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"Ce que je ferai pour les entreprises si je suis élu"
Leurs principaux atouts, c’est leur ingéniosité et leur courage ! En
Europe, nous sommes le pays de la sur-réglementation, de la
sur-fiscalisation, et au surplus, il est souvent de bon ton de
stigmatiser les patrons. Malgré ça, nous avons des entreprises qui
naissent et se développent avec une force étonnante. Imaginez ce que
pourrait être la France s’il y avait plus de liberté, moins de charges,
et si la valeur de l’audace était célébrée. Nous serions la première
puissance européenne car nous avons une bonne productivité et des
infrastructures publiques de qualité.
Dans ma stratégie de relance les PME auront une place décisive car on ne gagnera pas bataille de la croissance et de
l’emploi sans nos PME. Chaque semaine, je rencontre des chefs
d’entreprises. Que demandent-ils ? D’abord, une vraie baisse des charges
et une réduction du cout du travail. Ils réclament aussi moins de
contraintes. Je milite pour une révision des seuils sociaux, une sortie
des 35 heures par le biais d’accords d’entreprise, une refondation de
notre code du travail. Il faut distinguer ce qui relève des normes
sociales fondamentales et renvoyer le reste des dispositions à la
négociation sur le terrain.
Nos entreprises ont du mal à se développer et à atteindre la taille
critique parce qu’elles rencontrent des difficultés pour financer les
étapes de leur croissance. Il faut refondre la fiscalité du capital afin
de réorienter l’épargne française vers l’investissement productif ;
renforcer les dispositifs incitatifs à l’investissement direct dans les
PME selon des modalités utilisées avec succès dans d’autres pays
Européens, et je pense ici, à l’Employment Investment Scheme (EIS) au
Royaume Uni, qui permet à des investisseurs privés d’investir sous forme
d’actions ou d’obligation dans des TPE et des PME en apportant une
garantie sous forme de crédits d’impôt pour des montants pouvant aller
jusqu’à 1 M£.
Le protectionnisme est une solution pour se protéger dans certaines conditions, il y a des digues qu’on peut utiliser, sous
réserve de ne pas être en contradiction flagrante avec les règles
européennes. Mais le principal défi pour nos PME, c’est pas le repli,
c’est de gagner des parts de marché à l’exportation ! Notre
développement à l’international peut être beaucoup plus fort, dès lors
qu’on lève les contraintes qui pèsent sur nos PME et que les grands
donneurs d’ordre tirent leurs sous-traitants vers le haut.
Dans mon plan, la réduction des charges et des prélèvements sur les
entreprises doit être de l’ordre de 50 Mds€. Elle serait assurée par une
augmentation modulée de la TVA de 3 points, par une réduction de la
dépense publique de plus de 20 Mds€ pendant 3 ans puis de 15 à 20 Mds€
les années suivantes.
D’une façon générale, si on veut vraiment baisser la fiscalité en
France, il faut réduire nos déficits et moderniser notre sphère
publique. Elle doit être moins couteuse et plus efficace. Il faut, d’un
côté, resserrer les effectifs et, de l’autre, augmenter le temps de
travail dans la fonction publique de 35 à 39 heures.
Le passage à 39 heures, représente un gain de temps de travail de
près de 12%, soit l’équivalent de 600000 postes. Il faut aussi passer en
revue systématiquement celles dont l’efficacité est faible. Cela
réclamera beaucoup de courage, mais je crois que les Français et les
fonctionnaires eux-mêmes sont en attentes de choix forts car rien n’est
pire que l’immobilisme actuel. Vous êtes souvent intervenu pour dénoncer
le coût du travail en France.
Les prélèvements a alléger, je veux donner la priorité à la baisse des prélèvements pesant sur le
coût du travail pour redonner des marges de compétitivité prix et
d’investissement à toutes les entreprises. Le CICE et les allègements de
charges prévus dans le pacte de responsabilité seront simplifiés et
prendront la forme d’un dispositif unique et pérenne d’allégement de
cotisations sociales employeur. Ensuite, il faut supprimer les multiples
taxes qui pèsent sur la masse salariale : cotisations FNAL, versement
transport, taxes CNSA, pour un total de 15 Md€…
Nous sommes à 4,4% de déficit en 2014 en lieu et place des 2,2%
envisagés et le seuil des 2000 milliards dettes est atteint. Il est
temps de comprendre qu’une nation qui est incapable de tenir ses comptes
est une nation économiquement paralysée et socialement suicidaire. Il
faut agir sur tous les compartiments de la dépense publique : Etat,
collectivités locales, sphère sociale. Ca n'est pas contradictoire avec
l'idée de choix et de priorités, mais cela signifie qu'on ne peut pas
considérer que telle ou telle dépense serait sanctuarisée. Tout doit
être reconsidéré en vue d'un coût moindre et d'une efficacité meilleure.
Après avoir surtaxé les entreprises, après leur avoir donné des leçons à
tout bout de champ, le gouvernement a enfin compris que le mot
compétitivité n’était pas grossier. Tant mieux pour la France. Mais les
entrepreneurs que je rencontre ne sont pas rassurés pour autant : les
effets du CICE sont modestes et le pacte de responsabilité s’enlise dans
les contreparties et il n’aura pas d’effets avant plusieurs mois.
Les propositions du Medef méritent débat et certains d’entre-elles sont pertinentes. Je n’ai pas
compris pourquoi le gouvernement et sa majorité socialiste se sont
indignés. Lorsque la croissance est à 0,4% et quand on compte 5 millions
de français au chômage ou à temps partiel, il n’y a pas de propositions
taboues.
Le code du travail doit être recentré sur l’essentiel, c’est-dire sur
des normes impératives assurant la protection des droits fondamentaux
des salariés, comme par exemple la durée maximale du travail. En dehors
de ces normes sociales fondamentales, le principe sera celui de la
liberté conventionnelle et du renvoi au dialogue social dans les
entreprises mais aussi dans les branches.
Chaque pays a ses singularités. Je ne me polarise pas sur un modèle
extérieur mais par contre, le débat en France gagnerait en richesse si
nous regardions ce qui marche ailleurs. Au Canada, en Suède, il y a eu
des réformes de l’Etat intéressantes et ambitieuses. Au Danemark, en
Allemagne, il faut voir comment ces pays ont réformé leur marché du
travail. Arrêtons de penser que le monde tourne autour de nous. Soyons
fiers d’être français, mais curieux des autres.
La France reste un paradis pour entreprendre, Xavier Niel est un fonceur. Il bouscule et avance des projets et des idées. Il faut distinguer les niveaux de négociation. Au niveau des branches et
des entreprises, il revient aux chefs d’entreprise et aux organisations
syndicales d’assumer la responsabilité directe de leurs négociations et
de leurs accords. Au niveau national, il faut trouver la bonne
articulation entre le rôle d’impulsion de l’Etat et celui des
partenaires sociaux. La priorité accordée au dialogue social ne doit pas
être le paravent du statu quo et de l’absence de volonté de réforme,
comme c’est malheureusement le cas aujourd’hui.
Il réformer en profondeur la fonction publique, Avec 5,2 millions de fonctionnaires, c’est 22% de la force de travail
qui est employée par le secteur public en France pour 18% au Royaume Uni
et 11% en Allemagne ; c’est 90 fonctionnaires pour 1000 habitants,
chiffre deux fois supérieur à celui de l’Allemagne qui n’est pourtant
pas moins bien administrée que nous. La croissance c’est un tout. L’Etat
doit être remusclé pour être efficace. Il faut, je l’ai dit, d’un côté,
resserrer les effectifs et, de l’autre, augmenter le temps de travail
dans la fonction publique. Il faut revoir les automatismes de
déroulement des carrières et mettre simultanément en place une
revalorisation salariale en y réaffectant une partie des économies
réalisées par les suppressions d’emplois. Simplifions aussi les
conditions de recrutement des contractuels de façon à limiter les
recrutements de fonctionnaires sous statut aux missions dont la durée ou
la nature le justifient. Les armées françaises ont recours à des
contrats limités dans le temps. Ce qui est valable pour elles,
pourraient l’être dans beaucoup de nos administrations. A ceux qui
disent que les fonctionnaires n’accepteront pas ces évolutions, je
réponds : acceptent-ils la paupérisation actuelle de leur métier ? Mieux
vaut des administrations à 39h moins nombreuses, plus efficientes et
mieux rémunérées, que des administrations à 35 h, sans moyens dignes de
fonctionner. Je suis pour un Etat fort, animé par des agents motivés et
fiers de servir l’intérêt général.
Comment recrédibiliser la politique et réduire la fracture entre la politique et l’économie ?
C’est là une question majeure qui est posée à l’opposition. Ceux qui
pensent qu’il suffit de miser sur l’échec de la gauche pour relégitimer
la droite ne mesurent pas l’état d’exaspération du pays. Nous avons un
devoir d’honnêteté et de vérité. Savoir reconnaitre les erreurs du
passé, c’est un signe de lucidité et un gage de crédibilité. Il faut
être franc sur la situation du pays et ne pas faire des promesses
intenables. Il faut être digne et sobre, car la politique n’est pas un
jeu. Et puis, travaillons sur le fond, sur les idées, car c’est ça qui
intéresse nos concitoyens. Avec mes équipes, nous nous sommes attelés à
un projet de redressement national. Mes propositions sont sans
concession. Je sais qu’elles peuvent bousculer mes concitoyens. Mais je
refuse de croire que la démocratie ne marche que sur la démagogie.
La croissance molle et le chômage de masse ne sont pas
des fatalités françaises ou même européennes. Autour de nous, il y a des
Etats qui redémarrent grâce à leurs réformes. Il n’y a aucune raison
pour que l’Europe, avec ses 500 millions d’habitants bien formés, ses
technologies de pointe, ses universités, ses infrastructures, ses grands
groupes, reste à l’arrêt. Ce qu’il faut, c’est que chaque pays trouve
le cran de se moderniser et de se libérer des déficits. Avec l’appui de
la Banque Centrale européenne, qui a assoupli sa politique, on peut
retrouver le chemin d’une croissance solide et durable. Pour stimuler le
mouvement, je crois à la nécessité de renforcer le pilotage de la zone
euro et à l’établissement d’un noyau franco-allemand beaucoup plus
structuré. Entre nos deux nations, il faudrait enclencher une
harmonisation fiscale et sociale. Les seuls pays qui sortent leur
épingle du jeu ont choisi un modèle autre que celui de l’austérité pure
et dure… Je pense qu’on ne relancera pas un cycle de croissance durable
en Europe avec cette montagne de déficits et de dettes qui plombe notre
capacité à investir pour l’avenir. Contrairement à ce que j’entends
parfois dire, il n’y a pas de politique d’austérité en France. Les
dépenses publiques continuent d’augmenter et les déficits aussi. Au lieu
de parler d’austérité, parlons plus simplement de nécessaire rigueur
budgétaire.
J'ai fait campagne contre Maastricht, Oui, les craintes que nous avions exprimées en 1992 avec Philippe Séguin
se sont pour partie confirmées. Nous disions que la monnaie unique
n’était pas la panacée et nous pressentions que la technocratie
entraînerait un déficit démocratique de l’Union européenne. Force est de
constater que l’Europe actuelle est mal en point. Ceci dit, depuis
1992, le monde a changé. La mondialisation vient percuter nos vieilles
nations occidentales. Nous n’avons pas d’autre choix que d’unir nos
forces dans l’Europe. Mais pour que notre pays puisse y jouer un rôle
leader, encore faut-il qu’il soit compétitif et fier d’être debout.
Aujourd’hui, nous sommes l’homme malade de l’Union européenne. Qu’on le
veuille ou non, l’Europe des nations reste un fait. Voilà pourquoi, la
France doit se réveiller pour tenir tout son rang.
Je suis gaulliste, j’ai une certaine expérience, je regarde les réalités
telles qu’elles sont et j’en tire la conclusion que la France doit
sortir du déclin par des changements puissants. Je ne suis pas dans les
calculs et les effets de manche. Je veux tout faire pour aider notre
pays à retrouver sa force naturelle, son gout de croire au progrès. Je
parcours la France et je travaille à un projet. Je vois que mes
propositions commencent à s’imposer dans le débat. Je suis déterminé
parce que je crois que la France a besoin de vérité et d’une refondation
profonde.
La réduction des déficits est un moyen pour retrouver notre capacité de
mouvement. Mais elle n’est qu’un volet du redressement national ! Il
faut impulser une politique de compétitivité et d’innovation pour nos
acteurs économiques. Le chômage doit être combattu avec des réformes de
fond sur le marché de l’emploi. Notre système éducatif a besoin
d’autonomie. Et sur les questions régaliennes, il est indispensable de
ressouder la cohésion nationale : sur la sécurité, l’immigration, sur
l’intégration et la laïcité, le pays est en demande d’ordre et d’unité.
par François Fillon
Source: Entreprendre.fr