novembre 21, 2025

La démocratie directe ?

Pour en finir avec la démocratie directe

Emmanuel Macron réfléchit à changer la Constitution afin d'élargir les possibilités de référendum. À cette occasion, Contrepoints republie trois articles qui proposent différentes réflexions libérales sur la thématique de la démocratie directe. Ici, une vision plutôt critique de la démocratie directe sous la plume de José Lopez-Martinez.

Il n’y a pas lieu de chercher à substituer à la démocratie représentative une forme de démocratie supposée supérieure que serait la démocratie directe. Il suffit de voir comment votent généralement la Suisse francophone ou la Californie pour comprendre que la démocratie directe en France se traduirait par un recul significatif de la liberté.

 


 

En contrepoint de l’article de Jacques Legrand : Français, savez-vous ce que vivre en démocratie directe voudrait dire ?

Régulièrement, aussi bien du côté de l’extrême gauche que de l’extrême droite qui s’imaginent toujours représenter le pays réel, et récemment de manière curieuse chez quelques libéraux, on voit resurgir ce serpent de mer qu’est la demande de l’instauration de la démocratie directe ou semi-directe dans le système politique français. Une manière de Graal électoral qui devrait permettre d’exaucer le vœu de Lincoln d’un gouvernement du peuple par le peuple pour le peuple.

Dans des articles parus dans Contrepoints, Jacques Legrand ainsi que Jacques Garello revenaient sur cette antienne et rompaient donc une lance en faveur de cette option qui rendrait au citoyen son pouvoir de décision et sa souveraineté. L’argumentaire est bien connu. Fondamentalement, il s’agit d’une critique frontale du système représentatif où le peuple délègue sa souveraineté au parlement, au gouvernement et à l’autorité judiciaire.

En décrivant l’expérience historique, nos zélotes montrent que les représentants élus ont tendance à s’émanciper de l’intérêt général pour ne servir que le leur. Une oligarchie détiendrait dès lors l’essentiel du pouvoir, en cheville avec différents groupes d’intérêts et de pression. Le tout au détriment du pouvoir législatif et même du pouvoir judiciaire. Car dans les faits, l’exécutif devient le seul auteur principal des lois et la séparation des pouvoirs n’existe plus guère.

Au final, le citoyen est cantonné au rang de spectateur de la vie politique, confisquée par les partis.

Dans son article, Jacques Legrand, à la suite d’Yvan Blot, d’Étienne Chouard, d’Antoine Chollet, d’Alain Cotta et bien d’autres en France, appelle donc à l’avènement d’une nouvelle société qui passerait par une réforme des institutions fondées sur une subsidiarité ascendante. Une société qui ferait appel à l’engagement des citoyens là où ils peuvent agir, et qui les doterait de droits supplémentaires afin d’augmenter leur participation politique, et de les mettre au même niveau décisionnel que les représentants élus. À l’instar de ce qui existe en Suisse et, dans une moindre mesure, dans les États qui ont introduit dans leur système politique des outils de la démocratie directe (référendum, plébiscite, initiative populaire, pétition, destitution de mandataires, etc.).

En temps de crise, le sujet revient à la mode.

Comme aujourd’hui en France, avec la gestion calamiteuse du gouvernement Hollande, un président « mal élu », choisi par une minorité de la population si l’on tient compte du nombre des abstentions. La question de l’introduction d’une simili initiative populaire est d’ailleurs à l’étude au Parlement.

C’est donc une bonne occasion de tordre le cou une fois pour toutes à cette vraie fausse bonne idée qu’est la démocratie directe. Même si certains libéraux, comme Pierre Chappaz, croient y trouver une voie d’avenir en faisant, par exemple, référence au scrutin du 24 novembre en Suisse.

 


 

Les failles de la démocratie directe

Commençons donc par l’expérience historique.

Généralement, les thuriféraires de la démocratie directe aiment s’étendre sur les cas qui fonctionnent ou semblent fonctionner relativement bien. Comme la Suisse. Cas emblématique, il est vrai. Ou les New England Town Meetings aux États-Unis, déjà vantés en son temps par Tocqueville. Ou quelques référendums en Italie, etc.

Malheureusement, l’expérience historique de la démocratie directe, c’est surtout l’histoire d’échecs répétés et souvent sanglants. À commencer par la Grèce antique où la démocratie directe, la seule forme démocratique connue alors, se solda plusieurs fois par des guerres sociales dans plusieurs cités. Ce qui donna matière à réflexion aux philosophes d’alors, qui forgèrent à ce propos le concept d’ochlocratie.

Plus près de nous, plusieurs autres expériences de démocratie directe furent tentées : la Commune de Paris en 1871, les soviets russes après la chute du régime tsariste, les conseils ouvriers en Allemagne et en Italie après la Première Guerre mondiale, les communautés anarchistes en Espagne durant la guerre civile, le Chiapas, au Mexique, contrôlé un temps par l’Armée zapatiste de libération nationale.

Certes, des événements extérieurs y mirent fin, mais la manière dont elles s’étaient déroulées laisse peu de place au regret. Et si l’on voulait faire preuve d’un peu de mauvaise foi, on citerait, comme autre exemple peu reluisant de la démocratie directe, la Jamahiriya, cet « État des masses » instauré par Kadhafi en Libye à partir de 1977.

Le second point mis en avant en faveur de la démocratie directe est sa représentativité, qui serait supérieure au système de la démocratie représentative et, partant, plus légitime. Ainsi, par exemple, face à un président comme Hollande choisi par moins de 40 % des électeurs inscrits, par défaut, pour faire sortir son rival politique, on oppose la légitimité du peuple qui voterait directement, donnant en masse son avis sur une question précise.

Sauf que, encore une fois, l’expérience montre que cette supposée représentativité supérieure est loin d’être acquise.

On sait déjà en effet qu’aux États-Unis, les taux de participations aux scrutins sont extrêmement faibles, comparés aux scores européens, là où règne la démocratie représentative. Mais également en Suisse – l’exemple canonique de la démocratie semi-directe – la participation des citoyens aux consultations populaires est des plus réduites : de près de 70 % au début du XXe siècle, elle est tombée à moins de 30 % à la fin du siècle.

Alors qu’est-ce qui serait le plus légitime d’un point de vue démocratique : l’élection d’un représentant avec 40 % des suffrages ou l’adoption d’une initiative populaire par 15 % du corps électoral ?

Autre exemple récent et médiatisé : quelles sont la représentativité et la légitimité démocratique du nouveau projet de constitution islandaise rédigé par 25 citoyens choisis au hasard, en collaboration avec la population via Internet, et approuvé en octobre 2012 par 66 % des suffrages exprimés, mais avec un taux d’abstention supérieur à 50 % et l’opposition de toute une partie du spectre politique ?

Il y a peu, les différentes « assemblées populaires » apparues au sein de mouvements « Occupy » qui ont vu le jour à travers le monde (New York, Madrid, etc.) nous ont également montré que la démocratie directe n’offre absolument aucune garantie de représentativité supérieure par rapport à la classique démocratie représentative et qu’elle est tout autant, sinon plus, sujette à la démagogie, au dérapage populiste et à la tyrannique confiscation du pouvoir par une minorité active et bruyante selon l’effet Olson.

Mais le grand argument avancé par les partisans de la démocratie directe, à tout le moins par ceux qui veulent vendre ce programme aux libéraux, c’est, comme le font Legrand ou Garello, de nous assurer que ce système politique permettrait de limiter la taille de l’État, et de mieux préserver nos droits et libertés. Et dans la foulée, de nous décrire comment la Suisse est le cinquième pays le plus libre économiquement au monde. Et comment, en 1980, le référendum initié par le major Jarvis, la célèbre Proposition 13, limita la croissance des dépenses publiques en Californie et conduisit Reagan à la Maison blanche.

Mais une fois de plus, une étude plus approfondie doit nous faire déchanter.

Alors, s’il est bien vrai que la Proposition 13 permit, très momentanément, de réduire un peu le train de vie de l’État de Californie, il ne faut pas oublier que la plupart du temps la démocratie directe a servi aux États-Unis à alourdir le poids et à renforcer l’interventionnisme de l’État (législation sur le travail dans l’Oregon, le Colorado, l’Arkansas, système public de retraites dans l’Arizona, prohibition de l’alcool dans plusieurs État avant le Volstead Act, instauration de mesures de discriminations positives, protection de l’environnement en Californie, etc.).

Et actuellement, malgré le fait que la Californie soit sans doute l’État américain où est le plus appliqué la démocratie directe, on a pu observer depuis des années un envahissement sans précédent de l’État dans tous les domaines de la vie et une multiplication des atteintes aux libertés individuelles.

Quant à la Suisse, s’il est vrai qu’elle se trouve, en compagnie des États-Unis, dans le top 10 des pays les plus libres économiquement, cela ne doit pas occulter le fait que les huit autres pays premiers du classement ne pratiquent pas ou de manière parfaitement anecdotique la démocratie directe. Le lien de causalité non seulement n’est pas prouvé, mais fortement contredit par la pratique référendaire suisse qui, comme aux États-Unis, a surtout été un facteur d’étatisation et d’interventionnisme plutôt que de protection des droits et libertés.

Ainsi, quand on passe en revue la liste des près de 200 initiatives populaires fédérales qui furent soumises à l’approbation des Suisses depuis 1891, on constate que deux tiers des propositions visaient à augmenter l’intervention de l’État ou à réduire la liberté (« droit au travail », impôt sur la fortune, « mesures contre la spéculation », protection des locataires, temps de travail, lutte contre l’alcoolisme, contre le tabagisme, lutte « contre l’emprise étrangère », expulsion d’étrangers, construction de logements sociaux, système de pension publique, limitation du secret bancaire, politique de transports publics, limitation de la vitesse, diminution du trafic routier, contrôle des prix, santé publique, etc.) Chose qui ne doit pas étonner outre mesure quand on sait que le champion toutes catégories des promoteurs d’initiatives populaires est le Parti socialiste suisse, qui devance de très loin tous les autres partis ou groupes d’intérêt ou ad hoc constitués à cet effet.

Et même si, au final, l’écrasante majorité de ces propositions fut rejetée par la population suisse, il n’en demeure pas moins vrai que sur les 20 initiatives populaires qui furent approuvées, douze se sont bien traduites par un accroissement du poids de l’État, et une diminution des droits et libertés suisses (prohibition de l’absinthe, interdiction des maisons de jeu, contrôle des prix, protection de l’environnement, interdiction des OGM, restriction dans la construction immobilière, limitation des « rémunérations abusives », violations de la liberté de culte et atteintes aux pratiques religieuses inspirées par l’antisémitisme et l’islamophobie, etc.)

Bref, si la Suisse est un pays bien plus libre que la moyenne, c’est plutôt malgré la démocratie directe que grâce à elle. Et l’explication de ce degré de liberté doit être recherché ailleurs, à commencer par son système de strict fédéralisme et de décentralisation extrêmement avancé.

Non, la démocratie directe n’est pas la panacée, même pas une amélioration, juste un dangereux pis-aller.

Non seulement elle n’apporte aucune solution plus satisfaisante que la classique démocratie représentative, mais elle peut se révéler plus redoutable encore.

Car fondée sur le même vice : la règle majoritaire.

Comme prévenait Ludwig von Mises :

« La résurgence moderne de l’idée de collectivisme, cause principale de tous les tourments et désastres de notre temps, a eu un succès si complet qu’elle a relégué dans l’oubli les idées essentielles de la philosophie sociale libérale. Aujourd’hui, même parmi les partisans des institutions démocratiques, nombreux sont ceux qui ignorent ces idées. Les arguments qu’ils invoquent pour justifier la liberté et la démocratie sont teintés d’erreurs collectivistes ; leurs doctrines sont plutôt une distorsion du libéralisme véritable qu’une adhésion. À leurs yeux les majorités ont toujours raison simplement parce qu’elles ont le pouvoir d’écraser toute opposition ; la règle majoritaire est le pouvoir dictatorial du parti le plus nombreux, et la majorité au pouvoir n’est pas tenue de se modérer elle-même dans l’exercice de sa puissance ni dans la conduite des affaires publiques. Dès qu’une faction est parvenue à s’assurer l’appui de la majorité des citoyens et ainsi la disposition de la machine gouvernementale, elle est libre de refuser à la minorité ces mêmes droits démocratiques à l’aide desquels elle-même a précédemment mené sa lutte pour accéder à la suprématie. »

 

La tyrannie de la majorité

Une analyse déjà faite il y a bien longtemps par les Pères Fondateurs américains qui s’opposaient autant à la monarchie qu’à la démocratie directe.

Comme John Adams :

« L’idée que le peuple est le meilleur gardien de sa liberté n’est pas vraie. Il est le pire envisageable, il n’est pas un gardien du tout. »

Ou James Madison :

« Une pure démocratie ne peut céder à aucune revendication de l’opposition. Lorsqu’une orientation ou un intérêt commun est ressenti par la majorité, il n’y a plus qu’à sacrifier la partie la plus faible. De là vient que les démocraties ont toujours été jugées incompatibles avec la sécurité des personnes ou avec le droit de propriété… »

De bien noires prédictions qui se sont révélées globalement exactes au regard de l’expérience historique.

Cependant, même si la démocratie directe n’est pas le remède souhaitable, le diagnostic n’en reste pas moins correct et la maladie, bien réelle : érosion grandissante des libertés, étouffement sous le poids de l’État ventripotent, hommes politiques déconnectés de la population, corruption généralisée du système, désaffection des gens de la chose publique, etc.

Mais si l’on veut résoudre ce problème du point de vue libéral, il faut bien se souvenir de ce qu’est le libéralisme : ce n’est pas un système de production de lois ou de normes de comportement ; non, il vise à la protection des droits naturels des individus. Et, comme Albert Camus, il faut se rappeler que la démocratie libérale, ce n’est pas la loi de la majorité, mais la protection de la minorité. Or, la démocratie directe n’offre aucune garantie à ce sujet.

Quelles solutions, donc ? Pour protéger les droits naturels des individus et pour limiter la taille et l’action de l’État, on peut évoquer rapidement plusieurs pistes, qui demanderaient, bien sûr, de plus longs développements.

Tout d’abord, ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain, et conservons une modalité de la démocratie directe, la négative.

C’est-à-dire non pas celle qui permet aux électeurs de participer à la confection et/ou l’approbation de normes d’application obligatoire à l’ensemble de la population puisque cette voie conduit à plus d’étatisme et moins de liberté, mais celle qui leur permet de rejeter une législation ; historiquement, c’est d’ailleurs la première forme de la démocratie directe suisse, apparue dans le canton de Saint-Gall en 1831, et qui consistait seulement en une possibilité offerte à la population de rejeter une loi votée par le Parlement. On conserverait ainsi de la démocratie directe uniquement le veto de la population et la destitution de mandataires politiques (comme, par exemple, le recall aux États-Unis).

Ensuite, pour protéger plus efficacement les droits de la minorité et limiter l’invasion de l’État, on pourrait concevoir que si une loi, pour être adoptée par le Parlement, pourrait se contenter d’être approuvée par une majorité simple, ou même relative selon les cas, cette même loi pourrait être abrogée si une minorité significative (un tiers, par exemple) des parlementaires ou même de la population la rejetait. De fait, une norme repoussée par une minorité importante de la population ne peut être ni bonne ni légitime.

On pourrait également prendre le problème sous un autre angle, sans rapport aucun avec le vote démocratique.

Ainsi, afin d’éviter les collusions incestueuses des représentants du peuple avec l’État, les lobbys, etc. et pour favoriser leur zèle à contrôler de manière critique le gouvernement, on pourrait supprimer la rémunération publique des mandataires politiques (comme c’était inscrit dans la très libérale constitution belge de 1831).

Sans attache pécuniaire liant les représentants du peuple à l’État, on peut espérer de leur part un travail de contrôle plus rigoureux de l’action gouvernementale et une écoute plus attentive de leurs électeurs à qui ils devront leur salaire (via les cotisations des membres des partis politiques, de syndicats, de dons, etc.). Parallèlement, on peut miser sur une véritable décentralisation avancée et une réelle subsidiarité établie au niveau local le plus bas possible, afin de placer le centre de décision du pouvoir au plus près de la population et de ses préoccupations. Et si l’on opte pour la voie judiciaire, on pourrait instaurer une exception de contrôle de constitutionnalité des lois que pourrait soulever n’importe quel tribunal.

D’autres voies sont certainement possibles qui pourraient être envisagées dès lors qu’elles visent bien à la protection des droits et des libertés des individus et non pas à donner la possibilité à une partie de la population d’imposer ses vues à la minorité.

 

En conclusion

Comme le rappelait Raymond Boudon, il n’y a pas lieu de chercher à substituer à la démocratie représentative une forme de démocratie supposée supérieure que serait la démocratie directe.

Il suffit de voir comment votent généralement la Suisse francophone ou la Californie pour comprendre que la démocratie directe en France se traduirait par un recul significatif de la liberté (un avant-goût :  « 77 % des Français veulent une loi interdisant les retraites chapeau »).

Par contre, il faut bien toujours chercher à améliorer la démocratie représentative et à lutter contre la tyrannie des groupes d’influence et la confiscation du pouvoir. Et ce travail consistera à appliquer de manière rigoureuse les principes fondamentaux du libéralisme politique, à commencer par le principe de la séparation des pouvoirs. Et non pas donner libre cours aux gens pour s’immiscer dans la vie de leurs voisins, même au travers d’un vote démocratique.


Article publié initialement le 2 décembre 2013.

Lire l’article de Hadrien Gournay : La démocratie représentative aujourd’hui

Lire l’article de Jacques Garello : Les bienfaits de la démocratie directe

José Lopez-Martinez

Ancien secrétaire de l'association Libéraux.org, José Lopez-Martinez a été tour à tour gestionnaire de contentieux dans une compagnie d'assurance, comptable d'une société métallurgique, statisticien, bibliothécaire, couteau suisse... Il est actuellement webmaster. 
 
 


Démocratie directe

Définition

En démocratie directe, le pouvoir provient également de tous et s'exerce également sur tous, on dit que le peuple est souverain, c'est-à-dire qu'il détient tous les pouvoirs (exécutif, législatif, judiciaire).
Il n'y a donc pas ou presque pas de représentants politiques (ministres, maires, parlementaires, etc).

On peut concevoir l'organisation des pouvoirs dans une hypothétique démocratie directe ainsi :

La nation est le pouvoir législatif :
En effet elle détient l’initiative législative par le droit de pétition et toutes les lois doivent être votées par un suffrage direct véritablement universel, c'est-à-dire qui nécessite l’existence d’un vote obligatoire.

La nation est le pouvoir judiciaire dans la limite de la raison et de l’instruction que possède chaque individu :
La justice doit être populaire dans le plus de domaines où cela est possible et obligatoirement dans les affaires de droit commun.
C'est-à-dire rendue par des gens choisis aléatoirement parmi les citoyens n’ayant jamais été reconnus coupables de crimes ou de délits. Ce système n’est garant de l’impartialité que si l’instruction du peuple, notamment en matière de droit, est la mission première de la communauté. Cependant cette mission de service public peut pour partie ou pour tout être déléguée à d’autres organismes dès lors que ceux-ci sont soumis à un strict contrôle par des commissions populaires.

La nation a un contrôle absolu sur le pouvoir exécutif :
D’une part pour que le gouvernement représente toujours la volonté du peuple tous les mandats doivent être courts et conférés au suffrage universel direct, ainsi à tout moment une motion de censure contre le gouvernement doit pouvoir être engagée. Il est impératif que si une large majorité du peuple considère qu’une faute grave (non-respect des principes fondateurs de la république, alliances diplomatiques inacceptables) a été commise, le gouvernement soit destitué dans les plus brefs délais.
D’autre part, pour empêcher tout abus de pouvoir, le cumul des mandats doit être impossible et l’initiative législative dont dispose le pouvoir exécutif ne peut se traduire que par des référendums. Pour permettre le bon déroulement de la vie des citoyens, le nombre de lois pouvant être instituées sur une certaine période de temps doit être limité (ex : maximum un référendum par semaine). Une telle mesure permet d’empêcher l’inflation législative, un des grands maux des « démocraties représentatives », par l’usage de décrets gouvernementaux (mesure de faible importance non soumis au vote populaire). Évidemment ces décrets peuvent être abrogés par pétition comme toutes les autres lois.

La démocratie directe est un processus collectif de décision qui se fonde sur une organisation horizontale, plutôt que hiérarchique, de la société humaine. Elle est, tout comme le régime représentatif, un concept. Théoriquement, elle peut-être appliquée au niveau du régime politique d'un pays comme au niveau des processus collectifs de décision de tous types d'associations locales ou virtuelles (via Internet).

Aspect historique et sémantique

La démocratie, au sens étymologique de pouvoir (kratos) du peuple (demos) ne peut être que directe. L'expression de « démocratie représentative » peut être considérée comme un leurre car c'est seulement dans une démocratie directe que le pouvoir est le reflet exact des aspirations du peuple. C'est à partir de la naissance de régimes représentatifs parlementaires à la fin du XVIIIe siècle que la classe politique, constituée presque exclusivement de personnes appartenant aux classes sociales aisées, a, pour justifier moralement sa fonction, détourné la définition sémantique du terme démocratie en l'assimilant au régime représentatif/parlementaire.

La démocratie directe, au sens d'un régime dans lequel la nation est souveraine, n'a réellement existé que dans l'Athènes du VIe siècle avant JC avec les réformes successives de Solon (-594) et Clisthène (-508) :
La nation était effectivement souveraine avec un vote des lois par tous les citoyens réunis, et le tirage au sort des magistrats (pouvoir exécutif) ainsi que des juges qui recevaient des mandats d'un an. Des indemnités journalières de présence étaient même octroyées aux plus pauvres pour leur permettre d'assurer leurs fonctions civiques.
Cependant les femmes étant considérées comme d'éternelles mineures et les esclaves comme des biens ils étaient exclus de la communauté civique. Le système athénien comportait donc des défauts inhérents à son époque et qui vont à l'encontre de notre conception moderne de la démocratie : religion officielle, avilissement de la femme, économie fondée sur l’esclavage.

Bien que la démocratie directe ne se concrétisa jamais par un système plus égalitaire dans l'histoire, si ce n'est dans l'esprit de Jean-Jacques Rousseau qui justifia sa nécessité dans Du Contrat Social (1762) et entama même une ébauche d'une Constitution de démocratie directe pour la Corse en 1764, l'utopie de l'instauration d'une démocratie directe moderne existe toujours.

Démocratie directe et services publics

La démocratie directe n'implique pas nécessairement la suppression de l'État on ne peut donc pas l'assimiler à une forme d'anarchisme. Les missions des services publics et leur fonctionnement sont collectivement décidés par la communauté civique.

Allocation du budget public

Des sondages ont montré que si le budget alloué aux services publics était déterminé collectivement, l'allocation de ce budget serait très différente de ce qu'elle est en régime représentatif. Par exemple, le budget de l'armée et des services secrets serait réduit au profit des budgets alloués à des services tels que les pensions ou les transports en commun.

Contrôle des services publics

Par exemple les attributions de contrats publics à des entreprises privées (source importante de détournements de fonds publics au profit d'intérêts privés, via des représentants politiques corrompus) pourraient être collectives, de la conception à l'octroi jusqu'au suivi de réalisation. La publication, entres autres sur Internet, de tous les documents relatifs aux contrats publics, permettrait théoriquement à chacun de procéder aux vérifications qui dans un régime représentatif sont opérées par des représentants politiques ou des agents de l'administration publique. Ce principe de contrôle de la corruption se retrouve dans la démocratie participative.

Justice

Comme dit plus haut, le principe de démocratie directe appliqué dans le domaine judiciaire correspond à l'instauration de tirages au sort pour former des jurys populaires. Un tel système suppose un encadrement strict pour empêcher un manque d'objectivité du jury du à une influence extérieure : médias, parcours personnel des jurés, etc. Il paraît difficilement concevable de déléguer intégralement le pouvoir judiciaire aux citoyens ordinaires à cause de la complexité de certaines affaires nécessitant des connaissances dans des domaines très précis : droit international, droit commercial, scandales médicaux et bioéthique.

Condition à l’application effective de la démocratie directe

Pour des considérations techniques évidentes un régime de démocratie directe ne peut être instauré dans des États tels que nous les connaissons. En effet leur trop grande taille empêche l’existence d’un débat réel entre chaque citoyen, et la mobilisation fréquente d’une importante population pour des votes générerait certainement des problèmes d’organisation en apparence insoluble. Certains considèrent aujourd’hui que le vote électronique à domicile pourrait supprimer cet empêchement. Cependant d'autres pensent qu’un tel système en banalisant le vote pourrait amener à l’instauration de lois liberticides, voire de dictatures sous l’influence de médias de propagande et de démagogues. C’est pourquoi la solution classique imaginée par de partisans de la démocratie directe, dont Rousseau, est toujours avancée :

Tout d’abord pour des considérations techniques un vote de toute la nation ne semble possible que dans un État à faible population, pourtant le modèle de la démocratie directe se veut universel.

Le problème n’est donc soluble que si l’on postule l’instauration de communautés démocratiques comprenant au maximum 500 000 habitants, mais pouvant être de taille beaucoup plus réduite (minimum 30 selon certains sociologues). De telles entités étatiques auraient l’avantage supplémentaire d’être au plus près des besoins du citoyen, notamment en termes d’aménagement du territoire et d’infrastructures.

Toutefois la naissance de ces communautés démocratiques semble impossible du fait qu’elle sous-entend la dissolution des États existants et va ainsi à l’encontre du droit fondamental des peuples à disposer d’eux-mêmes. Cette condamnation hâtive provient d'une incompréhension de l’objectif de ces communautés, qui n’est pas de se substituer à l’identité nationale pour leurs théoriciens. La culture et la langue propre à chaque peuple n’est pas remise en cause dans cette nouvelle organisation, puisque rien n’empêche des coopérations renforcées entre différentes communautés démocratiques, dès lors que ces coopérations respectent les principes de la démocratie directe, c'est-à-dire ont été soumises à l’approbation des citoyens et sont — comme tout dispositif législatif — abrogeables par pétition.

La seconde attaque que subit ce modèle vise sa supposée faiblesse militaire auquel les partisans de la démocratie directe répondent par la création d’un fédéralisme souple entre les démocraties « classiques » et directes régi par les principes démocratiques les plus stricts (vote à la majorité simple requérant la représentation de toutes les nations membres). Cette structure se doit d’être à géométrie variable, fonction seulement de la volonté de chaque nation.

Limites

Le concept de démocratie a ses propres limites en matière morale puisqu'il revient aussi à l'oppression d'une partie de la population par une autre partie, la démocratie reconnaissant implicitement à une majorité de la population le droit d'imposer sa volonté à la minorité. Cette dictature démocratique fut notamment dénoncée par Emmanuel Kant (partisan du despotisme éclairé) et Jean-Jacques Rousseau (partisan de la démocratie directe) puis Alexis de Tocqueville (grand penseur libéral).

C'est parce que la démocratie repose sur le principe implicite d'oppression de la minorité par la majorité certains revendiquent moralement le droit à la désobéissance civile. Cependant d'autres considèrent qu'une liberté de circulation absolue des personnes permet à la minorité non représentée par le gouvernement démocratique en place de ne pas subir la dictature de la majorité en lui laissant la possibilité de quitter son pays.

La démocratie directe n'offre aucune garantie de sauvegarder les libertés, ni de protéger les minorités, car elle peut entraîner un accroissement du poids de l’État et une diminution des droits individuels. Elle offre seulement les avantages suivants :

  • possibilité de rejeter une loi votée par le parlement (droit de veto) ;
  • possibilité de destituer des mandataires politiques.

Voir aussi

Citations

  • La démocratie directe, qui amène l’électeur à se prononcer sur des thèmes économiques, conduit à des décisions très critiquables sous l’angle économique. Les économistes l’expliquent par ce qu’ils nomment « la recherche de rentes de la part des groupes d’intérêts ». (Emmanuel Garessus)
  • En tant que libéral, la démocratie directe comporte quantité d’avantages, mais elle ne protège pas l’individu. Il ne sert à rien d’en faire le critère ultime. A l’extrême, elle peut mener à une dictature de la majorité. (Emmanuel Garessus)
https://www.wikiberal.org/wiki/D%C3%A9mocratie_directe

 

 

novembre 20, 2025

Informations France en imagetext 1 ( À vos choix )
















Minarchisme : la pire forme d'idolâtrie d'État !

Minarchisme : la pire forme d'idolâtrie d'État

Est-ce qu'un peu pluvieux signifie qu'il pleut encore ? La réponse semble évidente. Mais pour beaucoup, la réponse correcte – qu'ils défendent avec véhémence – est qu'« un peu pluvieux ne signifie pas qu'il pleut ».

Je parle, bien sûr, du minarchisme et de l’étatisme. Ces deux positions proposent une organisation de la société, garantie par le monopole de la force et de la violence. Leur différence réside dans le degré d’« humidité » qu’elles appliquent. Or, leurs tenants veulent nous faire croire qu’il y a bien plus qu’une simple différence de degré. Ils prétendent qu’il s’agit d’une question de principe, et non d’ampleur.

De mon point de vue anarchiste, c’est à la fois risible et navrant. Un État est un État, quelle que soit sa taille. Il possède une nature intrinsèque. Et cette nature demeure, indépendamment de la manière dont on choisit de mesurer sa taille ou son impact. Il est important de s’en souvenir, et cela doit être au cœur de la philosophie libertaire. 


 Walter Block a posé la question suivante : quelle serait la véritable position libertarienne si l’on avait le choix entre, d’une part, une hausse des impôts générant moins de recettes pour l’État et, d’autre part, une baisse des impôts (un taux d’imposition plus faible) qui, en raison de la courbe de Laffer, augmenterait les recettes de l’État ? Les deux options semblent avoir des effets à la fois libertariens et contraires aux principes libertariens. Dès lors, faut-il privilégier une baisse des impôts ou une diminution des recettes de l’État si les deux options sont incompatibles ?

Bien que je comprenne la démarche de Walter face à ce prétendu dilemme, la réponse n'est pas binaire. Les options révèlent l'erreur fondamentale qui consiste à soumettre ses principes à un raisonnement incrémentaliste. En l'occurrence, le principe est celui du droit de propriété privée – le droit de l'individu à ce qu'il a légitimement acquis et accumulé. Dans les deux options, le droit de propriété privée est violé par l'État. Alors, l'une des options est-elle préférable à l'autre ? 
 
La réponse est : cela dépend. Votre choix final dépend de votre situation personnelle – de vos préférences. Mais vos préférences diffèrent du principe. Vous pourriez préférer un taux d'imposition plus élevé ou plus bas selon son impact sur vous. Il s'agit de défendre ce qui vous appartient. Mais les deux options sont mauvaises. Vous choisissez donc probablement ce que vous considérez comme le moindre mal. Mais le moindre mal reste un mal. 
 
 La véritable réponse libertarienne à la question de Walter est que nous nous opposons aux violations du droit de propriété privée – surtout lorsqu'elles sont institutionnalisées, centralisées et monopolisées par un État. L'ampleur du vol n'est pas un facteur déterminant pour qualifier un vol de tel. Le principe est clair : le vol est un crime. 
 
 Certes, le vol à l'étalage ou le larcin à la tire sont moins intrusifs et imposent une charge moindre au propriétaire qu'un impôt qui, par exemple, ampute régulièrement un tiers de ses revenus. On peut donc préférer le premier. Mais il s'agit bel et bien d'un vol. Le fait que le voleur ait dérobé une somme moins importante ne diminue en rien la gravité du vol. 
 
En ce sens, les droits sont binaires : soit ils sont violés, soit ils ne le sont pas. C'est une question de culpabilité et de responsabilité. Il ne s'agit pas de faire du mieux l'ennemi du bien. La pratique consistant à faire respecter, à défendre et à faire appliquer les droits prend en compte l'ampleur du préjudice et applique des sanctions et des conséquences adaptées à chaque cas particulier. Mais elle repose sur une évaluation binaire de la violation ou non d'un droit. Sans violation de droits, il n'y a pas de sanction. Or, la sanction dépend de la gravité du crime.
 
Quel est le rapport avec la pluviométrie et le minarchisme ? De même qu'il faut distinguer la violation des droits et les sanctions, il faut séparer principes et préférences. Certains libertariens peuvent préférer un taux d'imposition plus élevé car il diminue les recettes fiscales de l'État. D'autres peuvent préférer un taux plus bas, même si cela signifie des recettes accrues pour l'État. Mais aucune de ces positions n'est une question de principe. Dans les deux cas, les droits de propriété sont violés – par l'État. 
 
Autrement dit : on ne peut défendre l'une ou l'autre de ces positions par un argument libertarien de principe. L'argument libertarien de principe s'oppose à l'impôt. Il s'oppose également à l'État, puisque l'existence même de ce dernier viole les droits des individus. 
 
 Les minarchistes se considèrent généralement comme libertariens, même s'ils peuvent utiliser d'autres termes comme objectivisme. Mais ils adhèrent, ou du moins affichent, une position de principe de non-agression. Les libertariens, y compris les minarchistes, soutiennent que nul n'est autorisé à violer les droits d'autrui, que ce soit directement ou par la lâcheté d'un tiers. 
 
Mais qu'en est-il alors de l'État ? C'est là que les minarchistes commettent une erreur fondamentale qu'ils refusent d'admettre. Selon eux, un État de petite taille perd tout le pouvoir néfaste d'exercer un monopole sur la violence. Or, pourquoi ? Se pose non seulement la question de la définition de « petit État » – pour reprendre l'exemple hypothétique de Walter, un petit État est-il celui qui perçoit un taux d'imposition plus faible mais des recettes fiscales plus importantes, ou est-ce l'État au taux d'imposition plus élevé et aux recettes moindres qui est simplement plus petit ? Se pose également la question de savoir pourquoi la nature même de l'État ne s'applique plus.
 
Certes, les minarchistes ont imaginé toutes sortes de stratagèmes censés limiter le pouvoir de l'État. Certaines tentatives, plus honnêtes, reconnaissent que l'État cherchera toujours à accroître sa puissance, son influence et son emprise sur la société. À l'instar des Pères fondateurs américains, ils conçoivent donc différents types de freins institutionnels pour contenir cette machinerie. L'histoire a déjà tenté l'expérience, sans succès. La raison en est simple : l'État est pouvoir, force et violence. C'est son principe fondamental ; c'est ce qui le définit, ce qui le distingue des autres types d'organisations. Le monopole de la violence. 
 
Défendre cette machinerie, c'est défendre ce qu'elle est. On peut certes préférer un type particulier d'État. C'est précisément le cœur du raisonnement minarchiste. Leur État idéal est petit, inoffensif et étroitement surveillé. Il n'en reste pas moins un État. Et à ce titre, il viole les droits, a le pouvoir de les violer et est incité à devenir puissant et menaçant – et à se libérer de toute entrave. 
 
La solution anarchiste est simple : l'éliminer. Sans autorité, point de crainte. Et sans autorité, nous sommes libres de trouver nous-mêmes les solutions à nos problèmes. 
 
Ce qui est fascinant, c'est que les minarchistes refusent même d'envisager cette solution, ce qui devrait pourtant aller de soi au regard du principe libertarien de non-agression. Nombre d'entre eux s'y opposent d'ailleurs farouchement. Pourquoi ? Ne serait-il pas plus judicieux de consacrer le temps, les efforts et l'énergie que les minarchistes investissent dans des projets censés limiter le pouvoir de l'État, à trouver des solutions sans lui ? 
 
 La raison, même si les minarchistes refusent de l'admettre, est qu'ils ne peuvent concevoir un monde sans État. Pour eux, l'État n'est pas seulement une solution à un problème, mais une garantie. L'État garantit la protection, la défense et le respect des droits des individus. Il est la garantie de la justice, de la paix et de la liberté dans la société. Interrogez n'importe quel minarchiste, et il vous dira clairement que c'est l'incapacité de l'anarchisme à fournir une telle garantie qu'il conteste. Il ne peut ni concevoir ni accepter qu'une société puisse fonctionner sans dessein ni autorité centrale.
 
C'est là, en réalité, le cœur même de l'illusion étatiste. Qu'ils prônent un État « grand » ou « petit », les partisans de l'État croient fondamentalement à l'idée fantasmée que nous ne pouvons nous en passer. La seule différence entre les minarchistes et les partisans d'un État omniprésent réside dans le fait qu'ils reconnaissent que l'État ne remplit pas sa fonction de garant dans d'autres domaines de la société. Or, prétendent-ils, il doit garantir nos droits. En maintenant son monopole sur la violence et en empêchant les citoyens de résoudre leurs propres problèmes. 
 
Personnellement, je préférerais vivre sous un État minarchiste plutôt que sous d'autres formes, comme l'État nazi, communiste ou l'État-providence. Mais, par principe, c'est une abomination. Il faut l'abolir. 
 
Enfin, je tiens à préciser que les minarchistes ne sont ni nos compatriotes ni nos compagnons de lutte pour la liberté. Ils sont en réalité la pire forme d'étatisme. Non seulement ils acceptent le principe de l'État, fondamentalement anti-libertaire, mais ils en ont une vision idéalisée et irréaliste. D'autres partisans de l'État considèrent, à juste titre, l'État comme une source de pouvoir qu'ils utiliseront pour imposer la structure sociale qu'ils souhaitent. Ils reconnaissent souvent qu'il s'agit d'un moyen d'atteindre leur fin et qu'ils s'en serviront comme d'une arme. Pour les minarchistes, en revanche, l'État est le garant indispensable de tout ce qui est bon : le protecteur, le défenseur et le garant de nos droits naturels. Autrement dit, il est le vecteur de la liberté, de la paix et de la justice. 
 
Difficile d'être plus étatiste.
 

 
Per Bylund, PhD, is a Senior Fellow of the Mises Institute and Associate Professor of Entrepreneurship and Johnny D...  

 
 

Le socialisme est une doctrine politique, et non économique. (Idéologie vs Philosophie)

Le socialisme est une doctrine politique, et non économique.

Les doctrines du socialisme existent depuis plus de 150 ans, mais personne ne les avait véritablement expérimentées pleinement avant l'avènement de l'Union soviétique, des années 1920 au début des années 1990. Durant cette période, plusieurs révolutions communistes/socialistes ont eu lieu en Asie, à Cuba et en Afrique, offrant un terrain d'expérimentation pour observer le fonctionnement de ces économies socialistes. 
 
 
Comme Ludwig von Mises l'avait prédit, les économies socialistes ont connu un échec retentissant. Ses travaux sur le socialisme, publiés en 1920 et 1923, démontrent que, en tant que système économique, il était voué à l'échec avant même sa mise en œuvre, faute de système de calcul économique pratique. Malgré la propagande diffusée par les gouvernements socialistes et les médias occidentaux, qui prétendaient que les économies socialistes sortaient des millions de personnes de la pauvreté, la réalité du socialisme a confirmé les prédictions de Mises. 
 
Dès 1989, même les socialistes les plus convaincus, comme Robert Heilbroner, durent admettre l'échec cuisant du socialisme. En effet, au milieu des années 1990, seuls Cuba et la Corée du Nord tentaient de poursuivre l'expérience socialiste, et leurs économies respectives n'avaient rien d'enviable. Heilbroner écrivait dans le New Yorker :
 
L'Union soviétique, la Chine et l'Europe de l'Est nous ont apporté la preuve la plus flagrante que le capitalisme organise les affaires matérielles de l'humanité de façon plus satisfaisante que le socialisme : aussi inéquitable ou irresponsable que puisse être la distribution des biens par le marché, elle est plus efficace que les files d'attente d'une économie planifiée… La grande question semble désormais être la rapidité de la transformation du socialisme en capitalisme, et non l'inverse, comme cela paraissait il y a seulement un demi-siècle. 
 
Pourtant, Heilbroner – reprenant la conviction de Joseph Schumpeter que le capitalisme ne pouvait survivre à l'ère moderne – n'était pas persuadé qu'une économie capitaliste résisterait aux attaques culturelles et politiques des élites universitaires, sociales et gouvernementales, qui exigeraient toujours plus d'elle qu'elle ne pourrait produire. Heilbroner reconnaissait que Mises avait raison, qu'une économie socialiste manquait du calcul économique nécessaire à son épanouissement, mais il ne put jamais se résoudre à approuver le système capitaliste lui-même. 
 
Aujourd'hui, face à la pauvreté, à la hausse des prix, à la pénurie de logements à New York ou à l'envolée des prix alimentaires, les mêmes personnes accusent le capitalisme et, plus précisément, son symbole par excellence : le milliardaire. Peu importe que les problèmes de logement soient dus au contrôle des loyers et autres interventions gouvernementales visant à limiter l'offre, que l'inflation soit un phénomène provoqué par l'État, ou que les politiques de la Réserve fédérale, en créant des bulles financières, aient engendré une multitude de milliardaires sur le papier : les critiques s'en prendront systématiquement au libre marché. Leurs arguments n'ont besoin ni de cohérence ni de logique pour faire mouche. Comme je l'écrivais récemment, nombre de personnes parmi les plus ignorantes en matière d'économie se sont enrichies en donnant des avis publics sur le sujet. À l'ère des médias, même le plus ignorant des experts passe pour un « spécialiste » s'il partage les « bonnes » opinions politiques.
 
Malgré les nombreux échecs du socialisme en tant que système économique, il est plus populaire que jamais comme système politique. Le magazine socialiste Jacobin déclare : 
 
Pour les socialistes, instaurer la confiance du public dans la faisabilité d'une société socialiste est aujourd'hui un enjeu existentiel. Sans une foi renouvelée et ancrée dans la possibilité d'atteindre cet objectif, il est quasiment impossible d'imaginer relancer et pérenniser le projet. Il convient de souligner qu'il ne s'agit pas de prouver que le socialisme est possible (l'avenir est incertain) ni d'élaborer un plan détaillé (comme pour la projection du capitalisme avant son avènement, ces détails sont inconnus), mais de présenter un cadre qui contribue à démontrer la plausibilité du socialisme. (C'est Jacobin qui souligne.) 
 
Autrement dit, les socialistes n'ont pas besoin de réussir à produire concrètement des biens et des services et à garantir leur distribution. Il leur suffit de les promettre, même s'ils ne peuvent tenir leurs promesses, et de remporter les élections. Il y a cinq ans, le journal socialiste The Nation soulignait que les seules victoires nécessaires se remportent dans les urnes :
 
Plus important encore pour les Socialistes Démocrates d'Amérique (DSA), les Démocrates ne maîtrisent plus leurs listes électorales comme auparavant. Il n'existe aucun mécanisme pour dissuader les candidats DSA de se présenter ; bloquer un candidat est bien plus difficile qu'avant. Le Parti Démocrate actuel n'est plus qu'une coquille vide, prête à être investie par quiconque s'empare des privilèges liés aux fonctions électives. 
 
Si Bernie Sanders, socialiste démocrate, est élu président des États-Unis, le Parti Démocrate deviendra peu à peu son parti. Et s'il perd, en inspirant encore plus de recrues DSA et en favorisant les victoires aux élections locales, les socialistes pourront continuer à remporter des sièges au conseil municipal, à l'Assemblée législative, voire au Congrès, sous l'étiquette démocrate, et ainsi exercer une influence concrète. 
 
À New York, une socialiste siège à l'Assemblée législative de l'État : Julia Salazar, membre des DSA. Elle a contribué à mener des campagnes pour la nationalisation des compagnies d'électricité et pour un droit universel au logement. Cinq candidats soutenus par les DSA briguent des sièges à l'Assemblée législative en juin prochain, défiant les Démocrates soutenus par l'establishment. S’ils remportent tous les élections, ils commenceront à retrouver l’élan des années 1920. 
 
 Cette fois-ci, aucun leader législatif réactionnaire ne viendra déloger les nouveaux socialistes, et aucune peur du communisme n’alimentera la frénésie populaire contre leurs idées anticapitalistes. Salazar est membre de la majorité démocrate, alliée du bloc progressiste, et il est peu probable qu’elle perde une élection de sitôt. Les membres des Socialistes démocrates d’Amérique (DSA) qui souhaitent la rejoindre seront libres de prôner un changement radical. C’est un avenir qui aurait surpris la génération de 1920, car les socialistes n’ont jamais pris le contrôle de New York, et encore moins de l’Amérique. Mais les socialistes d’aujourd’hui abordent les années 2020 sans les obstacles insurmontables d’il y a un siècle. Ils n’ont plus besoin de leur propre parti. Ils peuvent simplement s’approprier celui de quelqu’un d’autre.
 
Aujourd'hui, les socialistes ont non seulement conquis la mairie de New York, mais aussi celle de Seattle, où un autre candidat se réclamant du socialisme démocrate a remporté les élections en imitant la campagne new-yorkaise axée sur l'accessibilité financière de Zohran Mamdani. Le mouvement ambitionne désormais de s'emparer du Parti démocrate. Il faut bien comprendre que ni Mamdani ni Katie Wilson, à Seattle, ne parviendront à tenir ne serait-ce qu'une fraction de leurs promesses électorales. Quoi qu'ils imposent, cela ne fera qu'aggraver la situation de leurs électeurs, mais leurs échecs non seulement seront ignorés, mais au contraire réinterprétés comme des succès. Dans sa critique de *Political Pilgrims* de Paul Hollander, où ce dernier analyse l'idéalisation du communisme par les élites occidentales, Paul Schlesinger Jr. écrit : 
 
Dans son analyse des mécanismes d'auto-illusion, le professeur Hollander utilise efficacement le concept de « redéfinition contextuelle ». Il entend par là la manière dont les activités sont transformées par leur contexte, de sorte que ce qui est détestable dans une société devient valorisant dans une autre. Ainsi, l'intellectuel de gauche estime que toute société fondée sur la propriété d'État, quelles que soient ses imperfections superficielles, est fondamentalement bonne ; toute société fondée sur la propriété privée, quelles que soient ses attraits superficiels, est fondamentalement corrompue. La pauvreté représente un échec honteux du capitalisme ; mais associée à l'égalitarisme et à la subordination des besoins matériels aux besoins spirituels, elle exprime un mode de vie simple et pur. Le travail manuel est dégradant sous le capitalisme, valorisant sous le communisme. Le travail des enfants est abominable aux États-Unis, mais à Cuba, voir des enfants travailler 15 heures par semaine dans les champs symbolise un but noble et commun. Comme l'a dit Angela Davis : « Le travail de coupe de la canne à sucre a radicalement changé depuis la révolution. » La redéfinition contextuelle, écrit le professeur Hollander, produit également une « réaction euphorique face à des objets, des scènes ou des institutions en soi banales et que l'on retrouve aussi dans les sociétés des visiteurs ». « Il y a quelque chose de fascinant dans un train russe à l'arrêt en gare », écrivait Waldo Frank. « La petite locomotive est humaine… Les wagons miteux sont humains. » 
 
De plus, les socialistes (et notamment ceux de l’enseignement supérieur) sont capables de manipuler les mots pour créer l’enfer capitaliste imaginaire dans lequel nous vivrions soi-disant. John Fea, professeur d’histoire à l’université chrétienne Messiah University, a publié le texte suivant sur le site web aujourd’hui disparu « Current » :
 
En tant que capitalistes, nous avons une confiance absolue dans les marchés financiers. Nous croyons que l'économie, avec la consommation ostentatoire qui la nourrit, sera notre salut. Nous scrutons le bas de nos écrans tandis que défile le téléscripteur, priant ardemment pour que ce soit enfin le jour où les dieux du Dow Jones accompliront leur magie et nous combleront de bienfaits. 
 
Mais le prophète Adam Smith n'a entendu que les prières d'une poignée d'élus. La main invisible n'a guère contribué à enrayer les inégalités, l'instabilité et la dégradation de l'environnement. Comme l'écrit l'historien Eugene McCarraher dans *Enchantments of Mammon : How Capitalism Became the Religion of Modernity*, nous vénérons le trône de « l'ontologie capitaliste de la transsubstantiation pécuniaire, son épistémologie de la domination technologique et sa morale du profit et de la productivité ». Ces dieux sont impuissants face à la pandémie, aux meurtres de Noirs dans la rue, ou à la naissance d'enfants qui vivront dans un monde de plus en plus invivable. 
 
 Le fait que Fea décrive un monde imaginaire est sans importance dans son domaine et dans celui des élites universitaires et médiatiques. Pour Fea et ses collègues de Messiah et de la plupart des universités, l'économie américaine est un véritable enfer où la plupart des gens vivent dans la misère (à l'exception des milliardaires), où seule une minorité bénéficie d'une couverture santé, où les capitalistes ont ravagé notre planète et où les profits sont extorqués au détriment des travailleurs américains. Rien ne doit contredire cette croyance. Comme l'a écrit Thomas Sowell à propos de gens comme Fea :
 
Il est généralement vain de tenter de convaincre par des faits et des analyses ceux qui se complaisent dans une supériorité morale fondée sur leur ignorance. 
 
Selon Fea, le socialisme « repose sur la croyance fondamentale en la valeur et le caractère sacré de l'être humain », et il serait la seule forme d'organisation sociale morale. Fea soutient également que le socialisme démocratique n'a rien à voir avec le communisme et les dictatures qui ont accompagné cette idéologie. Pourtant, nombre de ses articles de blog révèlent des liens avec l'extrême gauche qui a soutenu ces dictatures communistes. 
 
 Il est important de comprendre que Fea n'est pas une figure marginale de l'enseignement supérieur chrétien. Il contribue régulièrement à Christianity Today et est un conférencier recherché dans les universités chrétiennes. 
 
 Une personne comme Fea refuse de se préoccuper des questions de calcul économique – et puisque ce calcul repose sur des éléments tels que les prix du marché et les profits, qu'il juge immoraux, tout argument fondé sur un calcul économique ne résiste pas, à ses yeux, à l'épreuve de la moralité. Seule l'intention compte. Le socialisme, soutient-il, repose sur les idéaux les plus élevés de la fondation des États-Unis ; s’y opposer, c’est donc s’opposer à la vérité et à la décence mêmes. 
 
 Fea aborde l’argument dit de la nature humaine contre le socialisme, affirmant qu’il est facilement réfutable, car un gouvernement efficace, fondé sur la démocratie, compensera tout égoïsme inné chez l’être humain. Il cite Ben Burgis, du journal socialiste radical Jacobin :
 
Le cœur du socialisme est la démocratie économique. Qu'il s'agisse de décisions prises au sein d'une entreprise ou de décisions plus importantes ayant un impact considérable sur la société, les socialistes estiment que toute personne concernée doit avoir son mot à dire. 
 
 L'une des raisons pour lesquelles cela est si important est précisément que concentrer trop de pouvoir sur autrui risque d'entraîner des abus. Aucun système n'est parfait, bien sûr, mais le meilleur moyen de minimiser les risques d'abus est de répartir le pouvoir – politique et économique – le plus équitablement possible. 
 
 L'idée que le processus politique soit moralement supérieur au processus économique n'est pas surprenante de la part d'un professeur d'université qui rejetterait systématiquement le libre marché. Mais Fea et ses alliés pensent que tant que les citoyens peuvent voter, nous pouvons avoir une « démocratie économique », qui n'est guère plus qu'un concept abstrait, déconnecté de la réalité. 
 
 Il est à noter que dans aucun des écrits socialistes actuels, on ne s'attaque réellement aux questions économiques concrètes. Comme l'écrit Jeff Deist, les socialistes pratiquent ce qu'il appelle « l'antiéconomie » :
 
 L'antiéconomie… part de l'abondance et remonte le fil. Elle privilégie la redistribution à la production. Au cœur de toute antiéconomie se trouve une vision positiviste du monde, l'idée que les individus et les économies peuvent être contrôlés par décret législatif. Les marchés, qui fonctionnent sans organisation centralisée, cèdent la place à la planification, tout comme la common law cède la place au droit statutaire. Cette conception est particulièrement répandue chez les intellectuels de gauche, qui considèrent l'économie non pas comme une science, mais comme un exercice pseudo-intellectuel visant à justifier le capital et les intérêts des grandes entreprises.
 
Si des socialistes comme Fea invoquent la « démocratie économique », en réalité, seul l'État est capable de mettre en œuvre l'organisation économique qu'ils prônent. Certes, on ne lira jamais rien de plus abstrait de la part des socialistes, puisqu'une économie socialiste prospère ne fonctionne que dans un monde imaginaire. Après tout, Fea et les journalistes socialistes de The Nation et Jacobin n'ont pas à se soucier de prendre des décisions économiques d'envergure ; ils peuvent marquer des points simplement en dénonçant le capitalisme et en exigeant une économie « juste », sans même comprendre comment une économie fonctionne. Ils n'ont pas besoin d'avoir raison ; il leur suffit d'être perçus comme moraux par leurs pairs. 
 
En fin de compte, les socialistes excellent dans les stratégies électorales, mais pas en économie. Ils parlent de leurs candidats séduisants et des perspectives d'élire de nouveaux socialistes. Ce qu'ils sont incapables de faire, c'est de présenter une vision cohérente de l'économie, et une fois élus, ils n'auront pas plus de succès que les commissaires et les planificateurs économiques de l'ancienne Union soviétique qui, au moins, ont eu la sagesse, en 1991, de fermer boutique et d'éteindre les lumières.
 

 
William L. Anderson est rédacteur en chef à l'Institut Mises et professeur émérite d'économie à l'université d'État de Frostburg... 
 

 https://mises.org/mises-wire/socialism-political-doctrine-not-economic-one

 

 

Powered By Blogger