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octobre 24, 2014

Le débat libéral en France et ses faiblesses ! Les Français deviennent de plus en plus libéraux


L'Université Libérale, vous convie à lire ce nouveau message. Des commentaires seraient souhaitables, notamment sur les posts référencés: à débattre, réflexions...Merci de vos lectures, et de vos analyses.


Plus de deux siècles après Montesquieu, le libéralisme français est enfin parvenu à une inexistence politique à peu près totale. Peut-être les libéraux français auraient-ils un peu intérêt à se demander comment ce brillant résultat a été atteint et s’il existe un moyen d’inverser ce processus. Voici quelques suggestions.

Le discours libéral français actuel souffre de l’angle essentiellement défensif sous lequel il s’exprime. Sans doute parce que le poids de l’Etat s’est accru de façon à peu près continue depuis le première guerre mondiale, les libéraux ont pris l’habitude de pointer un par un les cas d’intervention excessive et contre-productive de l’Etat en France. Afin de renforcer leur discours, ils utilisent des exemples a contrario de neutralité de l’Etat donnant de bons résultats, mais ces exemples doivent de plus en plus être cherchés à l’étranger.

Par ailleurs, les libéraux connaissent par coeur le propos de Bastiat sur ce qu’on voit et ce qu’on ne voit pas et sont parfaitement conscients de ce qu’il s’agit d’un handicap difficile à surmonter, puisque ce qu’on voit, ce sont les avantages de l’étatisme, et ce qu’on ne voit pas, ce sont les avantages du libéralisme. C’est d’ailleurs pour cela que les libéraux reprennent si souvent le discours de Bastiat : parce qu’il décrit le handicap dont ils souffrent et montre en quoi ce handicap est injuste. Mais même en en démontrant l’injustice, il est toujours là.

En fin de compte, le discours libéral français consiste le plus souvent à montrer, secteur par secteur, en quoi le libéralisme est plus efficace que l’étatisme. Les libéraux cherchent par conséquent à passer pour des pragmatiques ne se sentant tenus par aucun dogme et prêts, le cas échéant, puisqu’ils sont pragmatiques et uniquement soucieux des résultats, à adopter des positions qui peuvent paraître un peu étranges de la part de libéraux. C’est ainsi que des gens comme Sorman, Rioufol ou Michaux sont capables de défendre les politiques de discrimination “positive” qui pourraient pourtant sembler, et qui en fait sont absolument, contraires à tout ce que le libéralisme représente. Le libéralisme, répondront probablement les intéressés, n’est pas une idéologie, et nous sommes des pragmatiques prêts à défendre ce qui marche plutôt que ce qui paraît conforme à notre doctrine. Soit, mais pourquoi dans ce cas se dire libéral ?

Conséquence plus générale de cet état de choses, le discours libéral se concentre généralement sur l’économie, domaine tenu pour distinct de tous les autres et dans lequel certaines choses peuvent être mesurées avec une certaine précision. L’économie se prête à la modélisation plus ou moins mathématique, donc les libéraux y trouvent matière à démontrer de façon assez objective, la justesse de leurs idées. Les controverses existent mais les libéraux peuvent néanmoins, dans ce domaine, défendre leur point de vue sans se référer à de quelconques fondements philosophiques. Le libéralisme économique mérite d’être défendu, disent-ils, parce qu’il marche.

Cette attention particulière portée aux résultats pratiques et à l’examen au cas par cas des domaines de l’action publique est cependant, pour les libéraux, une solution de facilité.

Le libéralisme repose d’abord sur une certaine vision de l’humanité, selon laquelle la liberté est un bien précieux pour des raisons tout à fait distinctes de l’efficacité économique. Même si la liberté n’était pas la meilleure des politiques économiques, elle mériterait sans doute d’être défendue pour un certain nombre de raisons qui ne seront pas détaillées ici mais dont les libéraux devraient se souvenir.

L’économie n’est qu’un domaine de l’activité humaine parmi d’autres, et il est même loin d’être certain qu’on puisse l’isoler comme on le fait généralement. La plupart des gens font huit heures par jour et cinq jours par semaine “de l’économie”. Ils travaillent et gagnent leur vie. Jouir de la liberté pendant cet intervalle n’a pas que des conséquences économiques. En réalité, l’idée libérale s’applique à l’économie comme aux autres domaines, avec les mêmes avantages et les mêmes inconvénients. L’économie se prête simplement mieux à des modélisation appuyées sur des outils mathématiques d’une part, à des observations quantifiées d’autre part, ce qui permet aux libéraux d’espérer imposer leur point de vue par la logique. C’est d’ailleurs en partie ce qui se passe.

Mais ce qui est vrai en économie l’est également, et de façon très logique, dans les autres domaines de l’activité humaine. L’idée que la satisfaction des désirs et des besoins individuels n’est pas contradictoire avec celle des besoins collectifs est vraie ou fausse mais n’a aucune raison de se limiter aux activités visant à la création de richesses matérielles. Si la concurrence entre producteurs et marchands apporte des bénéfices au consommateurs, pourquoi ne serait-il pas également vrai que la concurrence entre les idées apporte des bénéfices au citoyen ?

Enfin, le point le plus important parmi ceux que les libéraux ont malheureusement oubliés est le fait que le libéralisme est avant tout une théorie de l’Etat. Les libéraux français se contentent généralement d’énumérer ce que l’Etat ne doit pas faire, et ils le font souvent très bien. Des gens comme Revel ou Manière, ou plus récemment Laine, ont ces dernières années plaidé de façon très convaincante en faveur du désengagement de l’Etat, mais expliquer où l’Etat ne doit pas être est insuffisant. Il faut aussi expliquer où il doit être, et les deux réflexions sont non seulement aussi importantes l’une que l’autre, mais surtout complètement indissociables. Le désengagement de l’Etat ne doit pas être une sorte de route sans fin comme l’est la progressivité de l’impôt à gauche : apparemment, l’impôt n’est jamais suffisamment progressif et on ne peut jamais trop redistribuer les revenus. Telle est l’impression donnée par le discours de gauche sur la redistribution. Le discours libéral sur le désengagement de l’Etat ne doit pas en être une image inversée. L’Etat n’a besoin de se désengager que parce qu’il est, aujourd’hui, trop engagé. Il pourrait très bien ne pas l’être suffisamment, ce qui est d’ailleurs le cas dans un certain nombre de domaines.

Le désengagement de l’Etat repose sur l’idée que l’Etat fait certaines choses mieux que d’autres, et surtout fait certaines choses plus légitimement que d’autres. En gros, si l’on dit que la mission de l’Etat consiste à assurer la sécurité des biens et des personnes, son désengagement d’autres domaines d’activité doit avoir lieu dans la perspective d’une rationalisation des ses missions en faveur de ses tâches fondamentales. C’est là que se trouve la réponse des libéraux aux objections selon lesquelles ils veulent faire disparaître l’Etat et laisser le désordre s’installer. La question n’est pas la “quantité” d’Etat mais ce que l’Etat doit faire et ne pas faire.

Or, l’Etat remplit au moins une fonction particulièrement importante du point de vue d’un libéral : la défense de la liberté. Celle-ci peut être indirecte, au sens où l’Etat, en assurant la sécurité, protège les individus des menaces autres qu’étatiques contre leur liberté ; ou plus directe dans la mesure où une constitution bien faite limite les pouvoirs de l’Etat, et où l’équilibre des pouvoirs, un principe d’une incroyable complexité quand on veut qu’il s’applique correctement, doit conduire l’Etat à se restreindre lui-même. Rares sont les endroits où ce principe est correctement compris et mis en pratique, et la France n’en fait pas partie. Les libéraux devraient logiquement chercher à faire en sorte que “par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir”. Tel devrait être leur premier objectif, et telle n’est pas leur activité principale. Laisser dire, comme les politiciens le font régulièrement, que ces questions n’intéressent pas les Français et que ces derniers veulent avant tout voir leur niveau de vie augmenter, c’est manquer une occasion de replacer le libéralisme au centre même du débat politique français, et c’est aussi accepter que soit tenu un discours méprisant, à la limite de l’insulte, vis-à-vis des Français.

Le libéralisme s’appuie sur une vision à la fois optimiste et pessimiste de l’être humain. Optimiste parce que l’individu est considéré comme capable de bien faire quand on le laisse faire, pessimiste parce que les individus sont considérés comme susceptible d’essayer d’imposer leur volonté les uns aux autres. Le libéralisme n’est absolument pas une doctrine proclamant l’inutilité de toute contrainte étatique, c’est un ensemble de principes visant à fixer des limites aussi peu contraignantes que possible à la liberté.

On peut supposer que la raison principale pour laquelle le libéralisme est impopulaire en France et dans d’autres pays est que les gens se méfient les uns des autres. C’est ce qui est dit de façon très claire dans le domaine économique et social : si on laisse les patrons faire ce qu’ils veulent, dit-on, ils exploiteront les travailleurs. Le même argument est employé dans d’autres domaines, comme la possession d’armes à feu par les individus.

Les libéraux devraient prendre au sérieux ces arguments. Cela ne sert à rien de soutenir que les individus sont plus responsables qu’ils ne le sont. Mettre l’individu et la liberté individuelle au centre d’une doctrine politique est parfaitement légitime et justifié, mais la liberté individuelle suppose un certain sens des responsabilité qui est ou n’est pas acquis, et s’il ne l’est pas, alors il faut faire en sorte qu’il le soit. Ce devrait être l’un des objectifs du libéralisme, et c’est l’une de ses difficultés. Si c’est l’Etat qui doit préparer les individus à être de plus en plus libres, cela signifie que l’on confie à l’Etat la mission d’assurer son propre rétrécissement, et rares sont les bureaucraties qui remplissent avec zèle ce type de missions. C’est un problème complexe, mais c’est le problème des libéraux. Ce sont eux qui veulent faire reculer l’Etat, et seul l’Etat peut faire reculer l’Etat. La tâche est loin d’être aisée et le politicien qui saura la mettre en oeuvre sera très habile. Cet apparent paradoxe ne fait pas du libéralisme une utopie, et les libéraux devraient également se demander pour quelle raison un tel contresens est aussi fréquent. L’une des raisons peut être justement le fait que le libéralisme fait partie des doctrines qui deviendraient efficaces si une majorité suffisamment importante des citoyens l’approuvaient, ce que l’on aurait aussi bien pu dire, pourrait-on entendre, du communisme. Ergo, le libéralisme est un nouveau totalitarisme, une “perversion de l’esprit humain” et une utopie dangereuse. C’est aux libéraux de trouver la réponse appropriée à cet argumentaire étonnamment agressif mais entendu régulièrement, et la réponse pourrait être que le libéralisme ne vise qu’à l’exercice de la liberté individuelle et qu’il ne peut pas, par conséquent, devenir une tyrannie puisqu’il cesserait instantanément d’être ce qu’il est. On ne pouvait pas en dire autant du communisme, dont le caractère tyrannique ne contredisait pas fondamentalement les objectifs. On peut supposer que l’évolution vers le libéralisme occidental du XIXe siècle s’est inscrite dans l’émergence de l’Etat moderne, conçu avant tout comme un instrument de protection des individus à la fois contre les périls extérieurs et contre eux-mêmes. L’évolution ultérieure de l’Etat est peut-être le produit de la Première guerre mondiale, c’est-à-dire d’un retour en force de ces dangers ayant entraîné la construction d’économies de guerre qui auront évolué en temps de paix vers les économies administrées encore très présentes en France. Peut-être les longues périodes de paix sont-elles propices à un recul relativement spontané de l’Etat. Peut-être les tensions internes à la société françaises sont-elles plus fortes qu’on ne le croit habituellement. Tout cela est possible et mérite d’être examiné et discuté, car c’est en définissant les finalités de l’Etat que l’on peut fixer ses limites, et c’est en réfléchissant aux limites de la doctrine libérale qu’on peut la rendre effectivement applicable.

D’une certaine manière, l’instauration du libéralisme présente des points communs avec les processus de paix dans les pays en guerre civile. Il faut essayer avec beaucoup de patience de faire en sorte que les gens se méfient de moins en moins les uns des autres. Il est sans doute nécessaire de forcer la marche des choses à certains moments, et la grande bataille contre les syndicats à laquelle les libéraux s’attendent plus ou moins aura peut-être lieu, mais le plus important est sans doute de démêler l’ensemble assez complexe de tensions et de méfiance mutuelle qui existe dans la société française. C’est une tâche complexe et très difficile, mais quel intérêt y a-t-il à ne pas admettre l’existence de difficultés ? Si le discours libéral se contente de montrer en quoi le libéralisme est le meilleur des systèmes imaginables en s’appuyant sur des exemples économiques, plutôt que d’essayer de comprendre pourquoi pratiquement personne n’a l’air convaincu, les choses ne sont pas près d’avancer.

 Say no more
 

Montesquieu

De Wikiberal
 
Charles Louis de Secondat, baron de La Brède et de Montesquieu est un philosophe et magistrat français du siècle des Lumières né le 18 janvier 1689 à la Brède (Gironde), et mort à Paris le 10 février 1755.
Certains ont voulu le réduire, à l'image d'un doctrinaire univoque du libéralisme, mais en fait il fut l'inspirateur le plus lucide avec John Locke des principes d'organisation politique et sociale sur lesquels nos sociétés modernes s'appuient.
« Dans une nation libre, il est très souvent indifférent que les particuliers raisonnent bien ou mal: il suffit qu'ils raisonnent; de là sort la liberté, qui garantit des effets de ces mêmes raisonnements ».
Il est le père de la théorie de la séparation des pouvoirs afin d'en neutraliser les abus. Montesquieu voit dans le législatif le pouvoir le plus susceptible d'abuser de son autorité. Toutefois, Montesquieu ne désirait rien d'autre que de voir évoluer la monarchie française vers le modèle britannique, alors que les pères fondateurs de la Révolution française (excepté Mounier) fuyaient au contraire ce modèle gangrené par la corruption
Fils de Jacques de Secondat, baron de Montesquieu (1654-1713) et de Marie-Françoise de Pesnel, baronne de la Brède (1665-1696), Montesquieu naît dans une famille de magistrats, au château de la Brède (près de Bordeaux) dont il porte d'abord le nom et auquel il sera toujours très attaché. Ses parents lui choisissent un mendiant pour parrain afin qu'il se souvienne toute sa vie que les pauvres sont ses frères[1].
Après une scolarité au collège de Juilly et des études de droit, il devient conseiller du parlement de Bordeaux en 1714. En 1715, il épouse à 26 ans Jeanne de Lartigue, une protestante issue d'une riche famille et de noblesse récente qui lui apporte une dot importante. C'est en 1716, à la mort de son oncle, que Montesquieu hérite d'une vraie fortune, de la charge de président à mortier du parlement de Bordeaux et de la baronnie de Montesquieu, dont il prend le nom. Délaissant sa charge dès qu'il le peut, il s'intéresse au monde et au plaisir.
À cette époque l'Angleterre s'est constituée en monarchie constitutionnelle à la suite de la Glorieuse Révolution (1688-1689) et s'est unie à l'Écosse en 1707 pour former la Grande-Bretagne. En 1715, le Roi Soleil Louis XIV s'éteint après un très long règne et lui succèdent des monarques plus faibles. Ces transformations nationales influencent grandement Montesquieu ; il s'y référera souvent.
Il se passionne pour les sciences et mène des expériences scientifiques (anatomie, botanique, physique...). Il écrit, à ce sujet, trois communications scientifiques qui donnent la mesure de la diversité de son talent et de sa curiosité : Les causes de l'écho, Les glandes rénales et La cause de la pesanteur des corps.
Puis il oriente sa curiosité vers la politique et l'analyse de la société à travers la littérature et la philosophie. Dans les Lettres persanes, qu'il publie anonymement (bien que personne ne s'y trompe) en 1721 à Amsterdam, il dépeint admirablement, sur un ton humoristique et satirique, la société française à travers le regard de visiteurs perses. Cette œuvre connaît un succès considérable : le côté exotique, parfois érotique, la veine satirique mais sur un ton spirituel et amusé sur lesquels joue Montesquieu, plaisent.
En 1726, Montesquieu vend sa charge pour payer ses dettes, tout en préservant prudemment les droits de ses héritiers sur celle-ci. Après son élection à l'Académie française (1728), il réalise une série de longs voyages à travers l'Europe, lors desquels il se rend en Autriche, en Hongrie, en Italie (1728), en Allemagne (1729), en Hollande et en Angleterre (1730), où il séjourne plus d'un an. Lors de ces voyages, il observe attentivement la géographie, l'économie, la politique et les mœurs des pays qu'il visite. Avant 1735, il avait été initié à la franc-maçonnerie en Angleterre[2].
De retour au château de la Brède, en 1734, il publie une réflexion historique intitulée Considérations sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence, monument dense, couronnement de ses années de voyages et il accumule de nombreux documents et témoignages pour préparer l'œuvre de sa vie, De l'esprit des lois. D'abord publié anonymement en 1748 grâce à l'aide de Mme de Tencin, le livre acquiert rapidement une influence majeure alors que Montesquieu est âgé de 59 ans. Ce maître-livre, qui rencontre un énorme succès, établit les principes fondamentaux des sciences économiques et sociales et concentre toute la substance de la pensée libérale. Il est cependant critiqué, attaqué et montré du doigt, ce qui conduit son auteur à publier en 1750 la Défense de l'Esprit des lois. L'Église catholique romaine interdit le livre - de même que de nombreux autres ouvrages de Montesquieu - en 1751 et l'inscrit à l'Index (La partie religion avait été écrite au même titre que les autres). Mais à travers l'Europe, et particulièrement en Grande-Bretagne, De l'esprit des lois est couvert d'éloges.
Dès la publication de ce monument, Montesquieu est entouré d'un véritable culte. Il continue de voyager notamment en Hongrie, en Autriche, en Italie où il demeure un an, au Royaume-Uni où il reste 18 mois. Il poursuit sa vie de notable, mais reste affligé par la perte presque totale de la vue. Il trouve cependant le moyen de participer à l'Encyclopédie, que son statut permettra de faire connaître, et entame la rédaction de l'article Goût : 'il n'aura pas le temps de terminer, c'est Voltaire qui s'en chargera.
C'est le 10 février 1755 qu'il meurt d'une fièvre inflammatoire.

 
C’est une véritable révolution culturelle. Les Français, pourtant biberonnés à l’Etat providence, ne croient plus en leur modèle social. Ou en tout cas, de moins en moins. Lorsqu’ils sont interrogés sur les facteurs les plus à même de renforcer l’union de notre société, les citoyens estiment que la protection sociale est moins essentielle, révèle un rapport commandé par la Direction générale de la cohésion sociale, que 20 Minutes s’est procuré en exclusivité.
«Fait notable, ce désenchantement est particulièrement marqué chez les personnes les plus fragiles qui pourraient pourtant bénéficier des filets de protection dans cette période de crise: les non-diplômés (-9 points par rapport à 2011), les bas revenus (-7), les personnes au foyer (–7), les personnes souffrant de handicap (-8)», indique l’étude réalisée par le Credoc, un centre spécialisé dans l’observation des conditions de vie.

«Cette tendance libérale progresse depuis 15 ans»

Exit le collectif, pour s’en sortir, les Français préfèrent compter sur eux-mêmes. «Cette tendance libérale progresse depuis 15 ans mais se creuse davantage cette année», détaille Sandra Hoibian, auteure de l’étude et directrice adjointe du département Conditions de vie du Credoc.
«Elle s’explique par la désillusion croissante face à l’Etat-providence: le chômage et la pauvreté continuent de progresser, son action ne semble donc pas efficace. Du coup, l’idée que les individus, y compris les plus démunis, doivent se prendre en main se propage.» D’ailleurs, et alors même que la pauvreté s’est accrue en France ces dernières années, l’action des pouvoirs publics envers les plus précaires n’apparaît plus comme une idée fédératrice de la société française.

La liberté avant l'égalité ou la fraternité

Si les notions d’égalité et de fraternité sont donc en perte de vitesse, le désir de liberté, troisième valeur de la devise républicaine, ne cesse en revanche de gagner du terrain. Les citoyens veulent être les seuls maîtres de leur vie, choisir avec qui ils s’unissent et comment ils vont mourir. Ils sont ainsi majoritairement favorables au mariage des personnes du même sexe ou encore, au suicide médicalement assisté en fin de vie.
Et si certaines libertés individuelles restent à acquérir, «l’étude European social survey prouve que les Français sont les plus nombreux à considérer qu’ils sont libres de vivre leur vie comme ils l’entendent: 50% l’affirment, contre seulement 33% des Anglais et 25% des Allemands», rappelle Sandra Hoibian.

«Les Français ne veulent pas de désengagement de l’Etat»

Libéraux et plus que jamais excédés par l’impôt, les Français seraient-ils à deux doigts de prendre leur carte au Tea Party, le mouvement libertarien américain? «Il faut tempérer: les Français restent très attachés à leur modèle social et ils en attendent encore beaucoup. Autrement dit, ils sont plus libéraux que par le passé, mais ils le sont toujours nettement moins que les Anglo-Saxons», répond Sandra Hoibian.
En outre, si les Français réclament davantage de libertés, «ils ne veulent pas de désengagement de l’Etat, au contraire. Ils réclament plus d’ordre et souhaiteraient, par exemple en matière de laïcité, que la réglementation se renforce, notamment pour interdire le port de signes religieux dans les entreprises».


Difficile d'être libéral en France, C. GAVE

Alors qu'il fonde tout le système juridique aux Etats-Unis, le libéralisme a bien du mal à exister en France. Et ce ne sont pas les multiples composantes qui ont intérêt à cette situation qui vont l'aider à émerger.


Je vais avoir 70 ans, l’âge où les ombres s’allongent sur le sol, et de temps en temps je me pose la question « Mais pourquoi est ce aussi difficile d’être libéral en France ? Qui peut aussi se traduire par "Mais qu’est que j’ai été faire dans cette galère ?" Voici ce qui pour moi est un début de réponse à ces étranges questions.

Tout d’abord, le libéralisme est une philosophie du droit et non pas du tout une série de recettes économiques. Des principes juridiques ont émergé au cours du XVIIe et XVIIIe siècles, ont été appliqué aux États-Unis et en Grande-Bretagne et à la stupéfaction générale ont amené d’abord au décollage économique de ces deux pays, puis ensuite de tous les autres pays qui ont suivi leur exemple.

Le libéralisme n’a donc rien à voir avec l’économie, tout à voir avec le droit

L’application des principes juridiques du libéralisme amènent à la croissance économique, mais c’est une conséquence heureuse et non recherchée. Ces principes juridiques définissent d’un coté les relations des individus entre eux et de l’autre la relation entre ceux ci et l’entité à qui ils ont librement délégué le monopole de la violence légale, je veux dire l’État.
LE principe fondamental du libéralisme est donc que le droit régit TOUT et est supérieur à TOUT. Dans un monde organisé selon une philosophie libérale, le droit est le cœur même du système ainsi qu’on le voit aux USA où le Président lors de son intronisation jure de respecter la Constitution des États-Unis, cette Constitution étant, comme chacun le sait, la clef de voute de tout le système juridique, légal et économique aux USA.Et cette Constitution est inchangée depuis son origine, à l’exception de quelques amendements, dont le plus célèbre reste le premier "Le Congrès des États-Unis ne fera pas de loi pour limiter la liberté d’expression", ce qui bien sur interdit par exemple toutes les stupides lois mémorielles dont nous souffrons dans notre pays. Or dans le subconscient des Français, RIEN ne peut être supérieure à l’État

Et donc nous ne pouvons avoir aucune stabilité juridique puisque chaque changement dans l’État amène avec lui des changements dans le droit. Depuis que les États-Unis existent, nous avons eu le bonheur d’avoir cinq constitutions républicaines, deux ou trois monarchies, un ou deux empires, et quelques régimes indéterminés tels le Consulat ou Vichy. Et tous les agents de l’État qui avaient jure fidélité à la Constitution précédente n’ont jamais eu aucun problème à continuer à servir quand bien même la Constitution aurait changé puisque l’État et ses serviteurs restaient en place.

En France, l’État est pérenne, les constitutions et donc le droit sont par contre tout à fait transitoires. Et d’ailleurs, depuis Napoléon, l’État a même son droit à lui, ce qui est une monstruosité philosophique puisque cela veut dire que l’État et ses agents répondent à des règles différentes du commun des mortels.

Dans un monde libéral, le droit est supérieur à l’État. En France l’État est supérieur au droit. Et donc prendre le contrôle de l’État en France, c’est se retrouver dans la position de Moïse, en contrôle du droit ET de l’État, c’est a dire être à la fois roi et prêtre, et non pas simplement président (temporaire), ce qui est quand même beaucoup plus intéressant que d’être brimé par des textes rédigés il y a deux cent ans.

Et donc pour moi, être libéral, c’est vouloir ramener l’État sous le contrôle du droit. Et c’est là où les problèmes commencent, bien sur. Car qui vais je trouver sur mon chemin dans cet effort ?

A peu prés tout le monde…

D’abord et avant tout ceux que j’appelle les "bonapartiste". Loin de vouloir un État neutre et soumis au droit, ils veulent un État "fort", c’est à dire soumettant le droit à la volonté d’un "chef" qui prendrait le contrôle de l’État et le dirigerait en fonction de l’Intérêt général qu’il serait bien sûr seul à même de déterminer. La Constitution de la Ve République est organisée selon ces principes. On en voit les résultats heureux tous le jours.

Un libéral ne peut pas être d’accord avec de telles inepties et le vrai adversaire de tout libéral est, et à toujours été les bonapartistes, gaullistes, chiraquiens et autres sarkozystes.

Les bonapartistes pensent qu’un État fort rendra la France forte et tant pis si les citoyens sont faibles et n’ont guère de droits…Un libéral pense que des citoyens forts font une nation forte, la contradiction est donc totale.

Cette forme d’État qui a eu (peut être) son utilité dans le passé, pour reconstruire la France après 1945 par exemple est aujourd’hui complètement obsolète, compte tenu de l’évolution vers une économie de la connaissance.

Viennent ensuite les socialistes, tout empêtrés dans leur rêve de justice sociale centrée non pas autour de la notion de liberté, mais autour de celle d’égalité. Pour eux le but est de prendre le contrôle de l’appareil d’État pour assurer par la force une redistribution équitable (à leurs yeux), des ressources. Et si cela les amène à violer le droit, tant pis. On le changera (cf. Inconstitutionnalité récente de l’impôt confiscatoire au dessus de 75%).

Fondamentalement, ils pensent que le droit est fonction de la majorité du moment comme l’inénarrable monsieur Laignel en 1981 et leur cri de guerre reste "Vous avez juridiquement tort puisque vous êtes politiquement minoritaire."

Voila qui revient à fonder le droit sur la loi majoritaire du moment, ce qui est une incroyable erreur conceptuelle.

Le droit a son fondement dans l’individu et non pas dans la majorité. Fonder le droit sur une erreur intellectuelle amène TOUJOURS à un appauvrissement généralisé et c’est bien sur ce qui est en train d’arriver en France en ce moment (voir la Parabole de Vignerons et du Maitre de la Vigne dans les Evangiles, pour plus d’explications)


Suivent les "intellectuels Français" et autres "oints du Seigneur" locaux qui tous unanimement détestent le libéralisme puisque dans un régime liberal leurs voix ne vaudraient ni plus ni moins que celle d’un charpentier ou plombier zingueur. Comme le disait le regretté Raymond Boudon, "Les intellectuels en France détestent le Libéralisme parce que dans un régime Liberal, ils seraient payés en fonction de leur valeur"

Je ne sais pas pourquoi, je pense immédiatement au CNRS…mais d’autres noms me viendraient assez facilement à l’esprit.

Et puis, tout en bas, pas très nombreux mais faisant un bruit fou, une hérésie du libéralisme, les libertaires ou libertariens. Comme en France l’État se sent et est de fait supérieur au droit - ce qui est la cause de tous nos problèmes - la solution pour eux est non pas de ramener l’État à sa place mais de supprimer l’État, ce qui parait un peu …excessif. Un monde où la violence légitime serait privatisée, où les biens communs n’existeraient pas, ou l’affectio societatis disparaitrait, où les faibles ne seraient pas protégés, aurait tendance à s’organiser selon des principes mafieux fondés sur la force et non plus sur le droit, comme on le voit en Sicile tous les jours. Voila qui n’est guère souhaitable. Supprimer l’État, c’est de fait supprimer le droit, puisque le rôle principal de l’État est d’assurer une application égale à tous des règles essentielles et si nécessaire par la force.

Le but du libéralisme est donc simplement de rétablir le contrôle de l’État par le droit. Et ce rétablissement aurait des conséquences nombreuses et heureuses.

Par exemple, la croissance économique ne se rétablira en France que lorsque nous aurons effectué ce véritable retournement intellectuel puisqu’il ne peut y avoir croissance dans l’insécurité juridique et que la prééminence de l’État garantit que cette insécurité juridique va durer.

Hélas, je ne pense pas que les choses vont beaucoup bouger de mon vivant, ni que j’aurai une grande influence, mais cela ne n’importe guère.Ce qui compte c’est de porter le flambeau, quelqu’un d’autre le relèvera un jour.

Après tout, il n’est pas honteux d’échouer là où Montesquieu, Benjamin Constant, Tocqueville, Bastiat, Raymond Aron, Jouvenel, Revel et tant d’autres ont échoué avant moi.

Et comme le disait un grand Français, Pierre de Coubertin "L’important dans la vie ce n’est pas le triomphe mais le combat ."

Ce billet a été publié initialement sur le blog de l'Institut des Libertés




octobre 22, 2014

Conservatisme et néo-conservatisme politique et la critique

L'Université Libérale, vous convie à lire ce nouveau message. Des commentaires seraient souhaitables, notamment sur les posts référencés: à débattre, réflexions...Merci de vos lectures, et de vos analyses.



Terme dérivé du latin conservare et appliqué aux mouvements politiques et intellectuels qui ont pour but la conservation de l'ordre social existant ou le rétablissement d'un ordre antérieur, ordre fondé à leurs yeux sur des lois naturelles ou sur des données transcendantes. Les conservateurs considèrent avec un certain scepticisme les innovations sociales et les grandes théories abstraites.
Mouvement d'opposition au libéralisme et au radicalisme , issu de la résistance aux idées des Lumières et de la Révolution française
 
Autant de conservateurs à Gauche qu'à Droite! 
Le terme est apparu dans la première moitié du XIXème siècle mais avec un sens différent selon les pays. C’est donc une idée moderne mais dont la spécificité est d’être une idée contre, puisqu’elle naît contre la modernité. Elle s’est en effet constituée en défense de l’ordre politique et social traditionnel, celui-là même que vient bouleverser la Révolution française.

Contrairement au libéralisme et au socialisme , le conservatisme politique représente plus une attitude dans un contexte historique précis qu'une philosophie achevée. Il offre une idéologie à ceux qui se sentent dépassés ou mis à l'écart par la modernisation . Néanmoins, il reste ambivalent face à la modernité, puisque pour la combattre il se sert des instruments qu'elle a forgés, comme les associations, les partis et les médias.
À l’origine, la notion de conservatisme ne s’identifie ni plus ni moins qu’à une réaction contre la révolution donc à un courant contre-révolutionnaire porté par trois figures intellectuelles et politiques importantes : l’Anglais Burke et les Français De Maistre et Bonald. Ces trois hommes ont en commun de juger les principes de la Révolution française contraires à la nature de l’Homme, tant sur le plan politique que social ou même moral. Leur critique, qui s’oppose aux Lumières et aux Droits de l’Homme, s’articule selon trois axes : 

une critique de principe : l’Homme est une créature divine. Il est limité et ne peut pas tout savoir ni tout maîtriser. Il doit donc être modeste face aux volontés divines et ne peut pas faire oeuvre prométhéenne en essayant de bouleverser un ordre politique et social institué depuis des siècles. 

Une critique politique : la démocratie est incompatible avec la vraie autorité qui doit encadrer les passions humaines. Or la démocratie permet justement cette libération des passions ce qui en fait un régime terrifiant. En outre le pouvoir politique doit avoir une origine transcendante, comme c’est le cas de la monarchie de droit divin, ce qui ne l’est pas pour la démocratie qui vient de la souveraineté populaire. 

Une critique sociale : la bonne société humaine ne saurait être un agrégat d’individus mais une communauté vivante et ordonnée, organisée selon le principe des hiérarchies naturelles, là aussi voulues par dieu. 

Ces trois axes placent donc le conservatisme comme une réaction : réaction contre l’universalisme (il n’y a que dieu d’universel) et réaction contre le rationalisme. 

Les deux adversaires du conservateur sont donc les deux autres figures politiques de la modernité : le libéral et le socialiste (ou révolutionnaire). Les deux ont en commun une solide croyance dans le progrès et le déroulement d’un temps linéaire appelé autrement « sens de l’histoire ». 

De fait, durant une majeure partie du XIXème siècle, le conservatisme s’est identifié à la Contre-révolution, que ce soit en France ou dans les pays d’Europe touchés par les conséquences libérales de la Révolution française. Mais ce conservatisme était voué à l’échec dès lors que la tradition ante-révolutionnaire était rompue, sans possibilité de retour comme l’a montré l’évolution de la monarchie française de 1815 à 1848. Il s’est alors transformé en Réaction et le conservatisme politique a désigné autre chose. 

DES CONSERVATISMES ?
Il est resté de cette première période du conservatisme un attachement à ce qui est de l’ordre supposé de la permanence et de l’éternité, quelle que soit le domaine envisagé, ce qui continua à opposer les conservateurs aux libéraux et a fortiori aux socialistes, les deux s’attachant au progrès et à la maxime « Du passé faisons table rase… ». Ce que l’intellectuel allemand conservateur Moeller Van Den Bruck traduisait au début des années 1920 par :

 « Celui qui ne croit pas que nous remplissons le but de notre existence dans le court laps de temps, durant la minute qui s’écoule, celui-là est conservateur. » 

Politiquement, cela s’est traduit au Royaume-Uni et dans les États germaniques devenus l’Empire allemand en 1870 par un attachement sans faille à la monarchie et au principe monarchique dans lequel s’incarnait la nation. Cette simplification à outrance ne saurait cependant masquer le fait qu’il pouvait y avoir des nuances d’un pays à un autre, ne serait-ce que sur la classe sociale qui portait ce conservatisme politique (la noblesse rurale par exemple pour les pays germaniques). 

Mais la France occupe de fait une place à part car la puissance du mouvement républicain a semblé repousser le principe conservateur aux marges politiques. Hormis les légitimistes, on pourrait même se demander s’il y a pu y avoir des conservateurs en France puisque l’origine de la République est largement libérale. En fait c’est clairement la nation qui a pris en France le relais du principe monarchique comme ancrage du conservatisme. 

Ainsi peu à peu, quels que soient les pays, on a pu attribuer au conservatisme quelques caractéristiques simples : 

défense de la nation
conservation de la structure familiale comme base de la structure politique
foi dans la monarchie ou plus largement dans l’État
vie dans l’ordre social et la discipline 

Ceci étant posé, la définition du conservatisme n’est pas forcément plus claire car à bien observer ces éléments, on peut s’apercevoir que ce sont ceux finalement défendus par n’importe quel État. Or cela amène à la remarque assez évidente que l’État est en effet conservateur par essence et qu’il y a donc coexistence des deux principes. C’est d’ailleurs tellement vrai que l’État soviétique est rapidement devenu sous l’emprise de la contre-révolution bureaucratique le champion de ces principes. 

Autre élément de difficulté : l’existence d’un conservatisme social qui a connu une évolution similaire au conservatisme politique. Il apparaît en effet lui aussi au XIXème siècle en réaction à l’industrialisation et ses conséquences sociales, en particulier le laminage des élites traditionnelles et l’urbanisation. Mais il suit la même évolution que le conservatisme politique en gardant de sa première période l’hostilité au changement et à l’évolution tout en s’attachant à certains principes comme la défense de la hiérarchisation sociale de la société ou la nécessité des élites.
 

La gauche est gagnée par un conservatisme de principe

par André Comte-SponvilleGaz de schiste, OGM, nucléaire... La gauche en France, globalement, est contre. L’opinion n’est pas pour. Comme ce sont des sujets sur lesquels je n’ai aucune compétence particulière, je me garderai bien de trancher. Au reste, les experts eux-mêmes, sur ces questions, divergent. Mais ce qui me frappe, c’est ce tir nourri contre des ressources, énergétiques ou agricoles, qui résultent d’abord de considérables progrès scientifiques ou techniques. Cela ne prouve évidemment pas qu’il faille les utiliser (un progrès scientifique peut déboucher, socialement, sur une régression), mais devrait amener à les considérer, jusqu’à plus ample informé, avec bienveillance.

Or, c’est le contraire qui se passe : les sciences nous sont devenues suspectes, les techniques, inquiétantes. C’est un renversement considérable.
La gauche, qui se voulut pendant trois siècles du côté de tous ces progrès, y compris scientifiques, devient plus frileuse, plus méfiante, voire, parfois, carrément conservatrice. Qu’il puisse y avoir à cela de bonnes raisons, je n’en doute pas. Préserver les acquis sociaux, les paysages, l’environnement, ce sont des combats légitimes. Mais qu’il serait suicidaire, pour notre pays, de confondre avec le refus de principe de toute innovation, de toute adaptation, de toute transformation, fussent-elles difficiles et non dépourvues de risques. Qu’il y ait dans tout progrès une part de conservation nécessaire, je l’ai rappelé bien souvent. Ce n’est pas une raison pour glisser, comme certains le font, du progressisme à l’immobilisme, ni du rationalisme à l’obscurantisme.

Le principe de précaution, tel qu’il est énoncé par la Déclaration de Rio ou par la loi Barnier, se veut un principe d’action : l’absence de certitude scientifique, concernant un risque possiblement irréversible, ne doit pas nous dispenser de prendre « des mesures effectives », c’est-à-dire d’agir. Mais il fonctionne plutôt, en pratique, comme un principe d’inhibition, qu’on pourrait formuler à peu près ainsi : « Dans le doute, abstiens-toi. » Comme il y a toujours un doute (le risque zéro n’existe pas), il pousse certains à vouloir s’abstenir toujours, donc à ne rien faire. C’est opter pour la peur plutôt que pour la prudence. Et augmenter les risques, bien souvent, au lieu de les réduire. Toute action est risquée. Mais l’inaction presque toujours, l’est davantage.

Il n’y a pas de progrès sans risque. C’était vrai de la maîtrise du feu au paléolithique, comme de la Révolution industrielle au XIXe siècle. D’ailleurs, l’une et l’autre ont entraîné, au fil des siècles, des millions de morts. Est-ce une raison, rétrospectivement, pour les condamner ? Bien sûr que non ! Un progrès risqué, comme ils le sont tous, vaut mieux que l’immobilisme, qui est, lui, risque certain et plus grand. Ce n’est pas une raison pour faire n’importe quoi. Mais c’en est une pour refuser l’obscurantisme et le conservatisme de principe. Pour transmettre à nos enfants une planète habitable, nous avons besoin de davantage de science, de technique, de progrès, et non pas de moins.

Vive le conservatisme de gauche !

Qu’est-ce alors que l’instinct de conservation ? Au commencement, nous dit Dupré La Tour, il y a dans l'attitude conservatrice une certaine forme d'inquiétude, liée à la conscience intime de notre finitude:

 « Être conservateur, dit-il, c'est d'abord se savoir périssable ». 

 C’est ensuite faire gré à la désobéissance de manière à renouer avec l’humanisme radical. Les conservateurs d’autre part cultivent l'ordre avec la volonté de réinstaller une liturgie dans le chaos du monde. Ils défendent avec énergie les institutions. Ils ne démantèlent pas l’Etat. Ils luttent contre tous ceux qui font publicité de leur vie privée. Ils séparent à outrance leurs activités. Ils outrepassent l'individualisme sauvage afin de reconstruire ce lien que nous avons rompu avec les générations futures. Ils se méfient des imprécateurs romantiques, des grands émotifs, et préfèrent les intellectuels lucides qui prennent au sérieux la Science, tel Gaston Berger (1896-1960), le père de la prospective. Le conservateur n’est pas un précautionneux. S’il combat le libéralisme affairiste, et le consumérisme, il entend renforcer les ordres – la séparation des pouvoirs – qui garantissent le vivre ensemble. Vous l’aurez compris, l’ennemi du libéralisme révolutionnaire est ami du conservatisme social. Et ne me demandez surtout pas de quel bord est l’auteur ? 


 

L’imposture du « libéral-conservatisme »

L’expression « libéral-conservateur » gagne en popularité. Que se cache-t-il derrière ce mariage invraisemblable ?
Par Mathieu Bédard.

Libéral parce que conservateur


Le conservatisme libéral est une option politique viable qui a fait ses preuves à l’époque des plus belles heures du libéralisme et qui reste tout à fait envisageable dans un futur panorama politique français.

Par José López Martínez.


Conservateur

De Wikiberal
 
Un conservateur est quelqu'un qui
  1. vise à conserver le système tel qu'il est, autant dans ces aspects libéraux qu'illibéraux
  2. défend les libertés sur le plan économique et au niveau du pays mais non sur le plan personnel. Synonyme grosso modo et en général de "droite".
  3. défend la propriété et les « valeurs morales » (famille, travail, religion, patrie, traditions).
Dans son livre, paru en 1987, sur le mouvement conservateur aux Etats-Unis, John P. West cite 7 personnalités importantes : Russell Kirk, Richard Weaver, Frank S. Meyer, Willmoore Kendall, Leo Strauss, Eric Voegelin et Ludwig von Mises

Critique libérale

Un libéral ne se positionne pas pour ou contre le conservatisme : il est à la fois conservateur sous un certain plan ("le libéralisme est la seule idéologie qui n’aspire pas à changer l'homme mais à le respecter", Mathieu Laine) et progressiste sous un autre ("le libéralisme (...) n'est hostile ni à l'évolution ni au changement ; et là où l'évolution spontanée a été étouffée par des contrôles gouvernementaux, il réclame une profonde révision des mesures prises", Friedrich Hayek).
Friedrich Hayek dresse une critique du conservatisme en soulignant ses caractéristiques antilibérales :
  • sa prédilection aveugle pour l'autorité ;
  • son ignorance du fonctionnement des forces économiques (incapacité à comprendre l'ordre spontané qui le conduit souvent à privilégier des politiques absurdes, comme le protectionnisme, le salaire minimum, etc.);
  • son manque de principes (non pas moraux, mais politiques) ;
  • son interventionnisme pour raisons morales, alors que pour un libéral "les convictions morales qui concernent des aspects du comportement personnel n'affectant pas directement la sphère protégée des autres personnes ne justifient aucune intervention coercitive" ;
  • son absence d'objectif, fautes de principes : "le conservatisme peut, par sa résistance aux tendances prédominantes, ralentir une dérive indésirable, mais il ne peut empêcher que la dérive persiste, puisqu'il n'indique aucun autre chemin" ;
  • son acceptation de l'inégalité en droit au bénéfice d'une élite ou d'une hiérarchie, alors que "le libéral estime qu'aucune déférence envers des valeurs reconnues ne peut justifier le recours à des privilèges, monopoles, ou autres moyens de contrainte, en vue de protéger les personnes en question contre les forces du changement économique".

Conservatisme libéral

Hans-Hermann Hoppe a une définition du conservatisme plus positive qui lui est propre, qui n'est pas une opposition au changement ou une préservation du status quo, mais qui est liée à sa conception d'un ordre naturel :
Est conservateur celui qui croit en l'existence d'un ordre naturel, correspondant à la nature des choses : celle de la nature et celle de l'homme (Democracy: The God that Failed, 2001, chapter 10).
Pour Edmund Burke, le conservatisme libéral découle d'un refus de faire table rase du passé : la tradition, la famille, la religion, la hiérarchie, etc. fournissent des cadres de référence aux individus qui leur permettent de se développer. Ce sont de précieux garde-fous contre les doctrinaires constructivistes. Ainsi, Burke critique la conception française des droits de l'homme, construction abstraite et universaliste, pour lui préférer les droits des Anglais, héritage du passé.

Conservatisme antilibéral

De nombreux conservateurs de droite ou de gauche sont antilibéraux par nationalisme, traditionalisme, bellicisme, étatisme, interventionnisme, anti-individualisme, corporatisme, etc. Ils considèrent généralement que la coercition et la violence sont justifiées pour sauvegarder des "valeurs" nationales ou des "valeurs" morales.

Le conservatisme est une utopie car l’État finit toujours par devenir un
Léviathan incontrôlable. « Si l’on rejette le laissez-faire à cause de la faillibilité de l’homme et de sa faiblesse morale, il faut aussi, pour les mêmes raisons, rejeter toute espèce d’action du gouvernement », écrit Ludwig von Mises. (Damien Theillier, Libres ! 100 idées, 100 auteurs)

 

Néo-conservatisme

De Wikiberal
 
Le néo-conservatisme (ou néoconservatisme) est un courant de pensée politique d'origine américaine apparu à la fin du XXe siècle (années 1980). Il s'oppose au relativisme culturel et moral, et à la contre-culture de la nouvelle gauche (« New Left »). Il a influencé Ronald Reagan, George W. Bush et, dans une moindre mesure, Tony Blair.
Le néoconservateur (aussi abrégé en néocon) ne doit pas être confondu avec un partisan de la nouvelle droite française et européenne. Par ailleurs, le néoconservatisme est assimilé à tort à un courant particulier du libéralisme, bien que son discours soit très modérément libéral. En fait, les néoconservateurs acceptent des interventions étatiques importantes dans l'éducation et la santé, en échange de réduction d'impôts et de contrôle de l'inflation (et encore). Ils considèrent comme très important l'engagement de l'État dans le domaine militaire — en vue de lui faire servir des fins offensives (à l'opposé du courant paléoconservateur, partisan de l'isolationnisme).

Historique

En opposition avec la "vieille droite" américaine, fortement anti-étatiste, la "néo-droite" qui a émergé au cours de la guerre froide, sous la houlette du journaliste William F. Buckley Jr., directeur de la National Review, a ouvertement demandé une augmentation massive des dépenses étatiques et une extension de l'appareil policier au motif de combattre plus efficacement le communisme à l'intérieur et à l'extérieur des frontières américaines. Dans la foulée, au cours des années 60, de jeunes intellectuels ayant abjuré leur ancienne foi dans l'Union soviétique, mais toujours marqués par la pensée politique trotskiste, ont commencé à se faire connaître en critiquant la faillite morale entraînée par les politiques sociales lancées sous Kennedy et Johnson sous l'étiquette de "Grande Société" - mais il faut noter qu'ils n'ont jamais remis en cause le Welfare State rooseveltien.
Ces universitaires se nomment Irving Kristol (surnommé "le Pape du néoconservatisme"), Daniel Bell, James Burnham, Seymour Martin Lipset, Patrick Moynihan, etc. et fondent au même moment des revues telles que Encounter, The Public Interest, The National Interest. Ils seront rejoints par Norman Podhoretz, qui a créé de son côté Commentary, où il défend la politique de l'Etat d'Israël et s'oppose au pacifisme de la New Left.
Quittant progressivement le terrain social, ces auteurs s'intéresseront aux relations internationales et défendront - à la suite du polémologue, stratège et mathématicien Albert Wohlstetter, ainsi que de l'éditorialiste William F. Buckley, que l'implication croissante de l'armée américaine dans le monde entier afin, disent-ils, de faire pièces à l'empire soviétique. Ils attireront l'attention du très belliqueux - et supporter inconditionnel de l’État d'Israël - le sénateur démocrate Henry "Scoop" Jackson, en compagnie duquel plusieurs d'entre eux siègeront au sein du Committee on Present Danger. Ils feront campagne au sein du parti démocrate pour que Jackson devienne en 1976 le prochain président des Etats-Unis, mais ils échoueront : Jimmy Carter sera le candidat démocrate et gagnera les élections présidentielles.
Quand Ronald Reagan triomphe en 1980, ils devinent qu'il est leur homme: ancien démocrate passé à droite, anticommuniste décomplexé, désireux de faire de son pays la puissance qui déstabilisera l'URSS, le nouveau président s'entoure d'ailleurs de certains d'entre eux, nommant en particulier Jeanne Kirkpatrick ambassadeur représentant les USA aux Nations unies.
Durant les années 80, une nouvelle génération prend la relève: William Kristol (fils d'Irving et fondateur du Weekly Standard), Paul Wolfowitz, Paul Kagan, Francis Fukuyama, Daniel Pipes, etc. Avec la chute du communisme, il sont orphelins de l'ennemi qui entretenait leur soif d'expansionnisme et d'interventionnisme. Mais ils conservent leur attachement à la défense d'Israël et, sous le prétexte de protéger ce pays, militent pour que les gouvernements américains successifs se lancent dans des "guerres préventives". Au sein de multiples think tanks (Heritage Foundation, American Enterprise Institute, PNAC, etc.) ils travaillent à la confection de rapports visant à convaincre les dirigeants politiques de leurs options (cf. la lettre ouverte à Bill Clinton l'adjurant, en 1998, de renverser le régime de Saddam Hussein).
Aujourd'hui, les néoconservateurs s'identifient généralement avec le Parti Républicain des États-Unis - bien que l'un de leurs mentors, Richard Perle, continue de voter pour le parti démocrate - et avec la défense de l’État d'Israël face à la menace palestinienne.

Leurs rapports avec les libéraux et les libertariens

Les néoconservateurs, de leur propre aveu, ne partagent pas le souhait libéral de voir diminuer le rôle de l'État. Au contraire, ils aspirent à une augmentation des crédits en matière d'armements, à une extension de l'influence gouvernementale américaine dans le monde, au travers d'interventions militaires, de coups d'État téléguidés, de soutiens financiers à des organisations satellites dans différents pays d'Europe ou d'ailleurs.
S'ils contestent, comme les libertariens et la plupart des libéraux, la légitimité de l'ONU, ce n'est pas pour les mêmes raisons : les seconds le font parce qu'ils n'apprécient guère l'idée d'un "gouvernement mondial", tandis que les premiers se mobilisent contre ce type d'institution... parce qu'elle concurrence trop, selon eux, l'influence des États-Unis dans les affaires internationales.
Les néoconservateurs sont partisans en particulier de la "doctrine Wolfowitz", qui pose que l'objectif principal de la politique étrangère des États-Unis est d'empêcher la montée de tout pays (Russie, Chine...) qui pourrait faire échec à l'hégémonie américaine sur le monde entier.
Il n'est donc pas étonnant que les libertariens américains aient, pour la plupart, identifié les néoconservateurs comme des étatistes au moins aussi nuisibles que leurs homologues d'autres tendances politiques. Murray Rothbard, qui avait identifié en eux un discours fortement imprégné de philosophie marxiste, a dénoncé sans faillir leur influence dans la politique américaine et a notamment insisté sur le fait qu'ils servaient l'alliance du Big Business et du Big Government, tandis qu'ils défendaient le développement d'un Warfare State jouxtant le Welfare State (deux faces d'une même médaille, puisque - pour citer la célèbre phrase de Randolph Bourne: War is the Health of State). Plusieurs de ses libelles anti-néocons sont accessibles ici.
Depuis la mort de Rothbard, d'autres auteurs libertariens ont pris la relève pour dénoncer les politiques néoconservatrices, par exemple sur lewrockwell.com ou antiwar.com. Ivan Eland, par exemple, a consacré plusieurs livres très critiques vis-à-vis du néo-conservatisme. Ron Paul souligne l'alliance du welfare state avec le warfare state. Martin Masse, fondateur du webzine libertarien Le Québecois libre a brillamment résumé la vraie nature de l'idéologie néoconservatrice lorsqu'il écrit :
Aujourd'hui, les néoconservateurs américains prétendent défendre la « démocratie » et la « liberté » mais ont gardé cette tendance à vouloir l'imposer aux autres pays par la force. Le fait que les États-Unis doivent se transformer en empire pour atteindre cet idéal ne semble pas les déranger particulièrement. Ils valorisent les valeurs militaristes et croient que la liberté ne sera protégée que par un État fort. C'est tout le contraire de ce que croient les libertariens cohérents. Les néoconservateurs ne sont en fait que des trotskistes mutants qui ont plaqué leurs croyances étatistes et impérialistes sur un discours superficiellement « conservateur » dans le sens américain du terme, c'est-à-dire en faveur du libre marché et des valeurs traditionnelles.
De ce côté-ci de l'Atlantique, l'antilibéralisme foncier des néoconservateurs n'est pas bien compris, de sorte que l'on a pu voir des personnalités libérales (Alain Madelin, notamment) reprendre à leur compte leurs vues, comme s'il s'agissait d'options compatibles avec la pensée libérale.
Ron Paul caractérise les néoconservateurs par la pratique du "noble mensonge" et résume leurs idées ainsi (Liberty Defined, Noble lie) :
  • il est du devoir des élites de tromper les masses
  • les gouvernants sont des êtres supérieurs qui ont des droits et des devoirs à l’égard des inférieurs
  • une utilisation cynique de la religion est importante pour faire passer le message à destination d’une société obéissante, de façon à empêcher les individus de penser par eux-mêmes
  • les menaces externes unissent le peuple ; la peur est un ingrédient nécessaire au succès. Selon Machiavel, s'il n'existe pas une menace extérieure, les dirigeants doivent en créer une
  • cela unit les gens et les rend plus obéissants envers l'Etat. Les néoconservateurs affirment que c'est dans l’intérêt du peuple puisque l'individualisme est fondamentalement mauvais et que l'élite doit se conformer à son devoir de gouverner les incompétents
  • la religion, le mensonge et la guerre sont les outils utilisés par les néoconservateurs pour supprimer l'individualisme et fortifier une élite dirigeante. Ces points de vue sont, à des degrés divers et sur diverses questions, adoptés par les dirigeants des deux partis politiques. C'est pourquoi l'individualisme est sous attaque constante et la philosophie des Pères fondateurs a été si gravement compromise. Les néoconservateurs nieront toujours cela (cela fait partie de leur noble mensonge) car cela ferait exploser leur couverture
  • ils font en fait le contraire, revendiquant un brevet de superpatriotisme, et quiconque est en désaccord avec leurs guerres et leurs projets d’assistanat est anti-américain, anti-patriote, non-humanitaire, opposé aux troupes, et ainsi de suite.

Postérité

La vision du monde néoconservatrice a séduit nombre d'intellectuels aux Etats-Unis, tels que le philosophe Allan Bloom (qui servit de modèle au romancier Saul Bellow pour son roman Ravelstein), disciple de Leo Strauss, philosophe politique d'origine allemande (très prisé par un Paul Wolfowitz, par exemple).
En Europe, l'influence néoconservatrice semble avoir gagné une partie du Labour de Tony Blair et se reconnaît en France dans les articles et essais de nombreuses personnalités comme Jean-François Revel (depuis Comment les démocraties finissent jusqu'à L'Obsession anti-américaine), André Glucksmann (en particulier dans Ouest contre Ouest)), Yves Roucaute (La Puissance de la liberté et Le Néoconservatisme est un humanisme), ou encore Guy Millière, le laudateur attitré pour l'Hexagone de George W. Bush auquel il a déjà consacré pas moins de trois livres (!!).
Des sites comme libres.org ou encore l'Institut Hayek défendent plus ou moins ouvertement le point de vue néoconservateur au sein du monde francophone.


  • La doctrine néo-con ne reconnaît ni les responsabilités globales des USA, ni même leurs dettes. Ils considèrent que les dettes n’en sont pas, et qu’en fait ils représentent une sorte de tribut que le monde doit payer « en échange du monde que les Etats-Unis ont fait ». C’est un peu le même raisonnement, élargi, que celui qui a prévalu au moment de la guerre froide : les USA assurant la défense du monde libre, et ce monde libre refusant de payer pour sa sécurité, alors les USA sont légitimes à prélever un tribut. C’est l’origine objective du seigneuriage monétaire.

ANTICONS : Observatoire du néo-conservatisme

Ce site se propose de faire connaître au public francophone la nébuleuse française au service de l’idéologie néo-conservatrice, un cercle de pensée né aux États-Unis dans les années 70, dont les promoteurs ont accédé de façon coordonnée au pouvoir en 2001, à l’origine des grands bouleversements géopolitiques guerriers de la dernière décennie.
Il se veut une compilation non exhaustive mais factuelle d’informations sourcées et/ou facilement vérifiables.
 

octobre 15, 2014

Jean-Louis Caccomo: Le libéralisme, ensemble de valeurs morales

L'Université Libérale, vous convie à lire ce nouveau message. Des commentaires seraient souhaitables, notamment sur les posts référencés: à débattre, réflexions...Merci de vos lectures, et de vos analyses.

Le libéralisme est un ensemble de valeurs morales non une idéologie
 

« L’économie de marché, fondée sur la liberté d’entreprendre et le capitalisme démocratique, un capitalisme privé, dissocié du pouvoir politique mais associé à l’Etat de droit, cette économie-là seule peut se réclamer du libéralisme ».

J.F Revel [2000], La grande parade, Editions Plon, Paris, page 71
 
 
Depuis que je suis engagé dans ce combat titanesque et quasiment sacrificiel, je suis convaincu que le libéralisme est la seule réponse viable à la crise que nous vivons depuis quelques décennies. D’abord parce que la crise est avant tout une crise morale et une perte des repères et des valeurs découvertes et proclamées fièrement par les philosophes des Lumières. Et nous avons oublié et trahi ces valeurs, de là découlent tous nos problèmes qu’aucune solution technique ou purement comptable ne pourra résoudre.


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Et c’est bien une crise morale qui balaye notre pays. Quand les banquiers oublient leur cœur de métier et leur fonction nécessaire et irremplaçable, c’est toute la confiance qui est brisée mettant en cause les piliers eux-mêmes du système bancaire, pourtant maillon essentiel et indispensable à la croissance économique. Quand les hommes politiques, en charge de défendre l’argent public pour en faire le meilleur usage, déchaînent la dépense publique pour satisfaire les intérêts catégoriels et les revendications corporatistes, alors l’impôt perd sa légitimité tandis que le secteur productif est brisé par des prélèvements croissants. Quand des collégiens s’en prennent à leurs enseignants, que les parents démissionnent, qu’il est question de ne plus évaluer les écoliers ou de supprimer les devoirs à la maison et que les étudiants refusent toute sélection qui est pourtant le corollaire d’une orientation efficace, c’est tout le capital humain de la nation qui est dilapidé. Quand on veut toujours plus de droits, financés par l’Etat, mais que l’on refuse d’en assumer la charge et de supporter les devoirs qui en sont la nécessaire contrepartie, c’est la « guerre civile » permanente au lieu de la cohésion sociale et de l’harmonie nécessaire à l’épanouissement de l’économie. En bref, quand on veut toujours plus tout en donnant le moins possible sous le prétexte fallacieux de la solidarité, c’est la méfiance généralisée qui s’installe entre les individus.
 
Le libéralisme n’est pas l’agent de la régression sociale comme voudraient le faire croire ses trop nombreux détracteurs car le libéralisme est justement une éthique et un ensemble de valeurs morales sans lesquelles la science économique et la pratique de l’économie n’ont pas de sens. A toutes nos belles âmes, qui s’arrogent le monopole du cœur et de l’expression publique, il faudrait aussi rappeler que Robin des bois, qu’ils récupèrent volontiers comme symbole de leur combat contre la mondialisation, s’attaquait à un roi illégitime et spoliateur – et donc à l’Etat sorti de son rôle - pour rendre les richesses ainsi pillées à leurs créateurs et seuls propriétaires légitimes, c’est-à-dire aux contribuables. Il n’y a pas là de lutte des « puissants » en tant que riches contre les « faibles » en tant que pauvres. C’est un combat de toujours entre les spoliateurs parasites (les hommes de l’Etat qui abusent du pouvoir) et les véritables créateurs de richesses (les hommes libres et responsables qui créent des richesses). Ce combat ne sera jamais acquis car la liberté est toujours menacée car elle est une exigence et une discipline, fondées sur la responsabilité.
 
Il existe, en effet, une asymétrie fondamentale entre les « puissants », en tant que détenteurs du monopole de la violence légitime, et les « vulnérables » en tant qu’individus protégés par leurs seuls droits que les hommes de l’Etat ont trop vite fait de bafouer. Car il n’y a pas plus grand péril que d’être protégés par ceux qui ont le pouvoir de nous soumettre ; et que d’être dépendants de ceux qui ont le pouvoir de nous spolier. A l’heure où l’on nous demande de nous prononcer sur un projet de Constitution Européenne, il faut rappeler que le rôle d’une Constitution est justement de protéger l’individu du pouvoir politique et non de nous préparer à l’avènement d’un super-Etat européen étendant ses pouvoirs à l’ensemble des dimensions de nos vies.
 
Pourtant, selon nos dirigeants, il faudrait moins de libéralisme ou, du moins, il faudrait l’encadrer et le réguler avant qu’il ne ravage la planète et les sociétés. Mais n’a-t-on jamais défini le libéralisme ? Ne croyons pas que le libéralisme triomphe partout sur la planète. Les sempiternelles négociations entre Etats par délégations ministérielles interposées, dans le cadre de l’O.M.C., montrent que c’est le mercantilisme qui est triomphant alors même que ce dernier est une négation du libéralisme. Les mercantilistes, parce qu’ils considèrent que l’économie est un jeu à somme nulle (ce que gagne un pays ou un individu est nécessairement perdu par un autre pays ou un autre individu) transposent dans l’économie leur vision antagoniste des rapports politiques et humains.
 
Ce sont eux qui font des échanges une véritable « guerre économique » comme ils se servent de l’aspiration universelle à la foi et à la spiritualité pour nourrir leurs guerres de religions. Les arguments protectionnistes n’ont aucune validité puisqu’ils reviennent à nous infliger à nous-mêmes en temps de paix ce que nos adversaires chercheraient à nous faire subir en tant de guerre. Comment une armée peut-elle soumettre un pays ou une ville si ce n’est en décrétant le blocus ou l’état de siège qui a justement pour fonction d’étouffer l’adversaire en interdisant les échanges, préalable nécessaire à toutes activités économiques.
 
A leur origine, les accords du G.A.T.T. avaient pour mission de veiller à ce que tous les pays démantèlent leurs propres systèmes de protection puisque aucun ne voulait le faire s’il n’avait pas la garantie que les autres fassent de même. En transformant les accords du G.A.T.T. en O.M.C qui se présente comme une instance de régulation du commerce, les Etats – et notamment la France qui est à l’origine de cette conversion – ont pris le risque de faire triompher à nouveau le mercantilisme. Et quand le mercantilisme triomphe, ce sont toutes les valeurs du libéralisme qui reculent. Alors le commerce, naturellement source de paix et de prospérité, devient aux mains des Etats et de leurs représentants officiels, l’enjeu de chantages diplomatiques et de calculs géopolitiques.
 
L’histoire et la science économiques montrent que le libéralisme libère et protège les faibles contre les puissants. Comme les puissants n’ont pas spontanément tendance à mettre en œuvre un tel processus de libération et de libéralisation qui irait à l’encontre de leurs intérêts et privilèges, il faut des institutions fortes pour garantir un Etat de droit, c’est-à-dire un Etat respectueux des droits individuels fondamentaux, et qui daigne auto-limiter ses appétits de pouvoir. Un Etat libéral au sens originel du terme pour reprendre la vision de Benjamin Constant.
 
A tous les croyants qui ont des doutes sur la possible conciliation – ou réconciliation - entre un engagement libéral et leur foi religieuse, l’histoire montre que ce sont les pays communistes qui furent les plus anti-religieux. Et l’Etat-providence en France nourrit l’ambition de se substituer à la providence elle-même de la même manière que le communisme avait la prétention d’apporter le paradis en ce bas monde. Pour un croyant, un homme est d’abord un fils de Dieu avant d’être homme ou femme en particulier, patron ou salarié en particulier, riche ou pauvre en particulier. Et, tous les hommes sont les fils de Dieu. Pour un libéral, un homme est d’abord un individu avant d’être homme ou femme en particulier, patron ou salarié en particulier, riche ou pauvre en particulier. Et tous les hommes sont des individus.
 
Cette notion d’individu « abstrait » est fondamentale car elle fonde l’Etat de droit : les lois sont faites pour protéger l’individu « abstrait », c’est-à-dire tous les hommes dans ce qu’ils ont d’universels. On ne doit pas faire ni des lois de circonstances pour tel ou tel individu concret, ni des lois discriminatoires pour protéger (que cette discrimination soit dite « positive » ou pas) et différencier ainsi telle ou telle catégorie spécifique sans mettre en péril l’Etat de droit.
 
C’est cet ensemble de valeurs humanistes qui fait le souffle et la grandeur du libéralisme, pas seulement son efficacité économique, qui permet cependant à un nombre croissant de pays de goûter aux fruits de la prospérité. Car sans la richesse économique, point de développement social, de rayonnement culturel ou de puissance politique. Voilà pourquoi le libéralisme est la seule réponse possible à la crise actuelle. Et plus on s’obstinera à nier cette évidence, plus on s’enfoncera dans la crise.

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