Le thorium est un métal très lourd de couleur argentée qui se trouve
naturellement et abondamment dans la croûte terrestre, souvent associé à
d'autres minéraux radioactifs.
Il
est principalement étudié pour son potentiel en tant que combustible
nucléaire, en raison de son abondance et de sa capacité à produire de
l'énergie sans générer autant de déchets à longue durée de vie que l'uranium. Le thorium est ainsi considéré comme une alternative plus sûre et plus durable pour l'énergie nucléaire.
Thorium utilisé au Bhabha Atomic Research Centre à Mumbai en Inde.
Origine et numéro atomique
Le
thorium a été identifié en 1829 par le chimiste suédois Jöns Jacob
Berzelius, après avoir été extrait sous forme de minerai dans l'île de
Løvøya en Norvège. Le nom de ce minerai provient du dieu du tonnerre
dans la mythologie nordique, Thor.
La radioactivité du thorium a été découverte en 1898 par la physicienne Marie Curie et par le chimiste Gerhard Carl Schmidt.
Le thorium se situe en fin du tableau de Mendeleïev (numéro atomique = 90) dans la famille des actinides, tout comme l’uranium naturel (Z = 92)(1). Il dispose d’un seul isotope : le thorium 232.
Usages et intérêts
Le
thorium possède des qualités physico-chimiques exceptionnelles : il ne
fond qu’à 1 750°C et se vaporise vers 4 800°C (Pa). Il a de nombreuses applications industrielles comme matériau réfractaire, cathode en électronique, catalyseur en chimie, pour le cracking du pétrole, etc.
Une voie prometteuse pour le thorium comme combustible nucléaire semble être celle l'utilisation du mélange thorium-uranium
sous la forme de sel fluorés fondus, servant à la fois de combustible
et de caloporteur dans un réacteur à sel fondus (RSF). La filière
thorium-uranium 233 avait déjà suscité l’intérêt des chercheurs dès les
années 1950. Elle avait alors été rejetée, au bénéfice de la filière
uranium-plutonium car les conditions de radioprotection n’étaient alors
pas maîtrisées.
Le thorium peut également être utilisé par des
réacteurs de cette nouvelle génération dans des surgénérateurs à
neutrons rapides.
Différences avec l'uranium
Le thorium
est 3 à 4 plus abondant que l’uranium naturel (voir pargraphe sur les
ressources plus bas dans l'article) et est très faiblement radioactif (demi-vie de 14 milliards d’années).
Le thorium n'est pas fissile (l’uranium est le seul élément naturel à comporter un isotope fissile (uranium 235). mais fertile,
c'est-à-dire qu’il et peut se transformer par absorption d’un neutron
en uranium 233, élément fissile tout comme l’uranium 235 utilisé dans
les réacteurs actuels à eau pressurisée (type des réacteurs du parc nucléaire français).
Or, la fission de l’uranium 233 produit un peu plus de neutrons que
celle de l’uranium 235, ce qui permettrait de produire davantage
d’énergie avec une quantité donnée de minerai.
Dans le cas de
l'uranium, la réaction en chaîne est donc amorcée par de l'uranium 235
présent dans le minerai naturel puis dans le combustible préparé à
partir de ce minerai. Dans le cas du thorium, « il faut ajouter
artificiellement un élément fissile (ici de l'uranium 235) dans le
combustible préparé à partir de minerai naturel de thorium qui est non
fissile », explique le CEA(2) (comme l'illustre son schéma suivant).
Le couple Th232-U233 permet, comme U238-Pu239, la surgénération avec des neutrons rapides.
Contraintes économiques
L'exploitation du thorium implique des méthodes d'extraction plus coûteuses que celle de l'uranium, selon l'AIEA(3). « La
recherche, le développement et les essais d'installations nucléaires
alimentées au thorium sont tout aussi coûteux en raison d'un manque
d'expérience significative avec la prééminence historique du thorium et
de l'uranium dans l'énergie nucléaire », souligne l'Agence.
Le
retraitement des combustibles usés au thorium nécessite par ailleurs le
développement, au niveau industriel, d’un procédé spécifique (procédé
thorex), distinct de celui utilisé pour l’uranium, ajoute le CEA.
Le thorium dans le monde
Ressources estimées
La proportion de thorium dans la croûte terrestre est « de
l'ordre de un cent-millième, c'est-à-dire qu'il est plus abondant que
l'étain, l'arsenic et les métaux précieux. Il y en a deux fois moins que
le plomb, quatre fois moins que le zinc, dix fois moins que le cuivre,
mais il est de trois à quatre fois plus abondant que l'uranium »,
selon le CEA. L'AIEA évoque un même ratio entre la concentration
estimée de thorium (10,5 parts par million) et celle d'uranium (3 ppm).
L'AIEA
estimait les ressources mondiales de thorium à 6 355 000 tonnes à fin
2016. Ces ressources de thorium seraient principalement situées dans 7
pays selon les connaissances actuelles (par ordre d'importance)(4) :
en Inde (846 000 tonnes, soit environ 13% des ressources mondiales) ;
au Brésil (632 000 tonnes);
en Australie (595 000 tonnes) ;
aux États-Unis (595 000 tonnes) ;
en Égypte (380 000 tonnes) ;
en Turquie (374 000 tonnes);
au Venezuela (300 000 tonnes).
Inde, Norvège, Chine...
L’Inde
consacre actuellement un programme important de recherche pour
l'utilisation du thorium dans des surgénérateurs à neutrons rapides, ce
pays possédant également d’importantes ressources de ce minerai
longtemps resté dans l’ombre de l’uranium (et de faibles ressources
d'uranium par ailleurs).
La Chine a pour sa part annoncé à l'été
2021 l'achèvement d'un premier réacteur nucléaire expérimental au
thorium, au milieu du désert de Gobi.
En Norvège, Thor Energy a
réalisé une série d’essais avec du thorium dans le réacteur nucléaire de
recherche de Halden (au sud-ouest de la Norvège), avant son arrêt en
2018.
Sources / Notes
Pour
rappel, l’uranium est constitué de deux isotopes : l’uranium 238
(99,3%) et l’uranium 235 (0,7%) qui est le seul atome fissile présent
dans la nature et utilisé industriellement pour produire de
l’électricité.
Le thorium présente plusieurs avantages par rapport au
combustible nucléaire classique, l’uranium 235. Il peut générer plus de
matière fissile (uranium 233) qu’il n’en consomme pour alimenter les
réacteurs nucléaires refroidis par eau ou à sels fonduset il génère moins d’actinides mineurs à longue période que les combustibles au plutonium. On estime que la couche supérieure de la croûte terrestre compte en moyenne 10,5 parties par million (ppm) de thorium contre environ 3 ppm d’uranium.
« Du
fait de son abondance et de sa capacité à produire des matières
fissiles, le thorium pourrait offrir une solution à long terme pour
répondre aux besoins énergétiques de l’humanité », explique
Kailash Agarwal, spécialiste des installations du cycle du combustible à
l’AIEA et l’un des auteurs du rapport de l’AIEA.
Outre le fait
que lorsqu’ils sont en service, les réacteurs alimentés au thorium – et
l’énergie d’origine nucléaire en général – n’émettent pas de gaz à effet
de serre, l’un des autres avantages que présentent ces réacteurs est
qu’ils génèrent moins de déchets nucléaires à longue période que les
réacteurs actuels alimentés à l’uranium.
L'Inde mise sur le thorium comme nouveau combustible nucléaire
Le pays, qui possède le quart des réserves mondiales de cet élément,
veut s'affranchir de l'uranium, et ainsi assurer son indépendance
énergétique.
L'Inde va lancer la construction, dans les prochaines semaines, d'un prototype de réacteur à eau lourde fonctionnant au thorium, qui inaugurera une voie nouvelle dans le nucléaire civil. Le premier réacteur à vocation commerciale de ce type devrait entrer en service en 2020. L'Inde est un des seuls pays au monde à envisager sérieusement cette alternative aux combustibles nucléaires traditionnels que sont l'uranium et le plutonium.
L'utilisation du thorium dans le cycle de combustion présente de nombreux avantages. Le minerai produit moitié moins de déchets radioactifs que l'uranium et est disponible en quantité supérieure. Les réserves indiennes de thorium sont ainsi estimées à 290 000 tonnes contre seulement 70 000 tonnes dans le cas de l'uranium. De plus, au rythme de consommation actuel, les ressources mondiales identifiées en uranium pourraient s'épuiser d'ici cinquante à soixante-dix ans - sauf à recourir à la surgénération, qui était mise en oeuvre en France dans Superphénix.
Pour répondre à la croissance de ses besoins énergétiques, l'Inde n'a guère d'autre choix que de se tourner vers le thorium. Le pays veut augmenter la part de l'énergie nucléaire dans sa production d'électricité à 25 % en 2050, contre 3,7 % aujourd'hui, mais il manque d'uranium. L'Inde ne possède en effet sur son sol que 1 % des réserves mondiales de cet élément et n'est plus autorisé à en importer depuis 1974, date de son premier essai nucléaire.
La négociation d'un accord avec les Etats-Unis pourrait lever cette interdiction. Mais sa signature semble compromise en raison de l'opposition d'une partie de la coalition au pouvoir à New Delhi. "Si nous ne signons pas l'accord nucléaire avec les Etats-Unis, et faute de ressources suffisantes en uranium, nous devrons réviser à la baisse d'au moins 6 000 mégawatts (MW) notre objectif de production de 20 000 MW d'énergie nucléaire d'ici à 2020", a reconnu, le 29 octobre, Anil Kakodkar, le président du département indien de l'énergie atomique.
Reste donc le thorium, qui pourrait bien devenir le combustible de l'indépendance énergétique de l'Inde. Le pays en possède le quart des ressources mondiales. "L'idée consiste à se diriger vers l'autonomie grâce aux réacteurs à thorium", a confirmé, en octobre, Abdul Kalam, ancien président de la République, qui est considéré comme un des pères de l'arme atomique indienne.
Pour ce faire, New Delhi a lancé, à la fin des années 1970, un programme nucléaire en trois étapes. Le pays a d'abord importé des technologies étrangères pour construire des centrales classiques, à eau lourde, fonctionnant avec de l'uranium et produisant du plutonium. Douze réacteurs fonctionnent déjà et quatre autres sont en construction.
Le plutonium ainsi obtenu permettra le passage à la deuxième étape en 2010, avec la construction d'un surgénérateur d'une puissance de 300 MW. Ce réacteur utilisera comme combustible le plutonium inclus dans un "manteau" de matières fertiles, constitué d'uranium. L'Inde a finalement abandonné l'idée d'utiliser un manteau en thorium, quitte à dépendre encore de l'uranium. "Nous sommes dans la même situation qu'un investisseur. Avec le peu de ressources en plutonium que nous détenons, nous préférons miser sur un manteau en uranium, car l'énergie y est produite en plus grande quantité qu'avec un manteau en thorium", explique Ratan K. Sinha, le directeur du département "développement et conception des réacteurs" au centre de recherche atomique Bhabha.
La troisième étape, qui est initiée ces jours-ci avec le prototype au thorium, mènera à l'abandon définitif de l'uranium. Elle aboutira à la construction, dès 2020, de réacteurs fonctionnant au thorium, lit-on dans le plan d'orientation publié par le département atomique indien. Le pays a déjà construit un mini-réacteur test d'une puissance de 30 MW, pouvant convertir le thorium en uranium 233, une matière fissile qui n'existe pas à l'état naturel.
Cette technologie permet désormais à
l'Inde d'envisager, à terme, la construction de réacteurs qui
utiliseront, comme combustibles, l'uranium 233 et une légère quantité de
plutonium. "Nous avons encore besoin de temps pour concevoir des
installations sûres. En 2020, nous serons les seuls au monde à produire
de l'énergie nucléaire à grande échelle à partir du thorium",
assure M. Sinha. La conviction que le thorium a de l'avenir est partagée
par la société américaine Novastar Ressources, qui veut se placer comme
leader sur le futur marché de cet élément et vient de racheter une mine
aux Etats-Unis.
L’Inde développe ses propres technologies nucléaires, notamment les réacteurs PHWR
(Pressurized Heavy Water Reactor) de 700 MW. Le premier exemplaire a
été connecté au réseau en 2021 à Kakrapar, démontrant la maîtrise
technologique du pays.
L’Inde développe activement son programme de réacteurs au thorium,
s’appuyant sur ses importantes réserves nationales estimées à 846 000
tonnes. Le pays conçoit un cycle du combustible en trois étapes,
incluant des réacteurs surgénérateurs et des systèmes avancés au
thorium. Ce programme vise à réduire la dépendance aux importations
d’uranium et à établir une filière énergétique autonome. Un prototype de
réacteur rapide de 500 MW est en construction à Kalpakkam, marquant une
étape cruciale dans cette stratégie
L’Inde prend les devants avec sa filière à neutrons rapides
Le directeur du Conseil scientifique du Premier ministre indien,
C.N.R. Rao, a déclaré à des journalistes à Bangalore que le prototype de
surgénérateur indien de 500MW (le PFBR, un réacteur semblable au
réacteur français SuperPhénix fermé en décembre 1998 par le gouvernement
Jospin) est prêt à entrer en service au début de l’année prochaine. Il a
dit que le réacteur à neutrons rapides, en construction au Centre
Indira Gandhi pour la recherche atomique (IGCAR) à Kalpakkam, près de
Chennai, est le premier de ce type en Inde, et que « s’il s’avérait un
succès, nous deviendrons un chef de file dans l’énergie nucléaire avec
cette technologie entièrement nouvelle, que nous avons maîtrisée ». Le
réacteur a été entièrement conçu par IGCAR.
Le PFBR indien est un surgénérateur à sels de sodium fondus qui
utilise des oxydes d’uranium appauvri et du plutonium, connus sous le
nom de MOX, comme combustible. Une couverture fertile contient de
l’uranium appauvri pour absorber l’excès de neutrons générés par les
réactions de fission à l’intérieur du cœur du réacteur. Au bout de
quelques années, les éléments de la couverture sont retraités pour en
extraire le plutonium, qui sera utilisé pour alimenter les futurs
surgénérateurs. Tandis que les palettes de combustibles seront placés au
cœur du réacteur, les éléments de la couverture fertile resteront
autour de la paroi du réacteur. Le PFBR aura 181 assemblages
combustibles et 120 éléments de couverture.
Le complexe de fabrication du combustible nucléaire Hyderabad
fabrique les grappes de combustible du réacteur, qui sont ensuite
assemblées dans un atelier de l’IGCAR. Deux autres tranches de 500MW du
même type de réacteur sont actuellement en construction. L’Inde souhaite
construire six surgénérateurs de ce type d’ici 2020.
La prochaine série de PFBR sera recouverte de thorium-232. Une
couverture fertile de thorium autour du combustible à l’intérieur du
PFBR serait convertie en uranium-233, fissile, qui peut être ensuite
extrait pour servir comme nouveau combustible. Les réacteurs indiens de
troisième génération devraient utiliser de l’uranium comme combustible,
plus du thorium dans leur couverture fertile. Plusieurs scientifiques
spécialisés dans le nucléaire estiment qu’un programme nucléaire
utilisant du thorium permettrait de produire de l’électricité pour une
période allant jusqu’à 600 ans.
Thorium : la Chine domine l’énergie Infinie, un séisme géopolitique
La quête d’une énergie abondante, propre et sécurisée hante l’humanité depuis des décennies. Dans une vidéo récente sur YouTube, Idriss Aberkane, analyste géopolitique,
met en lumière un développement qui
pourrait redessiner le paysage mondial : les avancées chinoises dans les
réacteurs nucléaires à thorium.
Ce métal, souvent relégué aux oubliettes par l’Occident, promet une
source d’énergie quasi inépuisable, capable de transformer une simple
boule de la taille d’une orange en l’équivalent de la consommation
énergétique d’une vie entière, y compris pour des applications comme l’intelligence artificielle. Mais au-delà de la prouesse technique, la maîtrise du thorium par la Chine annonce un véritable séisme géopolitique.
Elle pourrait propulser Pékin vers une domination énergétique absolue,
affaiblir les puissances dépendantes des hydrocarbures et remodeler les
alliances mondiales. Cet article explore ces implications, en s’appuyant
sur les temps forts de la vidéo et des développements récents, pour
comprendre comment cette technologie pourrait accélérer le déclin de l’Europe tout en renforçant l’hégémonie chinoise.
Le thorium : une alternative nucléaire révolutionnaire
Le thorium, nommé d’après le dieu nordique Thor, est un élément
radioactif abondant dans la croûte terrestre – environ quatre fois plus
que l’uranium. Contrairement à ce dernier, il n’est pas fissile mais
fertile : il se transforme en uranium-233 sous l’effet de neutrons,
libérant une énergie colossale. Une vidéo explicative souligne que tenir
une boule de thorium de la taille d’une orange équivaut à sécuriser
toute l’énergie nécessaire pour une vie humaine, surpassant de loin le
pétrole, les biocarburants ou les éoliennes qui altèrent les paysages et
la biodiversité.
Les réacteurs à thorium, souvent basés sur la technologie des sels fondus (Molten Salt Reactors ou MSR),
fonctionnent à haute température mais à pression atmosphérique, évitant
les risques d’explosion comme à Tchernobyl. Le combustible, dissous
dans des sels fondus, sert aussi de fluide caloporteur, rendant le système intrinsèquement stable et autorégulé. En cas de surchauffe, le sel se dilate, ralentissant la réaction sans intervention humaine. De plus, ces réacteurs produisent beaucoup moins de déchets radioactifs – potentiellement zéro à terme via des cascades de réactions – et sont moins propices à la prolifération nucléaire, bien que des essais comme Teapot aux États-Unis aient démontré la possibilité de bombes à base d’uranium-233.
Les avantages sont multiples : efficacité énergétique supérieure, déchets gérables et sécurité accrue.
La vidéo note que le thorium est un sous-produit de l’extraction des
terres rares, domaine où la Chine domine déjà. Ses gisements, souvent en
Scandinavie ou en Chine, sont moins géopolitiquement sensibles que
l’uranium du Niger, par exemple. Mais des défis persistent : les sels
fondus sont corrosifs, nécessitant des alliages innovants. Malgré
cela, la technologie promet une révolution, car elle s’adapte aux
environnements hostiles comme les déserts, sans besoin massif d’eau pour
le refroidissement (contrairement aux centrales nucléaires classiques).
L’histoire oubliée : des États-Unis à l’abandon occidental
Les racines du thorium remontent aux années 1970 aux États-Unis, avec
des expériences prometteuses à Oak Ridge National Laboratory (ORNL). Le réacteur expérimental MSR y a fonctionné sans incident majeur, démontrant la viabilité de la technologie. Pourtant, les Américains l’ont abandonnée au profit des réacteurs à eau pressurisée (PWR), optimisés pour les sous-marins nucléaires comme l’USS Nautilus. Ces PWR, représentant aujourd’hui 96 % des réacteurs civils mondiaux,
étaient plus simples à adapter du militaire au civil, malgré leurs
inconvénients : besoin d’eau abondante, risques de surpression et
production de déchets à longue vie.
La vidéo pointe du doigt cette inertie industrielle, comparant le
nucléaire à l’aviation civile : changer un simple siège d’avion est un
calvaire réglementaire, imaginez pour une filière entière. Les
régulations, les investissements massifs dans les PWR et une
focalisation sur l’uranium – plus adapté à la production de plutonium
pour les armes – ont scellé le sort du thorium en Occident. L’Europe,
leader historique via la France, a suivi : influencée par des figures
comme Dominique Voynet, elle a délaissé la R&D sur le thorium pour
privilégier les énergies renouvelables intermittentes, accélérant son « suicide énergétique » .
Pendant ce temps, la Chine, avec sa vision millénaire – comme l’exprime l’acclamation « Zhōngguó wànsuì » signifiant « Vive la Chine » ou littéralement « Chine pour dix mille ans » – a repris le flambeau. Inspirée des travaux américains, elle investit massivement depuis les années 2010.
Les avancées chinoises : un bond en avant en 2025
En 2025, la Chine a franchi des étapes décisives, confirmant son leadership mondial. Le réacteur expérimental TMSR-LF1,
situé dans le désert de Gobi en Gansu, est opérationnel depuis juin
2024. En avril 2025, des scientifiques chinois ont réussi à le recharger
sans arrêt, une première démontrant la flexibilité des MSR. En
novembre 2025, une percée majeure : la conversion thorium-uranium a été
achevée, marquant la première mondiale en réacteur à sels fondus. Cela
permet d’engendrer plus d’énergie qu’il n’en consomme (l’uranium-233) à
partir du thorium, vers une énergie indépendante et durable.
Pékin vise un réacteur civil commercial d’ici 2035, mais les applications innovantes émergent déjà.
Adaptés aux déserts, ces réacteurs fonctionnent sans eau massive,
couplables à la pyrolyse anaérobie pour traiter déchets domestiques et
industriels. La vidéo évoque des centrales mobiles, comme des « groupes électrogènes » géants, déplaçables selon les besoins. Plus audacieux : les navires nucléaires. En 2025, la Chine a approuvé un porte-conteneurs de 14.000 TEU (Un
TEU correspond aux dimensions d’un conteneur standard de 20 pieds de
long -environ 6 mètres-, 8 pieds de large et 8 pieds de haut.) propulsé par un MSR au thorium, potentiellement autonome et automatisé, éliminant le fuel bunker et les émissions portuaires. Cela pourrait révolutionner le transport maritime, rendant les flottes chinoises invincibles en termes d’autonomie.
Ces progrès s’intègrent à l’économie chinoise : production
d’hydrogène, engrais, dessalement d’eau de mer, data centers alimentés
par clusters nucléaires. La chaleur haute température des MSR facilite
des réactions chimiques, changeant le jeu pour la synthèse d’ammoniac ou
les biocarburants. Près des ports ou zones minières, un cercle vertueux
émerge : énergie locale, mobilité hydrogène, réseaux d’eau – le tout
sans émissions massives.
Le séisme énergétique : une source quasi inépuisable et ses impacts
La maîtrise du thorium créerait un séisme planétaire. Imaginez une énergie inépuisable
: 1 kg d’uranium-233 issu du thorium libère théoriquement 23 GWh,
surpassant le charbon ou le gaz. Une tonne pourrait générer 23 TWh –
assez pour alimenter des nations entières. Avec des rendements même
modestes, cela éclipse les renouvelables intermittents. La vidéo insiste
: les civilisations progressent en transformant plus d’énergie ; le thorium, imbattable, propulsera ses maîtres vers la domination.
Répercussions immédiates : fin de la dépendance aux hydrocarbures.
Les navires thorium feraient le tour du monde sans ravitaillement,
automatisés via drones chinois. Sous-marins ou torpilles comme le
Poseidon russe gagnent en autonomie infinie, sans limites alimentaires
pour les équipages. Offshore, forage zéro fuel ; onshore,
micro-réacteurs pour climats artificiels ou exploitation de
l’Antarctique – bien que controversée, défiant les accords comme le
Protocole de Madrid.
Pour l’industrie, couplage avec pyrolyse transforme déchets en
ressources. Data centers, IA gourmands en énergie, deviennent viables
partout. Dessalement massif combat la pénurie d’eau ; production
d’hydrogène vert accélère la transition. Ce séisme rend obsolètes les
infrastructures actuelles : adieu pipelines gaziers, champs éoliens
géants. Les économies basées sur le thorium gagnent en résilience,
produisant localement sans vulnérabilités géopolitiques.
Répercussions géopolitiques : domination chinoise et déclin occidental
Géopolitiquement, les enjeux sont énormes. La Chine, avec ses
réserves de thorium et brevets, accède à une souveraineté énergétique
totale. Elle exportera ces réacteurs vers l’Afrique ou l’Algérie d’ici
2050, concurrençant de nombreuses nations et renforçant son influence
via la « Nouvelle route de la soie » . Des centrales mobiles ou navales sécurisent routes maritimes, protégeant intérêts en mer de Chine méridionale.
Pour l’Europe, c’est un cataclysme. Idriss Aberkane dépeint un « suicide »
historique : guerres passées, puis abandon nucléaire sous influence
verte. L’Allemagne, dépendante du gaz russe saboté par les sanctions,
voit son industrie s’effondrer. Les Verts implorent la guerre, mais sans
énergie bon marché, l’Europe stagne. La France, ex-leader nucléaire, a
gaspillé son avance ; l’UE, obsédée par le Net Zero, ignore le thorium.
Résultat : pollution importée, dépendance au GNL américain cher, et
vulnérabilité face à la Chine.
Les États-Unis réagissent : relance de R&D sur le thorium,
influencée par Trump et ses tarifs contre la Chine. Mais Pékin mène :
pas de « projet lunaire » surcommuniqués comme Musk, mais une
progression silencieuse, évitant pertes de face. Les
Américains, endettés, doivent financer leurs projets en créant un
engouement médiatique exagéré ; les Chinois, centralisés, investissent
patiemment.
Globalement, le thorium redessine les alliances. Pays émergents
optent pour des réacteurs chinois abordables et sécurisés, affaiblissant
l’OPEP et les exportateurs de gaz. La prolifération diminue, mais la
Chine gagne en soft power. L’Europe risque l’inutilité : sans
thorium, elle cède la primauté énergétique, accélérant son déclin
démographique et industriel.
l’Europe face à son destin : un appel à la réaction
Idriss Aberkane conclut sur l’impuissance face au « suicide »
européen : pulsions destructrices, de la Guerre de Trente Ans au wokisme
énergétique. Les Chinois, pensant sur des millénaires, saisissent
l’opportunité ; l’Occident, figé par des régulations contre-productives,
rate le train. Pourtant, des signes émergent : aux USA, résurgence du
thorium ; en Europe, débats sur la relance nucléaire.
Pour éviter le désastre, l’Europe doit investir massivement : R&D
(recherche et développement) sur la technologie MSR, partenariats avec
la Chine ou les USA. Sans cela, elle subira : l’énergie chinoise bon
marché inondera les marchés, rendant obsolètes ses industries.
Géopolitiquement, une Chine énergétique hégémonique dictera sa loi,
forçant des alliances asymétriques.
Vers un monde thorium-dominé
Le thorium n’est pas une utopie : c’est une réalité chinoise en 2025,
avec des percées confirmées. Sa maîtrise déclenche un séisme : énergie
inépuisable bouleverse économies, transports et géopolitique. La Chine
domine, l’Europe décline, les USA réagissent. Comme le dit Idriss
Aberkane, les civilisations transforment l’énergie pour survivre ;
celles ignorant le thorium périront. Il est temps de réveiller
l’Occident avant qu’il ne soit trop tard.
Le thorium peut-il rivaliser avec l’uranium comme combustible nucléaire ?
En bref
Le thorium pourrait être utilisé dans les réacteurs à sels fondus,
l’un des modèles d’énergie nucléaire de nouvelle génération dans lequel
le liquide de refroidissement du réacteur et le combustible lui-même
sont un mélange de sels fondus chauds.
Le Th-232 présente un intérêt pour la production d’énergie nucléaire
car il peut facilement absorber des neutrons et se transformer en
Th-233. Le Th-233 peut devenir du protactinium-233, qui devient à son
tour un isotope fissile et producteur d’énergie : le U-233.
Le thorium possède de nombreuses qualités mais également de nombreux
inconvénients : difficile à manipuler, métal fertile et non fissile,
risques plus élevés.
Mais il produit moins de déchets que le plutonium ou l’uranium et
reste une option attrayante pour l’avenir de l’énergie nucléaire.
En bref
Le thorium pourrait être utilisé dans les réacteurs à sels fondus, l’un des modèles d’énergie nucléaire de nouvelle génération dans lequel le liquide de refroidissement du réacteur et le combustible lui-même sont un mélange de sels fondus chauds.
Le Th-232 présente un intérêt pour la production d’énergie nucléaire car il peut facilement absorber des neutrons et se transformer en Th-233. Le Th-233 peut devenir du protactinium-233, qui devient à son tour un isotope fissile et producteur d’énergie : le U-233.
Le thorium possède de nombreuses qualités mais également de nombreux inconvénients : difficile à manipuler, métal fertile et non fissile, risques plus élevés.
Mais il produit moins de déchets que le plutonium ou l’uranium et reste une option attrayante pour l’avenir de l’énergie nucléaire.
L’idée d’utiliser le thorium comme combustible nucléaire a été abandonnée dans le passé car, traditionnellement, l’énergie nucléaire était liée à la recherche et au développement du nucléaire militaire – et l’uranium comme le plutonium permettaient la fabrication de bombes atomiques. Pour la production d’énergie, le thorium pourrait toutefois présenter de réels avantages et plusieurs pays investissent dans cet élément chimique (voir encadré). Ce métal pourrait être utilisé dans les réacteurs à sels fondus, l’un des modèles de nouvelle génération dans lequel le liquide de refroidissement du réacteur et le combustible lui-même sont un mélange de sels fondus chauds. Ces types de réacteurs peuvent atteindre des températures très élevées, ce qui augmente considérablement l’efficacité de la production d’électricité.
Le problème, toutefois, est que plus de 400 centrales nucléaires en service dans le monde utilisent principalement l’uranium (U) comme combustible. Bien que cet élément soit abondant, moins de 1 % de l’uranium sur Terre est de l’U‑235, l’isotope d’uranium qui est fissile. Le reste est de l’U-238. L’U-235 contenu dans l’uranium doit donc être concentré puis enrichi selon des procédés complexes et coûteux.
Et ce n’est pas tout, la fission de l’U-235 produit des déchets hautement radioactifs qui doivent être manipulés avec soin, puis stockés dans un endroit sûr pendant des périodes extrêmement longues. Ces déchets contiennent également un type de plutonium qui peut être exploité pour fabriquer des armes nucléaires.
Les réacteurs au thorium dans le monde
La Chine a achevé la construction d’un réacteur expérimental au thorium à Wuwei, à la périphérie du désert de Gobi (1). Le thorium a été testé comme combustible dans d’autres types de réacteurs nucléaires dans des pays comme les États-Unis, l’Allemagne, les Pays-Bas et le Royaume-Uni. Il fait également partie d’un programme nucléaire en Inde, en raison de l’abondance naturelle de l’élément dans ce pays. En France, des études sont menées par le CNRS qui développe un projet appelé MSFR (pour Molten Salt Fast Reactor), utilisant le thorium (2).
Quatre fois plus abondant que l’uranium
Le thorium (Th) a été découvert en 1828 par le chimiste suédois Jons Jakob Berzelius, qui lui a donné le nom de Thor, le dieu nordique du tonnerre. C’est un métal légèrement radioactif que l’on trouve dans les roches et les sols et qui est assez abondant dans la croûte terrestre. En effet, son principal isotope, le Th-232, est environ quatre fois plus abondant que l’U-238 (3) et aussi abondant que le plomb. La quantité que l’on trouve aux États-Unis, par exemple, pourrait répondre aux besoins énergétiques de ce pays pendant un millier d’années, et ce sans l’enrichissement requis pour les combustibles à base d’uranium.
C’est le minéral phosphate de terre rare, la monazite, qui contient le plus de thorium – jusqu’à environ 12% de phosphate de thorium (4). La monazite se trouve dans des roches ignées et autres roches et les ressources mondiales de monazite sont estimées à environ 16 millions de tonnes, dont 12 Mt dans des gisements de sables minéraux lourds sur les côtes sud et est de l’Inde.
Le Th-232 présente un intérêt pour la production d’énergie nucléaire car il peut facilement absorber des neutrons et se transformer en Th-233. Ce nouvel isotope émet un électron et un antineutrino en quelques minutes pour devenir du protactinium-233 (Pa-233). Cet isotope, quant à lui, se transforme en U‑233, qui est une excellente matière fissile. En effet, la fission d’un noyau d’U-233 libère environ la même quantité d’énergie (200 MeV) que celle de l’U-235.
Le problème du refroidissement
Dans les réacteurs conventionnels, l’uranium est stocké dans des barres de combustible solides, qui sont refroidies par d’énormes quantités d’eau. Sans ce refroidissement, les barres fondraient, libérant des radiations dangereuses. Le thorium subirait ses réactions dans un type de réacteur tout autre, appelé réacteur à sels fondus (ou MSR pour molten salt reactor) qui contient un mélange de sels fluorés dans lequel le combustible nucléaire est fondu. Ce type de réacteur n’a pas besoin d’être construit à proximité d’un cours d’eau, puisque les sels fondus eux-mêmes servent de liquide de refroidissement.
Les réacteurs peuvent de ce fait être installés dans des régions éloignées des côtes et même arides. Ces réacteurs ne peuvent donc pas non plus « fondre » au sens classique du terme et, en cas d’urgence, le combustible peut être rapidement évacué du réacteur. Les MSRs déployant du thorium sont également plus sûrs car ils fonctionnent à des pressions proches de la pression atmosphérique.
Comme l’uranium, le thorium absorbe aussi les neutrons, comme nous l’avons mentionné, mais contrairement à l’uranium, il ne libère pas davantage de neutrons pour perpétuer la réaction nucléaire en chaîne. Cette réaction commence lorsqu’un atome d’uranium est frappé par un neutron, libérant de l’énergie qui entraîne l’éjection d’autres neutrons des atomes d’uranium, relançant le cycle. En réduisant la quantité de neutrons injectés dans le combustible, c’est le thorium lui-même qui limite la vitesse de la réaction nucléaire.
Des investissements en R&D nécessaires
L’utilisation du thorium comme nouvelle source d’énergie primaire est une perspective séduisante depuis de nombreuses années, mais l’extraction de sa valeur énergétique latente d’une manière rentable est un défi. Le développement de nouvelles centrales nucléaires alimentées au thorium nécessitera donc d’importants travaux de recherche et développement, ainsi que des essais – des démarches qui pourraient être difficiles à justifier étant donné que l’uranium est relativement bon marché et abondant.
Autre inconvénient : le thorium est « fertile » et non fissile, de sorte qu’il ne peut être utilisé comme combustible qu’en association avec une matière fissile, telle que le plutonium recyclé, en tant que conducteur afin de maintenir une réaction en chaîne (et donc une réserve de neutrons excédentaires).
L’U-233 produit à la fin du cycle est également difficile à manipuler, car il contient des traces d’U-232, qui émet activement des rayons gamma. Si certains chercheurs soutiennent l’utilisation du thorium comme combustible parce que ses déchets sont plus difficilement à transformer en armes atomiques que ceux de l’uranium, d’autres affirment que des risques subsistent5.
Le bon côté des choses, c’est qu’il y a globalement moins de plutonium produit pendant le fonctionnement du réacteur. À tel point que certains scientifiques affirment que les réacteurs au thorium pourraient même contribuer à épuiser les tonnes de plutonium qui nous avons créées et stockées depuis les années 1950.
Comment des notions nées à gauche ou à
droite se sont retrouvées de l’autre côté du paysage politique. De la
Révolution française à nos jours, la carte idéologique des valeurs a
souvent été rebattue quand elle ne s'est pas tout simplement inversée.
Nationalisme
Égalité en droit
Individualisme
Égalité de fait
Collectivisme
Protectionnisme
Progressisme
Écologie
Cosmopolitisme
Religion
Conservatisme
Travail
Mérite
Puritanisme
Nationalisme
À la Révolution française, le nationalisme est une idée de gauche.
Le peuple se libère du roi, forme une nation souveraine. C’est le peuple
qui se « réuni en nation » pour fonder la légitimité politique. Le
nationalisme y désigne le mécanisme de réunion du peuple autour d’un
idéal de liberté individuelle.
Un siècle et demi plus tard, le nationalisme est rejeté par la gauche et
par le gaullisme au nom d’un internationalisme bienveillant. « Le
patriotisme, c'est aimer son pays. Le nationalisme, c'est détester celui
des autres » (de Gaulle). « Le patriotisme, c'est l'amour des siens. Le
nationalisme, c'est la haine des autres » (Romain Gary).
Le nationalisme devient pour la gauche un marqueur de droite associé aux
notions d’enracinement, de protection et de devoir. Le terme est
aujourd’hui approprié par la droite mais certaines de ses composantes
extrêmes le rejettent toujours pour lui préférer le patriotisme qui lui,
n’a jamais été connoté à gauche.
Individualisme
L’individualisme naît à gauche : c’est l’émancipation de l’individu
face aux ordres, aux traditions, à l’Église, l’homme libre et éclairé,
maître de son destin.
Aujourd’hui, c’est la droite (au moins libérale) qui le revendique :
réussite personnelle, liberté de choix, responsabilité individuelle.
La gauche, elle, dénonce désormais ses excès au nom du bien collectif et
de l’intérêt général en oubliant son attachement passé à l'émancipation
individuelle.
Collectivisme
À l’origine, la collectivité est de droite : famille, clan, religion, ordre social, corporations.
La gauche révolutionnaire combat ces appartenances au nom de l’émancipation individuelle.
Puis, au XIXe siècle, le collectivisme envahit progressivement la gauche
jusque là libérale avec la montée du socialisme : propriété collective,
adhésion imposée à l’idéal révolutionnaire, valeurs universelles d’une
société sans classes, sortie de l’histoire.
Si le collectivisme est aujourd’hui une valeur phare de la gauche
socialisante, les valeurs du collectivisme de droite n’ont pas disparues
et retrouvent même un regain de vigueur avec les notions d’appartenance
civilisationnelles et religieuses.
Seule une petite minorité libérale résiste.
Progressisme
Le progrès est un grand marqueur de la gauche aux XIXe et XXe siècle.
La science, la technique et la raison servent la marche en avant de l’humanité et bousculent l’ordre établi conservateur.
Mais dans la seconde moitié du XXe siècle, les penseurs postmodernes
remettent cela en cause. Le progrès devient suspect : la science serait
une idéologie comme une autre.
La méfiance envers le progrès est accentuée par l’adhésion de la gauche à l’écologie politique.
La droite en profite pour s’approprier le progrès, la modernité, la
technologie, et en est devenue aujourd’hui la meilleure représentante.
Cosmopolitisme
Longtemps réservé aux élites de droite — aristocrates, diplomates,
marchands, intellectuels — le cosmopolitisme devient au XIXe siècle une
valeur de gauche avec Marx et l’internationalisme : « Prolétaires de
tous les pays, unissez-vous ! ».
En ce début de XXIe siècle, il est devenu sélectif à gauche : oui aux
migrations entrantes mais méfiance envers les expatriés, traîtres à la
nation.
Conservatisme
Le conservatisme : mot honni de la gauche révolutionnaire.
Pourtant, il revient en grâce à gauche avec l’écologie, les terroirs, le local, la lenteur, l’authentique.
La gauche défend aujourd’hui ce que la droite n’a jamais cessé d’aimer :
la préservation. Conservatisme vert, contre modernité libérale.
Mérite
Bien présent à droite, le mérite était dans l’ancien régime une des
conditions de l’anoblissement. Mais l’hérédité des titres l’a transformé
en privilèges de naissance.
Avec son mot d’ordre « La carrière ouverte aux talents », la gauche
révolutionnaire fait du mérite une valeur phare de la république.
Aujourd’hui, la gauche critique le mérite comme justification des inégalités.
La réussite devient suspecte ; l’échec, une preuve d’injustice. La
notion de « justice sociale » désigne des coupables et des victimes.
Le mérite est clairement redevenu une valeur de droite étendue à l’ensemble de la société sous l’action de la gauche.
Égalité en droit
L’égalité devant la loi est une grande conquête de la gauche
révolutionnaire. Plus de castes, plus de privilèges et l’égalité des
chances.
Après s’y être opposée : privilèges, suffrage censitaire, la droite finit par se rallier à ce nouveau concept.
Mais à partir du milieu du XXe, la gauche socialiste conteste l’égalité
de droit pour corriger les inégalités de fait. Au XXIe siècle la
discrimination positive parachève le divorce de la gauche avec l’égalité
en droit.
L’égalité des droits cède donc le pas à l’équité des résultats à gauche
tandis que la droite lui reste fidèle et l’utilise comme rempart contre
l’interventionnisme redistributeur.
Égalité de fait
Ignorée par la gauche de 1789 et de la première partie du XIXe siècle
qui récompense le talent et le mérite, l’égalité de fait est également
ignorée par la droite.
La gauche, libérale jusqu’à la fin du XIXe, se fait socialiste, puis
communiste. L’égalité de conditions devient centrale avec Marx : « De
chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins. »
La voie discordante de John Rawls tentera de rétablir l’inégalité de fait à gauche dans les années 1970, sans succès.
Au cours du XXe siècle la droite sociale chrétienne tolère de moins en moins les inégalités de fait les plus flagrantes.
Protectionnisme
Le protectionnisme est une doctrine typiquement de droite au XIXe
siècle, attachée à la patrie et à l’industrie. La gauche libérale la
combat tout au long de cette période et jusqu’au début du XXe siècle.
Fin XIXe, la gauche socialiste l’introduit dans son camp pour protéger les ouvriers.
Au XXIe siècle, la tendance s’accentue : localisme, relocalisation,
circuits courts ; le protectionnisme devient une revendication de gauche
tout en restant réclamé par une partie de la droite.
Écologie
L’écologie naît à l’extrême droite au XIXe siècle en Allemagne.
Vision organiciste, nostalgie du sol et du sang, refus du cosmopolitisme, xénophobie.
À partir des années 1970, l’écologie politique migre à gauche : critique
du capitalisme, défense des communs, altermondialisme, décroissantisme.
Aujourd’hui, elle est devenue un marqueur conservateur de la gauche.
La droite, devenue progressiste, est plus méfiante à son égard mais ne la rejette pas en tant que science.
Religion
La religion a longtemps été le bastion de la droite et l’adversaire de la gauche républicaine et laïque.
Une première brèche est ouverte dans la 2e moitié du XXe siècle avec le ralliement de chrétiens au socialisme.
Mais au XXIe siècle, la gauche redécouvre la religion sous un autre
angle : relativisme culturel, défense des minorités, respect des
croyances. Son adhésion à l’écologie comprend également une composante
religieuse panthéiste qui attribue des vertus à une nature déifiée.
La droite reste attachée à la foi pour d’autres raisons : héritage, tradition, identité.
Travail
Travail : totalement méprisé dans les valeurs de la droite avant la
révolution – on ne travaille pas, on « exerce » ses talents innés- , le
travail revient progressivement en grâce au sein de la droite au cours
du XIXe siècle. Il incarne aujourd’hui pour elle l’effort qui doit être
récompensé.
La gauche, avec Marx, en fait le pilier de la valeur et veut le
soustraire à l’exploitation capitaliste. Passée par l’exaltation du
stakhanovisme au milieu du XXe siècle, la gauche est devenue plus
méfiante à son égard. Difficile pour elle de concilier les aides
sociales et la rémunération due au travail.
Au sein des libéraux, passés de gauche au XIXe à droite au XXe, le
travail est une notion respectable mais ne peut servir d’étalon à la
valeur, qui se crée uniquement lors de l’échange.
Puritanisme
Contrairement aux idées reçues le puritanisme est d’abord né à
gauche. Si on admet l’anachronisme, le protestantisme rigoriste qui
rejette la hiérarchie et les ors de l’Église, peut être assimilé à la
gauche. Cette quête de pureté intransigeante se retrouve à la révolution
française dans le culte de l’être suprême. La bourgeoisie montante - à
gauche début XIXe - moralise les mœurs, codifie le travail, la famille,
la respectabilité. Elle emportera ces valeurs à droite lorsqu’elle sera
chassée de la gauche par la marée socialiste.
Après avoir déserté la gauche durant la deuxième moitié du XXe siècle,
le puritanisme y revient au XXIe : contrôle du langage, morale de la
faute, surveillance des comportements, voile islamique, « cancel »
culture.
La droite du XIXᵉ siècle, héritière de la noblesse et de l’église, est
jouisseuse, mondaine, attachée à la fête, à l’apparat, à la tradition.
Ce n’est qu’après 1945 (et surtout après 1968) que le puritanisme
devient de droite en réaction à la libération sexuelle à
l’individualisme hédoniste et à la perte des sens civique et religieux.
Il est aujourd’hui partagé entre la droite et la gauche.
Alain Cohen-Dumouchel
Alain Cohen-Dumouchel est ingénieur et entrepreneur dans le domaine IT. Il anime le site www.gaucheliberale.org.
Ancien conseiller national d'Alternative Libérale, passionné de
philosophie politique, il est convaincu que la pensée libérale doit
retrouver sa place à gauche.
La Gauche libérale est une association qui vise à incarner le courant des libéraux de gauche dans le paysage politique français. Ses membres fondateurs sont pour l'essentiel des transfuges d'Alternative libérale, autour de David Poryngier. Celui-ci dit, à propos d'Alternative libérale :
“
Il n'y a pourtant pas
grand-chose de commun entre des contribuables en colère, dont la seule
préoccupation est de payer moins d'impôts, et d'authentiques
progressistes attachés aux libertés individuelles, voire très en avance sur une grande partie de la gauche sur des thèmes comme la légalisation du cannabis, l'adoption par les couples homosexuels, l'immigration ou la mise en place d'un revenu universel…
”
“
Nous ne voulons surtout
pas nous retrouver dans une posture caricaturalement
libérale-libertaire, qui ferait de nous des gens de droite au plan
économique et de gauche sur les questions sociétales. Nous avons au
contraire des points de vue assez radicaux à exposer sur la crise
financière, le système bancaire, les oligopoles industriels, les
relations entre le pouvoir et certains grands groupes, voire les paradis
fiscaux qui ne sont que rarement exposés. C'est peut-être le moment de
le faire…
”
Manifeste
“
Les valeurs de la gauche : égalité des chances, laïcité, solidarité et accès au travail sans le boulet de l'économie et de la morale socialiste-communiste.
Une démocratie qui repose sur la liberté et sur la tolérance. Une
pratique politique dans laquelle on ne prétend pas gouverner au nom de
Sa Morale, encore moins au nom de La Morale, mais dans laquelle on
essaye de limiter, autant que faire se peut, la dictature de la
majorité.
Un État recentré sur ses fonctions les plus essentielles. Un État fort
et sûr, garant des libertés individuelles et capable de faire appliquer
la loi sans faiblesse ni compromission.
La réforme en profondeur de notre société pour, dans tous les
domaines, aller vers une économie de marché, valoriser la prise de
responsabilité et le goût d'entreprendre.
Pourquoi la gauche serait-elle indéfiniment prisonnière du modèle
économique dit socialiste au sens large ? Les idées de gauche :
tolérance, progrès, solidarité, égalité des chances, laïcité doivent
elles rester accrochées à un modèle économique et social qui n'a jamais
fonctionné correctement, qui entraine inéluctablement la société vers
l’appauvrissement et la restriction des libertés individuelles, quand ce
n'est pas la misère les épurations politiques, la dictature puis le
totalitarisme ?
Pourquoi la droite, dans le but louable de défendre le dynamisme
économique et la création de richesse devrait-elle hériter de toutes les
valeurs réactionnaires et passéistes qui y sont traditionnellement
associées : immobilisme culturel, rejet des immigrés, affairisme, refus
de partage du travail, rigidité des valeurs morales ?
Gauche libérale défend des idées de gauche, progressistes et
modernes, applicables dans le cadre d'une éthique libérale et d'une
économie de marché.
Rien ne sert de se voiler la face. C'est bien le modèle libéral qui est
le plus efficace, qui se marie au mieux avec la démocratie, qui génère
le dynamisme économique et une amélioration des conditions matérielles.
La droite libérale n'a jamais réussi à faire prospérer le modèle
libéral. La théorie libérale de droite, si éloignée des conservatismes
et si solide soit-elle, n'a pu dissiper le malentendu de la loi de la
jungle et du chacun pour soi, que ses adversaires lui opposent à tort.
Contrairement aux affirmations de la droite libérale, ce modèle ne se
régule pas toujours de lui-même. Pour éviter ses dérives :
enrichissement excessif de quelques-uns au détriment des autres,
création de monopoles, ententes illicites, il faut des interventions
intelligentes et limitées mais fermes. L'État doit veiller au libre
fonctionnement des marchés. Il ne doit intervenir que pour briser les
monopoles, et pour s'assurer du libre accès de tous aux marchés (et non
pas au Marché).
Le laissez faire des libéraux classiques doit être complété par
la création artificielle de marchés destinés à résoudre des problèmes de
société. Le marché ne résoudra pas seul les problèmes d'environnement,
mais on peut résoudre les problèmes d'environnement avec une mécanique
apparentée au marché.
Au lieu de créer des monstres monolithiques et étatiques pour
affronter chaque problème (chomage, logement, intégration,
enseignement), il faut créer des marchés, au besoin aidés par l'État
mais ouverts à tous, entreprises, associations, individus, sans
clientélisme ni favoritisme.
Il est temps pour la gauche progressiste d'admettre les erreurs du passé
et d'arrêter de mentir par orgueil. L'étatisme, le dirigisme,
l'interventionnisme sont devenus des valeurs rétrogrades et passéistes
qui sont d'ailleurs largement partagées par la gauche et la droite.
Gauche libérale se veut le porte-parole d'une gauche honnête, généreuse
et dynamique. Elle rejette la gauche revendicative devenue synonyme
d'immobilisme, de défense des avantages acquis de protectionnisme
économique et culturel.