octobre 19, 2014

Le Libertarianisme comme Lemennicier

L'Université Libérale, vous convie à lire ce nouveau message. Des commentaires seraient souhaitables, notamment sur les posts référencés: à débattre, réflexions...Merci de vos lectures, et de vos analyses.

Ce n’est pas très difficile de présenter l’ensemble des principes moraux, politiques et économiques qui caractérisent un libertarien, car cet ensemble repose sur une prémisse très simple : la revendication radicale de la libre disposition de son corps ou de sa propre personne. Il revendique ce que l’on appelle le “self ownership” ou la propriété de soi. Ni Dieu, ni Maître. De celle-ci on déduit une philosophie politique, une épistémologie, une éthique et une économie politique qui caractérisent si bien la façon de penser des libertariens.




En 1646 du temps de la révolution de Cromwell, dans la prison de Newgate, Richard Overton, un des leaders parmi les levellers écrivit le pamphlet célèbre : “An arrow against all Tyrants”. Cet écrit affirme haut et fort le concept de propriété de soi qui caractérise depuis cette date tous les libertariens:
“To every individuals in nature, is given an individual property by nature, not to be invaded or usurped by any ; for every one as he is himself, so he hath a selfe propriety, else he not be himselfe”
En appui à cette revendication John Lilburne, un autre leveller écrit dans “Free man’s Freedom Vindicated” :
“individual man and woman who are and were, by nature all equal and alike in power, dignity, authority and majesty, none of them having by nature any authority, dominion, or magisterial power one over or above another; neither have they, or can exercise any but merely.. by agreement or consent, given, derived, or assumed by mutual consent and agreement for the good benefit and comfort each of other, and not for the mischief, hurt or damage of any”
Cette revendication radicale de la propriété de soi trouve son expression dans l’article 2 de la déclaration des droits de l’homme du préambule de notre constitution.
“Le but de toute association politique (y compris donc de DL) est la conservation des droits naturels imprescriptibles de l’homme, ces droits sont la liberté, la propriété et la résistance à l’oppression”
Il est clair qu’aujourd’hui tous les partis politiques qui entrent en compétition pour obtenir les votes des français devraient tous être déclarés comme anti-constitutionnels puisque sans exception leurs buts affichés et leur plate-forme électorale consistent essentiellement à violer l’article 2 du préambule de la constitution de la V ème République.
Revenons sur les trois ou quatre caractéristiques intellectuelles d’un libertarien.
Une philosophie politique radicale

Le libertariannisme politique naît avec les "Levellers" au milieu du 17 siècle pendant la révolution anglaise. En 1646 dans la prison de Newgate, Richard Overton, un des leaders parmi les levellers écrivit le pamphlet célèbre : "An arrow against all Tyrants". Cet écrit affirme haut et fort le concept de propriété de soi qui caractérise depuis cette date tous les libertariens:
"To every individuals in nature, is given an individual property by nature, not to be invaded or usurped by any ; for every one as he is himself, so he hath a selfe propriety, else he not be himselfe"

En appui à cette revendication John Lilburne, un autre leveller célèbre écrit dans "Free man's Freedom Vindicated" :

"individual man and woman who are and were, by nature all equal and alike in power, dignity, authority and majesty, none of them having by nature any authority, dominion, or magisterial power one over or above another; neither have they, or can exercise any but merely.. by agreement or consent, given, derived, or assumed by mutual consent and agreement for the good benefit and comfort each of other, and not for the mischief, hurt or damage of any"

Ces idées de propriété de soi et de consentement furent reçues avec beaucoup d'enthousiasme. A l'époque l'Europe est sous l'emprise de l'absolutisme royal et de la question de la tolérance religieuse. Les droits naturels de l'homme, la règle de Droit ( the Rule of Law) et le droit de résistance ou de faire la révolution vont vite gagner des adeptes. John Locke va finalement synthétiser ce courant politique. Les idées des Levellers vont constituer le socle de la philosophie des "lumières" au XVIII siècle qui sera le grand siècle des libéraux. Elles vont influencer les idéaux de la révolution américaine et française.

Cette revendication radicale de la propriété de soi trouve son expression dans l'article 2 de la déclaration des droits de l'homme du préambule de notre constitution et dans la déclaration d'indépendance américaine de 1776.
"Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels imprescriptibles de l'homme, ces droits sont la liberté, la propriété et la résistance à l'oppression"

 Nous tenons les vérités suivantes pour évidentes en elle-mêmes : que tous les hommes sont créés égaux ; qu’ils sont dotés par le Créateur de certains droits inaliénables et que parmi ces Droits figurent la vie, la liberté et la recherche du bonheur. Que pour assurer ces Droits , les Etats sont institués parmi les hommes, et que la légitimité de leur pouvoir émane du consentement des gouvernés. Que chaque fois qu’une forme de gouvernement devient destructrice de ces fins, c’est le Droit des gens que de le remplacer ou de l’abolir

Il est clair qu'aujourd'hui tous les partis politiques qui entrent en compétition pour obtenir les votes des français devraient tous être déclarés comme anti constitutionnel puisque sans exception leurs buts affichés et leur plate-forme électorale consistent essentiellement à violer l'article 2 du préambule de la constitution de la V ème République.

Il va de soi que cette philosophie politique repose sur une vision non angélique de l’Etat. Les États ne naissent pas du consentement de la population ou après un référendum ; ils naissent dans le sang et par la conquête d'une peuplade ou d'une bande armée par une autre.
 L’Etat .. . est une institution sociale qu’un groupe d’hommes vainqueurs impose aux vaincus, avec le seul but de réglementer le pouvoir des vainqueurs sur les vaincus, et de s’assurer contre les révoltes internes et les attaques extérieures. Téléologiquement, cette domination n’a pas d’autre objet que l’exploitation économique des vaincus par les vainqueurs. Aucun Etat primitif connu dans l’histoire est né autrement.

F. Oppenheimer (1914) The State. Fox and Wilkes San Francisco, p 9.

Les hommes d'État sont une "bande de brigands et d’assassins organisés", selon l'expression d'un juriste américain du XIXe siècle, Lysander Spooner, dans son pamphlet Treason- The Constitution of No Authority (1870). Cette interprétation a reçu même une consécration dans l’analyse économique moderne avec M.Olson dans son livre Power and Prosperity Basic Books , 2000, qui distingue les "bandits stationnaires" des  roving bandits et fonde l’émergence des Etats modernes sur cette hypothèse où le  bandit stationnaire impose son monopole. Monopole qui est considéré par ces économistes comme un moindre mal.

Il existe, en effet, en philosophie politique une longue tradition, confirmée par l'histoire de la formation des États modernes, qui voit essentiellement dans cette institution un instrument d’exploitation des politiquement faibles par les politiquement forts. Quant on cherche à comprendre l’émergence, l’essence et les buts de cette institution , une théorie angélique de l’Etat est intenable.
Citons B. De Jouvenel dans du Du pouvoir, Paris Hachette, col Pluriel 1972) :
 Il ne faut rien connaître que son propre temps, tout ignorer du comportement millénaire du Pouvoir, pour ne voir dans ces opérations (l’impôt sur le revenu, la nationalisation des banques, chemins de fer, électricité ou la socialisation de l’éducation, de la santé, de la charité ainsi de suite-) que le fruit de certaines doctrines. Elles sont des manifestations normales du Pouvoir, point différentes dans leur nature de la confiscation des biens monastiques par Henri VIII. Le principe est le même : appétit d’autorité, soif de moyens ; et les mêmes caractères apparaissent dans toutes ces opérations, y compris l’élévation rapide de profiteurs de dépouilles. Socialiste ou non, le Pouvoir doit nécessairement lutter contre l’autorité capitaliste, et dérober la substance accumulée par les capitalistes : il suit en cela sa loi propre. 

En tant qu’hommes ordinaires, ressemblant à tous les autres, les hommes politiques ou les hommes d’Etat prennent leurs décisions en fonction de ce qui les avantagent personnellement et non pas en fonction du bénéfice que peut en tirer la collectivité. Ils maximisent donc leur utilité personnelle et non l’intérêt général. Mais la particularité du système dans lequel ils opèrent est qu’ils maximisent leur satisfaction grâce à l’usage directe de la violence ou de la coercition ( en prélevant l’impôt et en le redistribuant en partie à leurs courtisans, complices ou clientèles électorales) ou indirecte via la vente de privilèges à des groupes de pression ou factions politiques qui les soutiennent et les corrompent. C’est dans ce sens là qu’ils ne se différencient pas fondamentalement d’une bande de brigands organisés.

Or, pour survivre et grimper en haut de l’échelle dans ce monde, il faut savoir rompre ses promesses, mentir, tricher, voler, user de la violence, et commanditer des crimes ( ie violer les droits de propriété des individus sur leur propre personne ou leurs biens). Habituellement les sociétés civiles (et civilisées) reposent sur le respect des promesses, le respect des droits de propriété, l'honnêteté, la préservation de la vie, la vérité et la paix.

Hélas, les exemples contemporains abondent pour nous démontrer que les hommes politiques mentent, trichent, ne respectent pas leurs promesses et commanditent des crimes ou des guerres ! Il faut un aveuglement, qui ressemble à de la complicité, pour ne pas percevoir que les hommes de l’Etat, qui sont des hommes comme vous et moi, des hommes ordinaires, élus ou non, lorsqu’ils évoluent dans un système politique comme le nôtre commettent "légitimement" des actes qui seraient considérés comme criminels s’ils étaient commis par de simples citoyens. C'est une anomalie qui a toujours intrigué les spécialistes de la philosophie politique. C'est tout le mystère de l’obéissance civile ou de la servitude volontaire qui font des hommes politiques des personnages hors du commun : des "hors la loi" ou des "au dessus des lois"! N'ont-ils pas le pouvoir extra- ordinaire de suspendre le temps surtout au moment de leur décès, quand il faut s'entendre sur leur successeur? Croyez-vous qu'en tant que simple citoyen vous pouvez en faire autant ?

 

Une épistémologie
La compréhension de la réalité sociale qu’ont les libertariens ne diffère pas fondamentalement de celle des libéraux classiques. Elle repose sur l’individualisme méthodologique. L’individualisme méthodologique consiste à expliquer les phénomènes économiques et sociaux seulement à partir des actions réactions et interactions entre les individus qui composent la société. En effet, par définition tous les évènements qui fondent l’histoire humaine et donc l’histoire économique, politique et sociale sont toujours le produit de l’action humaine individuelle, car seul les êtres humains agissent . L’individualisme s’oppose au holisme ou à l’organicisme qui caractérise l’épistémologie d’une grande partie des universitaires et intellectuels français quelle que soit leur discipline.

Dans une perspective identique les libertariens affirment la primauté non seulement de l’individualisme méthodologique mais aussi du subjectivisme C’est l’individu qui a des préférences ou des valeurs. C’est lui seul qui de façon ultime, sait ce qui est bon pour lui. C’est lui qui vit une existence séparée qui en supportera les peines et les plaisirs. On ne peut donc se mettre fondamentalement à sa place. C’est en cela que l’on parle de subjectivisme. Toute idée contraire – que l’on puisse se mettre à la place d’autrui et le forcer à avoir une autre vie que celle qu’il aurait choisie parce que l’on pense avoir par exemple une meilleure connaissance ou expérience que l’individu lui-même de ce qui est bon pour lui – constitue d’une part une prétention qui n’est pas du ressort de la nature humaine et d’autre part comme le rappelle Richard Overton un vol de propriété. On prive l’individu d’une autre vie. En quoi est-on habilité à priver quelqu’un du destin qu’il a choisi fut-il funeste pour lui ?

La primauté accordée à la coordination des actions individuelles, à la science de l’échange ou à la “catallaxie” et d’une façon générale aux aspects procéduraux de l’interaction individuelle (ils s’intéressent au Droit, à l’Etat, aux constitutions, aux normes sociales etc. ) caractérise les libertariens. Cette insistance sur la coordination des actions individuelles vient de ce que l’ordre social ou l’harmonie sociale par définition est un état où tous les individus réalisent leurs anticipations. C’est donc le problème social central par excellence. En cela les économistes libertariens se séparent profondément de la tradition néoclassique au sens où celle-ci use massivement de l’optimisation et du calcul économique et voit l’harmonie sociale dans la maximisation d’une fonction d’utilité collective. En cela les libertariens suivent une tradition classique en économie qui remonte à sa création. Les économistes français Quesnay , Pierre Du Pont de Nemours (des physiocrates dont le nom vient du grec Physis qui veut dire nature et Kratos qui veut dire règle) et Turgot inventent et développent une économie politique fondée sur les droits naturels de l’homme et la Règle de Droit (contrairement aux anglais qui vont développer une économie politique fondée sur l’utilité et l’utilitarisme de J.Bentham . Les économistes néoclassiques sont les fils de cet utilitarisme). Les Ecossais à peu près à la même époque avec A.Ferguson, A.Smith, D.Hume inventent et développent l’idée du marché comme ordre spontané. Cette combinaison entre les deux courants donne aux économistes libertariens leur spécificité. Ils aiment toujours rappeler la phrase célèbre : “Laissez- nous faire, laissez-nous passer. Le monde va de lui-même” Cette phrase légendaire aurait été prononcée par des marchands en réponse à une interrogation de Louis XV qui leur demandait en quoi il pouvait les aider.

En fait cette primauté est le fruit d’une réflexion et d’un débat scientifique fondamental et encore aujourd’hui ignorée par le courant dominant néoclassique sur l’impossibilité de coordonner les actions des individus aux buts multiples et souvent contradictoires, parfois même inconnus d’eux, par une procédure de planification (ou d’interventions) centralisée ou décentralisée. Car paradoxalement seul l’ordre spontané du marché fondé sur les droits de propriété et leur échange volontaire serait capable de générer les incitations, les informations et les connaissances tacites nécessaires à la coordination centralisée des actions des individus. Cette impossibilité de planifier de manière externe -centralisée ou décentralisée- la coordination des actions individuelles explique l’importance accordée par les libéraux et les libertariens aux solutions de marché

 Ils ne sont pas en faveur de ces solutions par goût ou par intérêt, mais après une réflexion sur le problème central de la dispersion des connaissances dans un monde où l’ignorance est fondamentale et où les finalités sont multiples, contradictoires et ouvertes.




Une éthique
La reconnaissance de l’antériorité de l’éthique dans la défense du libéralisme est une caractéristique propre aux libertariens. En cela le libertarien diffère du classique libéral. Leur justification du capitalisme de “laissez faire” vient du fait qu’il s’agit du seul système économique compatible avec l’éthique libertarienne et non pas de la supériorité du capitalisme à générer des richesses plus que n’importe quel autre système économique. En effet, une grande fraction des libéraux classiques ont une approche conséquencialiste de la liberté. En revanche, les libertariens ont une approche déontologique ou téléologique de la liberté.

Bien qu’il existe plusieurs façons de justifier le concept de “propriété de soi” parmi les libertariens, ce qui explique les variétés de “libertarianisme”, le fait de fonder une éthique sur ce concept de droit de propriété sur soi va impliquer non seulement une certaine façon de juger du bien et du mal mais aussi une façon de revenir à une forme contemporaine du Droit naturel moderne par opposition au Droit positif qui a donné naissance à l’incohérence du Droit contemporain produit par le législateur et professé dans nos universités.

Est mal tout acte commis individuellement ou en groupe qui viole la propriété des individus sur eux-mêmes ou leur liberté contractuelle. On définit simultanément le crime de la même manière. L’auteur d’un crime est coupable d’avoir privé sa victime de ses droits. Ce qui implique, s’il y a dommage, de réparer le préjudice commis. Comme le droit de propriété sur soi implique le principe de légitime défense, c’est-à-dire le droit (mais non l’obligation) de défendre sa personne et sa propriété légitime contre un agresseur, la victime a le droit de résister à l’agression et d’imposer à l’agresseur une réparation pour le tort causé. Cela s’adresse aussi, en se référant à l’article 2 de la déclaration des droits de l’homme, à tous les hommes de l’Etat qui au lieu de protéger les droits de propriété et la liberté des individus les violent. C’est en cela que les libertariens sont des révolutionnaires car ils appliquent aux hommes de l’Etat les mêmes lois ou le même Droit au nom du principe de l’universalité de la morale qui se traduit par l’égalité des individus devant le Droit naturel. Les hommes de l’Etat ne peuvent se mettre hors la loi naturelle qui s’impose à tous de manière égale.

Prenons un exemple : la liberté de circuler. Les écologistes veulent chasser les voitures des centres villes au profit des bicyclettes ou des piétons, les prostituées, les marchands ambulants, les mendiants veulent utiliser les trottoirs et les rues pour faire leurs affaires et gagner de l’argent. Les riverains veulent utiliser la rue pour les besoins de leurs chiens. Les camions veulent desservir les commerçants, les commerçants envahissent les trottoirs pour y installer des chaises et des tables pour vendre des boissons ou offrir des repas. Les publicitaires veulent utiliser ces espaces pour vanter la stature tranquille d’un homme politique ou les charmes d’Ulla 36 15, les syndicats qui cherchent un privilège ou à maintenir des privilèges acquis désirent utiliser la rue pour organiser une manifestation afin de faire pression sur l’homme politique, les homosexuels veulent organiser un défilé, les partisans de la techno un carnaval, en un mot la rue est devenue une source permanente de conflits entre tout ce petit monde chacun cherchant à tirer un maximum de profit de cette pâture commune. On voit même des ministres décider unilatéralement de fermer les rues pour privilégier certains utilisateurs au détriment d’autres utilisateurs sans que personne ne bronche ! Pourquoi en est-il ainsi parce qu’il existe soi-disant un droit à circuler !

Dans un droit libertarien, le droit de circuler librement s’applique et se limite à la propriété de l’individu ou à celles dont le propriétaire vous prête l’usage. Le droit des automobilistes de circuler est soumis à l’accord des propriétaires des rues : les riverains ou les commerçants qui auront acheté la rue et non pas aux élucubrations d’un ministre du transport ou de l’écologie qui interdit l’usage de la rue sous divers prétextes au détriment des automobilistes pour favoriser des cyclistes ou des piétons ou des riverains qui sont tout heureux de l’aubaine. Si les rues étaient privées, les décisions reviendraient aux propriétaires de chacune, et les divers propriétaires seraient incités à trouver l’usage de la rue le plus profitable pour eux. Ils seraient incités à répondre de manière variée aux demandes des diverses clientèles : piétons, cyclistes, automobilistes, vendeurs de rues, manifestants, chanteurs de rue, mendiants etc.
 

Une économie politique
 
Le capitalisme de “laissez faire” est le credo des libertariens.. Les maîtres mots sont : privatisation et concurrence. La particularité des libertariens ou des anarcho-capitalistes contrairement aux libéraux, c’est que ces deux mots s’appliquent non seulement aux services publics à la française mais aussi à toutes les fonctions régaliennes de l’Etat : Justice, monnaie, police, diplomatie, défense. Ils sont pour la suppression de l’impôt (remplacé par une cotisation volontaire ou un paiement pour service rendu et non pas promis et jamais rendu) et de toutes les réglementations ou lois qui violent les libertés de contracter ou les droits de propriété. Ils sont pour l’extension de l’appropriation privée aux domaines les plus divers en particulier à l’environnement et au corps humain. Ils sont pour la mise en concurrence des Etats via un fédéralisme impliquant la liberté de faire sécession, individuellement ou en groupe, comme du droit fondamental d’ignorer l’Etat. Là encore ils appliquent leur morale : celle du principe du consentement et de la non-violation du droit de propriété sur soi. Ils n’auraient rien contre un Etat similaire à celui que l’on connaît s’il pouvait émerger spontanément du consentement des individus. Ce n’est pas le cas. C’est pour cela qu’ils sont en faveur de règles procédurales ou de méta règles procédurales pour faire en sorte d’être sûr que tous consentent au monopole de la violence sur un territoire et/ ou à l’impôt.

Comme les libertariens non pas une vision angélique de l’Etat, à l’inverse des néoclassiques et aussi des libéraux classiques, ils préfèrent de loin des règles de Droit qui assurent du consentement individuel : droit de divorcer de l’Etat, de faire sécession individuelle, droit d’ignorer l’Etat (ce qui implique une charte des droits individuels et de pouvoir enfin vivre sans papiers) droit de faire la révolution ou de résister à l’oppression fiscale. Comme on ne délègue pas sa protection de façon ultime à des tiers qui peuvent être malveillants cela implique aussi le droit de détenir et de porter des armes. Cela veut dire aussi le droit d’entrer en compétition avec les Etats et donc le droit de faire sécession territoriale comme de “marier” son territoire avec d’autres Etats partageant les mêmes valeurs.

Leur vision favorite de l’Etat du futur XXI siècle est celui de la copropriété privée ou des villes privées formant des ligues, des fédérations et des associations entre elles de manière à résoudre les problèmes communs ou les conflits qu’elles peuvent avoir entre elles. C’est ce que l’on appelle le Nouveau Fédéralisme.
 
http://www.dailymotion.com/video/xe2q9w_etat-de-nature-et-nature-de-l-etat_news?start=4

  Conférence de Bertrand Lemennicier, professeur à Paris II - Assas le 17 juin 2010.
Organisée par Énergie Libérale, en collaboration avec Liberté Chérie. 

LES COURANTS DU LIBÉRALISME
 
Il y a grossièrement des libéraux conservateurs qui prônent un ‘Etat minimal fort et un capitalisme de “Laissez-faire” mais qui ont une attitude contradictoire vis-à-vis des usages du corps humain où ils refusent l’appropriation des corps par leur occupant. Dieu est encore leur maître. Un libertarien par définition est propriétaire de lui-même et veut abolir toutes les agressions contre cette propriété que celles-ci viennent de l’Etat ou de la société civile. Il est donc pour un Etat zéro au sens où l’Etat tel que le conçoit un libéral conservateur et a fortiori des socialistes et autres “partageux” repose toujours sur l’agression de la propriété de l’individu sur lui-même. Si les libéraux conservateurs respectaient ce principe il n’y aurait pas de différence entre eux. Les libéraux conservateurs font reposer leurs analyses conséquencialistes sur une vision angélique de l’Etat.

Une manière de classer les libéraux entre eux mais aussi de situer les libertariens consiste à faire la distinction entre les intellectuels rationalistes et les anti-rationalistes puis entre ceux qui adhérent à une morale conséquencialiste ou téléologique dans leur approche du concept de liberté par opposition à ceux qui sont partisans d’une approche éthique en termes de déontologie du même concept.

La tradition de A. Smith, B. Mandeville, F Hayek est anti-rationaliste mais conséquencialiste. Anti-rationaliste veut dire ici que l’on ne peut façonner la société à partir d’un raisonnement ou d’une rationalité à priori. C’est l’anti-constructivisme. Conséquencialisme veut dire que la liberté ou l’absence de coercition est justifiée par ses conséquences “bonnes” pour l’ensemble de la collectivité. Pour les libertariens radicaux une telle position peut tout à fait justifier non seulement un Etat minimal mais aussi maximal si l’on peut démontrer par le raisonnement ou l’expérience que les conséquences de l’usage de la coercition, même sans le consentement des individus, sont bonnes dans les circonstances présentes : la guerre par exemple dont on sait qu’elle joue un rôle fondamental dans la croissance et la concentration du pouvoir des Etats dans les mains de quelques-uns.

La variété du courant de pensée libertarien.
Une manière simple de situer les libertariens entre eux ou par rapport aux libéraux classiques ou encore par rapport aux anarchistes de "gauche" consiste à faire la distinction entre les intellectuels qui ont une vision conséquencialiste, déontologique ou téléologique du concept de liberté ou du droit de propriété sur soi.
Ainsi il y a des libéraux classiques ou des libertariens qui sont :
 
a) Utilitariste. C’est l’école de Chicago ou de l’école autrichienne : Friedman, père et fils, Mises, Kirzner. Ces auteurs ne croient pas à des valeurs intrinsèques. Ils justifient souvent les libertés individuelles par leurs conséquences favorables. Ils ne se prononcent pas sur les buts ultimes des individus. Ils se prononcent sur les moyens. Les droits de propriété privée et leur échange volontaire améliorent l’utilité de tous sans diminuer l’utilité de quelqu’un, ils sont donc adoptés parce qu’ils sont efficients au sens de Pareto. S’ils ne le sont pas en fonction de ce critère ils le sont parce qu’il s’agit de la meilleure façon de résoudre le problème fondamental de la dispersion des connaissances qui fait obstacles à la coordination des actions individuelles.
 
b) Droit naturel moderne et anti -rationaliste . . L’Anti-rationalisme et le conséquencialisme se conjuguent chez les partisans du prix Nobel Hayek. Les coutumes, les conventions, les traditions émergent spontanément de l’interaction individuelle par un processus de sélection naturelle. Ces règles et conventions contiennent plus d’informations que ne peut en découvrir et contenir un cerveau humain. Les respecter constitue un meilleur guide des actions individuelles que de compter sur sa propre rationalité pour prendre des décisions. Ainsi le droit de propriété sur soi et la liberté individuelle, qui émerge spontanément de l’interaction individuelle, sont sélectionnés par la nature parce qu’ils permettent de développer une société ouverte mieux que tout autre type d’institution.

c) Contractualiste. C’est l’école dit du “public choice”. Les droits de propriété privée émergent à la suite d’un contrat social. Celui-ci définit les règles par lesquelles sont distribués les droits et les obligations de chacun. Ce courant est anti-rationaliste et conséquencialiste. Le contrat social est justifié par les conséquences négatives d’une société où le monopole de la violence sur un territoire n’existerait pas. Ces auteurs sont souvent hobbésiens et s’opposent aux libertariens qui sont lockéens.
Déontologique

d) Kantiens. Les libertariens sont plutôt des rationalistes critiques et adhèrent à des positions éthiques qui sont ancrées dans la déontologie kantienne. Les droits individuels sont des contraintes absolues. C’est la position du philosophe R. Nozick où le droit est fondé sur une déontologie kantienne : chaque individu es considéré comme une fin en soi et ne peut pas être utilisé comme un moyen pour arriver à ses propres fins sans son consentement.

e) Lockéens. L’êtres humain est un individu unique qui vit une existence séparée. C'est lui seul qui contrôle et "possède " son corps humain comme ce qu’il utilise et transforme. Un tiers peut agir à la place de l'individu, peut essayer d'influencer la volonté de l'individu pour qu'il use de son corps ou de son esprit dans une certaine direction, mais de manière ultime c'est l'individu lui-même qui pense et agit. La revendication radicale du contrôle et de la possession de son corps humain comme de son esprit ( la liberté de penser) fonde le droit de propriété sur soi. Ce qui est vrai pour soi est donc vrai aussi pour les autres. Le respect du droit de propriété et la compatibilité de ces droits fondent un droit libertarien dont le premier exposé systématique a été fait
par M.Rothbard dans l’Ethique de la Liberté , Paris, Les Belles Lettres, col. Laissez faire, 1991,

Téléologique.

f) Aristotélistes

L'aristotélisme comme le néo aristotélisme suppose que la " nature humaine " est téléologique, c'est-à-dire que les êtres humains ont un Telos ou une fonction naturelle. Par exemple la fonction d'une voiture est de rouler d'un point à un autre en transportant quelqu'un. Sachant quelle est cette nature on a une idée de ce que peut-être son " épanouissement ". Le bien dans une telle vision est l'actualisation par un être vivant de ses potentialités telles que sa nature les a prédéfinies. Supposons que l'homme ait une nature. Le bien et le mal se décline immédiatement. Toute action qui est contraire à la nature de l'homme est mauvaise. Toute action qui rend réelle cette nature ou une forme potentielle de l'être humain est bonne
Mais qu'est-ce que la nature humaine ? Aristote définit la nature propre de l'homme comme :

"l'activité de l'âme en accord , ou impliquant, un principe de rationalité."

Ou bien, comme le suggère la philosophe et romancière Ayn Rand dans son livre La vertu d'égoïsme , (Les Belles Lettres Iconoclastes -1993), si le propre de l'homme, en tant qu'homme, est d'assurer sa survie avec pour seuls moyens : son libre arbitre, sa conscience, sa capacité à se projeter dans l'avenir et d'inventer son propre futur et sa faculté de raisonnement, est  bon Ÿ tout ce qui va dans le sens de ces caractéristiques, est  mauvais Ÿ ce qui va à leur encontre. L'homme peut abandonner sa conscience, son libre arbitre, sa capacité à se projeter dans l'avenir ou à raisonner, il peut se complaire dans l'irrationalité, l'émotion et agir comme un animal, mais dans un tel cas il n'accomplira qu'une vie d'animal. La rationalité, l'intentionnalité et la réalisation de projets individuels par ses propres efforts productifs et la fierté d'avoir réalisé sa vie d'homme en tant qu'homme deviennent des vertus cardinales. C'est l'égoïsme rationnel ou l'égoïsme classique en philosophie morale. Or, on ne peut réaliser cet égoïsme rationnel que dans un système de liberté et le capitalisme est le seul système qui repose sur l liberté.


g) Néo aristotélistes

Cette version moderne de l'aristotélisme développée par D. Rasmussen met en avant comme finalité de l'homme en tant qu'homme, son " épanouissement " Human Flourishing ". L'épanouissement serait la finalité ultime de l'être humain. " L'épanouissement " d'un homme (ou d'une femme) est composé d'une combinaison d'activités et de vertus qui est poursuivie pour elle-même. Les activités peuvent être la santé, l'exercice corporel, la beauté, la connaissance, l'invention, l'amitié, la liberté.. et les vertus peuvent être l'intégrité, la tolérance, la modération, le courage, la justice etc. Ces activités ou vertus ne sont pas des moyens pour atteindre des fins mais sont les fins elles mêmes et elles expriment l'épanouissement de l'homme. Par exemple un sportif pour réaliser sa vie de sportif se doit d'être intègre, honnête, courageux, en bonne santé, inventif, travailleur, juste, humble, tenace, combatif, respectueux des autres etc. On remarquera que ce " human flourishing " est ontologique (c'est une façon de vivre), non-exclusif au sens où il ne s'agit pas d'une combinaison donnée d'activités et de vertus qui dominerait toutes les autres, individualisé ( il y autant de combinaisons qu'il y a d'individus), relatif à chacun compte tenu des circonstances particulières de son environnement, implique un comportement rationnel et un contrôle de soi pour réaliser la combinaison choisie. En effet, la réalisation de cet épanouissement exige un comportement de " practical wisdom ". Pour mettre en pratique cette combinaison qui exprime l'épanouissement de l'homme en fonction des circonstances chaque individu doit exercer sa raison, dominer ses passions, faire des choix, être libre de les faire. Mais on peut imaginer que l’individu s’épanouit en poursuivant et en mettant en pratique la liberté individuelle pour la liberté individuelle elle-même.

Les différences majeures entre les libertariens et les anarchistes de  gauche.

 

 A visiter:
Le libéralisme pour les débutants
http://www.dantou.fr/liberalisme.htm

CREDITS
AUTEUR: Ken Schoolland schoolak001@hawaii.rr.com
PRODUCTEUR: Kerry Pearson (aka Lux Lucre)
MUSIQUE: Music2Hues www.music2hues.com
WEBSITE: www.jonathangullible.com
APPUI: The Jonathan Gullible fund www.isil.org/tools/jonathan-gullible.htm
­l
COPYRIGHT: www.creativecommons.org/licenses/by-nd-n
­c/1.0/


Il est difficile de prétendre être exhaustif dans ce domaine tant il existe aussi une grande variété de pensée chez les anarchistes de  gauche. Entre un Stirner, un Bakounine, Kropotkine, Tolstoï, Proudhon, Malatesta pour ne prendre que des personnages célèbres, il y a des différences souvent essentielles. Nous ne pouvons pas entrer dans ces différences faute de compétence dans ce domaine. Nous retiendrons ce qui apparaît comme les différences majeures en dehors du point commun qui est l’abolition de l’Etat moderne tel qu’on le connaît .

Le point commun

L’abolition de l’Etat
Reportons-nous au mot  anarchisme Ÿ de l’American Heritage College Dictionary :  l’Anarchisme est la doctrine politique qui énonce que toute forme de gouvernement est non nécessaire, oppressif et non désirable et qu’il doit être aboli Ÿ. Sous cet angle là, les anarchistes de  gauche Ÿ et les anarcho-capitalistes partagent le même point de vue et ont le même objectif : abolir l’Etat. En revanche, libertariens ou les anarchistes de gauche divergent sur les moyens d’atteindre ce but et sur ce qui doit remplacer l’Etat !

Les points divergents
Nous avons remarqué trois points de divergence :

L’ alternative à l’Etat
Les libertariens prétendent que les solutions institutionnelles alternatives qu'ils proposent : la privatisation totale des pouvoirs régaliens ( police , justice, armée, diplomatie, droit et territoire ) sont largement supérieures aux institutions monopolistiques et coercitives mises en place par les Etats nations contemporains. Comme nous l'avons écrit plus haut, leur vision favorite de l'Etat est celui de la copropriété privée ou des villes privées formant des ligues, des fédérations et des associations entre elles de manière à résoudre les problèmes communs ou les conflits qu'elles peuvent avoir entre elles. En revanche les anarchistes de  gauche Ÿ, qui refusent la propriété individuelle et la liberté contractuelle, proposent de fonder l’ordre social sur la  commune Ÿ,  l’autogestion Ÿ et la démocratie directe.

Cependant les anarchistes de  gauche Ÿ sont pris dans un paradoxe, car ils désirent lutter simultanément contre le capitalisme ( ce qu'ils font habituellement) et contre l’Etat. Mais dans un monde sans Etat , ils ne peuvent empêcher le développement des droits de propriété privés ni la liberté contractuelle de fonder l’ordre social. C’est ce que l’on a vu avec la Lex Mercatoria et le développement de la ligue Hanséatique ou avec l’Islande. C’est ce que l’on voit aujourd’hui avec la mondialisation, la globalisation et les marchés noirs liés aux crimes sans victimes. Toutes ces activités se développent en dehors des Etats nations ou seigneuriaux. A l’inverse, une société sans Etats ( ie sans monopole de la violence sur un territoire donné) n’exclut pas les formes institutionnelles des anarchistes de gauche de se développer. L’auto gestion et la gestion commune d’un territoire ou d’une entreprise sont des arrangements contractuels parfaitement libres dans une telle société anarcho-capitaliste.

La divergence essentielle entre les libertariens et les anarchistes de gauche (contemporains) concerne donc la notion de propriété individuelle et de liberté contractuelle. En particulier, beaucoup d’anarchistes de gauche sont contre la propriété privée et individuelle, et sont aussi contre le contrat de travail ou de mariage parce qu’ils impliqueraient un lien de subordination et donc l'exercice d'une coercition qui est ressentie comme une contrainte non consentie.

Emotion contre raison
L'opposition à l'Etat chez les anarchistes est souvent de l'ordre de l'émotion ou de la passion voire de la mystique. En revanche, chez les libertariens leur opposition à l'Etat repose sur la primauté de la raison.

Les stratégies pour abolir l’Etat.
Il existe une autre différence fondamentale entre les anarchistes de gauche et les anarcho-capitalistes c’est celle de la stratégie et de la tactique pour abolir l’Etat. Les anarchistes de  gauche Ÿ en revanche, ont une doctrine de la destruction de l’Etat par la violence collective ou individuelle. Cette violence repose ou reposait sur la terreur (attentats ciblés ou non ) à l’image des Etats modernes qui eux aussi règnent par le chantage et la terreur (des armes ou du fisc ) La doctrine de la violence, chez les anarcho-capitalistes, en revanche, repose sur la légitime défense et la résistance à l’oppression. C’est une doctrine de la  guerre juste Ÿ. En conséquence, leur stratégie diverge fondamentalement de celle des anarchistes de gauche. Elle repose principalement sur la formation des croyances collectives en délégitimant les hommes d’Etat, elle prône la désobéissance civile ou des actions consistant à ignorer l’Etat.

Les anarchistes de gauche sont –ils vraiment des anarchistes ?

La réponse est non. En effet ils ont renoncé aux actions violentes contre l’Etat faute d’efficacité. Mais ils n’ont pas renoncé à l’usage de cette violence contre les droits de propriété privé, (DAL), ni contre les firmes. Pire ils soutiennent les monopoles publics (SUD), ils encouragent les clandestins ou les sans papiers à se mettre sous le joug de l’Etat ! Rares sont les anarchistes qui militent de manière active, contre l'impôt (la TVA par exemple qui frappe plus les pauvres que les riches). Ils ont renié leur objectif principal : l’abolition de l’Etat. Par facilité, ils reportent leur lutte contre des politiquement faibles : les capitalistes. En fait , ils se comportent comme les étatistes en promouvant par la violence leurs idéaux d'égalité et de non exploitation de l'homme par l'homme ce qui les discrédite pour toujours.

@ Étes-vous un classique libéral ou un anarcho -capitaliste? 
 
Une façon simple de distinguer un libéral classique, un anarcho-capitaliste ou un libertarien des autres composantes de la vie politique est d'essayer de les classer selon un axe droite-gauche. Vous n'y arriverez pas. Pourquoi? parce que les opinions droite gauche recouvrent, plus particulièrement en France, un axe où la notion de liberté individuelle n'existe pas. Prenons un homme politique comme Madelin qui a pris l'étiquette de libéral. Est-il centriste ou de gauche quand il parle de la panne de l'ascenseur social ou milite pour l'égalité des chances en avançant ses origines modestes, à droite du RPR quand il prône la libération des forces vives des entreprises ou à l'extrême droite quand il veut une baisse drastique de la fiscalité mais un soutien aux subventions à la famille faisant appel à ses convictions catholiques? Il est inclassable diront ses collègues députés ou encore les journalistes qui répètent ce qu'on leur dit. Il l'est parce que vous n'utilisez par le diagramme de Nolan.

Reportons nous à la figure suivante:

 
Sur l'axe horizontal, on porte une échelle liberté économique ( ou d'interventionnisme étatique sur le marché) , sur l'axe vertical une échelle liberté personnelle ( ou d'interventionnisme dans la vie privée des gens)
 


Lorsque l’on prend l’axe des libertés économiques, il est facile de classer les partis politiques. Les partis de gauche mais aussi les gaullistes sont fondamentalement interventionnistes et désirent étendre la réglementation voire les nationalisations. Les partis de droite sont plutôt favorables au  laissez- nous faire Ÿ en économie. En revanche, le clivage est plus grand lorsque l’on observe l’axe des libertés personnelles. Les partis de droite (néo-conservateurs au sens américain du terme) sont plutôt opposés aux libertés personnelles, alors que les partis de gauche y sont favorables. On retrouve le clivage droite gauche sur l’axe en pointillé avec des regroupements qui brouillent totalement la visibilité des préférences, puisque sur l’axe des libertés économiques on retrouvera une fraction du FN et du RPR ainsi que DL, tandis que sur l’axe des libertés personnelles on retrouvera les partis de gauche mais aussi DL. En revanche, sur l’axe de peu de libertés économiques on retrouvera le PC, LO/LCR, les verts, le FN ou une fraction du RPR partageant les mêmes valeurs anticapitalistes. Les choses se compliquent dès que l’on pénètre dans les sensibilités internes aux diverses factions politiques. Ce diagramme peut s’enrichir en introduisant une troisième dimension liée au régime politique. Nous laissons au lecteur le soin d’imaginer la différenciation des partis en fonction de cette troisième dimension sachant que le PC et l’extrême gauche sont pour le parti unique et qu’une fraction de la droite a été ou reste monarchiste voire populiste.
 

Les libertariens sont plutôt des rationalistes et (exception faite de David Friedman qui est plutôt un utilitariste) adhèrent à des positions éthiques qui sont ancrées dans la déontologie kantienne ou dans la téléologie aristotélicienne. Les droits individuels et donc le droit de propriété sur soi sont issus de la possession naturelle de soi. Ces droits de propriété privés sont des contraintes absolues. Il existe deux versions différentes de la philosophie des droits individuels : celle où le droit de propriété sur soi est fondée sur une éthique téléologique ou objective à la manière de la romancière et philosophe Ayn Rand (c’est aussi ce qu’utilise M.Rothbard pour développer son éthique de la liberté) et celle du philosophe R. Nozick où le droit est fondé sur une déontologie kantienne où chaque individu es considéré comme une fin en soi et ne pas être utiliser comme un moyen pour arriver à ses propres fins sans son consentement.
 
Conférence du 19/12/2000, la conquête du pouvoir politique, séminaire: Stratégie vers la liberté. Nous sommes en 2014, le thème est toujours d'actualité pour tous ceux qui militent pour la liberté.

Quels conseils pouvez-vous donner aux jeunes libéraux ?
 
(Ici cela concernait les libéraux de DL)
C’est une excellente question. Elle est difficile pour deux raisons :

1) parce que parmi les militants de DL il y a beaucoup de jeunes dont le cerveau est déjà structuré par leur éducation préalable pour être d’authentiques socialistes ou néo-conservateurs. Il est toujours plus difficile de se débarrasser de mauvais réflexes mentaux que d’en acquérir de nouveaux. Il y a donc un effort considérable à fournir pour former les jeunes de DL à la pensée libérale ou libertarienne et aussi à l’art de débattre et de persuader les autres. Séminaires intensifs et /ou cours du soir sont indispensables. Ensuite il faut ne pas hésiter à titiller les aînés pour les pousser dans leur retranchement et leur dévoiler leurs faiblesses intellectuelles et leurs contradictions. Il faut faire la conquête intellectuelle de DL. Il faut que les cadres et les militants de ce parti deviennent d’authentiques libéraux ou libertariens ils le deviendront s’ils sont poussés par les jeunes et si les jeunes de DL le sont..

2) Parce que les jeunes DL n’ont pas une vision claire d’une stratégie de passage à une société de liberté. L’objectif est d’atteindre une société civilisée où le droit de propriété sur soi fonde l’interaction individuelle et l’ordre social.

Comment alors passer de la situation d’une société étatique où les libertés individuelles sont bafouées à une société sans Etat, civilisée donc, où les libertés individuelles sont respectées? C’est l’objet du dernier chapitre de l’Ethique de la liberté de M.Rothbard[1]. On peut rappeler que l’objectif principal des jeunes de DL devrait être, s’ils étaient véritablement libertariens, la suppression immédiate des agressions contre la liberté individuelle. On remarquera que cet objectif est fondamentalement “abolitionniste”. C’est d’ailleurs pour cela que l’Etat tel qu’on le connaît est réduit à zéro parce qu’il est fondé sur un principe d’agression des libertés individuelles ou de la libre disposition de son corps.

Trois principes devraient guider leurs actions dans ce processus de transition :
1) maintenir l’objectif de la suppression radicale des agressions contre les liberté individuelles.le processus de transition doit être de nature tel qu’on ne peut commettre des actions, implicitement ou explicitement, qui reviennent à une agression contre les libertés individuelles. Cependant comme les factions politiques violent les libertés individuelles, elles se comportent comme des hors la loi, il est donc du devoir de chacun de résister à ces violations par la force, c’est la légitime défense.

2) La légitime défense, du fait du deuxième principe, implique d’user de moyens qui ne reviennent pas à commettre une agression contre des tiers innocents.

3) Une fois les principes mis en avant il doit exister une stratégie correcte d’une transition vers une société libre et civilisée. C’est à cette découverte que devraient tendre les jeunes de DL. Ils devraient normalement constituer un “groupe d’avant garde révolutionnaire ” pour revendiquer et mettre en oeuvre l’abolition de toutes les agressions contre les libertés individuelles.

Bertrand Lemennicier
http://lemennicier.bwm-mediasoft.com/displayArticle.php?articleId=63
 

[1] Rothbard Murray, 1981 The Ethics of Liberty, Humanity Press.



Le mot "Libertarien" est un anglicisme. Il s'agit d'une traduction littérale du mot américain "Libertarian". Ce mot est lui-même un néologisme qui permet aux libéraux classiques américains de se distinguer des "liberals" qui sont socialistes et/ ou démocrates, ainsi que de la droite conservatrice qui constitue la base électorale du parti républicain.

Dans son livre "Libertarianism a primer" David.Boaz fait remonter le mot libéral à "Liberales" du nom des représentants de la classe moyenne au parlement espagnol aux alentours de 1820. Ces députés s'opposaient aux "Serviles" comme on appelait alors les représentants des nobles et de la monarchie absolue. Le terme de "servile", pour désigner les représentants ou les avocats de l'étatisme en Espagne, était bien choisi mais malheureusement n'est pas resté. En revanche le mot "libéral" est resté et désignait ceux qui défendaient la liberté et la règle de Droit. Ainsi le parti des Whigs en Angleterre est devenu le parti libéral. Le prix Nobel Hayek n'hésitait pas à se défiçnir comme un "old Whig". En revanche le mot "libertarian" est récent et est attribué à Leonard Reed fondateur de la "Foundation for Economic Education" (FEE) quand il s'est appelé lui-même "libertarian" pour se distinguer des néoconservateurs et des "liberals".

En France ou en Europe le mot libertarien avec un "e" ne distingue pas les libéraux du reste des autres intellectuels puisque le mot "libéral ou ultra-libéral" n'a pas encore été usurpé par la gauche intellectuelle. Le mot "libertarien" fait donc référence à un courant de pensée plus précis. Ainsi le libéralisme classique, sous sa forme ultra ou infra, accepte l'Etat minimal. En revanche, les libertariens d'aujourd'hui ne croient pas aux vertus de l'État minimal. Un tel État n'existe pas parce qu'il est dans la nature de l'État, tel qu'on le connaît, de croître indéfiniment en opprimant ses propres citoyens et en concentrant le pouvoir dans les mains de quelques uns. Ils réclament donc sa suppression et conjuguent l'anarchie et le capitalisme de "laissez- faire", d'où l'utilisation fréquente du mot : " Anarcho-Capitaliste" comme synonyme au mot libertarien.

Cependant nous avons une préférence pour le mot libertarien. En effet, le mot Anarcho-Capitaliste semble s'opposer comme un faux antonyme au mot à Anarcho-Syndicaliste qui est le résultat de l'entrisme des anarchistes "de gauche" dans les syndicats. Or les Anarcho-Capitalistes n'ont pas de stratégie d'entrisme dans le capitalisme pour la simple raison que le capitalisme n'est pas une organisation mais un ordre social spontané.

Ce n'est pas très difficile de présenter la litanie des libertariens : c'est-à-dire l'ensemble des principes moraux, politiques et économiques qui caractérisent ce courant de pensée, car cet ensemble repose sur une prémisse très simple : la revendication radicale de la libre disposition de leur corps ou de leur propre personne. Il revendique ce que l'on appelle le "self ownership" ou la propriété de soi. Ni Dieu, ni Maître. De celle-ci on déduit une philosophie politique, une épistémologie, une éthique et une économie politique qui caractérisent si bien la façon de penser des libertariens. Nous allons reprendre de manière succincte ces quelques points qui constituent le noyau dur de la pensée libertarienne. Nous consacrerons une autre section à la variété des formes de libertarianisme et terminerons par une section montrant les différences majeures qui séparent les libertariens des anarchistes au drapeau noir. 

https://www.youtube.com/watch?v=aCqNxUYgcdw
Conférence sur L'économie de la transition Séminaire Stratégie vers la liberté 16/01/2001, Leçon pour un pays comme la France qui n' a pas encore fait cette transition.Là encore pensez que cette conférence a été faite il y a plus de 13 ans. L'Ukraine n'a toujours pas fait sa transition (comme la France).

Libertarien

De Wikiberal
Le libertarianisme (ou "libertarisme") est une philosophie tendant à favoriser au maximum la liberté individuelle, que celle-ci soit conçue comme un droit naturel ou comme le résultat du principe de non-agression. De ce fait, ses partisans, les libertariens, s'opposent à l'étatisme en tant que système fondé sur la coercition, au profit d'une coopération libre et volontaire entre individus. 
Le mot libertarien découle du mot anglais "libertarian".
Les libertariens sont des libéraux radicaux, opposés à l'État dans sa forme contemporaine. Pour eux, les pouvoirs de l'État devraient être extrêmement restreints (minarchisme), ou même supprimés (anarcho-capitalisme). Contrairement à l'idée libertaire, les libertariens ne sont pas pour une société gérée en commun, mais pour une société où les interactions entre les individus découlent de contrats librement consentis, conformément au Droit naturel et à l'axiome de non-agression.
Le terme anglais de libertarian (libéral) a un sens plus étendu que le terme français "libertarien", qui ne désigne à strictement parler que les minarchistes et les anarcho-capitalistes.
Cherchant à tout prix à insérer les libertariens dans une échelle droite/gauche on utilise parfois, pour les désigner, des expressions plus douteuses, comme "libéraux libertaires", ou des expressions inexactes, comme "anarchistes de droite". Ce que précisément ces expressions montrent, en fait, est que les libertariens échappent au clivage habituel droite/gauche.

Historique

D'après Bertrand Lemennicier, la philosophie politique libertarienne naît avec les Levellers au milieu du XVIIe siècle pendant la révolution anglaise. En 1646, dans la prison de Newgate, Richard Overton, un des leaders parmi les levellers, écrit le pamphlet célèbre An arrow against all Tyrants. Cet écrit affirme haut et fort le concept de propriété de soi-même :
To every individual in nature is given an individual property by nature not to be invaded or usurped by any. For every one, as he is himself, so he has a self-propriety, else could he not be himself; and of this no second may presume to deprive any of without manifest violation and affront to the very principles of nature and of the rules of equity and justice between man and man. Mine and thine cannot be, except this be. No man has power over my rights and liberties, and I over no man's. I may be but an individual, enjoy my self and my self-propriety and may right myself no more than my self, or presume any further; if I do, I am an encroacher and an invader upon another man's right — to which I have no right.
Dans son Traité du gouvernement civil (1690), Locke affirme de la même façon :
§ 27. Encore que la terre et toutes les créatures inférieures soient communes et appartiennent en général à tous les hommes, chacun pourtant a un droit particulier sur sa propre personne, sur laquelle nul autre ne peut avoir aucune prétention. Le travail de son corps et l'ouvrage de ses mains, nous le pouvons dire, sont son bien propre. Tout ce qu'il a tiré de l'état de nature, par sa peine et son industrie, appartient à lui seul : car cette peine et cette industrie étant sa peine et son industrie propre et seule, personne ne saurait avoir droit sur ce qui a été acquis par cette peine et cette industrie, surtout, s'il reste aux autres assez de semblables et d'aussi bonnes choses communes. (traduction de David Mazel, en 1795)
Les libertariens sont les héritiers directs des libéraux classiques dont ils prolongent le libéralisme sans concession envers l'étatisme.

Origine du terme

L'histoire du mot « libertarien » est intéressante, car c'est la traduction en français de l'anglais « libertarian », lui-même traduction anglaise du français « libertaire ».
Déjà au début du siècle, le liberal party anglais, au pouvoir, avait dérivé vers de plus en plus d'étatisme, et de moins en moins de libéralisme. Ce changement de cap fut entériné dans les années 1920, où le très étatiste économiste Keynes se réclama comme liberal, en référence à la politique du parti liberal, et en rejetant explicitement la tradition de pensée libérale. Dans les années 1950, pour éviter le McCarthysme, les socialistes américains se sont massivement réclamés comme liberal, en reprenant la tradition keynésienne. Le mot liberal, aux États-Unis en étant venu à dire « socialiste », les libéraux américains (au sens original du terme) ont repris à leur compte le mot libertarian, qui aux États-Unis n'avait pas la connotation de gauche qu'il a en France. Le mot libertarian s'est depuis implanté en Grande-Bretagne (où il avait une connotation de gauche, comme en France), fort de toute la littérature libertarian déjà existante (ils n'allaient quand même pas ajouter à la confusion en créant un terme distinct en Grande-Bretagne !).
Cependant, à la même époque, dans les années 1970, Henri Lepage (Demain le capitalisme), en traduisant le terme libertarian, et en l'absence de littérature libertarian francophone, n'a pas voulu risquer l'amalgame avec les anarchistes socialistes, et a donc préféré utiliser « libertarien » plutôt que « libertaire ». Le mot était déjà employé par les Canadiens francophones[1].
Pour ajouter à la confusion, certains gauchistes ont néanmoins traduit libertarian par « libéral-libertaire », cependant que quelques rares libéraux revendiquent le mot « libertaire ». Les libertarian francophones du Québec, dans un pays où tout le monde est bilingue, ont repris le terme « libertarien », phonétiquement proche de l'américain libertarian, en France l'ADEL en a fait de même puisqu'il s'agit bien de l'association des Libertariens.
Le mot anglais libertarian, quant à lui, est attribué à Leonard Read, fondateur de la Foundation for Economic Education, pour se distinguer des néoconservateurs et des liberals socialistes.
Le mot « libertarien » donne lieu au néologisme « libertarianisme »[2] - mot si inutilement compliqué que même ceux qui se revendiquent « libertariens » préfèrent parler de libéralisme pour nommer leur philosophie (ce en quoi certains libéraux non libertariens sont en désaccord). Certains utilisent aussi le terme « libertarisme ».
A noter que les autres langues latines (italien, espagnol, portugais) utilisent indifféremment les termes libertario / libertariano (libertarien) et libertarismo / libertarianismo (libertarisme).
Certains auteurs français utilisent indifféremment les termes libéral et libertarien (François Guillaumat, Bertrand Lemennicier, etc.), d'autres n'utilisent que le terme libéral (Pascal Salin). Tout semble dépendre de la volonté ou non de se différencier des politiciens "libéraux" français (traditionnellement centristes, peu suspects d'extrémisme et peu enclins à une certaine cohérence idéologique...), ou de revendiquer résolument le terme de libéral en se rattachant à la lignée libérale française des siècles passés, elle-même à l'origine même du courant "libertarien" contemporain.
Le Petit Larousse illustré 2014 accepte le terme et le définit ainsi[3] :
libertarien, enne
n. et adj. (angl. libertarian). Partisan d’une philosophie politique et économique (princip. répandue dans les pays anglo-saxons) qui repose sur la liberté individuelle conçue comme fin et moyen. Les libertariens se distinguent des anarchistes par leur attachement à la liberté du marché et des libéraux par leur conception très minimaliste de l’État.
adj. Relatif à cette philosophie.
Il semble donc justifié de distinguer entre libéraux et libertariens, les libertariens étant des libéraux mais les libéraux n'étant pas tous des libertariens. Le libertarien se réclame de grands principes a priori (propriété de soi-même, axiome de non-agression, droit naturel...) alors que le libéral non libertarien se préoccupe de la liberté de façon plus empirique.
Il faut ainsi aborder les textes anglais avec de grandes précautions, car liberal et libertarian ne peuvent être traduits en français de façon univoque par "libéral" et "libertarien". Ainsi la phrase suivante : "Liberal critiques of libertarianism matter because libertarians claim to be liberals"[4], quasiment intraduisible en français[5], emploie le terme liberal dans le double sens de "progressiste" et de "libéral".
On aura donc les équivalences suivantes, en fonction du contexte :
  • liberal : 1. progressiste (voire socialiste)[6] ; 2. libéral (dans son acception ancienne) ;
  • libertarian : 1. libéral (classique) ; 2. libertarien ; 3. libertaire (dans son acception ancienne) ;

Politique

Le libertarisme a une existence politique dans les pays anglo-saxons (libertarian party). Il échappe à un positionnement politique classique de par ses thèses qui le situent à la fois à gauche au plan des libertés individuelles (usage libre des drogues, liberté d'expression, liberté d'immigration, liberté sexuelle...) et à droite au plan des libertés économiques (respect de la propriété privée, libre-échange, suppression ou diminution drastique de la fiscalité...). Comme le dit Murray Rothbard : le libertarien ne voit aucune incohérence à être « de gauche » dans certains domaines et « de droite » dans d’autres. Au contraire, il considère que sa position est quasiment la seule qui soit cohérente du point de vue de la liberté individuelle.
Les libertariens sont inclassables, et les personnes non averties (au moins en Europe, où les thèses libertariennes sont encore peu répandues) ont tôt fait de les classer, par ignorance, tantôt à l'extrême-gauche (anarchisme, refus des lois, défense intransigeante des libertés), tantôt à l'extrême-droite (liberté du port d'armes, défense intransigeante de la propriété et de l'entreprise privée, refus de l'assistanat étatique). Le libertarisme est en réalité anti-politique, pour lui la politique ne diffère pas de l'esclavagisme.

En quoi les libertariens diffèrent des libéraux

Même si le socle philosophique est commun, les divergences avec les libéraux sont nombreuses, et portent sur le rôle de l'État, du service public, la conception de la politique et de la démocratie, l'impôt, la loi, l'immigration, le droit pénal, etc. (les articles cités explicitent les différences). Les libéraux considèrent habituellement les libertariens comme des libéraux "radicaux" voire extrémistes, les libertariens considèrent les libéraux non libertariens comme des "compagnons de route" qui ne sont pas allés jusqu'au bout de la logique libérale (en raison d'un trop grand respect envers l'État, ou d'une conception incomplète de ce qu'est le droit). Les libertariens ont une vision pessimiste de l’État, les libéraux une vision optimiste : « pour un libéral, l'État minimal est le plancher ; pour un libertarien, il est le plafond. » (Patrick Smets).
Les libertariens, en comparaison avec les libéraux, ont de par leur logique propriétariste des idées très arrêtées sur ce que devrait être le droit dans une société libre, alors que les libéraux seront moins catégoriques sur le rôle de l'État et plus hésitants sur la réalité de la lutte des classes que dénoncent les libertariens, ou sur le principe de non agression que les libertariens érigent en règle générale.
Il est cependant impossible de tracer une frontière claire entre libertariens et libéraux (aux États-Unis, on emploie d'ailleurs le même terme dans les deux cas : libertarian). La différence est peut-être une question d'attitude : les libertariens déduisent leur position sur tout sujet de grands principes a priori tels que la non-agression, la propriété de soi-même ou le concept de droit naturel, avec le risque de tomber dans un certain dogmatisme (Rothbard est souvent cité comme l'exemple-type) ; les libéraux, eux, sont davantage attachés aux conséquences et adoptent un point de vue empirique (Hayek) ou utilitariste sans a priori. Comme le remarque un peu cruellement Virginia Postrel (an 18th-century brain in a 21st-century head) : la tradition déductive a défini l'identité libertarienne et son dogme, tandis que la tradition empirique a réalisé ses buts.
Certains "tests" essaient de cerner les différences fondamentales entre libéraux et libertariens, par exemple : Libéral ou libertarien ? Faites le test !.

Points de désaccord entre libertariens

Même si les points de vue sur la réduction du rôle de l’État et l'importance des droits individuels et de la non-agression font l'unanimité, il existe plusieurs points de désaccord entre libertariens :

Libertariens "de droite" et libertariens "de gauche"

Certains auteurs, tels Peter Vallentyne, se fondent sur le désaccord quant à l'appropriation des ressources naturelles pour distinguer un libertarisme "de droite" et un libertarisme "de gauche" ([1]). Ainsi, Rothbard et Kirzner seraient des libertariens d’extrême droite, car ils admettent que n'importe qui peut s’approprier des ressources non encore appropriées. Nozick serait seulement "de droite", car il admet le proviso lockéen. Les libertariens georgistes (Henry George, Hillel Steiner) admettent l'appropriation des ressources naturelles non encore appropriées en contrepartie d'une location versée à un fonds social. Enfin les libertariens "égalitaristes" tels Peter Vallentyne exigent en outre le paiement d'un impôt sur tous les avantages reçus de cette appropriation ("taxation complète des avantages").
Les libertariens agoristes se considèrent également comme des libertariens de gauche, voire d'extrême gauche, parce qu'ils se considèrent comme "anti-establishment", aussi bien contre le socialisme que contre le conservatisme.
Aux États-Unis on parle également de conservatisme libertarien[7], résultant d'une convergence entre deux courants politiques proches, les conservateurs étant souvent en faveur d'un gouvernement limité et les libertariens ne rejetant pas les "valeurs conservatrices" ; Ron Paul ou Gary Earl Johnson seraient ainsi des "conservateurs libertariens", ou des "libertariens conservateurs".

Les réalisations libertariennes

Alors que les hommes politiques traditionnels s'emploient à créer des privilèges et de faux droits, les libertariens cherchent à mettre en œuvre leurs idées de façon concrète directement dans la société civile (et non par la coercition étatique) en créant des services utiles aux personnes, visant à promouvoir l'autonomie individuelle. On peut citer les exemples suivants :
  • Wikipédia est une encyclopédie coopérative d'inspiration libertarienne, créée par Jimmy Wales ; c'est une bonne illustration du concept contre-intuitif d'ordre spontané ;
  • Bitcoin est une monnaie virtuelle décentralisée, créée par des libertariens partisans de la concurrence monétaire ;
  • les projets d’États libertariens, encore utopiques, pourraient un jour aboutir à des réalisations concrètes, soit par la voie politique (Free State Project), soit ex nihilo (seasteading, villes privées) ;
  • l'activisme libertarien (Ron Paul, Rand Paul, Edward Snowden, Hannah Giles, etc.) dénonce les pratiques politiques abusives des États ;
  • certains libertariens se sont spécialisés dans le survivalisme et partagent leurs expériences ;
  • les philanthropes libertariens (par exemple Peter Thiel) financent divers projets liés à la cause libertarienne.

Un pays pour les libertariens

Aucun pays existant ne pouvant convenir aux libertariens, ces derniers ont le choix entre militer dans leur propre pays pour davantage de liberté, ou, quand c'est possible, partir pour des pays plus libres (comme certaines micronations en Europe, Amérique ou Asie), ou encore construire à partir de zéro un tel pays. Les projets ont été très nombreux, mais aucun n'a encore véritablement abouti. Parmi les anciens projets :
  • la Principauté de Minerva, fondée en 1971 par un activiste libertarien de Las Vegas, Michael Oliver, sur les récifs de Minerva, à 500 km au sud-ouest du royaume de Tonga. Cependant, en 1972, les îles Tonga ont annexé Minerva. Le territoire est actuellement revendiqué par la Principauté de Minerva (gouvernement en exil) ainsi que par les îles Fidji.
  • la Principauté de Freedonia, créée en 1992. Le but ultime était de créer une nation libertarienne souveraine. Après un essai infructueux en Somalie en 2001, le projet a été abandonné.
  • Oceania, The Atlantis Project, projet libertarien de ville flottante, abandonné en 1994. Son auteur s'est tourné vers un projet humanitaire plus ambitieux, Lifeboat Foundation.
  • la Principauté de Sealand (ancienne plate-forme militaire de l'armée britannique, construite au large de l'estuaire de la Tamise dans les eaux internationales) est un exemple de micronation réussie (mais non libertarienne, et de plus extrêmement minuscule) dont les libertariens pourraient s'inspirer dans leurs projets futurs.
  • le projet Limón REAL est un projet de province autonome libertarienne au Costa Rica, conduit par Rigoberto Stewart.
A ce jour, le projet le plus abouti est le Free State Project, qui vise à regrouper 20000 libertariens dans l'État du New Hampshire, de façon à exercer une pression politique forte en direction du libertarisme. Une variante du projet a choisi l'État du Wyoming. Leur clone européen, "European Free State", a été pour le moment abandonné.
Le seasteading est vu comme une possibilité futuriste d'établir des communautés libertariennes en-dehors des états, sur des territoires très grands et non encore étatisés : les eaux internationales. Il n'y a pas de projet concernant les territoires terrestres inoccupés[8].
http://www.dailymotion.com/video/xbdik6_fondements-et-horizons-de-la-pensee_news?start=5

Alors que le terme libertarien est quasiment inconnu en France, cette pensée a réussi à se constituer en mouvement reconnu et structuré aux États-Unis qui a progressivement gagné en influence et en indépendance vis à vis des autres mouvements politiques.

La pensée libertarienne est fondamentale tant pour sa richesse et sa diversité, que pour son originalité qui se manifeste à travers son rejet de l'étatisme qui va au delà du clivage droite-gauche.

Quels sont les idées centrales de ce mouvement politique ? Comment a t-il su se structurer en parti politique aux États-Unis ? Quelles conclusions en tirer en France ?

Kevin Brookes, étudiant à l'Institut d'Études Politiques de Grenoble, nous a présenté l'ouvrage récemment paru de Sébastien Caré : « La Pensée libertarienne ». 

 

Bertrand Lemennicier

De Wikiberal
 
Bertrand Lemennicier est un économiste français né le 15 octobre 1943. Docteur d’État en Sciences Economiques et Professeur agrégé des facultés de Droit et Sciences Economiques, il enseigne l'économie à l'Université Paris II Panthéon-Assas. Il est membre du Conseil Scientifique de cette Université. Libéral et scientifique, il fait partie du bureau éditorial du Journal of Libertarian Studies.
Chargé de Recherches au CREDOC pendant de nombreuses années, il s'est occupé ensuite de la branche européenne de l'Institute of Humane Studies, institution dont l'objet est de former les élites de demain à la pensée libérale. Il organisait à ce titre des séminaires d'une semaine dans différents pays d'Europe de l'Ouest et de l'Est. Après avoir dirigé le Laboratoire d’Economie Publique de l’Université de Paris II, il dirige actuellement l’Institut de recherches sur la gouvernance et l'économie des institutions (IRGEI) de Paris II.
Il appartient à une école d'économistes - illustrée entre autres par l'un des prix Nobel comme Gary Becker, Ronald Coase, James McGill Buchanan ou Friedrich Hayek - qui s'efforce d'appliquer les outils de l'analyse économique à des comportements ou des relations qui n'apparaissent pas a priori de nature économique comme le mariage, le crime, le droit, la politique etc. Auteurs de nombreuses publications dans des revues scientifiques, il a aussi publié plusieurs livres dont quatre très remarqués : Le Marché du mariage et de la famille (1988 Editions P.U.F), Cinq questions sur les syndicats (ce dernier en collaboration avec Jacques Garello et Henri Lepage, 1990 Editions P.U.F), L'Économie du Droit (1991 Editions Cujas), et La Morale face à l'économie (Editions d'Organisation, 2006). Dans ce dernier ouvrage il aborde différents débats de société pour montrer que l'économie, loin d'être immorale ou amorale, traite effectivement des questions morales, parce qu’elle traite des actions humaines. Il est aussi l’auteur d’un manuel de Microéconomie sous forme d’un CDROM : - Microéconomie : Théorie et Applications CDROM, 2003-2005 édité par bwm-mediasoft, Luxemburg.
Il est membre de la célèbre Mont Pèlerin Society (MPS), de l’ISIL (International Society for Individual Liberty: Libertarian Activism Worldwide) et de the Property and Freedom Society.

Œuvres

  • 1980, La Spécialisation des Rôles Conjugaux, les Gains du Mariage et la Perspective du Divorce (Specialization of Conjugal Role, Marital Gains, and Perspective of Divorce), consommation
  • 1981, avec Levy-Garboua, L’Arbitrage Autarcie-marché: une Explication du Travail Féminin (Arbitration Autarchy-Market: An Explanation of Female Work), consommation
  • 1982, Les Déterminants de la Mobilité Matrimoniale (The Determinants of Matrimonial Mobility), consommation
  • 1987,
    • a. Indemnités de Licenciement: Assurances tous Risques, Réparation d’un Préjudice ou Impact sur la Liberté de Contracter (Damages of Licensing: All Risk Insurance, Retrieving a Loss or Taxation on the Freedom of Contract), Revue de la Recherche Juridique Droit Perspectif
    • b. Privatisons les rues : le mythe des " biens publics ", In: Henri Lepage et Serge Schweitzer, dir., De l'ancienne économie à la nouvelle économie, Librairie de l'Université, Aix-en-Provence, pp145-158
  • 1988, Le marché du mariage et de la famille, Collection Libre Echange, Paris PUF
  • 1991,
    • a."Le corps humain: propriété de l'Etat ou propriéé de soi ?" DROITS, revue française de théorie juridique.
    • b.Economie du droit, paris : Cujas
  • 1992, Prohibition de la drogue, Journal des Économistes et des Études Humaines, Vol 3, pp493-522
  • 1994, Tabac, histoire d'une imposture (avec B. Deveaud), Grancher, Paris
  • 1995, "L'Economie de la justice : du monopole d'Etat à la concurrence privée ? in JUSTICES
  • 1996, La Privatisation des rues, Journal Des Economistes Et Des Etudes Humaines, Vol. VII, n°2/3, June-September, pp363-376
  • 1997, L'OMS : bateau ivre de la santé publique(avec B. Deveaud), L'Harmattan, Paris
  • 1999, "Marriage Contracts and the Law-and-Economics of Marriage: an Austrian Perspective" in JOURNAL OF SOCIO ECONOMICS (in collaboration with Shoshana Grossbard-Shechtman )
  • 2001, Collective Belief Formation and the Politically Correct Concerning Information on Risk Behaviour, Journal des économistes et des études huamines, Vol 11, n°4, décembre
  • 2003,
    • a. Microéconomie : théorie et applications, CDROM, bwm-mediasoft, Luxembourg,
    • b. Nuclear Weapons: Proliferation or Monopoly?, In: Hans-Hermann Hoppe, dir., The Myth of National Defense: Essays on the Theory and History of Security Production, Auburn, AL: Mises Institute, pp127-144, [lire en ligne]
  • 2005, La Morale face à l'économie, Editions d'Organisation, Paris
  • 2005, “La privatisation des armées et l’argument des biens collectifs” dans INSECURITES PUBLIQUES ? SECURITE PRIVEE? ESSAI SUR LES NOUVEAUX MERCENAIRES, sous la direction de J.J.Roche, Paris , Economica
  • 2005, L’origine sociologique des parlementaires français, en coll. avec Pierre Edouard Ducray. Contribuables Associés
  • 2005, "Political Polarization of the French and the rejection of the European Constitution" EUROPEAN JOURNAL OF POLITICAL ECONOMY, (December)
  • 2006, "Fallacies in the Theories of the Emergence of the State" JOURNAL OF LIBERTARIAN STUDIES (Fall)
  • 2007, Qui est réellement corrompu : l’électeur ou l’homme politique ?, en coll. Avec Mariya Georgieva Contribuables Associés
  • 2007, « La notion de guerre juste » dans L’HOMME LIBRE, Les Belles Lettres, sous la direction de Mathieu Laine et Guido Hulsman
  • 2008,"When does the Candidate Supported by the Median Voter Win: French Presidential Elections, 1965-2007" (in cooperation with B. Grofman and H. Lescieux-Katir), in FRENCH POLITICS
  • 2009,"Testing the Accuracy of the Downs Spatial Model Voter Model on Forecasting the Winners of the French Parliamentary Election on May-June 2007" (in cooperation with H.Lescieux -Katir) INTERNATIONAL JOURNAL OF FORECASTING
  • 2010,"The existence of a “value” to “non existence” The case of wrongful birth in Tort Law Action” Comments on the paper of Valérie Harrant and Nicolas Vaillant: “compensation and Wrongful Life: a positive Economic Perspective” JOURNAL OF LEGAL ECONOMICS
  • 2010,"The 2007 French Presidential Election" (in cooperation with H.Lescieux Katir and B.Grofman) in CANADIAN JOURNAL OF POLITICAL SCIENCE
  • 2010," "Du mercenariat entrepreneurial au mercenariat en holding" chapitre 4, dans DES GARDES SUISSES A BLACKWATER, Etudes de l'IRSEM sous la direction de J.J.Roche, Paris mai volume 1 N°2

Citations

  • « La question de la privatisation de la protection militaire peut se faire en réalité au sein de la copropriété. Chaque copropriétaire est tenu de payer les charges afférentes à l'entretien et à la protection des parties communes comme des propriétés elles-mêmes ; même le locataire et le nomade, via des droits de passage, paieront la protection militaire et donc son financement. La protection militaire peut elle-même être offerte par des compagnies d'assurance ou de grandes entreprises spécialisées déjà dans la fourniture de services territoriaux. »
  • « Il est toujours tentant pour n'importe quel groupe de pression d'user de la contrainte publique pour imposer aux autres ses propres goûts ou ses propres intérêts privés. Mais l'usage de la violence politique par un groupe de pression pour promouvoir sa propre morale montre on ne peut plus clairement que la morale qu'on cherche à imposer n'est pas aussi bonne qu'on le dit puisqu'il faut user de la violence pour que les gens l'adoptent. On ne conçoit pas qu'une morale puisse s'imposer par une procédure majoritaire. »
  • « Le but d'un homme d'État n'est pas de supprimer les sources de son pouvoir, mais bien au contraire de les augmenter et de les concentrer dans les mains de quelques-uns. »
  • « Comme on interdit à un employeur d'embaucher un enfant de moins de 16 ans, les élèves n'ont d'autre solution que de fuir l'école ou, s'ils sont contraints d'y aller par la force, de résister par la violence à un système scolaire qui les agresse. S'ils n'ont pas envie d'aller à l'école et que les employeurs légaux n'aient pas le droit de les embaucher, ils se tournent vers le marché noir et la délinquance. Que l'on supprime la scolarité obligatoire, que l'on autorise le travail des enfants en deçà de 16 ans, et ces maux disparaîtront comme par enchantement. […] Nous avons le problème classique d'un législateur qui se substitue aux individus et aux familles en croyant savoir mieux qu'eux-mêmes ce qui est bon pour eux. Ils sont alors surpris de voir la réaction de ces jeunes. Quand on utilise la violence pour forcer quelqu'un à faire quelque chose qu'il n'a pas envie de faire, il ne faut pas s'étonner des conséquences que cela engendre. »
  • « Le contrat social n'existe pas parce qu'il n'y a pas de droit de sécession individuel, ni territorial […]. La notion de consentement veut dire que l'on peut vendre ses droits de vote, que l'on peut créer un État, que l'on peut objecter, que l'on peut choisir un statut de métèque ou le droit d'ignorer l'État. En absence de ces règles assurant le consentement, il n'existe ni consentement ni contrat social. »
  • « Le chômage contemporain est un chômage de file d'attente résultat d'une intervention ou d'un ensemble d'interventions publiques antérieures cherchant à protéger un secteur de la compétition sur le marché du travail. Ce secteur protégé engendre un effet pervers : un chômage qui entraîne la montée de l'exclusion et de la pauvreté. Pour corriger cet effet pervers, des règlementations spécifiques destinées à réduire la pauvreté sont prises. Ces règlementations spécifiques non seulement sont souvent inefficaces mais dans certains cas, contribuent à accentuer le phénomène combattu. À nouveau pour corriger cet effet pervers non anticipé, de nouvelles mesures d'aides et de règlementations sont introduites qui elles mêmes engendrent des effets pervers ainsi de suite. »
  • « Paradoxalement, la baisse des adhésions syndicales peut également s'interpréter comme une rançon du succès des syndicats sur le "marché politique". Dans la mesure où aujourd'hui la législation contraignante de l'État se substitue de plus en plus à la protection du syndicat, il est inévitable que moins de gens se sentent motivés pour mettre leur écot et leur temps à la disposition des centrales ouvrières. Pourquoi payer des cotisations, ou sacrifier du temps à l'activité syndicale si la plupart des objectifs qui guidaient l'action des syndicats sont désormais inscrits dans la loi ? »
  • « Les anarchistes de « gauche » sont pris dans un paradoxe, car ils désirent lutter simultanément contre le capitalisme (ce qu'ils font habituellement) et contre l’État. Mais dans un monde sans État, ils ne peuvent empêcher le développement des droits de propriété privés ni la liberté contractuelle de fonder l’ordre social. »
  • « Ce qui gouverne une nation (en démocratie), c'est la distribution des votes. Il y a un fort consensus autour de l'électeur médian. C'est une loi d'airain, pour l'homme politique, de saisir le vote de l'électeur médian. C'est l'électeur médian qui impose la redistribution. Pour cette classe moyenne, il faut qu'il y ait davantage de subventions que de taxation. Le seul moyen pour l’État d'y parvenir est de faire du déficit, financé par la dette publique. »

Liens externes

 

 

octobre 18, 2014

Syndicratie, idéologues de la « pensée unique », ou du « politiquement correct » contre le "Libéralisme"

L'Université Libérale, vous convie à lire ce nouveau message. Des commentaires seraient souhaitables, notamment sur les posts référencés: à débattre, réflexions...Merci de vos lectures, et de vos analyses.

Jacques de Guénin  avant-propos par les éditions Coquelin le livre de Florence Guernalec

Nous avons tous vécu l’expérience suivante : le public applaudit longuement la fin d’un spectacle. Au début, chacun applaudit à son rythme, dans un certain brouhaha. Au bout d’un moment, le rythme s’uniformise, et tous applaudissent à l’unisson. Il en résulte un bruit cadencé, comme la marche au pas des militaires, mais à la différence des soldats, personne dans le public n’a conscience d’avoir été contraint. 



Avec une échelle de temps très différente, notre société, prétendument si individualiste, s’est peu à peu uniformisée dans sa façon de penser et de se comporter, sans qu’aucune autorité ne l’y ait forcé, contrairement à ce qui s’est passé dans les régimes totalitaires. On appelle souvent « pensée unique », ou « politiquement correct », le résultat de cette évolution. Florence Guernalec l’appelle « la Norme », vocable plus précis et plus adapté au travail d’entomologiste auquel elle s’est livré.
 
La diversité était-elle plus grande autrefois, c’est à dire avant la guerre ? Sans aucun doute, puisque la famille cultivait alors l’effort, et l’école la compétition, que nous n’approuvons plus aujourd’hui que dans le sport. L’enseignement secondaire cultivait aussi l’esprit critique, et donnait pour modèle des héros positifs, sources de différenciations.
 
L’évolution s’est faite insensiblement, sous l’effet progressif de réformes que nous avons tous perçu sans être vraiment capables de les dater : pas de grandes révolutions; de simples points d’inflexion dont la cohérence et l’enchaînement ont fini par former une société complètement différente. Il y eut d’abord la suppression des compositions, des classements, des examens de passage, l’abandon de l’orthographe – en dehors des dictées de Pivot, assimilables au sport -, celui de l’arithmétique appliquée, des repères en Histoire et Géographie. Il y eut ensuite, l’invention du « collège unique », effort louable pour uniformiser l’enseignement par le haut, mais qui a rapidement abouti à l’uniformiser par le bas, sans qu’aucun gouvernement n’ait eu le courage d’inverser la tendance, ayant depuis longtemps abandonné le pouvoir aux idéologues et à la syndicratie.
 
On a assisté à une dérive lente vers le harcèlement des gens qui entreprennent, accompagnée d’une grande sollicitude pour les gens peu enclins à travailler. Cette dérive a été couronnée par un passage brutal aux 35 heures, mesure de pure démagogie qu’aucune analyse économique ne justifiait. La philosophie politique dominante est devenue une philosophie d’égalité forcée des niveaux de vie, opérée par la redistribution, bien loin de l’égalité devant la loi et de la récompense de l’effort et de la raison qui firent longtemps la gloire de notre République. Les écoles normales d’instituteurs, qui avaient tant contribué à faire jaillir les élites des classes populaires, ont dû céder la place aux médiocres Instituts universitaires de formation des maîtres, aggravant ainsi le clivage entre ceux qui sont nés dans les familles instruites et les autres.
 
Toutes les têtes qui dépassent doivent désormais être coupées – sauf celles des hommes de pouvoir – et il faut constamment se battre pour conserver les rares choses qui marchent encore dans notre pays : les grandes écoles, les concours anonymes, les entreprises multinationales, les scientifiques de talent.
 
Florence Guernalec nous a décrit avec lucidité le résultat de cette convergence vers la pensée unique : l’homme de la Norme. Elle nous livre chapitre après chapitre ce qu’il pense sur le libéralisme, le pouvoir, la société de consommation, le sexe, la morale, les inégalités, les injustices sociales, la pauvreté. L’échec patent de ses années de pouvoir aurait dû discréditer la Norme. En trois chapitres, le livre explique comment elle a réussi à survivre : par le mensonge organisé, la promotion des acquis, et l’Europe.
 
Florence Guernalec a fait un travail méticuleux et complet, écrit dans un style alerte avec un humour grinçant. On le lit en souriant, mais avec une légère inquiétude lorsqu’on se demande si cette description est applicable à soi-même.
 
D’aucuns trouveront cette description pessimiste. Ce n’est pas mon avis. C’est seulement grâce à la prise de conscience que permet ce livre qu’un sursaut pourra naître. Le dernier chapitre tente d’ailleurs de répondre à l’interrogation « Comment sortir de la Norme ? » Il rejoint ainsi le message qu’Ayn Rand, la grande philosophe et romancière américaine, délivre à la fin du paragraphe dont nous avons donné le début plus haut : 

Cependant quelques uns tiennent bon et vont de l’avant, sachant qu’ils ne doivent pas trahir leur feu sacré, apprenant à lui donner une forme, un but et une réalité. (1)
 
C’est pour encourager ceux-là que Florence Guernalec a écrit son livre.
 
Jacques de Guenin
 
Dans la continuité Jacques de Guenin nous livre le: Portrait de « l’Homme de la Norme »
 
Il est contre la peine de mort et pour l’avortement.
 
Il soutient les sans-papiers et les mal-logés.
 
Il milite pour la protection de l’environnement.
 
Il défend les droits des femmes et des minorités.
 
Il s’oppose à la répression policière et encourage la prévention de la délinquance.
 
Il se bat pour la retraite à 60 ans et rejette les fonds de pension.
 
Il est très attaché à l’État providence, aux services publics et à l’école laïque.
 
Il réclame l’annulation de la dette des pays les plus pauvres.
Il s’élève contre les licenciements et les délocalisations. Il approuve toutes les grèves par principe.
 
Il refuse la mondialisation néolibérale, craint le pouvoir des multinationales et des « gros actionnaires ».
 
Il déteste l’argent et la spéculation financière.
 
Il est très critique à l’égard de l’Amérique. Il rejette sa puissance économique et militaire, et son industrie du divertissement.
 
L’ « Homme de la Norme » a des valeurs et aime le faire savoir : il répète partout qu’il défend l’égalité des chances et les libertés individuelles ; il prône la solidarité entre les citoyens et combat les « injustices sociales ». Normal, il est dans la Norme et vote pour la Norme, le parti des progressistes.
 
Dans la vie courante,
 
Tous ses vêtements et tout son électroménager ont été fabriqués dans le Tiers-monde par des ouvriers payés une poignée de dollars et non syndiqués.
 
Il manifeste contre les démocraties à chaque sommet du G8 et de l’OMC, il ne s’oppose jamais aux violations des droits de l’Homme dans les dictatures.
 
Il ne fréquente que les cliniques et hôpitaux privés, ses enfants ont une nounou à demeure, sont inscrits dans une école privée et feront leurs humanités dans une université américaine.
 
En ville, il ne se déplace qu’en voiture. Il déteste le vélo et encore plus les transports en commun à cause de la foule et des odeurs.
 
Ses revenus mensuels lui assurent le strict minimum : un bel appartement dans un immeuble bourgeois sans immigrés et situé dans un quartier tranquille, une femme de ménage non déclarée, des vacances hors de prix dans un pays pauvre…
 
Il a de l’argent en bourse, très peu en réalité : son entreprise l’a obligé à investir.
 
A son travail, le tutoiement est de rigueur. Il fait en sorte d’être copains-copains avec ceux qui sont moins bien payés que lui mais ne déjeune jamais avec eux.
 
 
Ces petites contradictions n’ébranlent pas sa bonne conscience, l’ « Homme de la Norme » est une heureuse nature : il est sincèrement persuadé d’être un « mec bien ». Et à vrai dire, rien, ni personne ne peuvent entamer l’odeur de sainteté qui plane sur l’« Homme de la Norme ». Ses idées généreuses et altruistes le préservent de toute critique. Il fait partie de la caste des intouchables. D’ailleurs, l’ « Homme de la Norme » jouit d’une bonne image dans les médias : ce qu’il fait bénéficie toujours d’un a priori positif. Et il passe même pour une autorité intellectuelle : ses propos sont parole d’évangile.
 
Le soir, l’ « Homme de la Norme » s’endort sans états d’âme… Et il se lève le matin, le cœur léger car il appartient à la Norme et pour lui, c’est l’essentiel. 


Florence GUERNALEC est journaliste et essayiste. Son récent ouvrage “Panorama de la pensée unique” humain, caustique et lucide, décrit avec perspicacité la pensée unique qui encombre les esprits en France. L’essai en analyse les porteurs, les valeurs, les fondements, les ornières, les suffisances, les auto-satisfactions.

Nous étudierons le compromis médian porté par la pensée unique entre libéralisme et socialisme. Nous nous interrogerons aussi sur le fait que la pensée unique se soit généralisée en France à la Chute du Mur au son de ” toutes les idéologies sont mortes ” alors qu’en réalité, une seule idéologie venait de mourir : le communisme.
 
Cet ouvrage est publié par les éditions Charles COQUELIN :
 

Ce que pense la Norme… 


Sur le Libéralisme
 
Il aime tout et tout le monde sans nuance – excepté la guerre, l’argent, le pape, le Sida, Hitler, l’Amérique, les licenciements et le verglas sur les routes. Il se donne des airs « cool », ne dit jamais « je » mais « nous » : il croit sincèrement parler au nom de tous et a l’assurance de ceux qui s’imaginent avoir forcément raison. Touchez à un de ses cheveux et vous en ferez un martyr… Le militant altermondialiste est une espèce protégée. Tout le monde l’aime, personne n’ose le critiquer. C’est un saint ! Restait à lui trouver un ennemi crédible : le rôle du méchant a été attribué à l’unanimité au Libéralisme. Il lui aura suffit d’un slogan publicitaire – « Le monde n’est pas une marchandise » – pour rendre son cri audible. Aujourd’hui, nul besoin d’échafauder de grandes idées pour être pris au sérieux et faire l’ouverture du journal de 20 heures… Le Libéralisme sera donc « sauvage » ou ne sera pas. Et la société capitaliste sera soumise à la « Loi de la jungle » et à la « Loi du plus fort ». Dans Le « petit Libéralisme illustré » de la Norme, l’image du « renard libre dans le poulailler libre » charrie tous les fantasmes et les peurs des contes pour enfants : les proies faciles symbolisent ici les « honnêtes travailleurs » ; et les prédateurs, les capitalistes. Le prêt-à-penser de la Norme compile un ensemble de formules chocs, faciles à retenir et à emporter partout. A répéter sans réfléchir… Dans cette parodie de procès, ne manquent que les preuves et les éléments à charge. Mais pour l’« Homme de la Norme », l’affaire est entendue, inutile de se justifier : le Libéralisme traîne avec lui une odeur de soufre qui a pour noms, « plans sociaux », « chômage », « précarité », « sans-abri », « injustices sociales »… Conspué et décrié de toute part, le Libéralisme est donc condamné à la peine capitale : dans les réquisitoires, les mots « nazisme » et « fascisme » sont employés comme des injures pour qualifier l’ « horreur » attribuée au Libéralisme et à ses complices. Idéologie et démagogie sont les deux mamelles qui nourrissent les pages Débats des quotidiens et toute une littérature de gare toujours prompte à dénoncer les méfaits de la « bête immonde ».
 
Que savent ces maîtres à penser sur le Libéralisme ? Strictement rien. Ceux qui croient appartenir à l’élite de la France et qui se pressent sur tous les plateaux de télévision pour participer au lynchage, jouent aux économistes comme les enfants jouent au docteur… Parmi ceux qui font le plus de tapage médiatique et vendent le plus de livres, aucun n’a étudié les Sciences Economiques, ni même l’Histoire économique car au fond, aucun ne s’y intéresse vraiment, même entre la poire et le fromage. Aucune de ces « consciences » n’est capable de définir le mot « Libéralisme » encore moins d’en dessiner les contours. Au pays de l’ignorance, ils sont les rois. Et en tant que tel, ils règnent sans partage sur leurs sujets, l’Homme de la rue : ces personnalités médiatiques entretiennent le fantasme que ceux qui dirigent le monde, « veulent la peau » du peuple. Il aura donc suffit que ces maîtres à penser se présentent comme des esprits cultivés, dotés d’une grande intelligence, pour que personne n’ose émettre de doutes sur la probité et la pertinence de leur discours.
 
Si la Norme s’intéressait réellement à l’Histoire, elle saurait que le Libéralisme n’est pas une idéologie : personne n’a inventé le « laisser-faire » – ni la Bourgeoisie, ni des pseudo-économistes à la solde des capitalistes. Lorsqu’il y a 3000 ans avant J-C, les Phéniciens quittaient les rives de Byblos pour vendre leurs marchandises en Méditerranée – déjà les prémices de la mondialisation – ils étaient sans le savoir des libéraux comme Monsieur Jourdain déclamait de la prose. Le Libéralisme s’est naturellement imposé comme LE mode de développement du commerce et des échanges. Autrement dit, le Libéralisme est aussi vieux que l’Economie car le Libéralisme, c’est l’Economie – et inversement. Au début de l’industrialisation au XVIIIe siècle, les penseurs commencent à s’intéresser aux pratiques et usages en cours dans le commerce : ils découvrent alors les « lois naturelles » de l’économie à savoir la libre circulation des Hommes et des biens, le libre-échange des marchandises et la liberté des prix. Pour qu’il y ait transaction sur un marché, vendeurs et acheteurs doivent s’entendre sur le prix. Les premiers économistes mettent ainsi en évidence que le prix de vente d’une marchandise est déterminé par sa valeur d’échange (et non par sa valeur d’usage). Et ce prix évolue en fonction de la loi de l’offre et de la demande. Le revenu d’un individu et par extension la richesse des nations, proviennent donc de la vente de biens et de services. Par leur commerce, les entrepreneurs contribuent au développement économique de la société et au progrès car non seulement, ceux-ci retirent un salaire de leur activité mais ils enrichissent indirectement les différents agents économiques – ménages, entreprises, Etat – par leur consommation et les impôts prélevés sur leurs revenus.
 
La Norme se moque pas mal des « lois naturelles » de l’économie. Elle préfère s’enflammer pour des idéologies échafaudées par des esprits révoltés et utopiques. Les différents courants antilibéraux qui fleurissent en France à partir de la fin du XVIIIe, remettent en cause la Révolution industrielle comme source de progrès. Les premiers Socialistes proposent de remplacer la société capitaliste par une « société harmonieuse » au service de tous qui supprimera la concurrence entre les producteurs et les rapports de force entre les classes sociales. Ainsi naît l’idée d’une économie planifiée, débarrassée de la propriété privée et de capitalistes accusés d’être à l’origine des inégalités sociales. Pour la Norme, l’économie doit être contrôlée et orientée par l’idéologie, et les libertés du commerce, restreintes.
 
En Russie, les Communistes mettent en œuvre ce programme révolutionnaire en collectivisant les moyens de production. Le patronat est remplacé par une superstructure politique qui fixe les orientations et objectifs des entreprises sans consulter le peuple. Dans cette société planifiée, l’offre est donc totalement déconnectée de la demande : en clair, les producteurs ne tiennent pas compte des désirs des consommateurs et les prix ne sont pas fixés par le marché. Résultat la majeure partie des marchandises produites ne trouve pas acheteur. Sans ventes, l’argent nécessaire pour faire fonctionner les chaînes de production et payer les travailleurs, fait défaut. Et comme les entreprises sont en situation de monopole, elles ne sont pas incitées à fabriquer de nouveaux produits susceptibles d’intéresser les consommateurs, ni même à améliorer la qualité des biens qu’elles produisent. Enfin, les individus ne retirent aucun bénéfice personnel de leurs efforts : dans ce système, les ouvriers ne peuvent, en effet, espérer de meilleurs salaires et une amélioration de leur niveau de vie puisque les résultats financiers de leur usine comme ceux de l’ensemble de l’économie nationale, sont médiocres. Bref, l’idéologie socialiste « marche sur la tête » car elle défie toutes les « lois naturelles » de l’économie.
 
La Norme française ne retient pas les leçons de l’Histoire. Elle s’obstine à faire une lecture idéologique des événements au lieu d’examiner les faits : ainsi, les hommes politiques attribuent la crise économique des années 70 au Libéralisme qui fait une fois encore figure de coupable idéal. Or le ralentissement de la croissance ne provient pas de la dérégulation des marchés et de la mondialisation comme elle l’affirme mais du déclin du secteur industriel qui détruit désormais plus d’emplois qu’il n’en crée. La Norme oublie que pendant les trente glorieuses (1945-1975), le Libéralisme est synonyme de plein-emploi, de progrès social et d’augmentation constante et significative du niveau de vie des ménages. Et pourtant, tous les hommes politiques français militent pour moins de Libéralisme et plus de sociale-démocratie. La version imaginée par Valery Giscard d’Estaing s’apparente à un cocktail exotique composé d’un tiers de Libéralisme, un tiers de Communisme et un tiers d’improvisation : en clair, le secteur privé est étroitement encadré par un Etat omnipotent qui pèse sur tous les rouages de la vie économique et sociale, et le barman Giscard jongle maladroitement avec les deux liqueurs. Cette politique marque l’apogée de l’Etat providence cher aux partis de la Norme qui vont se succéder aux affaires. Au final, le cocktail magique concocté par la Droite a un goût amère puisque la pression fiscale augmente lourdement, le chômage aussi. Et rien n’est fait pour favoriser l’émergence de nouveaux secteurs économiques créateurs d’emplois.
 
Mai 81 sonne l’heure de la « rupture avec le Capitalisme ». Après 23 ans d’opposition, la Gauche a les mains libres pour mettre en œuvre la « troisième voie » (ni Libéralisme, ni Communisme) - il ne s’agit en réalité que d’une radicalisation de la politique social-démocrate de Giscard d’Estaing. Le nouveau pouvoir politique rejette l’économie de marché au profit d’un Etat entrepreneur : avec les nationalisations des banques et des principaux groupes industriels du pays, François Mitterrand entend ainsi contrôler l’économie libérale. Le gouvernement espère relancer la consommation et faire baisser le chômage en augmentant les dépenses publiques. La France allait ainsi passer des « ténèbres à la lumière » dixit Jack Lang. L’aventure tourne vite court car le bilan économique et social de cette politique socialo-communiste est désastreux : avec une inflation à deux chiffres, plusieurs dévaluations du Franc, un déficit public et commercial creusés, le pouvoir d’achat des français régresse, le chômage continue de grimper et la France voit apparaître les premiers SDF. Un an après son arrivée triomphale au pouvoir, François Mitterrand est contraint de stopper net l’expérience de la « troisième voie » et de mettre en place une politique de rigueur pour combler les déficits. Les alternatives au Libéralisme meurent jeune…
 
En désaccord avec les nouvelles orientations de la Gauche, le Parti Communiste (PC) claque la porte du gouvernement au début des années 80. Le PC met ainsi fin à la collaboration entamée avec les Socialistes en 1972, avec la signature du « Programme commun ». Au sein de la Norme française, le Communisme jouit toujours du bénéfice du doute, en particulier chez les « mal comprenants ». Malgré la multiplication des témoignages sur la réalité du système, ses plus fervents supporters affirment même que l’URSS est un modèle de société. Officiellement, la vie des soviétiques est un long fleuve tranquille : le pays ne connaît pas le chômage, ni la pauvreté. Les conflits sociaux n’existent pas… Et pourtant, la Norme va se prendre une bonne claque dans la figure : l’histoire commence comme un mauvais jeu de rôles - un pays est partagé en deux, la partie située à l’Ouest est libérale ; celle située à l’Est, communiste. Après quarante ans de ce jeu de massacre, les « joueurs » constatent que l’économie de l’Ouest s’est développée tandis que celle de l’Est restait bloquée au moment où le « jeu » a débuté : le tissu industriel de l’Ouest s’est modernisé et le pouvoir d’achat de ses habitants a augmenté tandis que les conditions de vie de la population de l’Est ont stagné voire régressé au fil des ans… S’agit-il d’une mauvaise science-fiction ou d’un délire imaginé par les libéraux ? Ni l’un, ni l’autre. C’est en fait l’expérience qu’a vécue l’Allemagne de 1949 à 1989. Le mur du Berlin ne permet plus de cacher ce que les esprits libres et clairvoyants savaient déjà depuis longtemps : le Libéralisme, c’est la gestion de l’abondance ; le Communisme, la gestion de la pénurie. Mais pour la Norme française, l’expérience allemande comme toutes les autres vécues dans les pays de l’Est et le tiers-monde, ne prouve rien : selon elle, l’idéal socialiste a partout été dévoyé par une poignée de réactionnaires, rien ne permet de remettre en cause cette idéologie. En France, le Communisme demeure étrangement inattaquable…
 
Les années 80 auront provisoirement mis fin aux illusions des nouilles qui croyaient encore aux « lendemains qui chantent ». Partout où le Communisme a régné, il a échoué lamentablement. Partout où un gouvernement a mis en place une « troisième voie », il s’est pris les pieds dans le tapis : le PIB par habitant des pays libéraux comme les Etats-Unis est plus élevé et augmente plus vite que celui des pays sociaux-démocrates comme la France. Ce résultat n’est pas surprenant puisque les économies libérales enregistrent de meilleurs taux de croissance que les économies administrées, et un taux de chômage inférieur. Rattrapée de plein fouet par la réalité, la Norme française est contrainte d’adapter son discours à défaut de changer radicalement de politique, elle se livre alors à quelques contorsions intellectuelles censées lui éviter de « perdre la face » et de faire son mea culpa : la Norme persiste à condamner fermement le « Libéralisme sauvage » (ou ultra-libéralisme), et invente l’expression de « Libéralisme tempéré » (ou régulé) qui a ses faveurs mais qui ne s’affirme que du bout des lèvres et sur la pointe des pieds pour ne pas effrayer une partie de son électorat. Ainsi, après avoir dénoncé les terribles ravages causés par le Capitalisme, la Norme nous apprend sans crainte du ridicule, qu’il y a désormais un « bon » et un « mauvais » Libéralisme. La bonne blague peut se résumer par la formule du social-libéral Lionel Jospin : « oui à l’économie de marché, non à la société de marché ». Ces acrobaties de langage ne parviennent pas à cacher l’essentiel : par ce demi-aveu, la Norme donne entièrement raison aux adeptes du Libéralisme, même un idiot l’aurait compris. Et les travailleurs réalisent un peu tard qu’on les a trompés, que les manifestations et grèves qu’ils ont organisées contre le système capitaliste, n’ont servi à rien ! Le Libéralisme a gagné la partie sans même avoir eu besoin de se défendre : ses adversaires se sont disqualifiés tout seul.
 
Florence Guernalec


 
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Sur le pouvoir
. Sur la société de consommation
. Sur le sexe
. Sur la morale
. Sur les inégalités et les injustices sociales
. Sur la pauvreté
 
Seconde partie :
Comment survit la Norme
 
. Le mensonge organisé
. La promotion des acquis
. L’utopie européenne
 
. Sortir de la Norme
 
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