Pour Sharansky et tant d’autres, la préservation de ces souvenirs est autant un acte d’autodéfense qu’une commémoration du passé.

« La mémoire est une arme morale contre le déni, l’oubli et la distorsion, [et] la guerre en Ukraine est une guerre idéologique tout autant qu’une guerre de territoire », conclut Sharansky.

« Nous faisons face à des tentatives flagrantes de distordre l’histoire et même de l’effacer. C’est justement en temps de guerre que l’obligation de défendre la vérité se fait plus forte. »

29 septembre 2025

https://fr.timesofisrael.com/84-ans-apres-le-massacre-de-babi-yar-les-noms-de-1-000-victimes-ont-ete-reveles/ 

 


Babi Yar, 1941. Le massacre des Juifs de Kiev restitué dans un documentaire exceptionnel

Les 29 et 30 septembre 1941, 33.771 Juifs sont exécutés à Babi Yar, près de Kiev, en Ukraine. Sorti en 2022, le documentaire « Babi Yar. Contexte » restitue de manière sobre et précise ce massacre perpétré par l’Allemagne nazie avec le concours de la Police auxiliaire ukrainienne. L’historien Christian Ingrao nous avait livré son analyse.
Le 28 septembre 1941, les Juifs de l’agglomération de Kiev reçoivent l’ordre de se présenter le lendemain au lieu-dit de Babi Yar avec papiers d’identité, argent, objets précieux et quelques vêtements. Ceux qui n’obéiraient pas seraient punis de mort. Pensant qu’ils seraient déportés, envoyés au travail forcé, ils obtempèrent. Mais conduits par petits groupes au bord d'un ravin, les 33.771 hommes, femmes, vieillards et enfants juifs sont tous exécutés à l’arme à feu, en 36 heures, par des unités de la SS, de la Wehrmacht et de la Police auxiliaire ukrainienne. À la libération, l’Ukraine retombe dans le giron de Staline et les soviétiques occultent la nature spécifiquement antisémite du massacre qui aurait selon eux visé des « citoyens soviétiques pacifiques ». En 1952, ils comblent le ravin.
 
 
Joseph Stalin fut l’un des dictateurs les plus redoutés du vingtième siècle, et son régime laissa un héritage de répression, de terreur et de millions de victimes. Sous son commandement, l’union soviétique devint une puissance mondiale, mais le prix fut la souffrance humaine, les goulags et les purges politiques qui anéantirent opposants et innocents. Le côté le plus sombre de Stalin se révèle dans sa capacité à transformer la peur en arme politique. Les camps de travail forcé furent remplis de paysans, d’intellectuels et de soldats accusés de trahison sans preuves réelles. Ces pratiques laissèrent des cicatrices profondes dans l’histoire russe et la mémoire collective de millions de familles. Aujourd’hui, en se remémorant cette période sombre, on ne peut ignorer comment le culte de la personnalité de Stalin masquait les horreurs derrière son image. Son portrait de dirigeant fort reste débattu, mais son héritage le plus sombre demeure un avertissement des excès du pouvoir absolu.
 
 
Le documentaire du cinéaste ukrainien Sergueï Loznitsa restitue le contexte du massacre de Babi Yar, perpétré trois mois après l’attaque de l’URSS par l’Allemagne nazie en juin 1941. Quand la Wehrmacht marche sur Kiev, alors soviétique, les Ukrainiens sont de longue date pris en étau entre différentes puissances impérialistes voisines…
Christian Ingrao1. En effet. Il y a alors en Ukraine des mouvements nationalistes, comme l’Organisation nationaliste ukrainienne (OUN), créée en 1929. Ces mouvements sont initialement nés pour obtenir l’indépendance de l’Ukraine et résister aux pressions de l’État polonais qui tentait de « poloniser » ces territoires. Puis la résistance se retourne contre l’Union soviétique qui a annexé l’Ukraine occidentale en 1939. Sa population subit alors une invasion, immédiatement suivie de la collectivisation, à partir de laquelle les Ukrainiens combattent l’occupant avec acharnement et ce, d’autant plus qu’ils étaient parfaitement informés de la manière dont l’URSS traitait l’Ukraine orientale. Soviétique depuis 1919, celle-ci avait déjà subi la collectivisation des terres agricoles qui conduisit à la famine des années 1932-1933 et à ses 3,5 millions de morts.
    
Cela explique-t-il l’accueil enthousiaste que les nazis reçoivent en Ukraine en juin 1941 ?
C.I. Cela explique d’abord que les Ukrainiens haïssent alors majoritairement le pouvoir soviétique et qu’ils espèrent que les Allemands vont leur octroyer l’indépendance. Il faut aussi souligner que les mouvements nationalistes ukrainiens entretiennent une étroite proximité idéologique avec le nazisme, avec lequel ils partagent un anticommunisme et un antisémitisme ataviques. Ils sont donc ravis de voir arriver les Allemands et profitent du désarroi du pouvoir stalinien pour fomenter des révoltes et des pogroms contre les Juifs. Mais quand la Wehrmacht entre dans Kiev, l’idée des autorités allemandes n’est pas de procéder à l’élimination immédiate des Juifs. Si les Einsatzgruppen visent les juifs, les francs-tireurs, les saboteurs, les communistes…, c’est d’abord parce qu’ils sont considérés comme une menace pour la sécurité.
 
 
Accueil des soldats de la Wehrmacht par la population ukrainienne à l'été 1941, quand l’Allemagne nazie entre en URSS malgré le pacte germano-soviétique signé en 1939
 

Alors, qu’est-ce qui va conduire au massacre de Babi Yar ?
C.I. En août 1941, les nazis considèrent que la « solution finale de la question juive » nécessite de déporter tous les Juifs d’Europe au nord de l’Union soviétique, dans le cercle polaire. Pour installer ceux d’Europe occidentale et méridionale sur les territoires de l’Est au cours de leur transit, les logisticiens nazis estiment qu’il faut d’abord faire « de la place » en exterminant la population juive soviétique.

(…) une série d’explosions meurtrières joue le rôle de déclencheur. Des bataillons de destruction et de sabotage, laissés sur place par l’Armée Rouge, ont miné les rues du centre de Kiev. (…) Les nazis rejettent immédiatement la faute sur la population juive de la ville (…)

À partir de la fin de l’été, les Einsatzgruppen se mettent donc à fusiller aussi les femmes et les enfants juifs dont ils croisent la route. En ce qui concerne Babi Yar, cependant, c’est une série d’explosions meurtrières, le 24 septembre, qui joue le rôle de déclencheur. Des bataillons de destruction et de sabotage, laissés sur place par l’Armée Rouge, ont miné les rues du centre de Kiev. Deux états-majors de la Wehrmacht sont décimés, le documentaire en montre d’ailleurs des images exceptionnelles que je n’avais encore jamais vues. Les nazis rejettent immédiatement la faute de ces attentats sur la population juive de la ville et décident que toutes et tous doivent être exterminés immédiatement. La volonté de vengeance et de représailles précipite ainsi l’extermination exhaustive déjà en préparation. Et conduit au massacre de Babi Yar.

« Le 24 septembre 1941, deux états-majors de la Wehrmacht sont décimés à Kiev, le documentaire en montre d’ailleurs des images exceptionnelles que je n’avais encore jamais vues », commente l’historien Christian Ingrao
 

C’est donc l’ensemble de la population juive de Kiev qui est massacrée ?
C.I. Oui, il s’agit des 33 771 juifs encore présents à Kiev à ce moment-là, sachant qu’avant la guerre, en 1937, on en recensait 224 000. Dans l’intervalle, les soviétiques ont en effet évacué le plus possible d’entre eux, conscients de l’entreprise allemande de décimation systématique et massive des juifs soviétiques. La mise en œuvre du massacre, parfaitement documentée, a impliqué la coordination d’équipes extrêmement diverses. Les unités de propagande de la Wehrmacht ont organisé le rassemblement des juifs les 29 et 30 septembre, les Einsatzgruppen sont chargés de la surveillance et des fusillades, (tandis que des unités de la police auxiliaire ukrainienne contribuent à « sécuriser » l’opération en surveillant les Juifs rassemblés, afin que personne ne s’échappe et n’aille raconter ce qui était en train de se passer. Ce qui ne manqua pas d’arriver, la nouvelle du massacre se diffusant discrètement dans toute l’Europe, Ndlr). Des groupes d’infanterie ou des unités de pionniers ont ensuite effondré les parois du ravin pour recouvrir les corps.
    
Pourquoi Babi Yar, massacre des Juifs d’Ukraine, est-il devenu le visage du génocide des Juifs à l’Est où un million et demi d’entre eux ont été exterminés entre 1941 et 1943 ?
C.I. Babi Yar devient un symbole en raison de son caractère inaugural et de son ampleur : comprenez que toute la communauté juive de la troisième ville soviétique est massacrée en une opération de deux jours. Il y aura d’autres fusillades par la suite, mais aucune aussi meurtrière et sordide. Du côté nazi, on peut penser que Babi Yar est une forme de test, un essai d’extermination massive et exhaustive par fusillade. À ce moment-là, les commandements exterminateurs envisageaient de systématiser la méthode partout où ils veulent tuer des juifs. Mais un mois à peine après Babi Yar, les rapports des Einsatzgruppen considèrent que les fusillades massives ne fonctionnent pas assez bien : lorsque leurs équipes retournent sur les lieux, elles retrouvent toujours des survivants.

Babi Yar est le visage du génocide des Juifs à l'Est mais de nombreux autres massacres eurent lieu, comme ici à Lubny, le 16 octobre 1941, où ils sont convoqués, sommés d'abandonner leurs affaires avant d'être assassinés
 

La propagande russe actuelle martèle un passé nazi de l’Ukraine pour légitimer l’invasion du pays, débutée en février dernier. Dans ce contexte, comment jugez-vous le film de Sergueï Loznitsa, réalisé avant l’invasion ?
C.I. Le documentaire adopte une position équilibrée et nuancée. C’est un Ukrainien qui dit aux Ukrainiens : « Il nous faut regarder notre passé en face ». (Pour se venger de la mainmise soviétique, le nationalisme ukrainien s’est vendu au nazisme. Les bataillons d’auxiliaires ukrainiens ont participé sans réserve au massacre des juifs dans une indifférence quasi générale. La population ukrainienne a toutefois payé un lourd tribut à l’occupation et a massivement participé à la libération de son territoire et à la victoire contre le nazisme, Ndlr). Le problème est de voir cette démarche critique et progressiste aujourd'hui pervertie de façon délétère par le régime russe.

Le problème est de voir cette démarche critique et progressiste aujourd'hui pervertie de façon délétère par le régime russe. En Ukraine, certains courants critiquaient ainsi le film, jugeant que son discours fait le jeu de Moscou. Or (…), le réalisateur n’a montré aucune ambiguïté dans son soutien à son pays.

En Ukraine, certains courants critiquaient ainsi le film, jugeant que son discours fait le jeu de Moscou. Or, dans ses prises de position depuis l’invasion, le réalisateur Sergueï Loznitsa n’a montré aucune ambiguïté dans son soutien à son pays. Tandis que les Ukrainiens critiques défendaient, eux, un récit antirusse marqué par le nationalisme ukrainien dont le film s’attache justement à montrer la face sombre. Par ailleurs, le cinéaste est totalement à contre-courant du récit soviétique. Son travail montre que les juifs n’ont pas été tués en tant que citoyens soviétiques : ils l’ont été parce qu’ils étaient juifs. (Le découpage du film traduit bien la volonté soviétique de refaçonner ce crime : il montre les différentes modifications du site jusqu’en 1960, qu’il s’agisse de glissements de terrain ou du comblement du ravin opéré par les soviétiques grâce à une décharge voisine, Ndlr).

Exécutions de masse de Juifs par les Einsatzgruppen (« Groupes mobiles d'intervention » du IIIe Reich allemand), en Ukraine, à l’automne 1941
 

Qu’est-il reproché d’autre au documentaire ?
C.I. De ne s’intéresser qu’aux juifs morts à Babi Yar, alors que quelque 100 000 personnes y ont été tuées entre 1941 et 1943, parmi lesquelles des prisonniers de guerre soviétiques, des Roms ainsi que 400 militants nationalistes. C’est un discours auquel je n’adhère pas. Même si on peut reprocher à Sergueï Loznitsa certaines ellipses, son propos s’oppose fondamentalement au vieux récit stalinien qui subsume toutes les victimes en une seule catégorie. Il permet de restituer la singularité du destin des juifs de Kiev. Son film est une exceptionnelle leçon d’histoire alors que la mémoire ukrainienne demeurait jusqu’à peu pour le moins lacunaire : des trois projets de mémorial évoqués depuis 2000, aucun n’a vu le jour, pour des raisons devenues très complexes, sur fond de potentielles tentatives d’instrumentalisation.
     
Dépourvu d’entretien et de commentaire en voix-off, le film adopte dans sa forme un parti pris radical. Quelle impression en gardez-vous ?
C.I. J’en garde un souvenir très fort car j’ai pu le découvrir sur les lieux mêmes du massacre, dans le ravin de Babi Yar, lors de la commémoration des 80 ans, en octobre 2021. J’apprécie aussi le film pour sa rigueur et sa valeur scientifique : le discours, très précis, s’appuie sur une extraordinaire et unique recherche documentaire. Je salue le choix de Sergueï Loznitsa de ne jamais tomber dans la surenchère émotionnelle en évitant de montrer des images dont la violence pourrait submerger le spectateur. Ces images existent pourtant. Celles des exactions perpétrées dans les pogroms en Ukraine glacent le sang. En choisissant de ne pas les inclure au film, le réalisateur laisse à chacun la possibilité de se faire un point de vue. L’absence de commentaires, au profit de simples cartons situant la chronologie et la géographie des événements, contribue à ce soin particulier.

                                      Le film inclut le témoignage d’une survivante au massacre.

Comment ce sombre épisode de l’histoire a-t-il croisé vos recherches ?
C.I. Mes premiers travaux de recherche portaient sur les intellectuels enrôlés en tant qu’officiers dans la SS et à la tête d’organes de répression (Gestapo, Service de sécurité, Einsatzgruppen), or certains d’entre eux étaient présents à Babi Yar et ont contribué au massacre. Vous savez, ce que la recherche en histoire travaille à établir aujourd’hui concerne plutôt l’enchaînement des événements, car les faits eux-mêmes, les violences nazies, sont clairement établis : on est en mesure de reconstituer pratiquement jour par jour les massacres commis… Il s’agit donc plutôt de comprendre la logique qui sous-tend certaines décisions, comme par exemple celle, prise en trois jours, de clôturer le ghetto de Minsk, en Biélorussie, puis de fusiller tout le monde en octobre 1941.
      
Les archives ouvertes après la chute du Mur de Berlin, les témoignages, et les sources judiciaires ont permis de faire énormément de progrès dans ce sens depuis vingt-cinq ans. Mais de grandes interrogations subsistent. Par exemple, on manque encore d’une vision précise de la façon dont s’agençaient les relations des différents organes de répression du IIIème Reich avec les administrations des camps de concentration. On ne retrouvera jamais la majorité des sources produites à l’époque, 90 % d’entre elles ont été détruites par les bombardements alliés ou par les nazis eux-mêmes. ♦
     
Pour en savoir plus :
Le documentaire « Babi Yar. Contexte »(link is external), réalisé par Sergueï Loznitsa, est sorti dans les salles le 14 septembre 2022. Il a reçu le Prix spécial du Jury de l’œil d’or au Festival de Cannes 2021.

Notes
  • 1. Christian Ingrao est historien, spécialiste des violences nazies, directeur de recherche au CNRS au Centre d’études sociologiques et politiques Raymond Aron (unité CNRS/EHESS).

https://lejournal.cnrs.fr/articles/babi-yar-1941-le-massacre-des-juifs-de-kiev-restitue-dans-un-documentaire-exceptionnel

 

octobre 27, 2025

Un néo-communisme chez les démocrates US, et en France ??

Les démocrates n’ont pas fléchi le genou, ils sont devenus la révolution : le communisme est désormais le programme du parti.

Hier soir, le candidat à la mairie de New York, le communiste Mamdani, a tenu un grand rassemblement à New York. Des communistes déclarés, AOC et Bernie Sanders, étaient présents. Ils ont quitté la scène au chant « Taxez les riches ». 

Des démocrates « traditionnels », comme la gouverneure de New York Kathy Hochul, étaient également présents. Elle a soutenu Mamdani à la mairie. 

 


 

Les experts démocrates tentent de tracer une ligne entre un « démocrate » et un « socialiste démocrate ». Quand on est démocrate et qu'on plie le genou en soutenant un socialiste démocrate, la frontière est claire. On est une seule et même personne. 

Tout démocrate qui soutient un socialiste démocrate a démontré qu'il ne se soucie que du pouvoir, et non du peuple. Point final. 

 Ce sont des communistes. Il n'y a aucune différence entre eux : la Chine, l'ancien bloc soviétique, la Corée du Nord, Castro ou les Khmers rouges du Cambodge. 

Dans les années 60, William F. Buckley tentait de rallier les républicains au mouvement conservateur. L'une de ses premières mesures fut de débarrasser le Parti républicain des radicaux comme la John Birch Society. Nombreux étaient ceux qui lui disaient : « Nous risquons de perdre les élections si nous ne les incluons pas. » Il s'en fichait. Gagner des élections en s'associant aux communistes, ou aux John Birch, revient à ne pas vraiment gagner. Il faudra toujours prendre des décisions politiques avec eux à la table des négociations, et donc toujours adopter de mauvaises politiques.

Pour faire simple, « J'ai fait de délicieux brownies au chocolat. J'y ai mis juste un peu de crotte de chien, mais ils sont quand même délicieux. En voulez-vous un ? » 

 Regardez ce qui s'est passé dans des États comme l'Illinois. La vieille machine de Chicago voulait s'accrocher au pouvoir. Elle ne s'intéressait pas aux gens. Juste aux leviers de pouvoir qui les contrôlaient. Peu à peu, elle a été infiltrée par les communistes. Finalement, les communistes ont eu l'intelligence de dire ce que la vieille machine voulait entendre, puis de s'emparer du pouvoir. Toni Preckwinkle a été l'une des premières. Elle contrôle le comté de Cook. Finalement, le conseil municipal de Chicago comptait neuf communistes, et il y a maintenant un maire communiste. Le gouverneur de l'État essaie de se présenter comme un démocrate centriste traditionnel, mais il ne l'est pas. Il est gouverné par une gauche radicale et trouve plus de points communs avec les communistes qu'avec les capitalistes du libre marché. 

 Les personnes qui ont hérité de leur fortune se sentent souvent coupables et adhèrent à des causes comme le communisme pour apaiser cette culpabilité. D'où l'expression « assez riche pour être démocrate ». C'est une construction psychologique étrange et néfaste. 

 Il y a toujours eu des différences entre républicains et démocrates. Mais ces différences sont très marquées aujourd'hui et très différentes de ce qu'elles étaient il y a 50 ans. Autrefois, les démocrates étaient pour les petites gens et les syndicats, tandis que les républicains étaient pour les grandes entreprises et les riches clubs de campagne. 

 Cette différence n'est plus vraie. Les démocrates sont pour les grandes entreprises et pour un pouvoir bureaucratique centralisé et non élu. Les élus démocrates placent simplement leurs proches à ces postes non élus, puis feignent la fonction de contrôle qu'ils sont censés exercer.

Il en résulte une diminution des libertés pour les citoyens et une corruption généralisée. 

La transformation du Parti démocrate a pour conséquence une défense vigoureuse du communisme et des valeurs anti-occidentales. Je ne parle pas de religion, mais simplement des idées simples développées par les Grecs et les Romains de l'Antiquité, puis mises en pratique par les fondateurs des États-Unis. Ironiquement, leur expérience a trouvé son chemin dans d'autres pays. Nombre de ces pays sont ceux d'où les fondateurs ou leurs familles ont émigré. 

 Hier, après 100 ans de corruption et de régime bureaucratique capitaliste de copinage fortement centralisé, l'Argentine a voté pour donner à Mileil la majorité dans toutes les chambres de son assemblée législative. Il a fallu 100 ans pour éliminer la puissance des péronistes corrompus. 

Pourquoi ? 

 Parce que cette corruption s'auto-alimente. Ses tentacules s'étendent au monde des affaires, et celui-ci se retrouve à voter pour la corruption. Les coûts d'opportunité pour les entreprises sont initialement minimes, comme la crotte de chien dans un brownie.  Finalement, ils prennent de l'ampleur et finissent par engloutir l'entreprise tout entière. 

 Ça commence par « nommer telle personne » ou « embaucher telle personne ». Ça se termine par « Donnez-nous tous vos bénéfices ».

Transcription : 

Cela peut être une expérience très solitaire et isolante. J’ai beaucoup de chance d’avoir cinq autres camarades soutenus par DSA qui m’accompagnent à l’Assemblée et au Sénat. Mais, par exemple, avant notre élection, Julia Salazar a été au pouvoir pendant deux ans sans qu’un seul autre socialiste ne soit soutenu par DSA. 

Il est alors beaucoup plus facile de mener une campagne axée sur la sensibilisation aux classes sociales, car nous la mènerons en remettant en question le statu quo actuel et en démontrant, par notre critique, qu’il s’agit d’un problème de capitalisme. Il y a donc 107 démocrates à l’Assemblée de l’État de New York sur 150 membres. Parmi ces 107 démocrates, on compte six élus soutenus par DSA et sept membres. 

Nous avons une septième personne qui est membre de DSA, bien qu’elle n’ait pas été soutenue par DSA. Elle s’appelle Jessica Gonzalez-Rojas. Nous ne disposons manifestement pas des effectifs nécessaires, tels qu'ils sont actuellement, pour obtenir la législation radicale nécessaire et commencer à croire que ces résultats sont suffisants. 

Nous devons continuer à élire davantage de socialistes et nous assurer d'assumer pleinement notre socialisme. Nous avons mené une campagne de boycott universitaire, dont l'un des volets consistait à lutter contre les études à l'étranger dans des universités israéliennes complices de l'occupation, notamment en développant des technologies d'armement pour Tsahal. Aujourd'hui, en portant la question de l'apartheid israélo-palestinien à Bowdoin, vous la mettez au premier plan et elle est plus difficile à ignorer. 

Et ensuite, veiller à démanteler cette relation. Ce sont des choses que vous pouvez faire en tant que législateur. Par exemple, le gouverneur Cuomo a un décret interdisant à l'État de New York de faire affaire avec toute entreprise soupçonnée de sympathiser avec le mouvement BDS. 

En tant que législateur, je peux, une fois que nous aurons constitué une coalition suffisamment large pour cela, annuler ce décret. Mais je crois sincèrement en ce projet politique. Je crois sincèrement au socialisme. 

 Pour moi, c'est la Palestine qui m'a amené à rejoindre ce mouvement. Être socialiste peut être une expérience très solitaire, et ce l'était pour moi, pour tout un pays. Car mon parcours, comme Oren l'a évoqué, a commencé sur mon campus universitaire avec les Étudiants pour la Justice en Palestine. 

 Pour alimenter ce chemin et comprendre que c'est pour le socialisme que nous nous battons en ce moment. Qu'il s'agisse de l'annulation de la dette étudiante ou de l'accès à l'assurance maladie pour tous, ces questions bénéficient d'un soutien populaire massif dans tout le pays. Mais il y a aussi d’autres questions auxquelles nous croyons fermement, que ce soit le BDS ou l’objectif final de s’emparer des moyens de production.


octobre 10, 2025

Qui est Monsieur Jean-Luc Mélenchon ?

Jean-Luc Mélenchon naît dans une famille pied-noir, à Tanger (actuel Maroc). Il revient en France, dans le Jura, en 1962, obtient une licence de lettres modernes et une licence de philosophie en 1972. Pendant ses études, il est très actif à l'UNEF et dans l'Organisation Communiste Internationaliste, une organisation trotskiste à l'extrême gauche de l'échiquier politique. Dès 1968 il est en première ligne des mouvements étudiants dans la région, et dirige l'Organisation communiste internationaliste à Besançon. Il est évincé du mouvement et rejoint rapidement le Parti socialiste en 1976. 

 

 

Professionnellement, il travaille un an comme ouvrier avant de rejoindre l'éducation nationale. Il devient enseignant en 1976. En 1978, suite à une rencontre avec le socialiste Claude Germon, il quitte le Jura et rejoint Massy, en région parisienne, où il est directeur de cabinet de Claude Germon, maire de Massy. Il monte rapidement les échelons de la fédération de l'Essonne, dont il devient premier secrétaire en 1981 (jusqu'en 1986). Il se positionne alors comme un défenseur farouche de la laïcité.

En 1986, il est élu sénateur et se fait connaître comme un tenant de l'aile (très à) gauche du Parti socialiste. Il dénonce régulièrement la « gauche molle ». En 1990, sa motion recueille 1,35 % des suffrages au congrès du Parti. En 1992, il vote en faveur du traité de Maastricht. En 1997, il se présente comme seul candidat face à François Hollande pour le poste de premier secrétaire du Parti socialiste et recueille 9 % des voix. Son courant au Parti, « gauche socialiste », recueille entre 7 % et 13 % des suffrages exprimés lors des congrès du Parti jusqu'à sa disparation en 2002. Il s'y marginalise de plus en plus, seul sénateur à voter contre le passage à l'euro en 1998. En 2000, il participe néanmoins au gouvernement Jospin, à l'enseignement professionnel. Il s'affirme à nouveau contre la majorité du parti en 2005, en faisant compagne contre le projet de Constitution européenne. De plus en plus radical, il acte bientôt le fait de quitter la gauche de gouvernement pour l'extrême gauche. 

 


 

En 2009, il lance le Parti de gauche. Aux Européennes de 2009, il obtient 8 % des suffrages. La campagne présidentielle de 2012 qui suit lui offre un tremplin, avec une percée médiatique sur fond de positions outrancières, qui caractériseront son positionnement ultérieur, de même que celui de La France Insoumise. S'inscrivant dans une veine populiste, il publie un livre Qu'ils s'en aillent tous !. En 2012, il réussit à obtenir le soutien du Parti communiste français (PCF) pour la présidentielle. Il termine 4e avec 11 % des suffrages. Candidat dans la circonscription de Marine Le Pen pour les législatives qui suivent, il ne se qualifie pas pour le second tour. Débute alors une période d'opposition très à gauche contre la présidence Hollande, qui divise le camp de la gauche. En 2017, il arrive à nouveau en 4e place, avec un score qui a grimpé à 20 % des voix.

Depuis 2017, il incarne l'opposition d'extrême gauche à Emmanuel Macron, avec son parti La France Insoumise (LFI). Il se démarque à nouveau par son choix régulier de l'outrance et de l'opposition systématique, avec un programme fortement teinté d'étatisme et de communisme repackagé. En 2022, il réussit à s'imposer devant les autres candidats potentiels à gauche, et termine en troisième place de la présidentielle, avec 22 % des suffrages. Grâce à une « OPA » sur la gauche (union au sein de la NUPES), il réussit à obtenir plusieurs dizaines de députés LFI.

Son choix de l'opposition systématique et d'un positionnement toujours plus extrême à gauche l'isole. En octobre 2023, selon un sondage Odoxa, 62 % des Français ont une opinion négative de lui. Il est la personnalité politique la plus rejetée en France[1]

 


 

Positions politiques

Le programme économique de Jean-Luc Mélenchon n'est largement qu'une resucée des programmes de la gauche de la gauche et de l'extrême gauche, avec retour de la retraite par répartition à 60 ans, planification, fiscalité confiscatoire, etc. Il veut la construction de 200 000 logements sociaux par an, etc.

Alors qu'il s'est longtemps positionné comme un défenseur ardent de la laïcité, il a largement évolué, adoptant dans les années 2010 et 2020 un positionnement largement critiqué pour son « islamogauchisme », terme politique qui désigne les compromissions d'une certaine gauche régressive avec l'islamisme. Les analystes parlent de « virage à 180 degrés »[2], largement motivé par le « clientélisme »[3],[4]. Premier à dénoncer l'« islamophobie », terme hautement polémique, Jean-Luc Mélenchon est jugé par beaucoup comme sorti du « champ républicain » pour défendre des intérêts religieux[5]

D'un point de vue institutionnel, il réclame une Sixième République. Son respect de l’État de droit interroge : il appelle les membres de son parti à venir « défendre » le siège alors qu'une perquisition légale y est en cours[6]. Il tente physiquement et verbalement d'empêcher la perquisition en criant « La République, c'est moi ! », expression qui restera célèbre. Mis en examen pour « actes d'intimidation contre l'autorité judiciaire, rébellion et provocation », il est condamné à trois mois de prison avec sursis et 8000 euros d'amende[7]

Vidéo INA

 

Notes et références

1 - Sondage : Jean-Luc Mélenchon devient la personnalité politique la plus rejetée avec 62 % d’opinions défavorables 

2 - Laïcité: "Jean-Luc Mélenchon a fait un virage à 180° ces dernières années", pour Gilles Kepel (politologue spécialiste de l'islam contemporain), BFM TV

3 - LFI: La France islamo-gauchiste ?, Causeur, 20 mai 2022

4 - Accusés de complaisance avec l'islamisme politique, les Insoumis sur le gril

5 - Jean-Luc Mélenchon et la laïcité, l’histoire secrète d’un revirement, Le Parisien, 28 octobre 2023

6 - Récit "La République, c'est moi !" : retour sur la perquisition du siège de La France insoumise qui vaut un procès à Jean-Luc Mélenchon, France Info, 19 septembre 2019

7 - Jean-Luc Mélenchon condamné à trois mois de prison avec sursis pour rébellion et provocation, Le Parisien, 9 décembre 2019    

 Source

Son blog 

Wikipédia

 

septembre 21, 2025

"En Russie, des millions d'opposants se taisent parce qu'ils ont peur"

Un documentaire donne la parole aux voix qui osent défier Vladimir Poutine

Ce film, diffusé dimanche 21/09/25 à 21h05 sur France 5, dévoile des images inédites des prisons russes. Manon Loizeau explique à franceinfo comment elle l'a conçu hors de Russie, notamment grâce aux images tournées sur place par sa coréalisatrice. 

 


 

"Des traîtres à la nation". Voilà comment Vladimir Poutine qualifie les voix dissidentes dans son pays. Soucieux de donner l'image d'une Russie forte et unie, il durcit la répression envers les opposants politiques, traqués et emprisonnés, mais mis en lumière dans le documentaire "Politzek, les voix qui défient le Kremlin". Diffusé dimanche 21 septembre sur France 5, à 21h05, le film de Manon Loizeau et Ekaterina Mamontova s'immerge dans la vie de quatre femmes dont les proches ont été condamnés à de longues peines. Il décrit l'implacable machine répressive au service du Kremlin et dévoile des images inédites de l'intérieur des geôles russes. Manon Loizeau revient pour franceinfo sur l'élaboration de ce film.

Franceinfo : Pourquoi n'avez-vous pas pu vous rendre en Russie pour tourner votre film ?

Manon Loizeau : J'ai vécu 10 ans en Russie, de 1994 à 2004. Lorsque Vladimir Poutine est arrivé au pouvoir en 2000, j'ai commencé à réaliser des films sur les assassinats politiques, dont celui d'Anna Politkovskaïa, qui était une amie. Mais aussi sur les empoisonnements au polonium, sur la Tchétchénie et sur les crimes de guerre commis en Ukraine. Les autorités russes n'ont évidemment jamais apprécié mes films. Je suis donc connue du FSB, les services secrets russes. Je ne peux plus y retourner en Russie, même si elle reste mon pays de cœur. Lorsque nous avons appris l'arrestation d'Evan Gershkovich, le correspondant du Wall Street Journal à Moscou, condamné à 16 ans de prison pour espionnage, je me suis dit que retourner en Russie était devenu bien trop dangereux. Même si ce journaliste a été libéré depuis.

Comment avez-vous pu réaliser votre documentaire à distance ?

C'était la question : comment tourner un film de l'intérieur sans être sur place ? J'ai actionné toutes les personnes que je connaissais là-bas et j'ai été mise en contact, au bout de quelques mois, avec une jeune réalisatrice, Ekaterina Mamontova. Elle réalisait déjà des films, sous un pseudo, pour dénoncer le régime, mais ce qui était très important pour moi, c'est qu'elle avait l'intention de quitter la Russie avant même que nous décidions de travailler ensemble, car je ne voulais pas que ce film soit la raison de son exil. Elle a donc filmé une dernière fois son pays avant de le quitter. 

 


 

Que souhaitiez-vous raconter sur cette Russie ? 

Je souhaitais faire un film autour de ces milliers de Russes jetés en prison parce qu'ils sont contre la guerre en Ukraine. Ce qui a vraiment déclenché le projet a été d'une part l'arrestation d'Oleg Orlov, un militant des droits de l'homme que je connais bien, mais surtout la mort d'Alexeï Navalny.

Je voulais montrer la répression et les arrestations arbitraires qui font régner la terreur, mais également l'incroyable résistance. On a tous l'impression que tous les Russes dissidents sont partis, et que ceux qui sont restés sont en accord avec la politique de Vladimir Poutine. Alors qu'il y a des millions de personnes opposées au régime, mais qui se taisent parce qu'elles ont peur. On ne les entend plus, on ne les voit plus, mais pour autant, il y a des tas de gens qui vont dans les tribunaux soutenir les prisonniers politiques, qui se recueillent toujours sur la tombe d'Alexeï Navalny, et qui croient encore à la liberté.  

Comment Ekaterina Mamontova a-t-elle pu filmer les procès ?

Tout est interdit, mais comme il n'y a presque plus de médias occidentaux, les autorités laissent les quelques journalistes russes d'opposition filmer les détenus au début et à la fin de leur procès, pour montrer à quel point ils punissent sévèrement les voix discordantes. C'est une façon pour eux d'effrayer les dissidents, car ils arrêtent des personnes qui appartiennent à toutes les strates de la société : artistes, médecins, intellectuels, ouvriers, enfants... Ils ne savaient évidemment pas qu'Ekaterina filmait pour nous.

Combien de temps ce tournage a-t-il duré ? 

Nous pensions qu'elle ne travaillerait que quelques jours. Au bout de deux mois, je recevais encore chaque jour des images qu'elle tournait. Finalement, le tournage a duré un an. Il m'est très vite apparu que ce documentaire serait sur des femmes qui se battaient pour leurs proches. 

Le film s'est construit de manière clandestine et artisanale. Au fil du temps, j'ai pu rencontrer des femmes réfugiées en France. Tout d'abord Nadejda, dont la fille artiste était emprisonnée depuis trois ans pour avoir remplacé des étiquettes dans les supermarchés par des messages antiguerre. Ensuite, j'ai fait la connaissance d'Anna Karetnikova, qui avait travaillé dans des prisons russes pendant des années. J'ai ainsi pu commencer à dresser des portraits.

 


 

A-t-il été difficile de faire témoigner la mère d'un adolescent emprisonné ?

En fait, nous savions que des enfants étaient arrêtés. J'avais commencé à enquêter là-dessus, mais les parents ne parlaient pas, car tout le monde était terrorisé. En août 2024, un accord entre les Etats-Unis et la Russie a permis la libération de certains dissidents, dont Oleg Orlov. Ils ont été échangés contre des prisonniers politiques russes qui étaient détenus dans plusieurs pays occidentaux. Les familles de prisonniers politiques ont pris conscience que ceux qui ont été remis en liberté avaient été soutenus lors de grandes campagnes de mobilisation. Contrairement au pianiste Pavel Kouchnir, mort dans l'indifférence générale à 39 ans, car personne ne savait qu'il était en prison.

Irina, la mère de l'adolescent de 14 ans emprisonné que l'on voit dans le documentaire,(Lire en fin de post) a alors commencé à parler à des médias d'opposition russe, car son fils s'est fait battre en prison. Elle a eu très peur pour sa vie. Elle est devenue le porte-voix de toutes les mamans, car il y a des dizaines d'enfants en prison.

Dans le documentaire, vous montrez que les prisonniers peuvent recevoir des lettres...

Oui, cela paraît complètement kafkaïen dans un système russe où la Constitution est sans cesse bafouée : procès truqués, faux témoins créés de toutes pièces et payés, et en même temps, dans cette même Constitution, les gardiens de prison ont l'obligation de remettre le courrier aux prisonniers et ils le font. Une des prisonnières politiques que l'on voit dans le film a reçu des centaines de lettres d'enfants du monde entier qui dessinaient des arcs-en-ciel et des drapeaux ukrainiens, après une campagne d'Amnesty International très médiatisée.

Les gardiens, submergés, lui ont donné tous ces courriers, ce qui l'a aidée à tenir. Les lettres, ce sont les mots contre les murs, c'est essentiel. La prison est un trou noir où sont engloutis des tas de gens. Il faudrait faire une campagne d'information pour que tout le monde puisse écrire aux enfants emprisonnés surtout.

Nous dédions aussi ce film aux milliers de prisonniers ukrainiens qui sont dans les prisons russes et dont nous n'avons aucune nouvelle. Ils sont dans des centres secrets. Les échanges entre l'Ukraine et la Russie concernent des militaires. Pas les civils, qui sont vraiment dans un trou noir.

Comment avez-vous obtenu les images de l'intérieur des prisons ?

Grâce à Anna Karetnikova, qui est réfugiée en France et a longtemps travaillé dans des prisons russes comme observatrice. Elle nous a montré toutes les images qu'elle avait filmées et cela a illustré en creux ce que nous racontions. Anna faisait partie de l'ONG Memorial, gérée par Oleg Orlov, et est devenue visiteuse de prison en 2005. A l'époque, les autorités russes ont permis à des membres d'ONG de pénétrer dans les centres pénitentiaires afin de donner des gages à l'Europe.

Quatre ans plus tard, elle a quitté l'ONG et a été engagée par la prison, qui lui a fourni une caméra. Elle s'est alors dit qu'elle pourrait aider de l'intérieur des détenus. Les choses se sont dégradées lorsqu'elle a vu de plus en plus de ses amis, défenseurs des droits de l'homme, emprisonnés. Elle s'est enfuie en 24 heures de Russie lorsqu'elle a commencé à être inquiétée. Ce qui est incroyable, c'est qu'elle a pu faire une copie de tout ce qu'elle avait filmé. 

 


On a le sentiment que la répression s'intensifie...  

Oui, depuis le mois de juin, il y a eu des raids terribles chez des ONG et des journalistes. Depuis le 1er septembre, le régime a fait passer tout un arsenal législatif pour ouvrir onze centres de pré-détention, qui recréent un peu un nouveau goulag, où seront enfermés exclusivement des prisonniers politiques. Ils autorisent désormais le FSB à avoir légalement ses propres prisons. Ils pourront faire absolument tout ce qu'ils veulent, alors que ce genre d'endroit avait disparu en 1990, lors de la chute de l'URSS.

La messagerie WhatsApp et toutes les applications occidentales sont désormais interdites. Une nouvelle messagerie russe appelée Max a été intégrée dans tous les portables vendus. Depuis le 1er septembre, tous les téléphones russes deviennent de facto des traqueurs et des enregistreurs. On est rentré dans le tout répressif, ce qui n'augure rien de bon, et tout le monde a très peur que les gens qui sont déjà en prison soient jugés pour de nouveaux chefs d'accusation. 

Le documentaire "Politzek, les voix qui défient le Kremlin", réalisé par Manon Loizeau et Ekaterina Mamontova, est diffusé dimanche 21 septembre sur France 5, à 21h05, et visible sur la plateforme france.tv.

Article rédigé par Isabelle Malin - Propos recueillis par France Télévisions

Source 

 



"Même les camarades de mon fils l'ont dénoncé" : en Russie, la répression politique n'a pas épargné Arseny, emprisonné à 14 ans 

Toute voix russe discordante ou critique de Vladimir Poutine est désormais muselée, relate un documentaire diffusé dimanche sur France 5. Le film suit les proches de plusieurs prisonniers politiques, dont la mère de cet adolescent, condamné pour ses propos sur les réseaux sociaux et à l'école.

Son visage, encore adolescent, ne s'affiche désormais que sur des photos. Des souvenirs de vacances que sa mère garde précieusement. Arseny a aujourd'hui 15 ans, l'âge d'aller au lycée. Mais il n'a aujourd'hui pour horizon que les murs de sa prison. Incarcéré dans un établissement pour mineur de l'Oural, ce jeune russe paie ses prises de position politiques, dans un pays où aucune voix anti-Poutine ne peut émerger

Son histoire, comme celle d'autres dissidents, est racontée dans un documentaire tourné clandestinement pendant près d'un an en Russie et diffusé dimanche 21 septembre à 21h05 sur France 5. Intitulé "Politzek, les voix qui défient le Kremlin", et réalisé par Manon Loizeau et Ekaterina Mamontova, le film dévoile des images de l'intérieur de prisons russes. Il dresse le portrait de quatre femmes qui luttent pour la libération de leurs compagnons, amis, filles et fils emprisonnés, qu'ils soient défenseur des droits humains, metteuse en scène de théâtre, jeune artiste ou adolescent trop critique du pouvoir. Dans une Russie déchirée par la guerre menée en Ukraine depuis plus de trois ans, ainsi que par une répression de plus en plus vive, ces prisonniers politiques ont un surnom : les Politzek.

 


 

"Liberté pour les prisonniers politiques"

Arseny en fait désormais partie. Avant d'être arrêté, il était un élève brillant, qui rêvait d'une autre Russie. Il postait régulièrement des vidéos sur Ies réseaux sociaux, dans lesquelles il dénonçait la guerre en Ukraine, le trucage du procès d'Alexeï Navalny, principal opposant à Vladimir Poutine jusqu'à sa mort dans une prison de Sibérie en 2024, ainsi que "l'Etat totalitaire" qu'est devenu son pays.

 


 

"Salut les amis, je suis sorti manifester seul. C'est le jour de la Russie contre Poutine. Liberté pour les prisonniers politiques, liberté pour tous", clame-t-il dans un de ses courts films. En août 2023, des membres du FSB, les services secrets russes, débarquent à l'aube chez l'adolescent et l'interrogent, comme l'explique sa mère, Irina Turbina, dans le documentaire : "Les agents du FSB lui ont demandé : 'Tu ne te caches pas, tu dis partout ouvertement que tu es contre Poutine. Pourquoi tu fais tout ça ?'" 

Arseny assume alors ses propos et leur répond qu'il considère que c'est de sa responsabilité de dénoncer la politique répressive du président russe. Quelques mois plus tard, le jeune adolescent est convoqué à Moscou, pour être jugé devant un tribunal militaire.

Sa mère, qui vit seule avec son fils, apprend alors que la professeure d'histoire d'Arseny va témoigner contre lui. Irina est persuadée que c'est l'école, où l'adolescent exprimait librement ses opinions, qui a désigné son fils aux services de renseignements : "Je pense qu'avec d'autres professeurs, ils ont appelé le FSB pour signaler Arseny. (...) Même les camarades de classe de mon fils l'ont dénoncé. (...) Ils l'ont tous dénoncé." Elle explique que c'est à ce moment-là que des agents ont commencé à surveiller son fils, et retrouver ses publications politiques sur internet. "Tout a démarré à ce moment-là", se désole Irina.

Condamné à 5 ans de prison

Pourtant, Arseny et sa mère sont plutôt optimistes lorsqu'ils se rendent au procès, en juin 2024. Pour eux, l'idée qu'un adolescent alors âgé de 14 ans isolé soit considéré comme dangereux semble extravagante. Mais à l'énoncé du verdict, tout s'effondre.

"Le juge est arrivé et, d'une voix blême, a dit que le tribunal (...) reconnaissait mon fils coupable. Arseny était assis et il pleurait."

Irina Turbina, mère d'un prisonnier politique russe

Dans le documentaire "Politzek, les voix qui défient le Kremlin"

L'adolescent est condamné à cinq ans de prison pour "participation aux activités d'une organisation terroriste". Il est d'abord incarcéré dans l'établissement pénitentiaire pour mineur de la capitale russe, située à 400 kilomètres de son domicile, où Irina ne peut se rendre qu'une fois par mois faute de moyens. Arseny écrit régulièrement des lettres à sa mère, dans lesquelles il lui explique qu'il est souvent battu et qu'il est terrifié. Puis, après un passage à l'hôpital, il est envoyé dans une colonie pénitentiaire pour mineurs dans l'Oural, sans moyen de communication. Plus de 2 000 kilomètres le séparent désormais de sa mère et de sa région natale.

 Source avec vidéo à voir

 

 

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