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septembre 11, 2025

"Bloqer "? Non, croître !

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« Il faut plus de moyens. » « Il faut plus de dépenses. » « Taxons les riches ! » Nouveau mouvement, anciens slogans. Pour les militants du 10 septembre, la seule réponse à nos difficultés semble consister à creuser toujours plus la dette. Et si on essayait la croissance ?


La France connaît une crise économique, politique et sociale inédite. Plombée par des divisions béantes, le bûcher des égoïsmes, une vision du monde obsolète où les vieilles lunes dominent par la grâce des extrêmes et la déconnexion frileuse et sans imagination du bloc central, elle file droit vers l’abîme de la relégation. Privée de majorité comme de budget, incapable de compromis, elle regarde avec lassitude la valse des Premiers ministres et méprise une dette publique qui culmine à 3 345 milliards d’euros, représentant environ 116 % du PIB selon les dernières projections du Fonds monétaire international et de l’OCDE. Le déficit budgétaire persiste autour de 5,4 % à 5,8 % du PIB, tandis que les paiements d’intérêts sur cette dette s’élèvent à près de 66 milliards d’euros annuels. Un montant qui dépasse déjà le budget alloué à l’éducation et pourrait atteindre 100 milliards d’ici 2029 en continuant sur cette lancée. Et les nouveaux emprunts pourraient passer la barre des 4 % – ce qui induit +5 milliards d’intérêts annuels par point de taux –, tandis que nous remboursons difficilement ceux qui tournent autour de 1,3 %. Autant de sommes qui ne participent pas à l’investissement en faveur de l’école, de la justice, de la santé, de la sécurité ou de la défense. Pire, nous attendons fébrilement la dégradation de la note du pays par les différentes agences de notation, dont les verdicts vont tomber entre le 12 septembre et la fin octobre. Une autre perspective d’augmentation des taux d’intérêt et donc de la dette future. Quant à la croissance du PIB, elle est anémique, prévue à seulement 0,6 % à 0,8 % pour l’année, bien en deçà de la moyenne de la zone euro, pourtant peu reluisante avec ses 1,5 %. Même si le chômage a baissé ces dernières années, non sans quelques douteux artifices de présentation de ses chiffres et de sa structure, il reste élevé, à 7,5 %. Et s’agissant des retraites, depuis 20 ans, leur financement tire les dépenses publiques vers le haut, totalisant 14 % du PIB et près de la moitié des versements en faveur des aides sociales. Le tout par refus de faire tomber le tabou de la capitalisation, toujours profitable sur le temps long malgré de potentielles brèves baisses de rendement conjoncturelles. Comme le montre la capitalisation partielle suédoise, qui a permis de stabiliser un système précédemment fragilisé. Enfin, l’inflation, bien que désormais modérée, revenue autour de 1 %, a vu son augmentation massive durant les deux dernières années éroder le pouvoir d’achat des ménages.

Austères perspectives ?

 Face à un tableau aussi noir, la logique voudrait que l’on applique une véritable politique d’austérité, ainsi qu’il en a toujours été quand des pays ont fait face à une violente crise de la dette. Coupes budgétaires massives, hausses d’impôts et réductions drastiques dans les dépenses sociales sont les recettes habituelles en la matière. Cette approche, qui vise à ramener le déficit sous les 3 % du PIB, pourrait, dans un premier temps, aggraver la situation, comme l’ont démontré les cas passés de la Grèce entre 2010 et 2015, où cette politique a provoqué une chute de 25 % du PIB et une explosion du chômage à 27 %. Nous n’y sommes pas encore. Mais, hélas, quand le point de non-retour est atteint, c’est indispensable. Et contrairement à ce qui est clamé à longueur de manifestations, nous sommes encore très loin d’une politique d’austérité, même si tant de choses seraient à dire concernant la gestion de l’État et les nombreuses économies pouvant être envisagées sans augmenter les inégalités.

Oser la croissance !

 Mais il existe un contrepied radical à ces sombres perspectives : s’appuyer sur les atouts de la France pour enfin oser la croissance économique. Ce n’est pas une option facultative, mais l’unique stratégie viable pour désendetter le pays sans sacrifier les citoyens. Historiquement, les phases de forte expansion ont permis de réduire le ratio dette/PIB de manière organique, sans austérité punitive. Aux États-Unis, après la crise financière de 2008, le plan de relance d’Obama, doté de 800 milliards de dollars, a stimulé une croissance moyenne de 2,5 % par an, ramenant la dette de 100 % à 74 % du PIB en 2019 selon les données de la Banque mondiale. En France même, les Trente Glorieuses ont vu une croissance annuelle de 5 %, divisant par deux le poids de la dette accumulée après la Seconde Guerre mondiale, tout en finançant un État-providence robuste. Sans une accélération similaire, la dette française pourrait atteindre 120 % du PIB d’ici 2026, alourdissant les intérêts de 10 à 15 milliards supplémentaires par an. À l’inverse, cibler une croissance de 3 % par an – un objectif réaliste avec des réformes en faveur des entreprises – générerait 150 milliards d’euros de PIB additionnel sur trois ans, augmentant les recettes fiscales de 60 à 70 milliards (à un taux moyen de 45 % du PIB, chaque point de croissance rapportant environ 30 milliards en impôts et cotisations).

Desserrer l’emprise

 Pour rendre cette perspective réaliste, il faut d’abord réduire une part du périmètre de l’État, pas celle qui aide les – réels – plus fragiles, mais celle qui n’a rien à voir avec les missions d’une nation ou qui relève de la pure sphère privée, comme les participations de l’État dans Renault – le résultat d’une rétorsion post-Seconde Guerre mondiale. Mais aussi baisser les impôts de manière ciblée, en ramenant le taux de l’impôt sur les sociétés de 25 % à 15 % pour les PME innovantes et les nouveaux secteurs stratégiques. Des domaines dans lesquels nous possédons des champions ne demandant qu’à assumer leurs responsabilités. C’est notamment le cas dans l’intelligence artificielle, l’énergie solaire, les biotechnologies, la santé numérique, l’aéronautique, la fintech, la cybersécurité, la banque ou encore l’agritech. Cela pourrait générer des milliards d’euros annuels pour les investissements privés, avec un coût budgétaire initial de 15 milliards, rapidement compensé par 25 milliards de recettes supplémentaires issues de l’activité accrue. L’exemple de l’Irlande est édifiant. Son taux d’imposition sur les sociétés de 12,5 % a attiré plus de 1 000 milliards d’euros d’investissements étrangers depuis 2000, propulsant sa croissance à 5 % en moyenne – malgré des fluctuations allant de -5 % à +18 % – et créant des centaines de milliers d’emplois qualifiés.

Cultiver nos potentiels

 Parallèlement, des investissements massifs en infrastructures et innovations s’imposent : allouer 100 milliards d’euros sur cinq ans, financés par des emprunts à bas taux (autour de 2,5 % actuellement pour les obligations françaises à 10 ans), à la transition numérique et verte. Pas par une planification étatique rigide – de la promotion de l’hydrogène à la destruction de la filière nucléaire, l’État n’a pas démontré sa lucidité – mais par une approche bottom-up, qui fixe un cap, soutient les projets, mais laisse aux acteurs économiques la liberté de choisir leurs solutions. Cela inclut 50 milliards pour l’intelligence artificielle et les start-up, amplifiant les leviers de la BPI, et pourrait créer 500 000 emplois high-tech selon les estimations de divers cabinets. Le retour sur investissement est prouvé : chaque euro investi en R&D génère 2,5 euros de PIB additionnel, d’après l’OCDE, transformant ces dépenses en moteurs de prospérité à long terme.
 
 

L’impôt pour tous

 À cela s’ajoute une nécessaire réforme fiscale, incluant l’impôt pour tous, comme au Danemark – le pays le plus proche de nous en termes de prélèvements – même de manière symbolique, afin de concerner tous les citoyens et de ramener chacun dans le cadre républicain. Avec également une redéfinition des tranches, de manière à ce que les classes moyennes supérieures, les plus affectées et les moins aidées, retrouvent une dynamique d’action.

Plus léger, plus agile

 Une dérégulation intelligente compléterait ces mesures, en simplifiant le Code du travail pour réduire de 30 % les normes administratives superflues, facilitant les embauches et les adaptations des entreprises. Mais en l’appliquant avec doigté pour ne pas créer d’appels d’air au seul profit de bas salaires et en empruntant des recettes à la flexisécurité nordique. Enfin, des ajustements de TVA, comme en Irlande encore une fois, notamment sur les biens essentiels, pourraient stimuler la demande intérieure.
Contrairement à l’austérité, dont le multiplicateur fiscal négatif contracte l’économie, une relance expansionniste offre un multiplicateur positif, permettant de ramener le déficit sous 3 % du PIB d’ici 2030 et de stabiliser la dette. Tous, citoyens, entrepreneurs, élus, devons rejeter la petite musique soit étroite, soit décroissante, soit de repli, qui agite la classe politique comme la rue ! Une France dynamique, innovante et leader mondial dans l’innovation, dont la croissance serait la clé de l’équité et de la souveraineté, reste possible.
 
Benjamin Sire @BenjaminSire
 

 

 

septembre 06, 2025

Ah les "Mozart" de la finance en France, des champions, ils font mieux que prévu, beaucoup mieux même ! Cataclysmique ...

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Le déficit budgétaire français est catastrophique !
Il s'élève à 142 milliards...
C'est 32% de plus que ce qu'il était prévu initialement à 107.2 milliards €.
A ce rythme là, il n'y aura pas assez de jours fériés à supprimer pour compenser.
 

 
Les conséquences en termes simples :
🚨 L'État doit emprunter pour couvrir la différence
🚨 La dette publique augmente encore
🚨 L’État paye encore plus d'intérêts chaque année (50 milliards /an)
🚨 Les marchés financiers perdent confiance et exigent des taux d’intérêt plus élevés pour prêter à la France (4.5% sur les obligations à 30 ans, un record de 2011)
🚨 Le financement de l’État coûte encore plus, c'est un cercle vicieux.
Soit l'Etat prends des mesures d'austérité (comme en Grèce, sans comparaison tout de même), soit l'Europe prend les commandes.
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Ces croyances qui envoient la France dans le mur de la dette
« La France est trop importante, elle ne peut pas faire défaut », « la dette ne se rembourse pas », « il suffit de supprimer les 211 milliards d’aides aux entreprises »… Autant de clichés qui pourrissent le débat et empêchent de regarder la réalité des finances publiques françaises. Débunk.
par Benjamin Sire @BenjaminSire et Philippe Silberzahn @phsilberzahn
 
La première chose qui vous est demandée lorsque vous rejoignez les Alcooliques Anonymes, c’est d’admettre votre problème avec l’alcool. Sans cet aveu, rien n’est possible. À maints égards, il en va de même concernant la réalité de la crise de la dette française : tant que le pays ne reconnaîtra pas qu’elle constitue un sérieux problème, nul salut n’est envisageable pour ses finances. Et l’illusion dangereuse dans laquelle nous vivons se perpétuera…
Car, de cette reconnaissance, nous sommes encore très éloignés. Notamment parce qu’il persiste au sujet de la dette un certain nombre de fausses croyances, abondamment entretenues par le personnel politique et certaines sphères militantes. Soit par manque de culture économique, soit par pur cynisme, parfois pour les deux raisons. Hélas, ces fantasmes délétères rendent impossible l’établissement d’un diagnostic lucide de la situation économique du pays. Si nous persistons à croire qu’il n’y a pas de problème, il est impossible d’y remédier.
Raison pour laquelle nous allons nous atteler à examiner un certain nombre de ces croyances et tenter de débusquer les mensonges qu’elles recèlent.
 

 
 1 – « Il est impossible que les marchés financiers refusent de prêter à la France tant elle est importante dans la zone euro. »
Ou, dans le même ordre d’idée :
« La France ne peut pas faire défaut, comme ce fut le cas de la Grèce en 2012. »
Ici, la croyance – quelque peu prétentieuse – est dans la singularité d’une France capable de s’affranchir des lois de l’économie. Parce que nous sommes « un grand pays », « l’un des deux principaux moteurs de l’Europe », nous serions à l’abri de la faillite. C’est oublier que d’autres grandes nations, comme le Canada ou la Nouvelle-Zélande, ont connu de violentes crises de la dette auparavant. Mais aussi, plus près de nous, l’Italie, troisième économie de la zone euro, avec des marqueurs assez proches des nôtres au moment du désastre, en 2011*.
Si le défaut de paiement fut loin d’être atteint dans ces trois pays, et d’autres ayant connu des situations analogues, la potion qui leur a été infligée pour résoudre la crise fut extrêmement violente. Nous l’avons déjà montré à partir de plusieurs infographies – que nous reproduisons ici – rappelant les conséquences des mesures prises pour les fonctionnaires, les retraités, les salaires, l’emploi et les entreprises, dont nombre furent confrontées à la faillite.
Certes, la France est une économie clé de la zone euro. Mais les marchés financiers évaluent le risque sur la base de ratios comme la dette publique (113 % du PIB en 2024 selon l’INSEE) et le déficit budgétaire (5,8 % du PIB). Une dégradation de la solvabilité ou une perte de confiance, comme lors de la crise des dettes souveraines de 2010-2012, pourrait entraîner des hausses de taux d’intérêt (ce qui est déjà le cas) ou un rationnement du crédit, y compris pour la France.
Même si un « scénario à la grecque» est encore lointain, aucun État n’est immunisé contre un défaut souverain. Si la France bénéficie encore d’un large accès aux marchés et conserve le soutien de la Banque centrale européenne (BCE), la montée des taux (passés de 1,6 % pour les remboursements actuels à 3,4 %, voire 3,6 %), couplée à la crise des liquidités que nous connaissons, est franchement de mauvais augure. Et ce, de manière encore plus évidente au regard de l’incapacité du Parlement à s’accorder sur l’adoption d’un budget, dans un contexte d’instabilité politique et de fortes tensions sociales.
 
2 – « La dette n’aura aucun impact sur moi ! »
Encore raté ! Une crise de la dette a un impact sur tous les citoyens. Nous l’avons vu plus haut, en prenant les exemples du Canada, de la Nouvelle-Zélande et de l’Italie. Nous pourrions aussi évoquer la crise espagnole de 2012, même si celle-ci est autant liée à l’explosion de la bulle immobilière locale qu’à un dérapage des finances publiques. Elle a entraîné une explosion du chômage qui a touché 1 actif sur 4 et un jeune sur 2. Un prélèvement obligatoire de 2 % sur tous les salaires a été imposé pour financer les retraites. Quant aux fonctionnaires, ils ont perdu 8 % de leur pouvoir d’achat. Enfin, les 35 heures des fonctionnaires ont été jetées aux orties, voyant le temps de travail augmenter de deux heures et demie.
Concernant l’Italie, à partir de 2011, un dixième des emplois de la fonction publique a été sabré, tandis que le pouvoir d’achat des fonctionnaires a baissé de 10 % et celui des retraités de 5 %, tandis que l’âge de départ a été repoussé de 4 ans pour atteindre celui de 66.
Les fonctionnaires et les retraités ne sont pas les seuls touchés. Durant les crises financières suédoise de 1992 et canadienne de 1995, les entreprises ont été soumises à rude épreuve, les faillites s’étant accumulées de manière effrayante. Chemin que la France semble désormais emprunter depuis 2024, avec 66 422 dépôts de bilan, selon la BPCE, soit une hausse de 64,5 % par rapport à 2022 et de 18 % par rapport à 2023.
Certes, la dette publique française n’est pas la cause unique de ces faillites. Mais, couplée à l’incertitude politico-économique, elle aggrave les possibilités de financement par la limitation des aides publiques et la hausse des taux d’intérêt, faisant particulièrement souffrir les sociétés ayant contracté des prêts garantis par l’État (PGE), non encore remboursés lors de la pandémie de Covid. Chacun – particulier, entreprise, fonctionnaire – est donc bien impacté par une crise de la dette.
 

 
 3 – « Cela fait 30 ans qu’on nous dit la même chose et regardez, nous sommes toujours en vie ! »
Ici, la croyance est le produit de ce qu’en psychologie on appelle le biais de normalité. Il consiste à nier ou minimiser des avertissements relatifs à un danger, donc à sous-estimer la probabilité d’une catastrophe. En suivant la logique d’un tel raisonnement, toute personne vivante peut se croire immortelle. On retrouve là le fameux « jusque-là tout va bien», popularisé par le film La Haine, faisant le récit des considérations d’un homme chutant d’un précipice sans avoir encore touché le sol.
Certes, la France est toujours « en vie », mais sa dette va progressivement lui coûter très cher, après une période pré-Covid où les taux étaient particulièrement avantageux. Par ailleurs, n’oublions pas que l’histoire progresse par paliers et que les facteurs de crise mettent longtemps à produire leurs effets. Mais lorsque le drame se présente, c’est de manière soudaine et brutale. Cela n’est pas sans rappeler la fameuse citation d’Hemingway : « Comment avez-vous fait faillite ? De deux façons. Progressivement, puis soudainement. » Or, si la France continue patiemment à courir à sa perte, sans changer de trajectoire, elle risque d’y parvenir brutalement.
Particulièrement dans un moment où la charge de la dette atteint un seuil très inquiétant (près de 70 milliards d’euros annuels prévus pour 2026) et ne cesse d’augmenter, tout comme les taux d’intérêt. Ceux de l’obligation française à 30 ans viennent d’ailleurs de franchir les 4,5 %, ce qui est très inquiétant et n’était pas arrivé depuis 2011, date de la crise de la zone euro.
 
4 – « Pas d’inquiétude, la dette ne se rembourse jamais ! »
Cette croyance, encore reprise dans une tribune publiée dans Le Monde il y a quelques jours, sous la plume d’économistes d’Attac et de la Fondation Copernic, est dangereuse, tant elle est couramment diffusée. Car si la dette totale semble effectivement se perpétuer sans être remboursée, ce n’est qu’une impression. Les États comme la France ne remboursent généralement pas le principal de leur dette de manière massive. Mais ils le font concernant les anciens emprunts arrivés à échéance et en contractent de nouveaux de manière continue.
Cette pratique est standard en économie publique, permettant de maintenir la liquidité sans choc budgétaire immédiat. Problème : plus les taux d’intérêt montent, plus ces échéances et les intérêts à rembourser obligatoirement augmentent. Tant que les taux restaient sous les 2 %, cela semblait soutenable. Mais avec la dynamique actuelle de remontée des taux, conjuguée à un montant de dette global sidérant, cela change la donne en profondeur et grève considérablement les finances publiques et les marges budgétaires.
En résumé : on rembourse les anciens emprunts à taux faible, mais on contracte les nouveaux à des taux plus élevés. Pire, cette situation peut conduire à l’introduction d’une spirale auto-réalisatrice si les marchés financiers perdent confiance, comme l’a illustré la crise italienne de 2011. À l’époque, l’Italie, avec une dette publique autour de 120 % du PIB et une croissance atone, a vu ses taux d’emprunt à 10 ans bondir à plus de 7 %, en raison d’une contagion depuis la Grèce, d’un déficit budgétaire persistant et d’une forte instabilité politique.
Pour la France, un tel épisode pourrait survenir si le ratio dette / PIB dépasse durablement 115 % (projeté à 116 % fin 2025), entraînant une hausse des spreads obligataires (différentiel avec l’Allemagne), qui obligerait l’État à pratiquer des ajustements brutaux. C’est ce que rappellent les avertissements de la Cour des comptes, soulignant notre vulnérabilité accrue aux chocs externes.
 

 
 5 – « La dette ne pèse pas sur les enfants, mais finance un patrimoine bénéfique. »
Cette autre croyance, figurant dans la tribune du Monde précitée, est séduisante, car la dette peut financer des actifs productifs. Mais, en réalité, elle sert surtout à couvrir des dépenses courantes. Elle ignore aussi les coûts d’opportunité : des intérêts élevés absorbent des fonds qui pourraient aller à l’éducation ou à la transition écologique.
Avec une durée moyenne de la dette de 8 à 9 ans, les remboursements futurs (via les impôts ou de nouvelles coupes budgétaires) affecteront bien les générations futures. Surtout, les prêts que nous contractons ne financent pas des investissements, mais des dépenses de fonctionnement. En 2023, le manque à gagner de notre système de retraite, évalué à 70 milliards, a ainsi représenté quasiment la moitié du déficit public.
 
6 – « Avec 211 milliards de cadeaux aux entreprises ces dernières années, on sait où trouver les économies budgétaires ! »
Problème : le chiffre de 211 milliards – soit trois fois le budget de l’Éducation nationale – régulièrement avancé est faux. Il inclut de nombreux financements qui ne vont pas aux entreprises privées ou dépendent de politiques vertueuses. Par exemple, les aides à l’audiovisuel public, aux affaires maritimes, à l’agriculture, aux territoires ultramarins ou aux emplois aidés. Mais aussi des subventions environnementales, et bien d’autres.
Ce chiffre provient d’un rapport du Sénat qui recense plus de 2 200 dispositifs en faveur des entreprises pour l’année 2023. Son montant diverge d’ailleurs d’autres évaluations officielles, comme celle du Haut-Commissariat au Plan, qui trouve 111,9 milliards en adoptant un périmètre plus précis.
Comme l’a expliqué Benjamin Dard dans Franc-Tireur, sans ces aides, « notre économie ne résisterait pas dans la compétition internationale. Depuis les années 1990, l’État tente d’amortir le coût du travail. Pas par idéologie néolibérale, mais parce que, pour financer un modèle social à part, les entreprises françaises ploient sous les charges. C’est même le pays où le coût du travail est le plus élevé, selon l’OCDE. […] Supprimez ce dopage et bon courage pour rester compétitif face à la Chine ou à l’Allemagne. »
Et pourtant, ces aides ne suffisent pas à « remédier aux déséquilibres mondiaux entre puissances », comme l’écrit un rapport de Rexecode (Centre de recherches pour l’expansion de l’économie et le développement des entreprises). D’autant que d’autres grandes nations utilisent les mêmes méthodes avec des montants variables : environ 202 milliards pour l’Allemagne, 181 milliards pour les États-Unis, 335 milliards pour la Chine, qui n’ont pourtant pas les mêmes contraintes liées aux cotisations sociales.
Il n’est donc pas question de cadeaux, mais de dispositifs indispensables pour limiter l’impact de notre modèle social par rapport à celui des autres grandes puissances. La suppression de ces aides viendrait immédiatement renchérir le coût de fonctionnement des entreprises bénéficiaires, ce qui aurait un impact négatif sur leurs résultats et réduirait leur contribution aux finances publiques.
Ainsi, en supprimant ces aides, l’État et les finances publiques seraient sans doute finalement perdants.
 

 
 
Conclusion
Tant que la question de la dette sera publiquement abordée sur le fondement de ces fausses croyances – et d’autres, voir encarts abonnés –, la France continuera à se rapprocher d’une crise majeure dont les remèdes pèseront lourdement sur le portefeuille de chacun de ses citoyens. Et cela, ni les institutions, ni les entreprises, ni les citoyens ne peuvent se le permettre.
 

 

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