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novembre 11, 2014

La grande peur de la « défaillance du marché » François-René Rideau et Jean-Louis Caccomo

L'Université Liberté, vous convie à lire ce nouveau message. Des commentaires seraient souhaitables, notamment sur les posts référencés: à débattre, réflexions...Merci de vos lectures, et de vos analyses.



Pour justifier l'intervention de l'État, les étatistes de tout poil, à commencer par les fonctionnaires chargés de la propagande officielle, inventent des scénarios-catastrophes du genre « que se passe-t-il si les fournisseurs de tel type de service font tous faux bond et ne satisfont pas le public? » Ces ratiocinations suivent un modèle standard, et on peut leur donner une réponse standard. 

L'exemple repose systématiquement sur la supposition que la défaillance d'un acteur est une catastrophe irréparable, qu'il n'y a pas un marché national pour pallier les déficiences locales, que toute solution au problème devrait avoir pour base la reconduction des acteurs défaillants et de leurs comportements, etc. Il repose aussi sur des évaluations fantaisistes de ce qui serait économiquement possible, par des personnes qui se veulent extérieures et supérieures au marché. Mais aussi et surtout, ces arguments posent en pétition de principe que l'État est à même de faire mieux et de corriger ces « défaillances du marché » [1]

Or, si un problème est isolé, s'il ne concerne que les frustrations vites oubliées de quelques personnes, franchement, il ne vaut pas la peine d'en parler. Nul ne doit à ces personnes la satisfaction de leurs désirs sinon elles-mêmes. Mais à mesure qu'un problème concerne plus de personnes pendant plus de temps, à mesure que davantage de personnes sont prêtes à allouer davantage de ressources à résoudre ce problème, alors les sommes en jeu croissent, alors la concurrence devient d'autant plus rude pour satisfaire cette demande; aussi, il se trouvera promptement quelqu'un pour remplacer tout acteur défaillant. Ainsi, si par hasard dans un quartier donné tous les acteurs se révélaient insuffisants pour remplir une mission à forte demande, cela serait dans un marché libre une opportunité pour l'émergence d'un nouveau concurrent ou l'implantation d'un concurrent extérieur au quartier. [2]
 
Mais par delà ces considérations de théorie économique, voici selon moi la bonne façon de présenter le principe du marché libre, en termes pratiques. 

Pensez-vous, personnellement, que dans tel quartier, il y a vraiment une forte demande sans réponse? Ma foi lancez-vous! Plutôt que de demander que d'autres résolvent le problème à votre place, qui plus est avec de l'argent prélevé de force sur autrui, ce qui est l'attitude passive d'un esclave ou l'attitude active d'un tyran, prenez vos responsabilités, mettez vos actes en accord avec vos paroles — appuyez vos affirmations putatives par des actions effectives [3]

Si, le premier, vous réagissez et faites une offre qui réponde à la demande, votre entreprise sera couronnée de succès, et cette réussite sera à la fois la reconnaissance de votre talent d'entrepreneur, la récompense des services rendus à tous vos clients, un encouragement à continuer, et la mise à votre disposition de ressources pour exercer davantage votre talent, ici ou ailleurs. Si au contraire, vous n'étiez qu'un arrogant affabulateur, vous ferez faillite, et cette faillite sera à la fois le témoin de votre erreur, l'assurance que vous n'aurez plus les moyens de mettre votre bêtise à l'œuvre, une désincitation à imiter votre erreur pour tous vos émules potentiels. Et si votre faillite était due à l'influence de mauvaises idées ou pratiques qui n'excluent pas que vous ayez eu quelques bonnes idées ou pratiques dans le lot, ma foi, d'autres que vous seront libres de suivre votre exemple sur les points qu'ils croient bons en changeant ceux qu'ils croient mauvais; et vous-mêmes serez libre de trouvez de nouveaux investisseurs pour une nouvelle entreprise amendée, si vous savez les convaincre. Avec un peu de chance, les pertes financières vous seront une sonnette d'alarme et vous permettront de vous corriger avant la sanction finale de la faillite. 

Ainsi, en l'absence d'un monopole ou de réglementations élevant une barrière à l'entrée du marché, il n'y a que des lâches et des hypocrites pour prétendre qu'une demande n'est pas satisfaite. Si vous avez le courage d'une opinion sincère, lancez-vous: le marché libre n'est pas, comme l'État chéri de vos fantasmes, une divinité supérieure de laquelle attendre passivement la salvation; vous faites partie de ce marché libre: si vous voyez mieux que les autres une opportunité, c'est à vous et à nul autre de la saisir [4]; et si vous ressentez plus que les autres un besoin, c'est à vous de rendre attractive l'entreprise de le satisfaire. Et plus la demande est « criante » et plus la solution est « évidente », qui plus est « pour tout le monde », plus vous êtes un lâche, un hypocrite ou un affabulateur de le prétendre et de ne pas vous lancer dans l'entreprise d'y répondre. 

Et si « vous n'avez pas le temps » car votre activité actuelle est tellement plus productive et plus sûre pour vous-même que celle dont vous vous faites le chantre, eh bien engagez les ressources que vous gagnez par ailleurs pour les investir dans cette autre activité que vous prétendez si utile [5]; si comme vous le prétendez tant d'autres personnes ressentent le même besoin que vous, vous n'aurez aucun mal à susciter un fournisseur à votre besoin commun. À défaut de trouver un entrepreneur parmi vous, recrutez-en un. Et s'il faut pour cela fournir des garanties d'investissement à un entrepreneur potentiel, déposez vos fonds et promesses de fonds chez un notaire, avec engagement de les investir ou de les dépenser auprès d'un fournisseur qui satisferait à vos critères, en agréant un juge réputé impartial pour tout litige à ce sujet; si vous collectez assez de fonds assortis de conditions raisonnables, il se trouvera bien quelqu'un pour relever le défi; dans le cas contraire, ce sera la preuve que votre évaluation était erronée, que la valeur accordée par vous et ceux qui ressentent ce « besoin » à la satisfaction de celui-ci ne suffit pas à couvrir les frais de production d'une telle satisfaction, et que vos ressources seront mieux employées ailleurs. 

D'aucuns étatistes mettront en avant l'objection d'un « manque de ressources » des « victimes »: selon eux, les pauvres et faibles « exploités » par les capitalistes, n'ont pas les moyens de créer des concurrents à ces compagnies établies, et seraient ainsi « obligés » de payer « beaucoup plus » à ces fournisseurs « dominants » voire à ce « monopole » que ce que ces services ne coûtent réellement. Si vraiment des consommateurs sont forcés de payer « beaucoup plus » que ce que coûte « réellement » une prestation, c'est donc bien que ce « plus » représente autant de ressources grâce auxquelles ils pourraient non seulement payer le fonctionnement d'un concurrent moins cher, mais aussi financer l'établissement de ce concurrent, et ce d'autant plus vite et avec d'autant plus de bénéfices que ce « beaucoup plus » est « outrageusement » élevé. Bref, si vraiment le scandale était énorme, alors par définition, les ressources pour le faire cesser ne manquent pas; et si un grand nombre de personnes en était conscient, alors l'émergence d'un remplaçant serait facile et rapide. À ce moment, les socialistes mettent en avant « l'impérieuse nécessité » dans laquelle se trouvent les « pauvres » qui n'auraient « pas le choix », pris à la gorge, soumis à leurs besoins immédiats. Mais comment ces pauvres seraient-ils soudain dans le besoin? Sont-ils vraiment aux portes de la mort? N'y a-t-il rien qu'ils puissent sacrifier? Ne peuvent-ils pas se priver qui d'une bière, qui d'une place au cinéma, qui d'un vêtement neuf, qui d'un magnétoscope, qui d'une voiture plus récente, qui d'un appartement plus grand, etc., bref, épargner, le temps qu'il faut pour réunir les fonds nécessaires? Ne peuvent-ils pas emprunter à un taux d'autant plus élevé que l'exploitation est outrageuse et que sa fin les libérera? Si vraiment exploitation outrancière il y avait, les moyens ne manqueraient pas de la faire cesser. Et encore une fois, plus grande la « rente de monopole » supposée, plus urgente cette alarme, plus les victimes seront prêtes à sacrifier pour la faire cesser, et plus rapide sera sa fin. Dans un marché libre, il n'est donc aucunement possible qu'un monopole quelconque puisse rançonner le public et subsister. Dès que le prix d'un fournisseur est « trop » élevé ou que ses prestations sont défaillantes, et à mesure que l'insatisfaction du public est grande, ce fournisseur, sur un marché libre, est condamné à devoir s'améliorer ou disparaître — et vite. 

La « solution » des étatistes est de confier à l'État le soin de « protéger » les faibles. Les socialistes vont jusqu'à réclamer que l'État se fasse fournisseur exclusif. Voilà bien une conclusion absurde fondée sur des hypothèses autocontradictoires autant que sur des sophismes flagrants. Qu'est-ce donc que l'État régulateur, sinon la domination des pouvoirs établis, et le frein à l'émergence de concurrents? Qu'est-ce donc que l'État fournisseur, sinon précisément le monopole, ce cas le pire dont on avait peur que le marché le suscite peut-être? Cette « solution » est précisément le pire possible de tous les maux que l'on prétend écarter. Qui protège contre les prix outrageux et le service désastreux de la part du monopole d'État? Personne. Les citoyens étaient supposés imprévoyants et incapables de s'organiser; comment se défendront-ils alors contre l'État tout-puissant? Pire encore, là où un libre marché reconnaît à une minorité prévoyante le droit de s'organiser pour établir un concurrent au bénéfice de tous, la régulation et le monopole de l'État consistent précisément en l'empêchement et l'interdiction de toute concurrence, en l'emploi de la force pour prévenir toute tentative d'organisation pour faire cesser l'exploitation. 
 
Ce que proclament vraiment les étatistes, c'est qu'ils sont des êtres supérieurs, source de bienveillance, de prévoyance, d'autorité, d'organisation, d'intelligence, dont le commun des mortels est dépourvu; ce qu'ils revendiquent, c'est qu'il faut leur conférer le pouvoir (absolu, dans le cas des socialistes) sur la masse des inférieurs. Derrière toutes les pseudo-justifications, il n'y a rien d'autre que cette revendication aristocratique (et totalitaire, pour les socialistes). Ceux qui voient un problème potentiel dans le marché libre et refusent de voir le même problème en pire dans l'État font deux poids deux mesures. En prétendant que l'État est une solution, ils font une pétition de principe; plus encore, quand on examine en détail le fonctionnement social et sa dynamique, on voit qu'ils vont à l'opposé de la raison. Ce n'est pas qu'ils raisonnent à l'envers — c'est qu'ils ne raisonnent pas, mais croient par superstition, superstition alimentée par la propagande des véritables exploiteurs, les privilégiés de l'État. 

Ceux qui justifient l'intervention politique par des scénarios catastrophes ne comprennent pas plus la nature d'un marché libre que celle de l'État; ils en restent à la pensée magique.[6] La grande peur des « défaillances du marché » n'est autre chose que cette névrose de ceux qui ont peur de la liberté et sa réalité duale, la responsabilité, et qui se cherchent désespérément en l'État un parent, un tuteur, pour les soulager d'avoir à se comporter en adultes [7] — peur alimentée par les voyous qui n'hésitent pas à s'en servir pour étendre leur pouvoir sur tous les hommes, via une majorité d'esclaves volontaires, soumis grâce à leur croyance en Dieu-l'État. 

Par  François-René RIDEAU

Cet article est issu du remaniement d'un billet paru sur mon blog en février 2004. Il a été publié au QL #146 du 15 septembre 2004. 

Notes

[1]: Sur le sophisme de la défaillance de marché (market failure), voir par exemple cet article The Market Failure Myth de D.W. MacKenzie.
[2]: Bien sûr, des réglementations strictes et autres lois protectionnistes peuvent empêcher ou ralentir considérablement cette implantation; mais dans un tel cas, la permanence de la pénurie n'est évidemment pas due à la concurrence (c'est-à-dire à la liberté), mais bien à l'absence de concurrence (c'est-à-dire à l'intervention coercitive de l'État).
[3]: Les américains ont cette excellente expression: put your money where your mouth is, littéralement « mettez votre argent là où se trouve votre bouche »; bref, appuyez vos dires par un engagement concret.
[4]: Dans son article Are Bubbles Efficient?, Robert Blumen raconte cette blague connue, dans laquelle des « économistes » discutant de l'économie en termes de marchés magiquement en équilibre permanent trouvent par terre un billet de cent dollars, et passent leur chemin en disant que si ce billet avait vraiment de la valeur, le marché aurait déjà escompté cette valeur. La morale de l'histoire est que contrairement à ce que suppose l'approche classique, l'équilibre des marchés ne se fait pas magiquement, et n'est pas l'objet fondamental de la science économique. Au contraire, comme l'avance l'approche « autrichienne » de l'économie, l'objet fondamental de la science économique est bien l'action humaine de ceux qui voient et saisissent les opportunités d'amélioration pour eux-mêmes et leurs congénères. Et cette action humaine constitue la force dont la résultante est de s'approcher d'un point d'équilibre dynamique (quand cette force est en rétroaction négative) ou au contraire de faire évoluer la société vers le progrès (quand cette force est en rétroaction positive), voire les deux à la fois selon la projection choisie. En fin de compte, il n'y a pas d'équilibre, il y a que des opportunités qui sont autant d'incitations à l'action; l'équilibre n'est qu'un point mouvant où tendent momentanément ces actions, dans l'approximation rarement pertinente où l'information se découvrirait et circulerait beaucoup plus vite que ne se déroule l'action.
L'erreur des économistes classiques et autres étatistes est donc de voir en l'économie un phénomène déshumanisé qui se déroulerait sans l'homme, malgré lui, comme une malédiction qui le détourne de la « vie vraie », alors qu'au contraire, vue correctement comme domaine de l'Action Humaine, elle est un phénomène consubstantiel à la nature humaine, elle est la vraie vie.
[5]: Là encore, les américains, qui comprennent mieux que nous le principe de fonctionnement d'une économie libre, ont cette expression: money talks — « l'argent parle ». Le seul moyen sincère et honnête pour signifier que l'on attribue vraiment de la valeur à quelque chose que l'on n'a pas la compétence pour faire avancer soi-même, c'est de dépenser son argent en conséquence.
Pour prévenir la réaction outragée des détesteurs de l'argent, les américains ont encore cette expression time is money, « le temps c'est de l'argent ». L'argent, c'est ce que rapporte l'usage le plus productif de votre temps, mis au service de ceux qui savent le mettre au plus grand profit d'autrui, en combinant votre spécialité à celles complémentaires d'autres personnes. Ensuite, vous pouvez à votre tour employer cet argent, qui peut se concevoir comme la concrétisation d'une « dette sociale » à votre égard, pour employer des spécialistes capables d'effectuer les tâches qui vous tiennent à cœur. Souvent pour réparer une plomberie défectueuse, il vaut mieux travailler trois heures et payer une heure de travail de plombier que d'essayer soi-même et passer six heures en essais et erreurs, achat de pièces et énervement; de même pour aider les nécessiteux, il vaut souvent mieux travailler quelques heures en plus et faire une donation du produit de ce travail à une charité spécialisée dans une telle entreprise, que de passer un temps bénévole à faire maladroitement ce que d'autres feront mieux à votre place.
Bien sûr, en fin de compte, chacun est seul juge de la meilleure façon de passer son temps. Mais l'emploi judicieux de l'argent, cet intermédiaire universel, loin d'être un signe de « matérialisme », est au contraire un signe d'efficacité dans l'usage de ressources matérielles, au service des causes qui sont celles des hommes, qu'elles satisfassent des appétits matériels ou des aspirations spirituelles — si tant est qu'on pusse délimiter pertinemment le matériel et le spirituel.
[6]: Sur les sophismes utilisés pour justifier l'État, et sur la pensée magique sous-jacente à ces sophismes, lire mon essai L'État, règne de la magie noire.
[7]: Pour l'analyse d'un cas particulièrement aigu de cette névrose, voir mon article Schizophrénie socialiste, commentaires sur la pièce « Dans la solitude des champs de cotons » de Bernard-Marie Koltès.






Comment imputer le déséquilibre constaté aux défaillances d’un marché qu’on empêche précisément de fonctionner ?


Les théoriciens de la concurrence imparfaite, en banalisant l’adjectif « imparfaite », considèrent que l’on ne peut décidément pas faire confiance en la concurrence pour concilier les intérêts nécessairement divergents (à court terme en tout cas) des protagonistes du marché. La « concurrence imparfaite » est cependant un concept dérivé du modèle de « concurrence pure et parfaite » auquel il prétend se substituer en l’affinant. Pourtant, le modèle, même affiné, n’est sans doute pas une représentation fiable de la réalité des processus de marché. 

Si la plupart des manuels d’économie proposent des présentations détaillées et abondamment illustrées des modèles de concurrence imparfaite, ils éludent le plus souvent une telle question qui implique de revenir sur les fondements philosophiques du principe même de concurrence. Considérons l’exemple du marché du travail pour illustrer ce propos. Il est clair que le monde réel, dans lequel nous vivons tous, est loin d’être parfait. Il est clair aussi que la concurrence telle qu’elle existe, dans le monde réel, est quelque chose d’autre que la « concurrence pure et parfaite ». Pourtant, l’origine des défaillances constatées est loin d’être établie clairement. 

Si une grande partie des économistes se montrent favorables à l’idée d’encadrer la concurrence par des instances extérieures au marché, c’est soit qu’ils ont une conception néoclassique de la concurrence, soit qu’ils ne reconnaissent aucunement les vertus du marché libre (keynésiens, marxistes, régulationnistes…). En agrégeant tous ces courants de pensée, on obtient finalement la majorité des économistes qui considèrent qu’il y a des imperfections qu’il faut – et que l’on doit corriger. Mais, si les développements récents vont dans le sens de la législation de la concurrence, c’est notamment en raison de l’impossibilité de se rapprocher, dans la réalité, des conditions de la concurrence pure et parfaite telles qu’elles ont été définies par la théorie. Pourtant, sommes-nous certains de la pertinence des références en ce domaine ? 

La question est loin d’être anodine car, si la référence est fausse, alors les conclusions le sont tout autant et ce que nous appelons « défaillance » est alors tout autre chose 

Le marché du travail en France est caractérisé aujourd’hui par la coexistence, d’un côté, d’un nombre important de chômeurs de longue durée et de chômeurs diplômés, et d’un autre côté, par une pénurie croissante de personnel dans un nombre important de secteurs, que ce soit de personnel qualifié ou non. Le moins que l’on puisse observer est donc une grande défaillance dans la quête d’un équilibre du marché du travail. Face à ce constat, on en appelle généralement aux pouvoirs publics. Pour autant, le marché du travail en France est-il l’exemple d’un marché libre ou d’un marché perturbé à force de réglementations et de collectivisation des processus de négociation qui empêchent tout ajustement fin des offres et des demandes ? 

Il suffit de mentionner l’existence du S.M.I.C., de la complexité du droit du travail, du poids des charges sociales, des nouvelles réglementations, du poids de l’État dans l’éducation et la formation pour constater qu’il n’existe pas, dans les faits, un réel marché du travail sur le dos duquel on pourrait imputer la responsabilité du chômage. Sans avoir la prétention de trancher une question si complexe, l’économiste n’a pas le droit de s’interdire de se poser la question inverse. N’est-ce pas plutôt les tentatives constantes et maladroites de régulation forcée et de manipulation de l’offre et de la demande de travail, par des mécanismes réglementaires et administratifs (telles les conventions collectives qui se substituent de plus en plus au contrat de travail dont le fondement est individuel) qui neutralisent toutes possibilités d’ajustement fin, qu’il soit quantitatif ou qualitatif. 

Le moins que l’on puisse constater est que cette tentative de « régulation » se solde par de terribles et coûteux échecs. Si les échecs de la régulation sont plus coûteux que les imperfections de la concurrence qu’elle était censée corriger, n’aurait-on pas plus intérêt à restaurer les conditions du plein épanouissement des lois économiques ? En tout cas, la redoutable question du chômage nous renseigne plus sur les défaillances de l’administration et de sa gestion que sur les prétendues défaillances inhérentes à un marché libre. Car comment imputer le déséquilibre constaté aux défaillances d’un marché qu’on empêche précisément de fonctionner ?

Par Jean-Louis Caccomo
 
http://caccomo.blogspot.fr/2014/07/defaillances-du-marche-ou-defaillances.html

Défaillance du marché

De Wikiberal
 
La justification habituelle « philanthropique » de l'intervention de l'État réside, en autres, pour les étatistes dans le concept vague et un peu passe-partout de défaillance du marché. En fait, il s'agit là d'une justification a posteriori des premières interventions de l'État, une justification de l'augmentation du pouvoir de l'État, et de son emprise, bien éloigné de buts prétendument philanthropiques.
En réalité, on peut soutenir que le marché est toujours imparfait, mais jamais défaillant :
  • imparfait, parce que personne n'est jamais complètement satisfait des biens et services disponibles : ils sont toujours trop chers, en quantité insuffisante, et parfois même pas encore inventés !
  • jamais défaillant, parce qu'une défaillance se définit comme l'incapacité à remplir une obligation, et il est absurde d'assigner des obligations à un marché.

Aspects néfastes de l'intervention de l'État

En réalité, l'emploi par l'État de la coercition lorsqu'il intervient, implique nécessairement des conséquences néfastes, puisque l'État ne vient pas comme un être surnaturel, hors du monde, qui ne fait que, par exemple, modifier les répartitions de richesse. La violence que l'État fait aux hommes induit une agression au sens propre du terme, et une appréhension, qui n'aurait pas eu cours dans une société de liberté où la répartition de la richesse - issue de la création - est spontanée. Il s'ensuit que, dans la plupart des cas, l'intervention conduit à un effet contraire au but recherché par le philanthrope. Les exemples sont nombreux, on pourrait ici citer l'explication rothbardienne de la crise de 1929, prétendument emblématique des faiblesses du capitalisme : elle trouve sa source dans le protectionnisme et l'interventionnisme des années 1920, ainsi que dans les décisions arrêtées par la toute jeune Federal Reserve américaine sur le marché monétaire (voir aussi l'article étalon-or).

La causalité libre

Il advient donc de l'intervention de l'État une série d'aggravations des situations présentes, mais qui ne sauraient être attribuées à l'État qui se caractérise, pour beaucoup d'étatistes, par une sorte d'infaillibilité. Attitude encouragée d'ailleurs par la croyance de suivre des idées progressistes, qui vont "dans le sens de l'Histoire", avec pour objectif d'améliorer sciemment le sort des "classes défavorisées". Sorte d'emprunt à la dialectique matérialiste marxiste. En ce sens, les étatistes ne sont pas conscients de la causalité des effets pervers de l'interventionnisme. Ils s'expliquent, pour eux, par une sorte de "causalité libre", sans source. Cette "causalité libre", à partir de laquelle les étatistes cherchent à élucider l'origine des "effets indésirables ou non souhaités", ne serait alors qu'une propriété d'émergence des interactions individuelles, incapable d'être prévue au niveau microscopique (ou microéconomique), mais qui est observable au niveau de la macroéconomie.

La personnification du marché

Cependant, la pensée est également pervertie par un autre principe, à partir de ce point : le marché, ensemble des actions individuelles, est donc imprévisible, peut conduire à des "dérives", il ne pourrait alors être utilisé comme remède à quelconque situation. L'État s'impose donc comme la solution d'une force personnifiée, et qui s'attribue des objectifs précis. Et on note, en bout de course, une projection de la conception de l'État sur celle du marché, où celui-ci devient personnifié. D'où la matérialisation des multiples "dérives du marché", qui ne pourraient en aucun cas être laissées "à ses forces aveugles indomptables".

Faire payer par tous la folie de quelques-uns

En pratique, l'accusation de défaillance du marché est utilisée par les étatistes pour leur permettre de satisfaire leurs lubies aux dépens des contribuables. Elle permet à l'irrationnel, grâce à la coercition fiscale, de se donner libre cours sans subir la sanction du marché. L’État peut prétendre ainsi jouer un rôle de super-assureur, en assurant l'inassurable, de super-banquier, en finançant à perte le non-rentable, etc.

Citations

  • Si les marchés sont imparfaits, les politiques sont aussi imparfaites que les marchés. (Paul Krugman)

Voir aussi


Défaillance de l'État

De Wikiberal
 
Les défaillances de l'État (government failures) sont les cas dans lesquels l'action des hommes de l'État cause plus de mal qu'elle n'apporte d'éléments positifs. 
Il s'agit d'un des principaux objets études de l'école du Choix Public de James McGill Buchanan et Gordon Tullock. Les étatistes invoquent les défaillances du marché pour justifier l'intervention des pouvoirs publics dans tous les secteurs. Buchanan et Tullock entendent à l'inverse souligner que l'action de l'État est tout aussi défaillante et qu'opposer, comme le font les étatistes, une puissance publique immaculée et un marché toujours défaillant est une erreur grossière.
Les économistes du Public Choice soulignent ces défaillances et proposent plusieurs explications. Ainsi, ils expliquent la croissance de l'État et ses échecs par le fait que les fonctionnaires sont des hommes comme tout les autres; ils cherchent donc à maximiser leur satisfaction, c'est-à-dire par exemple augmenter leur salaire, obtenir un plus grand bureau, etc. Ces buts peuvent souvent entrer en contradiction avec les buts affichés de l'action étatique, à savoir agir en faveur de l'« intérêt général ». Pour l'économiste William Niskanen, l'action étatique est par essence moins efficace, car les droits de propriété ne peuvent s'exercer pleinement et la responsabilité individuelle n'existe donc pas.
Autre exemple, un homme politique à la veille d'une élection sera tenté d'offrir des baisses d'impôts clientélistes à certaines parties de l'électorat, pour assurer sa réélection.
Prenant l'exemple de la crise financière actuelle, l'historien François Garçon dans Le Temps du 19 janvier 2009 souligne que la règlementation étatique, présentée comme la panacée, n'a rien fait pour pallier certaines dérives ou même les percevoir. Et Garçon de mettre en doute la capacité de l'État à mieux réguler le marché, à rebours de l'idéalisation irrationnelle qui en est souvent faite[1].


novembre 01, 2014

Globalisation - Mondialisation 8/8 (La criminalité et le terrorisme)

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La criminalité et le terrorisme


 À la fin du XXe siècle est apparu un nouveau phénomène : la mondialisation simultanée de la criminalité, du terrorisme et de la corruption, une dangereuse « trinité » qui se manifeste dans toutes les régions du monde. Elle se rencontre dans les pays les plus pauvres de l'Amérique latine et de l'Afrique, mais également au cœur de l'Europe prospère. Profitant de la corruption, des groupes de criminels et des cellules terroristes agissent ensemble, que ce soit dans la zone dite de la triple frontière en Amérique latine (Brésil, Paraguay, Argentine) ou dans le cadre des conflits régionaux de l'Afrique de l'Ouest, dans l'ex-Union soviétique ou dans les prisons d'Europe occidentale. La criminalité et le terrorisme sont également associés en Australie, en Asie et en Amérique du Nord, ainsi qu'en témoignent des affaires criminelles qui confirment l'intégration importante de ces activités.
 
Cette trinité est cependant plus complexe que le simple recours des terroristes à des activités criminelles pour financer leurs activités ou la circulation accrue de biens illicites à l'échelle mondiale. Il s'agit plutôt d'un phénomène distinct, dans le cadre duquel des réseaux criminels mondiaux agissent avec des terroristes, les deux groupes menant ainsi à bien leurs activités, à la faveur d'une corruption généralisée.

Cette distinction artificielle qu'on fait entre criminalité et terrorisme se fonde sur une définition obsolète des deux phénomènes. Le précepte selon lequel les criminels seraient motivés par l'appât du gain et les terroristes exclusivement par des convictions politiques ne correspond plus à la réalité contemporaine. Les criminels ne font plus partie d'organisations hiérarchiques ne menaçant pas l'État - comme c'était le cas de la mafia sicilienne ou des Yakuza japonais. Les terroristes, dont l'action est souvent financée par des activités criminelles, passent souvent de la criminalité au terrorisme et vice versa. La structure en réseaux de ces deux groupes leur permet d'entrer en contact, sans que les uns aient nécessairement toujours conscience de l'identité des autres. Il se peut que les deux groupes coopèrent directement ou qu'ils soient en contact par le biais d'intermédiaires. Par exemple, à Los Angeles, l'école de langues qui a fourni des visas à certains des pirates de l'air du 11 septembre 2001 en a également fourni à des prostituées appartenant à un grand réseau de traite d'êtres humains. Ce réseau se livrait également à des vols d'identité susceptibles de faciliter les agissements de terroristes.

Contrairement à l'opinion selon laquelle ce phénomène serait né avec la mondialisation, la criminalité organisée et le terrorisme existent depuis longtemps à l'échelle internationale. Dans les années 1930 déjà, les membres de la mafia italienne des États-Unis se rendaient à Kobé (Japon) ou à Shanghaï (Chine) pour s'approvisionner en drogue et des membres de divers groupes criminels américains se réfugiaient en Chine pour échapper à la justice américaine. Des membres de l'Armée républicaine irlandaise ont trouvé refuge dans des communautés irlandaises implantées à l'étranger, qui apportaient également un appui financier à l'organisation agissant en Irlande.
 

La nouveauté tient cependant à la rapidité et à la fréquence de ces échanges, ainsi qu'au degré de coopération entre ces deux formes de criminalité transnationale. 
Les criminels aussi bien que les terroristes ont établi des réseaux transnationaux, répartissant entre plusieurs continents leurs activités, leur planification et leurs moyens logistiques et semant ainsi la confusion parmi les systèmes judiciaires nationaux qui ont l'habitude de combattre la criminalité transnationale sous toutes ses formes. Les criminels transnationaux bénéficient grandement de la mondialisation. Les terroristes et criminels font circuler des personnes, de l'argent et des marchandises dans un monde où les flux de plus en plus importants de personnes, d'argent et de marchandises masquent à merveille leurs agissements. Les terroristes aussi bien que les criminels transnationaux ont internationalisé leur action pour atteindre leurs cibles, commettre leurs actes et échapper aux autorités.
 

Le lien avec la mondialisation
Les réseaux internationaux de criminalité organisée ont mondialisé leurs activités pour les mêmes raisons que les sociétés multinationales les plus respectables. Les sociétés multinationales établissent des filiales dans le monde entier pour tirer parti d'une main-d'œuvre ou de marchés de matières premières intéressants. Les groupes qui agissent dans l'illégalité font de même. En outre, les groupes internationaux, qu'ils soient légaux ou illégaux, s'implantent également à l'échelle mondiale pour répondre à leurs besoins de production, de commercialisation et de distribution. Les groupes illégaux parviennent à étendre leur champ d'action en tirant parti du nouveau contexte économique, grâce à la révolution des communications et des transports internationaux. Les terroristes ont eux aussi mondialisé leur action, en tirant parti de la possibilité de recruter à l'échelle internationale, de rester proches de communautés d'émigrés qui puissent leur apporter un appui logistique et financier et d'accéder à des communautés plus fortunées.

La fin de la guerre froide a pour beaucoup contribué à la montée de la criminalité transnationale. La fin du face-à-face entre super-puissances a réduit le risque de conflits de grande envergure, mais depuis la fin des années 1980, le nombre de conflits régionaux a augmenté de façon exponentielle. Malheureusement, les armes et les combattants qui alimentent ces conflits sont souvent liés à des activités criminelles transnationales, par exemple au trafic de drogues, de diamants et d'êtres humains. Ces conflits ont donné lieu à un nombre sans précédent de réfugiés et ont nui aux activités économiques licites de ces régions, qui sont alors devenues des lieux privilégiés de recrutement de terroristes ou des refuges où former des terroristes et planifier leurs agissements.
 
L'essor des activités transnationales illicites a été énormément aidé par les grands progrès technologiques réalisés après la Deuxième Guerre mondiale. L'augmentation du trafic aérien civil, les améliorations des télécommunications (notamment le téléphone, la télécopie et les communications rapides via l'internet) et la croissance du commerce international ont facilité la circulation des biens et des personnes. Les criminels et les terroristes profitent de l'anonymat des salons de bavardage sur l'internet et d'autres formes de communication informatisée pour planifier et mener à bien leurs activités. Les terroristes du 11 septembre se sont servis d'ordinateurs accessibles au public pour envoyer des messages et acheter leurs billets d'avion. De même, les trafiquants de drogue colombiens planifient et effectuent leur commerce illicite au moyen de télécommunications codées.

La mondialisation s'accompagne d'une idéologie favorable au libéralisme économique et au libre-échange et d'une réduction de l'intervention des États. D'après les partisans de la mondialisation, la réduction des réglementations internationales et des obstacles au commerce et aux investissements aura pour effet d'accroître les échanges et le développement. Mais ces conditions favorables à la mondialisation contribuent également de façon décisive à la hausse de la criminalité. Les groupes de criminels et les terroristes profitent de l'assouplissement considérable des réglementations, de la réduction des contrôles frontaliers et de la plus grande liberté qui en résulte pour étendre leur action au-delà des frontières et dans de nouvelles parties du monde. Ces contacts s'effectuent plus fréquemment et plus rapidement. Alors que la croissance du commerce légal est réglementée par l'application de politiques de contrôle des frontières, ainsi que par des agents des douanes et des systèmes bureaucratiques, les groupes de criminalité transnationale profitent librement des lacunes des systèmes juridiques nationaux pour étendre leur portée. Ils se rendent dans des régions dont ils ne peuvent être extradés, établissent leurs opérations dans des pays où l'application des lois est inefficace ou corrompue et blanchissent leurs capitaux dans des pays où règne le secret bancaire ou qui disposent de peu de mécanismes de contrôle efficaces. En répartissant ainsi leurs activités, les criminels et les terroristes tirent parti de la mondialisation, tout en agissant à moindre risque.
 

Le commerce mondial s'est énormément développé dans la deuxième moitié du XXe siècle. Les flux très importants de marchandises licites ont masqué une hausse des marchandises illicites. Il est très difficile de détecter les marchandises illicites parmi celles qui sont licites. Le pourcentage de porte-conteneurs dont la cargaison est vérifiée est très faible, ce qui facilite le trafic de drogue et d'armes et la contrebande. Il est ainsi possible de transférer de la drogue à bord d'un thonier, afin d'échapper à toute détection, et une société de production de miel peut servir à transférer des fonds et à générer des profits pour Al-Qaïda.
 

De nombreuses formes de criminalité mondialisée se sont accentuées au cours des dernières décennies. Le trafic de drogue a été le premier secteur d'activités illicites à maximiser ses profits à l'ère de la mondialisation. Les criminels ont tiré d'énormes bénéfices du trafic de drogues, et de nombreux terroristes en ont fait un important moyen de financement. Mais à mesure que la concurrence s'est intensifiée sur le marché de la drogue et que la répression de la communauté internationale s'est durcie, les bénéfices réalisés ont été réduits par la concurrence et l'accroissement des risques ; de nombreux criminels et terroristes se sont donc tournés vers d'autres formes de criminalité facilitées par la mondialisation de l'économie. Les criminels aussi bien que les terroristes ont par la suite tiré des profits financiers de l'augmentation du trafic d'armes et du commerce d'êtres humains. On a également observé une progression très importante du commerce illicite d'espèces protégées, de déchets toxiques, d'œuvres d'art et d'antiquités volées, de produits de contrefaçon et de la criminalité mondialisée liée aux cartes de crédit. Les groupes de criminalité organisée et les terroristes exploitent toutes ces activités, parfois même conjointement.
 

Un secteur de services de taille importante s'est également développé pour répondre aux besoins de toutes les formes de criminalité transnationale. Il s'agit notamment de pourvoyeurs de faux documents, de blanchisseurs d'argent et même d'experts de haut niveau qui fournissent des services juridiques, financiers et comptables aux deux groupes. Cette tendance se manifeste entre autres par le fait que l'établissement bancaire Riggs Bank de Washington, qui a compté parmi ses clients honnêtes des présidents américains et un grand nombre de membres des milieux diplomatiques internationaux, a été poursuivi en justice pour avoir blanchi des capitaux du dictateur de la Guinée équatoriale et facilité le transfert de fonds en direction de terroristes, ce qui lui a valu une amende de 25 millions de dollars. Cette affaire montre que les activités des criminels et terroristes ne restent pas toujours dans l'économie de l'ombre mais se mêlent souvent au système économique légitime. 

Que peut-on faire ?

Il faut que nous modifiions radicalement notre approche de la sécurité internationale. En s'accrochant à la distinction artificielle et dépassée selon laquelle les criminels seraient motivés seulement par le profit et les terroristes seulement par des convictions politiques ou religieuses, les décideurs, les forces de l'ordre et les stratèges militaires ne peuvent lutter efficacement contre le nouveau phénomène des réseaux criminels transnationaux.
 
Les États et les organisations multilatérales doivent abandonner leur conception de la sécurité datant de la guerre froide, selon laquelle les conflits entre États-nations constitueraient la principale menace pesant sur la sécurité internationale, laquelle pourrait donc être garantie par les États. Par exemple, une stratégie qui viserait à empêcher la prolifération d'armes de destruction massive en interdisant seulement l'accès aux matériaux nécessaires à leur fabrication serait certes brillante en théorie mais fatalement vouée à l'échec, car, s'ils ne remédient pas aux menaces supplémentaires que constituent la corruption généralisée et les activités des réseaux criminels et terroristes, les États risquent d'instaurer un sentiment factice de sécurité.

Pour combattre la conjonction de la criminalité, du terrorisme et de la corruption dans un contexte mondial, il faut également remédier aux conditions sociales, politiques et économiques qui suscitent et entretiennent ces trois fléaux. Tous sont liés à des problèmes structuraux ayant trait aux inégalités économiques entre pays, à des régimes autoritaires et au manque de perspectives de nombreuses régions du monde. Une solution viable consiste à reconnaître et à combattre le sentimental d'aliénation qui est à l'origine d'une grande partie des actes de terrorisme, notamment parmi les populations islamiques. La possibilité d'avoir un emploi et de gagner sa vie joue à cet égard un rôle crucial pour de nombreux habitants des pays en développement, afin que, par exemple, les agriculteurs afghans et latino-américains n'aient plus à cultiver de la drogue pour subvenir aux besoins de leur famille.

La criminalité est souvent considérée comme secondaire par rapport au terrorisme. Depuis le 11 septembre 2001, de nombreuses ressources auparavant consacrées à la lutte contre la criminalité transnationale ont été réaffectées à la lutte contre le terrorisme. Il pourrait s'agir là d'une grave erreur, entre autres pour l'armée et les services de renseignement. La lutte contre la criminalité n'est pas une question secondaire mais figure au cœur du combat à mener contre le terrorisme. Les terroristes qui ont posé des bombes dans des trains à Madrid le 11 mars 2004 auraient pu en être empêchés si les autorités carcérales avaient fait attention au complot qui se tramait dans leurs établissements mêmes.
 
Les forces de police de Los Angeles, qui associent l'action de la police locale à celle des forces de l'ordre fédérales, constituent un exemple de stratégie efficace à cet égard. En faisant appel à la fois à des analyses d'experts et aux méthodes policières habituelles et en surveillant étroitement les activités criminelles au sein de leur communauté, les forces de police de Los Angeles ont brillamment réussi à déjouer d'éventuels complots terroristes et à tenir en échec des organisations qui financent et facilitent le terrorisme. En faisant preuve de coopération et en réduisant les obstacles bureaucratiques, la police de Los Angeles a pu combattre le terrorisme sans recourir à un quelconque mécanisme juridique particulier et sans porter atteinte aux droits prévus par la loi.

Si la menace que constituent les acteurs non étatiques comme les criminels et terroristes transnationaux continue de s'accentuer dans les décennies à venir, il faudra que la coopération internationale s'intensifie, que les lois soient mieux harmonisées et que les services de renseignements collaborent davantage. Nous devons cependant, dans le cadre de la mise en œuvre d'une politique de lutte contre la criminalité transnationale et le terrorisme, respecter les droits de l'homme et éviter des mesures qui entraîneraient une plus grande radicalisation et favoriseraient le terrorisme. C'est en modifiant notre conception des criminels, des terroristes et de la corruption, qui doivent être perçus comme interdépendants, et du traitement que nous leur réservons, que nous parviendrons à empêcher que les bienfaits de la mondialisation soient exploités au détriment de la sécurité internationale.
 
  2007


Crime

De Wikiberal
Le crime désigne la catégorie des infractions les plus graves, catégorie plus ou moins vaste suivant les pays et systèmes juridiques. Le terme provient du latin crimen, qui signifie en latin classique « accusation » ou « chef d'accusation » puis, en bas latin, « faute » ou « souillure ».
Le terme de crime a des sens différents en droit anglo-saxon et en droit français. Un homicide volontaire (meurtre), un assassinat (meurtre prémédité), ou un viol[1] sont des crimes. En droit de Common law, sont également des crimes le vol qualifié, les émeutes, les agressions sexuelles, les actes contraires aux bonnes mœurs, l'évasion fiscale, le parjure, etc. (de nombreux actes qui sont considérés comme des délits en droit continental).
 

Agression

De Wikiberal
Le terme d'agression désigne pour les libéraux le fait d'initier directement une violence (ou de menacer de le faire) à l'encontre d'un individu en visant soit son intégrité physique soit sa propriété, sans se préoccuper de son consentement. C'est donc le critère du consentement (relativement à un périmètre limité à notre propre corps et aux biens qui sont notre propriété personnelle) qui détermine s'il y a ou non agression.

Agression du point de vue libertarien

Pour les libertariens, la notion d'agression est très restrictive. Ne sont pas des agressions et donc ne donnent lieu à aucune violation du droit :
  • les insultes, la calomnie, la diffamation (conformité à la liberté d'expression, aucune violence physique ni atteinte à la propriété[1])
  • la rupture unilatérale d'un contrat (liberté d'action totale, moyennant des compensations prévues auparavant dans le contrat)
  • un échange de biens ou de services n'est pas une agression (les théories antilibérales de "l'échange inégal" sont absurdes : un échange a lieu parce que chacune des parties y trouve avantage, avantage qui n'est pas mesurable, car subjectif)
  • le plus souvent, le non-respect de la propriété intellectuelle n'est pas vu comme une agression ni un vol (hors contrat impliquant la personne concernée)
  • le licenciement d'un employé, le travail prétendument "mal payé", la concurrence "sauvage", le port d'armes, etc.
  • la publicité n'est pas une agression tant qu'elle n'impacte pas la propriété des personnes qu'elle cible et n'est pas trompeuse.
  • toute "agression" envers soi-même n'est jamais une agression au sens du droit, puisqu'il y a consentement (masochisme, suicide, don ou vente d'organes, grève de la faim, consommation de drogues, euthanasie...)
  • se défendre contre une agression n'est pas une agression (légitime défense)
Pour la plupart des libertariens, un grand nombre d'actions autorisées légalement, et qui sont uniquement le fait de l’État, sont en réalité des agressions :

Subjectivité et objectivité de l'agression

En accord avec le subjectivisme libéral (et en désaccord généralement avec le droit positif), une agression est seulement ce que la personne agressée définit comme "agression" (aspect subjectif), quand sa personne ou ses biens sont impactés par l'action d'autrui (c'est là l'aspect objectif). En effet, certaines actions jugées violentes ou dommageables par les uns (sado-masochisme, duel, travail "mal payé", euthanasie, etc.) peuvent être acceptées par ceux qui en sont apparemment les "victimes" : une condition nécessaire (mais non suffisante) à l'agression est l'absence de consentement.
La liste des conditions qui déterminent une agression peut donc s'établir ainsi :
  1. absence de consentement de la part de l’agressé (pas d’agression s’il y a consentement)
  2. impact dommageable démontrable sur la personne ou sur ses biens propres (l'agression ne doit pas être imaginaire ou subjective)
  3. existence d’un agresseur (la « nature » ou le « système capitaliste » ne sont pas des agresseurs)
  4. action positive de cet agresseur sur la personne ou sur ses biens propres (pas d’agression par inaction, par concurrence, par usage de la liberté d’expression, etc.)
  • Ce que signifie une agression violente est qu’une personne prend le contrôle de ce qui appartient à une autre sans son consentement. L’ingérence peut atteindre la propriété d’un homme sur sa propre personne (le cas d’une agression corporelle) ou sa propriété sur les choses comme dans le cas du vol ou de la violation de domicile. Dans un cas comme dans l’autre, l’agresseur impose sa volonté contre la propriété naturelle d’un autre, il prive sa victime de sa liberté d’action et du plein exercice de sa propriété naturelle de soi-même. 
  • (Murray Rothbard, L'Éthique de la liberté, chap. 8)


Coercition

De Wikiberal
La coercition est l'exercice de contraintes (le plus souvent d'origine étatique) pesant sur des individus et/ou leurs biens. De telles contraintes peuvent être justifiées d'un point de vue libéral pour assurer le respect du droit.

Point de vue libéral et libertarien

Pour certains libéraux, « la coercition a lieu lorsqu'on amène les actions d'un homme à servir la volonté d'un autre, non pour servir ses projets à lui, mais ceux de l'autre » (Friedrich Hayek). Cette acception pèche néanmoins par son imprécision. En effet, son sens est tellement extensif qu'il pourrait, par exemple, s'appliquer au publicitaire cherchant à persuader le consommateur potentiel des mérites d'un produit quelconque ou au séducteur baratinant une femme qu'il convoite.
C'est pourquoi les libertariens estiment plutôt qu'elle renvoie à toute action contraire au principe de non-agression (action qui consiste tant à employer la violence légale contre des individus innocents qu'à menacer de le faire).
En revanche, on ne peut appeler coercition ce qui découle de la nature des choses : les faits naturels, tels que la gravitation, la météorologie, ou le fait qu'il faille travailler pour vivre (rareté des biens). La révolte contre la nature, qui sous-tend plus ou moins inconsciemment les théories collectivistes, est une absurdité.
Du point de vue du droit, on pourrait parler de deux types de coercitions : la coercition (voire la violence) légitime, nécessaire pour assurer le plein exercice des droits individuels à l'encontre des personnes qui les violent, et la coercition illégitime :
«L’ennemie des libéraux n’est pas tant la coercition en soi que la coercition arbitraire, abusive et envahissante – celle qui bureaucratise toute une société en règlementant et réprimant là où libre initiative et libre association pourraient efficacement satisfaire besoins et aspirations des gens. D’une manière plus générale, la contrainte n’est pas davantage et ne saurait intrinsèquement être l’ennemie des libéraux, sauf à entretenir une conception bien sommaire et réductrice de la liberté. Si, dans une société ouverte, il y a logiquement bien moins de contraintes que dans une société close traditionnelle ou contemporaine (étatisée, collectivisée), celles-ci n’y disparaissent pas pour autant comme par enchantement. »
    — Alain Laurent
 

Terrorisme

De Wikiberal
Le terrorisme consiste en la pratique, par une personne, un groupe ou un État, de crimes violents destinés à produire sur leur cible (la population) un sentiment de terreur, souvent bien supérieur aux conséquences réelles de l'acte. Le terrorisme vise la population civile en général ou une de ses composantes, une institution ou les structures d'un État. L'objectif peut être d'imposer un système politique, de causer des destructions à un ennemi ou de déstabiliser une société, d'obtenir la satisfaction de revendications politiques, religieuses, racistes, séparatistes, etc.
Raymond Aron définit le terrorisme ainsi :
Une action violente est dénommée terrorisme lorsque ses effets psychologiques sont hors de proportion avec ses résultats purement physiques.
Partout et de tout temps, on observe que le terrorisme est le meilleur allié de l'accroissement de la coercition du pouvoir d'Etat ; il est d'autant plus nécessaire, en période de tension, de ne pas fléchir sur les principes de base des sociétés libérales.

Origine

Le mot terrorisme (ainsi que terroriste et terroriser) est apparu pour la première fois au XVIIIe siècle, durant la Révolution française, pendant le régime de la Terreur, lorsque le Comité de salut public dirigé par Robespierre exécutait ou emprisonnait toutes les personnes qui étaient considérées comme contre-révolutionnaires.
Le mot a plus tard évolué pour désigner aujourd'hui les actions violentes visant spécifiquement les populations civiles, faites dans le but de détruire, tuer et de mutiler. Les terroristes privilégient en effet les cibles civiles plutôt que les opposants armés.
Ces attaques ont pour but de promouvoir des messages à caractère politique ou religieux par la peur, ce qui différencie le terrorisme des actes de résistance visant à se libérer d'une occupation en détruisant les institutions politiques des occupants ou en assassinant ses représentants.

Les différents types de terrorisme

Il existe trois grands types de terrorisme :
  • le terrorisme individuel (nihiliste)
  • le terrorisme organisé (extrême-gauche, extrême-droite, islamisme)
  • le terrorisme d'État.
La terreur d'État a fait dans l'histoire beaucoup plus de victimes que la terreur d'en bas, celle du faible contre le fort.
Le premier épisode terroriste connu, rapporté par Flavius Josèphe, est celui des Zélotes, qui luttent en Palestine au Ier siècle après J.-C. contre l'occupant romain. La secte ismaïlienne des Assassins se fait connaître par ses actions violentes en Iran et en Syrie du XIe au XIIIe siècle. Autour de 1860, les mouvements nihilistes développent des actions terroristes en Russie.

Terrorisme intellectuel  

Le terrorisme intellectuel est la pratique qui, au moyen d'arguments et de procédés intellectuels (conformes en général à la liberté d'expression), vise à intimider pour empêcher la formulation d'idées gênantes. C'est une censure idéologique qui vise à empêcher de parler de tout ce qui ne rentre pas dans les grilles de l’idéologie, et qui sera dénoncé par le politiquement correct comme étant un dérapage. C'est un moyen de favoriser ses propres idées et donc soi-même en tant qu'incarnation de ces idées (intellectuel défendant son statut, parti visant la conquête du pouvoir). La politique est un des domaines privilégiés du terrorisme intellectuel, mais la culture, l'enseignement, etc. n'en sont pas exempts.
« Le terrorisme intellectuel, ce sont les moyens que mettent en œuvre ceux qui savent très bien qu'ils ont tort pour empêcher que les objections les atteignent. Ils n'ont pas d'autres méthodes. »
    — Jean-François Revel
« Qu'appelle-t-on terrorisme intellectuel ? Le fait de vouloir déconsidérer une personne qui exprime des opinions au lieu de les réfuter par des arguments. »
    — Jean-François Revel
« C'est un système totalitaire. Mais d'un totalitarisme patelin, hypocrite, insidieux. Il vise à ôter la parole au contradicteur, devenu une bête à abattre. À abattre sans que coule le sang : uniquement en laissant fuser des mots. Les mots de la bonne conscience. Les mots des grandes consciences. Les mots qui tuent. »
    — Jean Sévillia, Le terrorisme intellectuel : De 1945 à nos jours, éd. Perrin, 2004
Parmi les procédés habituels qui sont au cœur du terrorisme intellectuel : l'emploi de la censure, de sophismes, le relativisme, le polylogisme (l'opinion ne compte pas, c'est la situation sociale de celui qui parle qui compte), la diabolisation, l'emploi de motvirus ("ultra-libéralisme", "néolibéralisme" ), les obstacles moraux au consentement, etc.
En France, il existe plusieurs procédés de terrorisme intellectuel utilisables facilement pour éviter tout débat :
  • le classique "point Godwin" qui consiste à mettre son adversaire sur le même plan que les Nazis (argument ad hominem utilisé quand l'adversaire est à bout de ressources) ;
  • spécifiquement français, le "point Poujade" permet de clore tout débat sur la fiscalité ou le rôle de l'État : "tu n'es qu'un égoïste ordinaire, tu veux seulement payer moins d'impôts" ;
  • le "point fasciste" est souvent une conséquence logique du "point Poujade" : "tu es contre la solidarité et pour le darwinisme social". George Orwell observait (déjà à l'époque du fascisme) que « le mot fascisme n’a plus aucun sens, si ce n’est dans la mesure où il recouvre quelque chose d’indésirable ».
  • le "point c-u-l" ("c'est ultralibéral") : quand les procédés précédents apparaissent trop datés et trop usés, l'accusation inusable d'"ultra-libéralisme" permet de qualifier l'adversaire d'extrémiste, comme si la liberté (confondue avec l'anomie) relevait d'une idéologie arbitraire, tolérable tant qu'elle ne serait pas "extrémiste".
Voir aussi La gauche en France.

 


Who Are the ‘Terrorists’?

by Murray N. Rothbard
by Murray N. Rothbard
First published in the Libertarian Party News, March/April 1986.
"Terrorism" has been made The Issue of the Year, for which Americans are expected to tighten their belts, pay countless billions in taxes so the U.S. government and its allies can arm to the teeth, and suffer an escalating repression of their liberties.
Yet who the terrorists are supposed to be remains vague and shadowy. Their only apparent common characteristic is that they are swarthy and foreign; no Nordics need apply.
The top villains seem to appear and disappear kaleidoscopically. A few years ago it was Colonel Khadafy; remember the sinister, swarthy, and "bearded Libyan hit men" supposedly sent to the U.S. to assassinate President Reagan? For that alleged act a partial embargo was imposed on Libyan trade. Yet, the "hit men" seemed to have vanished into the night, never to be heard from again.
After Khadafy had his day in the sun, the Bulgarian equivalent of the KGB had its time at the top, supposedly having engineered Mehmet Ali Agca’s attempt to assassinate Pope John Paul II.
The "Bulgarian connection," so highly touted by conservatives and neo-conservatives in this country, seems to have blown itself away on the sea of lies, contradictions, and lunacies in Agca’s testimony. The only sure quantity in Agca and his proven colleagues is that they are right-wing Turks, hardly fitting candidates for the current White House-U.S. Establishment hit list.
After the fading away of the Bulgarian evil empire, the Lebanese Shiites and their alleged mastermind, the Ayatollah Khomeini, had a long run as "Top Terrorist of the Month."
The U.S. Navy had their turn at shelling and destroying Shiite villages in Lebanon, but the Shiites proved a hardy bunch, and the idea of bombing the alleged Shiite training camp headquarters in the Bekaa Valley foundered in the realization that Syria was there, with anti-aircraft rockets, and with Russia and World War III looming in the background.
Then, suddenly, presto chango, and the dread Shiites seem to have disappeared as the top terrorists, to be replaced by… none other than Colonel Khadafy, back from his long rest.
The chain of evidence linking the Colonel to the recent airport bombings is even flimsier than the hysteria over the Khomeini and Bulgaria, and ranks up there with the disappearing Libyan hit men.
The airport bombings "look like the work" of Abu Nidal, head of the militant Palestinian Fatah Revolutionary Council. That takes care of that, even though no one is really sure that Nidal is still alive.
Having established the Nidal responsibility to its satisfaction, the U.S. government then tries to link Khadafy to Nidal. The claims of the White House and the CIA that they have secret evidence should be met with the same contempt as the alleged "secret knowledge" the CIA was supposed to have had on Vietnam. No person or group should be convicted on secret knowledge.
Even the U.S. admits that its evidence against Khadafy "wouldn’t stand up in court." But a basic tenet of both libertarian and Anglo-Saxon law is that everyone must be considered innocent until proven guilty; otherwise, retaliation or punishment would itself be open criminal aggression, in fact would be "terrorism." Why doesn’t such a standard apply also to Arabs, even if foreign, swarthy, and sometimes even bearded?
In truth, Khadafy is not even charged directly with masterminding or even financing Nidal or other terrorists. He is charged with allowing Nidal to have bases on Libyan territory, with "harboring" terrorists. An interesting charge. (Although even here, there is some evidence that the airport terrorists came from bases in Lebanon, not Libya. But who cares, right, so long as we kill some Arabs, any Arabs?) What does it mean?
In New York and other cities of the United States, hundreds of innocent men, women, and children are terrorized every day, in crimes called mugging. Should the United States government carpet-bomb New York City, destroying it for "harboring" terrorists, and for allowing them to use the city as a "base"? But, you might say, that would mean murdering masses of innocents? Sure, so why then is it OK for the United States government to shell Shiite villages, murdering the innocent, or for Israel to bomb Tunisia, killing 61 innocents, or for the United States to bomb Libya?
The U.S. and Israel say that they deplore having to kill innocents, but since they feel that they must "retaliate," and they can’t pinpoint the actual terrorists – in fact, they don’t know where the terrorists are or even who they are – therefore, they must do something, and killing the innocent becomes a regrettable necessity.
But how does such an argument differ from the U.S. government carpet-bombing New York City ("We must retaliate, and it is regrettable that we have to kill thousands, but we can’t pinpoint the SOB’s"). Or, for that matter, how does it differ from policemen trying to catch a criminal fleeing into a crowd, and simply machine-gunning the entire crowd?
To bring the case closer to home, there is some evidence that the Air India plane that blew up out of Canada was sabotaged by Sikh terrorists, and that those Sikhs were trained in a CIA training camp in Alabama. Would the Canadian, or Indian, government be justified in a bombing strike against the CIA base in Alabama, even at the regrettable cost of killing a few thousand Alabamans? If not, why not? Isn’t Alabama a "harborer" of Sikh terrorists?
Furthermore, every group in this struggle has grounds to believe that they are "retaliating": the Arabs believe that they are retaliating against Israeli aggressors and their backers in the United States.
The rule should be absolute: no "retaliation" is ever justified that injures or kills innocent people, and that means people who are not themselves active criminals. Anything else is an apologia for unremitting and unending mass murder; anything else is chaos and old night, and a justification for "anarchy" in the bad sense.
Everyone rightfully scorns Communists for holding a double moral standard, for holding that no acts are immoral so long as they advance their cause. But what about the egregious and flagrant double standard upheld every day by the American establishment: from the White House down to the major political parties and the media? If they did not hold such a double standard, they would be condemning the following flagrant acts of terrorism:
  • The CIA mining that damaged several neutral and peaceful vessels in Managua Harbor.
  • Acts of brutality by the Nicaraguan contras.
  • The U.S. government’s aggression in an invasion of Grenada.
  • The U.S. government’s flagrant war threats against Libya.
  • Reagan’s act of terrorism against U.S. citizens in Libya, by threatening them with jail sentences if they do not leave.
This last act has an interesting twist: these Americans, who have been peacefully let alone by the dread Libyan government, are supposedly being forced to leave Libya by the U.S. for "their own protection."
Struggling to wriggle out of this blatant double standard has been a major project of the favorite theoretician of the conservatives and neo-cons, Mrs. Jeanne Kirkpatrick, she who first made her mark with a sophistic distinction between "authoritarian" torture (good) and "totalitarian" torture (bad). Any sensible treatment of terrorism would define it as "aggression against innocent people."
First, Mrs. Kirkpatrick and her colleagues tried to redefine "terrorism" as such aggression by private groups, thereby letting the U.S. and Israeli governments off the hook.
But then, with escalating hysteria against Khomeini, Khadafy, Bulgaria, etc., the conservatives were forced to include "state-sponsored" or "state" terrorism in their lexicon.
Mrs. Kirkpatrick’s latest attempt to justify a double standard is that terrorists are evil because their "demands are unlimited" and random, whereas good guys make demands that are attainable and specific.
While the "unlimited" criterion might apply to the alleged airport bombings by Abu Nidal, they most emphatically do not apply to most previous terrorist acts, such as the Achille Lauro hijacking, since they have generally been linked to very specific demands for the release of Arab comrades from Israeli jails. Another sophistic attempt to whitewash U.S. and Israeli terrorist actions thus comes a cropper.
There also is a related double standard at work. So far, every bombing or assassination abroad is attributed to "terrorists"; while every similar occurrence within the United States – from the average mugging to the assassination of John F. Kennedy – is quickly assigned to the category of "lone nut," or, at the least, non-political.
Why a political murder should be considered somehow worse than a lone-nut or non-political one is itself a fascinating question. But the main point is that when a clearly political dynamiting or murder does take place within the borders of the United States – an area that the U.S. government should concern itself with far more than events 5000 miles away – no one seems to give much of a damn.
When one American, Leon Klinghoffer, was murdered on a hijacked Italian cruise liner, the New York media did not stop wailing about the deed for a solid month, and New York’s egregious Senator D’Amato actually proposed Klinghoffer for the Congressional Medal of Honor.
When one American, Alex Odeh, was murdered by the dynamiting of his Los Angeles office of the American-Arab Anti-Discrimination League, few kicked up a fuss. No media wailed day after day, no senator called for the granting to Odeh of the Congressional Medal of Honor. Why is that? Why the double standard?
Why is the murder of one American thousands of miles away treated so very differently from the murder of another right here at home? It would be interesting to see what moral theory Mrs. Kirkpatrick comes up with for that one.
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