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septembre 16, 2018

Énarchie ou L'ENA: une ouverture avec des doctorants

Ce site n'est plus sur FB (blacklisté sans motif), alors n'hésitez pas à le diffuser au sein de différents groupes ( notamment ou j'en étais l'administrateur), comme sur vos propres murs respectifs. 
D'avance merci. 

 L'Université Liberté, un site de réflexions, analyses et de débats avant tout, je m'engage a aucun jugement, bonne lecture. Je vous convie à lire ce nouveau message. Des commentaires seraient souhaitables, notamment sur les posts référencés: à débattre, réflexions...

Merci de vos lectures, et de vos analyses. Librement vôtre - Faisons ensemble la liberté, la Liberté fera le reste. N'omettez de lire par ailleurs un journal libéral complet tel que Contrepoints: https://www.contrepoints.org/ 
Al, 

PS: N'hésitez pas à m'envoyer vos articles (voir être administrateur du site) afin d'être lu par environ 3000 lecteurs jour sur l'Université Liberté (genestine.alain@orange.fr). Il est dommageable d'effectuer des recherches comme des CC. 
Merci


L'énarchie serait-elle en manque ?
La suppression de cette école ne sera pas d'actualité, à titre expérimental, des doctorants pourraient constituer une manne évolutive de hauts fonctionnaires  !
Cela promet !!


Décret n° 2018-793 du 14 septembre 2018 instituant à titre expérimental un concours externe spécial d'entrée à l'Ecole nationale d'administration réservé aux titulaires d'un diplôme de doctorat

JORF n°0214 du 16 septembre 2018
texte n° 1




Décret n° 2018-793 du 14 septembre 2018 instituant à titre expérimental un concours externe spécial d'entrée à l'Ecole nationale d'administration réservé aux titulaires d'un diplôme de doctorat

NOR: PRMG1815582D
ELI: https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2018/9/14/PRMG1815582D/jo/texte
Alias: https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2018/9/14/2018-793/jo/texte

Publics concernés : candidats aux concours d'entrée à l'Ecole nationale d'administration, élèves français et étrangers, stagiaires des cycles préparatoires.
Objet : expérimentation d'un concours externe spécial d'accès à l'Ecole nationale d'administration, ouvert aux candidats titulaires d'un diplôme de doctorat.
Entrée en vigueur : le texte entre en vigueur le lendemain de sa publication. L'expérimentation du concours externe spécial commence à la session 2019 des concours d'entrée à l'ENA.
Notice : le décret prévoit l'expérimentation, pour une durée de cinq ans, d'un concours externe spécial d'entrée à l'Ecole nationale d'administration (ENA) réservé aux titulaires d'un diplôme de doctorat et organisé par spécialités, afin de favoriser le recrutement d'élèves possédant un haut niveau de compétences scientifiques. En outre le décret modifie le décret n° 2015-1449 du 9 novembre 2015 relatif aux conditions d'accès et aux formations à l'Ecole nationale d'administration, notamment concernant les modalités de report des places non pourvues aux différents concours d'entrée à l'ENA.
Références : le décret et le texte qu'il modifie, dans sa rédaction issue de cette modification, peuvent être consultés sur le site Légifrance (http://www.legifrance.gouv.fr).


Le Premier ministre,
Sur le rapport du ministre de l'action et des comptes publics,
Vu le code de l'éducation, notamment son article L. 612-7 ;
Vu le code de la recherche, notamment son article L. 412-1 ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires, ensemble la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
Vu l'ordonnance n° 45-2283 du 9 octobre 1945 modifiée relative à la formation, au recrutement et au statut de certaines catégories de fonctionnaires, notamment son article 8 ;
Vu le décret n° 99-945 du 16 novembre 1999 modifié portant statut particulier du corps des administrateurs civils ;
Vu le décret n° 2007-196 du 13 février 2007 modifié relatif aux équivalences de diplômes requises pour se présenter aux concours d'accès aux corps et cadres d'emplois de la fonction publique ;
Vu le décret n° 2007-1444 du 8 octobre 2007 modifié portant statut particulier du corps des administrateurs de la ville de Paris ;
Vu le décret n° 2015-1449 du 9 novembre 2015 relatif aux conditions d'accès et aux formations à l'Ecole nationale d'administration ;
Vu l'avis de la commission administrative paritaire interministérielle en date du 29 mai 2018 ;
Vu l'avis du Conseil supérieur des administrations parisiennes en date du 30 mai 2018 ;
Vu l'avis du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat en date du 11 juin 2018 ;
Le Conseil d'Etat (section de l'administration) entendu,
Décrète :

  • Chapitre Ier : Dispositions temporaires instituant à titre expérimental un concours externe spécial d'entrée à l'École nationale d'administration réservé aux titulaires d'un diplôme de doctorat

    A titre expérimental et pendant une durée de cinq ans à compter du 1er mars 2019, peut être organisé chaque année un concours externe spécial d'entrée à l'Ecole nationale d'administration, ouvert aux candidats justifiant, à la date de clôture des inscriptions, du diplôme de doctorat défini à l'article L. 612-7 du code de l'éducation ou d'une qualification reconnue comme équivalente à ce diplôme dans les conditions fixées par le décret du 13 février 2007 susvisé.


    Sous réserve des dispositions spéciales prévues par le présent décret, les dispositions du décret du 9 novembre 2015 susvisé sont applicables au concours externe spécial prévu à l'article 1er, aux candidats à ce concours et à ses lauréats.

    Article 3

    Le concours externe spécial est organisé par spécialités.
    Il comprend une ou plusieurs épreuves d'admissibilité et des épreuves d'admission.
    La liste des spécialités susceptibles d'être offertes ainsi que la nature, la durée, les coefficients et le programme des matières des épreuves d'admissibilité et d'admission sont fixés par arrêté du ministre chargé de la fonction publique, après avis du conseil d'administration de l'Ecole nationale d'administration.


    Les modalités d'organisation ainsi que les spécialités offertes au concours externe spécial sont fixées chaque année par l'arrêté prévu au premier alinéa de l'article 3 du décret du 9 novembre 2015 précité.


    Le nombre de places offertes par spécialité au concours externe spécial est fixé par l'arrêté prévu au premier alinéa de l'article 2 du décret du 9 novembre 2015 précité.
    Pour l'application du deuxième alinéa de cet article, ces places sont prises en compte au titre des places offertes au concours externe et au titre des places offertes aux trois concours.
    Pour l'application du troisième alinéa de cet article, il en est également tenu compte dans le total des places offertes aux trois concours.
    Pour l'application du quatrième alinéa de cet article, il ne peut y avoir de report de places non pourvues des concours prévus aux 1°, 2° et 3° de l'article 1er du décret du 9 novembre 2015 précité sur le concours externe spécial. Le président des jurys peut, dans les conditions prévues par ce même alinéa, reporter tout ou partie des places non pourvues d'une spécialité du concours externe spécial sur l'une ou plusieurs autres spécialités de ce concours ou sur l'un ou plusieurs des trois autres concours.


    Pour l'application du dernier alinéa de l'article 1er du décret du 9 novembre 2015 précité, une candidature au concours externe spécial est assimilée à une candidature au concours externe.

    Article 7

    Le jury du concours externe spécial comprend, outre le président, six à quatorze membres, dont un binôme dévolu à chaque spécialité ouverte et une personnalité qualifiée dans le domaine du recrutement.
    Le président et au moins deux membres du jury sont communs avec les autres concours d'entrée à l'Ecole nationale d'administration.

    Article 8

    Au moins deux mois avant l'expiration du délai de cinq ans mentionné à l'article 1er, le directeur de l'Ecole nationale d'administration adresse au Premier ministre, après avis du conseil d'administration, un rapport final d'évaluation. Le rapport est ensuite présenté au Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat.
    Ce rapport comporte notamment les éléments suivants :
    1° Le nombre de candidats inscrits au concours externe spécial ouvert aux titulaires d'un diplôme de doctorat, le nombre de candidats convoqués au concours, le nombre de candidats présents et le nombre de candidats absents aux épreuves, en indiquant pour chaque donnée la part des femmes et des hommes ;
    2° Le nombre de candidats admis à l'issue de ce concours, et, le cas échéant, le nombre de candidats admis ayant ensuite renoncé au bénéfice du concours ou ayant abandonné la scolarité à l'Ecole nationale d'administration avant leur première affectation, en indiquant pour chaque donnée la part des femmes et des hommes ;
    3° Les rapports du président des jurys ;
    4° Les appréciations portées par les jurys d'évaluation des élèves en fin de scolarité ;
    5° L'appréciation de la direction de l'Ecole nationale d'administration sur la scolarité de ces élèves ;
    6° Les emplois occupés par les anciens élèves recrutés par la voie du concours externe spécial en fonction et les appréciations portées par leurs employeurs.
    Il fait état, le cas échéant, des contestations et des contentieux auxquels l'expérimentation a donné lieu.
    Ce rapport propose au Premier ministre le maintien, avec ou sans limitation de durée, du concours externe spécial en l'assortissant de modifications éventuelles, ou l'abandon de cette mesure.


    Les dispositions du deuxième alinéa de l'article 9 du décret du 16 novembre 1999 susvisé et du deuxième alinéa de l'article 7 du décret du 8 octobre 2007 susvisé s'appliquent respectivement aux administrateurs civils et aux administrateurs de la ville de Paris recrutés par la voie du concours externe spécial.

  • Chapitre II : Dispositions à caractère permanent modifiant le décret n° 2015-1449 du 9 novembre 2015 relatif aux conditions d'accès et aux formations à l'École nationale d'administration
    Article 10

    Le décret du 9 novembre 2015 précité est ainsi modifié :
    1° Au quatrième alinéa de l'article 2, les mots : « dans la limite du dixième des places offertes à ce concours » sont remplacés par les mots : « dans la limite de trois places offertes à ce concours » ;
    2° A la première phrase de l'article 23 et de l'article 35, après les mots : « l'Ecole nationale d'administration », sont insérés les mots : « ou de la Banque de France ou d'établissements publics assurant pour les agents de la fonction publique une formation statutaire initiale dont les stagiaires du cycle préparatoire ont réussi un des concours » ;
    3° A l'article 36, les mots : « chaque année » sont remplacés par les mots « et actualise » ;
    4° Au dernier alinéa de l'article 40, la référence au II de l'article 38 est remplacée par la référence au III de l'article 38.

    Article 11

    Le ministre de l'action et des comptes publics et le secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'action et des comptes publics sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.


Fait le 14 septembre 2018.


Edouard Philippe

Par le Premier ministre :


Le ministre de l'action et des comptes publics,

Gérald Darmanin


Le secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'action et des comptes publics,

Olivier Dussopt

 





L'énarchie désigne le gouvernement de la France par les énarques, hauts fonctionnaires sortis de l’École nationale d’administration (ENA). 
Le terme péjoratif d'énarchie a été forgé par Jean-Pierre Chevènement (sous le pseudonyme de « Jacques Mandrin ») dans son livre L’Énarchie ou les Mandarins de la société bourgeoise (1967).  

L’École nationale d’administration est une grande école française créée en 1945 pour démocratiser l'accès à la haute fonction publique de l'État. La "nécessité" d'une telle école trouve son origine dans le Régime de Vichy, qui inaugure déjà une prise de pouvoir de la technocratie, formalisée ensuite à la Libération avec la création de l'ENA :
L’originalité du Régime de Vichy est aussi l’arrivée en force de « technocrates », hauts fonctionnaires vite promus et qui rêvent de mettre en œuvre, sans contre-pouvoirs, leur programme de modernisation. (Jean-Marc Dreyfus, Dictionnaire de la Shoah, Larousse, 2015)
Ce système rappelle le système du mandarinat en Chine, qui dura de 605 à 1905 : une sélection (examens mandarinaux) déterminait qui de la population pouvait faire partie de la bureaucratie d'État. Ce système de recrutement par concours dans la fonction publique est inspiré des examens impériaux, ayant été ramené de Chine par les Jésuites, qui l'avaient adopté dans leurs écoles avant d'être repris et généralisé par Napoléon afin de créer une nouvelle élite destinée à remplacer celle de l'Ancien Régime.
Pour Bernard Zimmern, le premier triomphe de l'énarchie date de la présidence de Valéry Giscard d’Estaing en 1974. La haute administration française « ignore ce qu’est réellement une entreprise, forme de beaux parleurs, brillants, mais des gestionnaires incapables. »

Critiques

  • l'énarchie favorise l'endogamie oligarchique des élites françaises (cooptation des anciens élèves au sein de la sphère publique, parapublique et privée) ;
  • l'ENA ne forme pas des spécialistes mais des hauts fonctionnaires qui seront parachutés à la tête des grandes entreprises nationales sans expérience de la gestion d’une entreprise ;
  • elle ne favorise ni la mixité sociale ni l'efficacité ;
  • par son conformisme et son conservatisme, elle paralyse le pays et l'Etat, en empêchant les réformes libérales et en maintenant, voire accroissant, les privilèges, le corporatisme, l'assistanat et le capitalisme de connivence ;
  • comme cela se produisit dans le système de mandarinat chinois, les membres de l'élite (les "lettrés") passent davantage de temps à chercher à accroître leur influence et à se combattre entre eux qu'à permettre aux libertés de progresser dans le pays ;
  • le "paritarisme", hérité du programme politique du CNR, conduit à une gestion de type soviétique de tous les organismes publics et parapublics, où les hauts fonctionnaires n'ont pour interlocuteurs que les syndicats ; cette gabegie généralisée (gaspillages, grèves...) se fait sur le dos du contribuable.

Bibliographie

  • 1967, L’Énarchie ou les Mandarins de la société bourgeoise, Jacques Mandrin (Jean-Pierre Chevènement), La Table ronde de Combat
  • 2007, Les Lunettes à Frédéric, ou : le Voyage au bout de l’État, Emile Jappi (René de Laportalière), éd. du Chef-d'oeuvre
  • 2012, Promotion Ubu roi - mes 27 mois sur les bancs de l'ENA, Olivier Saby, Flammarion
  • 2015, La ferme des énarques, Adeline Baldacchino, Michalon
  • 2017, Ce que doit faire le prochain président (chapitre 10 : Supprimer l'Éna), Agnès Verdier-Molinié, Albin Michel

Voir aussi

Citations

  • L'omnipotence napoléonienne de l'Etat fut longtemps, en France, tempérée par l'inefficacité bonasse des fonctionnaires. (...) La création, en 1945, de l'Ecole Nationale d'Administration a changé tout cela. Détournant le courant des forts en thème de l'enseignement des Lettres au lycée de Bourg-en-Bresse, elle l'a précipité dans les canaux desséchés de ce grand corps assoupi mais si consubstantiel à la nation : l'Administration. (Jean-Pierre Chevènement, 1967)
  • C'est l'Énarque qui représente maintenant dans notre pays le visage quotidien du pouvoir. (...) Comme autrefois le latin dans l'enseignement secondaire, l'agilité verbale est ici devenue une fin en soi de l'enseignement parce qu'elle est un critère et un attribut social. (Jean-Pierre Chevènement, 1967)
  • Le but essentiel du processus de sélection est de trier les gens en fonction de leur total manque d’originalité et de leur capacité à apprendre et à répéter des enseignements dont personne en dehors d’eux ne peut comprendre l’intérêt. Voila qui est absolument nécessaire quand l’on veut choisir des gens sans originalité qui devront suivre des règles établies en dehors d’eux, sans poser de questions. (...) Le non sequitur de base en France est : "Je suis sorti premier de l’ENA, donc je suis plus intelligent que vous qui n’avez pas fait d’études", ce qui  est loin d’être certain. (Charles Gave, 2013)
  • La caste technocratique, à la différence des autres, n'a aucune légitimité. La France n'avait pas besoin d'énarques. Ils se sont emparés du pouvoir à la faveur d'une erreur historique du général de Gaulle, qui s'est tout simplement trompé d'époque, même si l'on peut comprendre, à la lumière du passé récent de la France, pourquoi il l'a commise. Et s'ils sont devenus féroces, c'est parce qu'ils savent bien, au fond d'eux-mêmes, qu'ils sont des imposteurs. Leur pouvoir ne repose sur aucun support historique, sur aucun soubassement économique ou culturel, sur aucun service rendu au pays par leurs ascendants au fil des siècles. C'est un pouvoir arbitraire et cupide, artificiellement plaqué sur le pays et qu'il conduit à sa perte. Sans aucun scrupule, il adopte pour seuls moyens de gouvernement ceux qui ne visent qu'à abaisser le peuple, à le priver de sa liberté et de sa dignité. Ces gens sont allés trop loin pour reculer. Ils sont bien décidés à garder le pouvoir de toutes les façons possibles, fût-ce au prix d'une lutte à mort. Et ce sont de tels "partenaires" que les membres du camp de la liberté veulent influencer de l'intérieur ! (...) Il est donc évident que les énarques de droite n'ont pas d'autre choix, pour garder leur pouvoir et leurs privilèges, que d'utiliser le meilleur outil qu'ils puissent trouver à cet effet, la dictature socialiste. (Claude Reichman, Le secret de la droite, 2003)
  • Puisque l'économie semblait vouloir leur échapper, il ne leur restait plus qu'à l'investir. Ce qu'ils firent sans aucune difficulté. Pour une entreprise ayant des relations quotidiennes avec l'administration et travaillant peu ou prou pour l'Etat, l'engagement, à sa direction, d'un "grand commis" paraît, au début, une excellente affaire. Muni d'un bon carnet d'adresses, où figurent ses pairs et compagnons demeurés au sein des cabinets ministériels et de la haute administration, l'énarque devenu patron fait merveille pour desserrer les contraintes et décrocher les marchés. Son pouvoir régalien s'est certes réduit, mais il bénéficie d'une rémunération sans commune mesure avec celle d'un haut fonctionnaire et il prend goût à une vie où il peut jouir d'un confort qu'il n'avait jamais connu jusque là. Il n'a d'ailleurs pris aucun risque en quittant l'administration, puisqu'il peut y revenir quand il veut. La règle vaut tout aussi bien pour l'énarque devenu député que pour celui qui s'est dirigé vers l'entreprise. Le sein douillet de la fonction publique est prêt à le recueillir à tout moment. Il aura même monté en grade pendant son absence. Cette disposition en apparence secondaire est en fait essentielle pour comprendre la facilité avec laquelle les énarques se sont emparés de tous les rouages politiques du pays. (Claude Reichman, Le secret de la droite, 2003)
  • La première promotion de 1946-1947 comptait 86 énarques. La France en compte environ 5.000 aujourd'hui et, durant ce laps de temps, la dépense publique est passée de 35% à 57% du PIB. Selon les statistiques de la promotion Léopold Sédar Senghor, 27,7% des postes des grands corps de l'État (Cours des comptes, Conseil d'État, inspection des finances) sont occupés par des enfants d'énarques. (...) L'ENA est bien le symbole de cette idée que l'État et les administrations publiques en général (centrales, locales et sociales) sont toujours légitimes quoi qu'ils fassent. La seule idée d'évaluer vraiment leur missions ou actions équivaut à remettre en question la nécessité même de leur existence. (Agnès Verdier-Molinié, Ce que doit faire le prochain président)
  • Comme tous ceux qui avaient reçu ma formation et suivi mon parcours professionnel, c’était inconsciemment que j’étais devenu un homme malfaisant. (René de Laportalière, Les Lunettes à Frédéric, ou : le Voyage au bout de l’État, 2007)
  • J'aimerais mieux que mon fils apprît aux tavernes à parler, qu'aux écoles de la parlerie. (...) Hors de ce batelage, ils ne font rien qui ne soit commun et vil. Pour être plus savants, ils n'en sont pas moins ineptes. (Montaigne, Essais)
  • Il ne sait rien ; il croit tout savoir — cela présage clairement d'une carrière politique. (George Bernard Shaw)
  • La grande spécificité de ces établissements d’enseignement est qu’ils étaient les premiers à ne plus former des individus intellectuellement pour les préparer à exercer des métiers de services divers (juridiques, médicaux, financiers...) mais pour les préparer à gouverner. Par ce réseau d’établissements, la France espérait produire une élite destinée exclusivement au gouvernement : les technocrates. Fort naturellement, cette élite se retrouva immédiatement en concurrence avec les élites politiques traditionnelles de la Troisième République : les professions libérales. (...) Par conséquent, depuis soixante dix-ans, l’on a progressivement remplacé une élite de producteurs, au sens économique, par une élite de prédateurs, substitué au gouvernement de ceux qui par nature font autre chose le  gouvernement des gens qui ne savent rien faire d’autre que gouverner. Et cette mutation se manifeste clairement lorsque l’on compare, comme nous l’avons fait, les résultats de la IIIe République et ceux de la Ve. (Philippe Fabry, 22/10/2015)

Liens externes





 
« Inaptocratie : un système de gouvernement où les moins capables de gouverner sont élus par les moins capables de produire et où les autres membres de la société les moins aptes à subvenir à eux-mêmes ou à réussir, sont récompensés par des biens et des services qui ont été payés par la confiscation de la richesse et du travail d'un nombre de producteurs en diminution continuelle. »






avril 15, 2015

Des économistes keynésiens, Bercy et l'égalitarisme...et la France qui plonge !! Débat avec Bernard Zimmern.

L'Université Liberté, un site de réflexions, analyses et de débats avant tout, je m'engage a aucun jugement, bonne lecture, librement vôtre. Je vous convie à lire ce nouveau message. Des commentaires seraient souhaitables, notamment sur les posts référencés: à débattre, réflexions...Merci de vos lectures, et de vos analyses.

 Mais ou sont cher(e)s ami(e)s les économistes libéraux ??



Sommaire:

A) De bons partis politiques sans bons économistes ? - Emploi 2017 - par Bernard Zimmern

B) Bernard Zimmern - Wikiberal

C)  Changer Bercy pour changer la France, de Bernard Zimmern - Lesobservateurs.ch et Le blog de Francis Richard

D) L’Obsession antilibérale française - Nicolas Lecaussin - Capitalisme: cette France où l’Etat est roi - Par Christine Kerdellant


Emploi 2017

A) De bons partis politiques sans bons économistes ? 
 
Les grands partis politiques sont en train de s’étriller en prévision des prochaines élections régionales et surtout en vue de la présidentielle de 2017, en nous parlant de rassemblement, de menace créée par le succès de l’autre parti ; les campagnes politiques sont devenues des jeux d’ombres où chacun cherche à cacher l’autre mais où l’on chercherait vainement l’esquisse d’un programme économique capable d’amener notre redressement.

Ne parlons pas du parti au pouvoir ; il est certes encourageant de voir des jeunes socialistes essayer de se sortir des vieilles chimères et de tenter en France un socialisme renouvelé à la Tony Blair. Tout en se demandant si c’est possible lorsqu’on voit un Tony Blair, millionnaire, revenir au secours du leader du Labour, Ed. Miliband, dont la campagne pourtant ressort toutes les vieilles lunes socialistes. À voir les résistances qui ont accompagné le projet pourtant plus que mesuré qui a agité les sphères politiques il y a quelques semaines en France, et ont forcé le gouvernement à passer d’un texte avec une centaine d’articles à plus de 200 pour tenter d’accommoder ses opposants internes (y compris un amendement permettant aux départements d’outre-mer de modeler leurs jours de congés pour s’adapter aux mœurs –et religions ?- locales), on peut se demander si le chômage a des chances des régresser malgré une embellie internationale annoncée.

Mais le plus grave n’est pas que le parti socialiste au pouvoir n’ait pas fait les politiques qu’auraient dû mener ses adversaires, c’est que ses adversaires ne savent toujours pas quelles politiques économiques ils devront mener s’ils reviennent au pouvoir.

Et, dans une certaine mesure, on peut les excuser, car pour qu’un parti propose de bonnes politiques, encore faut-il que les économistes qui le conseillent aient eux-mêmes les bonnes idées.

Or, l’expérience de 2007 n’a pas été très concluante sur ce point.
Se rappelle-t-on que les remèdes proposés à l’époque étaient la fusion des régimes d’embauche, CDD et CDI en un seul (nous n’avons jamais eu de réponse au pourquoi), la fusion de l’ANPE avec les ASSEDIC (qui ont amené à fusionner un organisme qui marchait encore assez bien avec le désastre que nous dénonçons depuis 20 ans, qui ne sert qu’à faire tourner les chômeurs et aux politiciens à s’abriter derrière un organisme d’État pour cacher leur impuissance : l’ANPE ?) Ou, un peu plus tard, de supprimer les publicités payantes sur les chaînes de télévision publiques ? Et nous oublions certainement les plus croustillantes qui ont été emportées par le vent de l’histoire.

C’est d’ailleurs un des traits de l’évolution des partis que des mesures précises soient mises dans les programmes. La force des leaders de parti sous la troisième et la quatrième république n’était pas leur capacité à proposer les bonnes mesures mais à formuler les bons rêves, à nous présenter leur programme, non par les moyens à mettre en œuvre mais par les résultats : plus d’égalité, plus de justice, augmenter le pouvoir d’achat, avoir une défense forte, etc.

L’art d’un leader politique est de savoir par son discours nous faire croire que ce qui est en fait des vœux pieux, les anglophones disent un « wishfull thinking », est l’action qu’il va mener.

Pour le retour au plein emploi, nous en sommes à peu près au même point, non seulement de la gauche qui n’a jamais su, car son rôle à elle n’est pas de créer de la richesse mais de la distribuer, mais de la droite qui n’a jamais su non plus comment on créait de vrais emplois et pas seulement des fictions, et qui depuis 2002 n’a jamais su que copier la gauche en créant des petits boulots. Rappelons la SARL à 1 euro de Renaud Dutreil, l’aide à la personne de Jean-Louis Borloo dont les rapports de la Cour des comptes montrent que les emplois créés se chiffrent seulement en quelques dizaines de milliers et ont coûté extrêmement cher, etc.

Pourtant, n’importe quel économiste pourrait se demander pourquoi toute la chaîne des entreprises françaises est atteinte de nanisme, pourquoi malgré les milliards qu’a dépensé l’État à travers la Caisse des Dépôts ou Oséo, maintenant la BPI, nos entreprises françaises restent naines, que nous ne voyons pas, non seulement la création d’entreprises et d’emplois nouveaux sombrer à des niveaux (rappelons 26.000 entreprises employeuses et 100.000 emplois créés en France contre 200.000 et 500.000 au Royaume-Uni) qui traduisent l’absence de toute politique ou même la haine de toute création, mais que les PME ne parviennent pas à grossir, que les ETI en nombre et en volume en sont restées depuis 20 ans à peu près au même niveau, c’est-à-dire à moins de la moitié de l’Allemagne ? Malgré la loi de François Fillon reconnaissant le titre officiel d’ETI ? Malgré encore une fois les campagnes menées et les milliards d’argent public dépensés par l’État pour lutter contre ce nanisme ?

La réponse sera certainement que l’État n’a pas fait assez, qu’il aurait fallu investir plus.

La réponse sera certainement qu’il faudrait plus d’aides et d’interventions.

Errare humanum est, perseverare diabolicum : L’erreur est humaine, mais persister dans l’erreur par arrogance, c’est diabolique (wikipedia).

Il intéresse certainement nos hommes ou femmes politiques de gagner les élections, mais il intéresserait encore plus leurs électeurs qu’ils sachent s’entourer d’économistes capables de leur indiquer les voies qui permettent de créer des entreprises championnes de croissance, pas seulement des zombies.

par Bernard Zimmern


Nombre d’entreprises par taille en Allemagne et au Royaume-Uni par rapport à la France en 2009 (France = 100% pour chaque catégorie)




B) Bernard Zimmern - Wikiberal

Bernard Zimmern, né le 8 juin 1930, est un entrepreneur et un militant libéral conservateur français, fondateur de l'iFRAP.  
l est diplômé de l'école polytechnique (promotion 1949) et de l'école nationale d'administration (ENA). Il avait été précédemment lauréat du concours général de physique et de version latine.
Il travailla principalement chez Renault puis à la CEGOS dont il fut le directeur du département Recherche et Développement pendant 10 ans. Il fut également ultérieurement président-fondateur de la société OMPHALE et de Single Screw Compressor Inc. (USA) pour lesquels il déposa de plus de 500 brevets dans le domaine des compresseurs rotatifs.
En plus de son activité professionnelle, il est engagé dans le débat d'idées en France; en particulier, il a fondé l'Ifrap (iFRAP) en 1985 sur ses fonds propres. Le but de l'organisme est de juger l'efficacité de la dépense publique, en particulier par le recours au benchmarking international. Il a également participé à la fondation de l'association de défense des contribuables Contribuables Associés en 1990, sur une idée de François Laarman.

Récompenses

Pour ses travaux de recherche, il a reçu la Médaille Giffard de la Ville de Paris en 1989, récompensant sa contribution au prestige de la mécanique française à l'étranger, ainsi que la médaille d'or du Refrigeration Institute de Londres en 1977[1]. Pour la fondation et le développement de l'iFRAP, il a reçu le Prix renaissance de l'économie, attribué par Michel de Poncins (économiste et président de Catholiques pour les libertés économiques).




C)  Changer Bercy pour changer la France,
 
Bernard Zimmern, avec l'assistance de Dominique Mercier et Valérie Pascale, vient de publier un livre à contre-courant des économistes en vogue, des égalitaristes tels que Joseph Stiglitz ou Thomas Piketty, qui, obsédés par la chasse aux inégalités, ne comprennent rien au processus de création de richesses et induisent en erreur ceux qui se laissent séduire par leurs thèses basées sur l'envie.


Pour ces prétendus économistes, le riche, surtout américain, voilà l'ennemi, surtout le très riche, et, davantage encore, le très très riche, qui serait un rentier, un profiteur des richesses créées par d'autres. Or, manque de chance, ces très très riches, ces milliardaires américains, sont en grande proportion des entrepreneurs dont les aïeuls étaient pauvres ou sans fortune notable.



Bernard Zimmern montre, chiffres à l'appui, l'imposture de ces prétendus économistes. En effet ils voient que la croissance des revenus des très riches est plus rapide que la moyenne, mais ne voient pas que ce sont ces très riches qui font la croissance en créant des richesses et des emplois.

Ces prétendus économistes ne voient pas non plus que, si la croissance est toujours plus forte aux Etats-Unis qu'en Europe et que le chômage y est moindre, c'est qu'aux Etats-Unis il y a davantage de milliardaires en proportion qu'en Europe et que ces milliardaires y sont, en outre, en plus grande proportion des entrepreneurs.

Ceux qui créent le plus d'emplois, ce sont toutefois les millionnaires, donc les très riches, qui, aux trois quarts, sont des entrepreneurs individuels et représentent plus de la moitié de la fortune industrielle et de l'investissement américains.

Parce que ces entrepreneurs, qui risquent leur fortune personnelle, sont mis à l'index par l'administration Obama, et menacés par les dirigeants démocrates, et parce qu'ils sont écoeurés , la reprise américaine est plus lente et plus hésitante qu'elle n'aurait pu l'être...

Vous avez dit risque? "Le concept de risque est totalement étranger à des professeurs d'université dont la paie est assurée jusqu'à la fin de leurs jours." C'est pourtant le risque, souvent considérable, que prennent les entrepreneurs qui fait la force d'une économie et qui peut être aussi bien à l'origine de leur fortune que de leur chute.

Quand ces prétendus économistes parlent de justice sociale, ils oublient justement le risque pris par les entrepreneurs, qui se traduit pour eux par une plus grande instabilité de revenu que celle d'un salarié: un entrepreneur a certes plus de chances qu'un salarié de grimper l'échelle des revenus, mais il a aussi plus de chances de la dégringoler.

Qui sont-ils ces économistes, ces égalitaristes? Ils sont tous fonctionnaires: "Ils réalisent le rêve de tout fonctionnaire: appartenir au secteur public et garder la garantie de l'emploi, mais avec les avantages du secteur privé."...

Si ces égalitaristes promeuvent la redistribution, celle-ci n'améliore pas pour autant réellement les conditions d'existence des plus pauvres et des plus déshérités. Ils n'en perçoivent qu'une partie en espèces, tandis qu'une petite minorité, appartenant au secteur public, perçoit la plus grande partie de la redistribution en nature...

Pour étayer leurs propos sur les inégalités croissantes en France, ces égalitaristes trichent avec les statistiques et ne retiennent que les éléments qui vont dans le sens de leurs thèses. Ainsi ils ne tiennent pas compte par exemple dans l'évolution des revenus des revenus de la redistribution ou ils y intègrent au contraire les bénéfices non distribués.

Quand ces égalitaristes font des comparaisons de patrimoine, ils ne prennent pas en compte l'âge des détenteurs, de même qu'ils ne tiennent pas compte des capitaux correspondant aux rentes de retraites versées ou des autres prestations sociales perçues, lesquels réduisent pourtant les inégalités entre riches et pauvres.


Il n'est pas besoin d'être Einstein pour comprendre qu'en démocratie les voix des pauvres sont plus nombreuses que celles des riches et qu'en conséquence la redistribution sous forme d'avantages en espèces ou en nature, est le moyen le plus efficace pour se faire une clientèle électorale.

La redistribution est aussi un alibi moral pour les étatistes, qui présentent ce vol des uns pour remplir la poche des autres, sous les traits vertueux de la justice sociale et qui, en fait, substituent l'immorale solidarité forcée des programmes étatiques à la philanthropie volontaire des anglo-saxons.

Bercy est une forteresse imprenable et l'instrument implacable de la redistribution. Le donjon de cette forteresse, c'est la Direction de la Législation Fiscale. C'est cette dernière qui décide de la politique fiscale du pays et l'impose au Parlement qui n'a pas les moyens de s'y opposer. D'autant que ses contrôleurs sont tous issus de Bercy... Quant à la Cour des Comptes, ses membres sortent de la même école que ceux qu'ils examinent...

Comment apprécier la valeur des fonctionnaires de Bercy? Comme il n'existe pas d'instrument de mesure au sein de cette entité, un moyen simple de les jauger est de voir ce qu'ils donnent quand ils dirigent des entreprises privées. Là les contre-performances des Pierre-Yves Haberer, Jean-Marie Messier, Michel Albert ou autres Alain Minc sont éloquentes et se passent de commentaires...

Bercy décide donc en fait du sort de 63 millions de Français. Le malheur est que les agents de Bercy ne connaissent rien à l'entreprise, pour la bonne raison qu'ils n'y ont jamais travaillé. Aussi toutes les mesures qu'ils cogitent depuis trente ans pour favoriser l'emploi - formation, insertion etc. - sont-elles surtout créatrices de chômage. Parce que, selon Bernard Zimmern, ils ne savent pas notamment que seules les entreprises nouvelles créent des emplois...

Pour terminer, Bernard Zimmern raconte toutes les batailles pour l'emploi et pour les Business Angels qu'il a menées de 2002 à 2012 sous un gouvernement dit de droite. Toutes ont été des échecs, parce qu'il n'est pas acceptable pour Bercy d'"encourager les riches à s'enrichir"... Or il ne sert à rien de chercher à réduire la dépense publique si, parallèlement, on ne favorise pas justement la création d'entreprises nouvelles...

Selon l'auteur il faut donc que Bercy accepte d'aider les riches à devenir plus riches et accepte de ne pas taxer les plus-values de capital à l'impôt sur le revenu. Dans cet ordre d'idée, exempter tout investissement dans une entreprise de moins de 50 salariés et de moins de 10 millions d'euros de chiffre d'affaires d'impôt sur les plus-values serait bénéfique pour l'emploi et ne coûterait rien puisque "toutes les données chiffrées montrent que cette "dépense fiscale" retourne dans les caisses de l'Etat avant d'en être sortie".

Même si les mesures préconisées par Bernard Zimmern sont discutables, elles iraient dans la bonne direction en cas d'adoption. Tant il est vrai que la libération de l'économie est la seule voie qui puisse conduire à la prospérité et que "la voie de l'égalitarisme est celle qui mène à la pire forme d'inégalité: le chômage".

Francis Richard, 11 février 2015


Changer Bercy pour changer la France - Les riches sont la solution, pas le problème, Bernard Zimmern, avec l'assistance de Dominique Mercier et Valérie Pascale, 196 pages, Tatamis
Publication commune Lesobservateurs.ch et Le blog de Francis Richard










D) L’Obsession antilibérale française - Capitalisme: cette France où l’Etat est roi

Et si l’incapacité du pays à se réformer venait de son « obsession antilibérale »? C’est la thèse d’un économiste – libéral, lui – dans un livre où il pointe l’hypertrophie de la puissance publique, de la gauche à la droite, des élus aux élites.
Nicolas Lecaussin, directeur de l’Institut de recherches économiques et fiscales (Iref), d’inspiration libérale, est un auteur prolifique, tout comme l’institut qu’il dirige. Après Cet Etat qui tue la France (Plon, 2005), L’Absolutisme efficace (Plon, 2008), Au secours, ils veulent la peau du capitalisme ! (First Editions, 2009) et A quoi servent les riches (avec Jean-Philippe Delsol, Lattès, 2012), il s’apprête à publier L’Obsession antilibérale française (éd. Libréchange). 


Pour lui, la France s’oppose maladivement au système libéral, à l’inverse de tous les grands pays occidentaux : de Jean-Luc Mélenchon à Marine Le Pen, de François Hollande à Nicolas Sarkozy, tous sont en effet tombés dans le piège du politiquement correct en professant leur haine du libéralisme, quitte à s’accrocher à des recettes qui ont échoué partout ailleurs. 

Dans son livre, dont nous publions ici les bonnes feuilles, Nicolas Lecaussin tente d’expliquer les sources de ce blocage, qui empêche selon lui les hommes politiques français de faire les réformes aptes à sauver notre économie. [Extraits]

Le libéralisme ou la présomption de culpabilité
En France, le mot « social » est la clef de la réussite politique, alors que le mot « libéral » est tabou, car il risquerait de nuire à toute carrière politique. Durant les dernières années de sa présidence, Nicolas Sarkozy a tout fait pour que l’on n’accole pas cette étiquette à son image. « Je ne suis pas le président des riches », répétait-il à longueur de journée, en démontrant qu’il était favorable à une politique « sociale », mais pas « libérale ». Dans la France antilibérale, Sarkozy est resté comme le président libéral… Quelle méprise ! Il était aussi peu attaché à la politique de Margaret Thatcher que ne l’est François Hollande à celle de Tony Blair. 

L’antilibéralisme ne connaît pas les frontières politiques
Les antilibéraux se rassemblent en un pot-pourri complet. Dans le monde politique, de l’extrême gauche à l’extrême droite, en passant par la gauche, le centre et la droite, les idées antilibérales sont omniprésentes. Etre « libéral » est devenu le synonyme d’une accusation terrible et inexcusable, tandis que l’adjectif « libéral » est l’insulte suprême. Les économistes sont en France, à quelques exceptions près, des antilibéraux convaincus et ne s’en cachent pas. Et que dire des intellectuels, de gauche et de droite, en général, qui ont toujours fait de l’antilibéralisme leur principal cheval de bataille? 

L’antilibéralisme a bien nourri surtout le Front national, car, avec son rejet de la mondialisation, c’est son principal fonds de commerce aujourd’hui. Il n’existe aucun autre parti, dont le discours soit plus étatiste, plus antilibéral et plus antimondialiste que celui du FN. […] Un autre paradoxe de cette obsession antilibérale française est que celle-ci perdure au moment où, partout ailleurs dans le monde, les idées libérales gagnent du terrain. […] 

Le président de l’Assemblée nationale, le socialiste Claude Bartolone, a, lui aussi, identifié les vraies causes de la crise économique en France et en Europe. Dans une interview accordée au quotidien Le Parisien (26 juin), il affirme que le président de la Commission européenne, M. Barroso, représente une « erreur de casting ». Il « n’a rien compris au film (sic!). […] Barroso incarne une Europe qui ne correspond plus au monde actuel. C’est l’Europe du XXesiècle, celle de la libre circulation des marchandises et des capitaux, de la marche forcée vers l’austérité. Barroso, ce n’est pas l’Europe du XXIe siècle, plus protectrice, plus préoccupée par la croissance et l’emploi ». Il est vrai que, depuis qu' »elle est plus protectrice et plus préoccupée par la croissance et l’emploi », l’Europe ne cesse de s’enfoncer dans la crise économique et le chômage de masse… 


Les sources de la « pathologie » antilibérale française
Dans un article publié par le Wall Street Journal, j’avais écrit que le meilleur remède pour soigner les banques françaises se trouvait, au contraire de ces méthodes, dans le fait de se détacher de l’Etat, en évitant la mainmise des énarques sur les conseils d’administration. Mon article déclencha alors l’ire des dirigeants de la BNP (des énarques et d’anciens hauts fonctionnaires), qui saisirent l’AMF (Autorité des marchés financiers). Deux ans après ma publication, pas la moindre nouvelle des enquêteurs très efficaces… de l’AMF, qui ne m’ont même pas interrogé!

Pourtant, deux jours après la parution de mon article, le Wall Street Journal publia un éditorial reflétant la position du journal, qui nous apprenait que les banques françaises sont bien à la recherche de dollars, en s’interrogeant sur les compétences de l’Autorité des marchés financiers, saisie par la BNP pour enquêter sur ce genre d’affaire… 

Qui plus est, bizarrement à cette époque, la rédaction du Wall Street Journal recevait un appel téléphonique provenant d’une « haute personnalité politique française », qui se disait « choquée » par mon article qui nuisait « à la BNP et aux banques françaises en général ». Simple coïncidence? Dans mon article, je dénonçais justement la connivence entre les banques françaises et l’Etat ! 

Mais qui avait pu se permettre d’appeler et d’invectiver la rédaction du Wall Street Journal ? Le Canard enchaîné a donné la réponse à ce mystère quelques semaines plus tard : c’était Xavier Musca, le secrétaire général de l’Elysée… Habitué aux pratiques françaises, il n’avait pas hésité à admonester l’équipe du Wall Street Journal pour ce qui lui apparaissait comme une faute professionnelle. 

C’était comme si le directeur de cabinet de la Maison-Blanche appelait à propos d’un article sur la Bank of America. Aux Etats-Unis, il aurait été obligé de démissionner… En France, où les hommes politiques s’invitent dans les médias, ces méthodes d’apparatchiks sont monnaie courante. 


L’Education nationale et les manuels d’économie contre les libertés économiques et l’entreprise
Un sondage réalisé en novembre 2013 par OpinionWay auprès des enseignants du second degré démontre à quel point ceux-ci méconnaissent ou rejettent l’entreprise. Pour 90 % d’entre eux, le premier synonyme qui leur vient à l’esprit lorsque l’on parle de l’entreprise, c’est le mot « stress »! Pour 62 % d’entre eux, c’est le mot « exploitation » ! Les manuels d’économie aussi reflètent cette obsession antilibérale. Parmi les sujets proposés aux épreuves du baccalauréat 2013 figurait la question : « Que devons-nous à l’Etat ? » et « Le conflit social est un facteur de cohésion sociale » (sic). […] Il est remarquable d’observer que, dans les manuels d’économie des classes de première et de terminale, on ne voit aucun portrait d’entrepreneur français ! 

Intellectuels, hauts fonctionnaires, politiques: l’antilibéralisme jusqu’à la moelle
Mais qui sont ceux qui condamnent la France à cette tragédie économique? Un mot suffit pour y répondre : dans l’Assemblée nationale de 2012, presque 2 députés PS sur 3 sont fonctionnaires… tandis que, parallèlement, ils ne sont que cinq chefs d’entreprises! […] C’est un mauvais signe pour l’avenir politique, économique et fiscal de notre pays, même si les décisions importantes ne sont pas prises au Palais-Bourbon. Il n’en reste pas moins vrai que les députés sont les élus du peuple et, dans une démocratie normale, ils devraient jouer un rôle important, surtout dans le contrôle des finances de l’Etat. 


Ainsi donc, les députés de la nouvelle Assemblée sont en grande majorité des fonctionnaires ou dépendent directement, ou indirectement, de l’Etat. Il est donc difficile de leur demander d’instaurer plus de réformes et d’appuyer la baisse des dépenses publiques. Malheureusement, on retrouve la même situation pour ce qui est des ministres, où un seul est issu du secteur privé. Leurs conseillers, tous membres des cabinets ministériels, ne sont pas issus non plus de l’entreprise privée. 

En Grande-Bretagne, sur 621 élus (« Members of the Parliament »), 25,1% sont des chefs d’entreprise et 13,5% sont des cadres du privé. Seulement 9% proviennent du secteur public (fonctionnaires, enseignants, employés, etc.). Il faut préciser une chose importante : le candidat à la Chambre des communes qui travaille dans le secteur public est obligé de démissionner de son administration au moment de déclarer sa candidature, avant même les élections ! Au total, pas moins de 218 professions différentes sont représentées à la Chambre des communes, contre seulement 39 professions différentes à l’Assemblée nationale. 

En Suède, 33% des élus de l’Assemblée (349 membres) peuvent être considérés comme des fonctionnaires et 12% comme des chefs d’entreprise. Toutefois, environ 80% des fonctionnaires suédois sont des contractuels (ils sont embauchés comme dans une entreprise avec des contrats de droit privé). On peut donc difficilement les comparer aux fonctionnaires français… 

Aux Etats-Unis, la profession la plus répandue chez les membres de la Chambre des représentants est celle d’entrepreneur. Sur 435membres, environ 184 (43%) sont chefs d’entreprise. Au Sénat, 28 sénateurs sur 100 proviennent du monde entrepreneurial. Notons aussi que, chez les sénateurs, la profession la plus répandue est celle d’avocat. […] 

La profession la mieux représentée au Parlement du Canada (doté de 308 députés et de 105 sénateurs) est celle… « d’homme (ou de femme) d’affaires ». Ils (elles) sont 59 (soit 20%) à la Chambre des communes, suivis par les avocats, au nombre de 47, les experts conseils, au nombre de 37, les enseignants, au nombre de 31, etc. Au Sénat, les hommes ou les femmes d’affaires sont au nombre de 22 (soit 21% du total), suivis par 19 avocats, 13 enseignants, etc.Au vu de ces comparaisons chiffrées, il n’est pas étonnant de constater que l’appareil législatif de la France est naturellement porté à prendre des mesures étatistes. Il faudrait instaurer chez les élus français une obligation de temps de présence dans l’entreprise privée ; l’économie française s’en porterait mieux ! 

En 2013, 150000 personnes environ travaillaient pour le ministère de l’Economie et des Finances en France (pour une population d’environ 65 millions de personnes), 148000 employés seulement travaillaient pour le Trésor américain et le département du Commerce (pour une population d’environ 315 millions de personnes). Le nombre de fonctionnaires à occuper des fonctions similaires est donc très proche, mais pour une population en France presque cinq fois plus réduite ! 

Même si la comparaison est rendue difficile pour cause de systèmes politiques différents (pays fédéral aux Etats-Unis contre système centralisé en France), on retiendra que le nombre de fonctionnaires est le même du côté américain pour gérer un budget (de dépenses) de 2,449 trillions de dollars, alors que celles-ci se montent en France à 1,353 trillion de dollars ! 

Alors qu’aux Etats-Unis 61,3% des membres de l’élite administrative en charge de l’économie et des finances ont déjà travaillé dans le secteur privé, ils ne sont que 24,6% à Bercy! Ce sont les conclusions d’une étude que l’Iref a publiée en décembre2013. Ce qui montre qu’au sein même de l’administration fiscale, là où l’on décide des impôts des ménages et des entreprises, ceux qui connaissent le fonctionnement de l’entreprise sont extrêmement minoritaires. Comment peuvent-ils savoir ce qui est bon, ou non, du point de vue réglementaire ou fiscal, pour les entreprises !?

Par Christine Kerdellant (source)



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