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novembre 20, 2025

Le président qui pouvait dire NON… et qui a toujours dit OUI !!

Bilan Macron 2017-2025 : 445 milliards d’euros disparus, selon Marc Touati 

Une servitude volontaire qui mène la France au bord du gouffre

Le 19 novembre 2025, l’économiste Marc Touati, président du cabinet ACDEFI et figure respectée des analyses libérales, a publié une vidéo choc sur X : « Chiffre choc du bilan Macron : 445 milliards d’euros ont disparu ! Et ce n’est malheureusement pas terminé… ». Devant un graphique implacable, Touati explique que depuis 2017, la dette publique a explosé de 1.160 milliards d’euros alors que le PIB n’a progressé que de 715 milliards. Résultat : un écart abyssal de 445 milliards d’euros qui révèle une croissance artificiellement dopée à la dette, sans création de richesse réelle.

(C’est l’une des questions essentielles que tout le monde se pose et que vous êtes très nombreux à me poser presque tous les jours : Quel est le vrai bilan économique de M. Macron ? Sur les plateaux de TV également, on me pose souvent cette question et lorsque j’y réponds, on remet souvent mes chiffres en question ! Ah « l’omerta » est tenace en France ! Alors, pour faire taire les adeptes du déni de réalité et les illusionnistes en tous genres, voici le vrai bilan économique de M. Macron depuis 2017 au travers notamment des questions suivantes : Quelle a été l’évolution de la dette publique française depuis 2017 ? Quel est l’écart entre l’augmentation de cette dernière et le PIB en valeur ? Dette publique / PIB : Quelle progression de 2017 à aujourd'hui ? Hors déficit primaire et à prix constants, la France est-elle en croissance ou en récession depuis 2017 ? Quid des défaillances d'entreprises de 2017 à 2025 ? Même question pour le taux de chômage ? Le taux de pauvreté a-t-il augmenté en France depuis 2017 ? Quid des inégalités ? Quelle évolution pour la natalité ? La réindustrialisation a-t-elle eu lieu ? Comment ont évolué les déficits commerciaux et courants ? Taux d’intérêt des obligations d’Etat à 10 ans : Quelle progression depuis 2017 ? Question de la semaine : Pourquoi les recettes fiscales sont en décalages avec les prévisions gouvernementales ? Quelle est la bonne nouvelle de la semaine ? Quelles sont les phrases de la semaine ? Réponses à toutes ces questions et à bien d’autres dans cette vidéo, graphiques et tableaux explicites, pédagogiques et réalisés sans trucage à l’appui…)

« Ces 445 milliards n’ont pas été volés, mais ils ont bel et bien disparu des caisses de l’État », martèle-t-il, pointant une gestion budgétaire irresponsable qui nous rapproche dangereusement de la Grèce de 2010.

Et Touati n’y va pas par quatre chemins : la France de 2025 est pire que la Grèce d’avant la troïka. Déficit hors contrôle, dépenses publiques records (57-58 % du PIB), charge de la dette qui dépassera 100 milliards en 2025… Tout cela n’était pas une fatalité. C’était un choix.

Le président qui pouvait dire NON… et qui a toujours dit OUI

Le rôle d’un président de la République n’est pas d’être un gestionnaire passif des « aléas mondiaux ». C’est de défendre farouchement les intérêts de la France et des Français.

Comme l’écrivait Étienne de La Boétie dans son Discours de la servitude volontaire, le pire despotisme est celui que l’on accepte librement. Ici, c’est une servitude économique volontaire : Emmanuel Macron a eu tous les leviers constitutionnels (article 40, 49-3, veto européen, négociation brutale à Bruxelles) pour refuser ce qui nous ruinait. Il ne l’a jamais fait.

  • Il a accepté le plan de relance européen de 2020 (750 Md€) sans négocier un statut de contributeur net avantageux, alors que la France paiera pendant des décennies.
  • Il a prolongé le « quoi qu’il en coûte » jusqu’en 2024 alors que l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne stoppaient net dès 2022.
  • Il a maintenu un bouclier tarifaire énergie à plus de 100 Md€ au lieu de laisser les prix faire leur travail d’adaptation, comme l’ont fait nos voisins.
  • Il n’a jamais imposé la baisse des 57-58 % de dépenses publiques/PIB, record mondial avec le Danemark… mais sans les résultats danois.
  • Il a refusé toute réforme profonde de l’État (suppression de 120.000 postes promise en 2017 ? Oubliée), ou des collectivités territoriales.

Comme le souligne Marc Touati, « personne n’a forcé Macron » à transformer le CICE en baisse de charges permanente sans contrepartie, à remplacer l’ISF par un IFI qui rapporte 5 milliards de moins par an, ou à laisser filer les niches fiscales et subventions inefficaces.

 

(Scandales d’Etat à répétition en France, Activité économique française et internationale, marchés boursiers toujours euphoriques : l’actualité de ces derniers jours est très chargée et suscite de nombreuses questions : Que signifient et quelles seront les conséquences des révélations de M. Lemaire sur le dérapage des comptes publics en 2024 ? Quel sera l’ampleur des déficits publics français en 205 et 2026 ? Encore de nouveaux mensonges d’Etat ? La France est-elle la lanterne de l’économie mondiale en cette fin d’année 2025 ? Quelles perspectives pour la croissance en France, dans la Zone Euro, aux États-Unis, en Chine, en Inde et pour l’ensemble de la planète ? Quel sera le coût de la suspension de la réforme des retraites en France ? Question de la semaine : comment vont évoluer les marchés boursiers au cours des prochains mois ? Quelle est la bonne nouvelle de la semaine ? Réponses à toutes ces questions et à bien d’autres dans cette vidéo, graphiques et tableaux explicites, pédagogiques et réalisés sans trucage à l’appui…)

Les chiffres qui accablent : un naufrage évitable

Au 20 novembre 2025 :

  • Dette publique : 3.416 milliards d’euros (115,6 % du PIB au T2 2025, INSEE).
  • Déficit public 2025 : prévu à 5,4 % par le gouvernement (optimiste), mais la Cour des comptes et la Commission européenne tablent sur 5,6 à 6 %.
  • Charge de la dette : déjà 70 Md€ en 2024, plus de 100 Md€ en 2025 – bientôt plus que le budget de l’Éducation nationale.
  • Croissance : 0,6-0,7 % prévue pour 2025 – quasi-récession structurelle.

Marc Touati le répète depuis des années : la France est le seul grand pays européen à voir sa dette et son déficit continuer d’exploser après le Covid. L’Italie de Giorgia Meloni ramène son déficit sous 3 %. L’Espagne et le Portugal font mieux que nous. Pourquoi ? Parce qu’ils ont eu le courage de dire NON à la dépense incontrôlée.

(Marc Touati, économiste et président du cabinet ACDEFI, était l'invité de l'émission Ecorama du 19 novembre 2025, présentée par David Jacquot sur Boursorama.com. Parmi les sujets abordés : la crise budgétaire française, les tensions politiques autour des hausses d’impôts, la réaction des marchés, les nouvelles prévisions de croissance, mais aussi l’état de santé de l’économie américaine entre brouillard statistique, inflation persistante et politique économique de l’administration Trump.)
 

La servitude volontaire du XXIe siècle

« On » a élu Emmanuel Macron deux fois pour réformer, libérer l’économie, baisser les impôts et la dépense. Huit ans plus tard, nous avons :

  • La fiscalité la plus lourde d’Europe,
  • Une industrie qui fuit,
  • Des services publics qui se dégradent malgré les records de prélèvements,
  • Une dette transmise à nos enfants qui les condamne à payer pour nos lâchetés.

Comme le dit La Boétie, « soyez résolus de ne plus servir, et vous voilà libres ». Macron a choisi de servir : Bruxelles, les lobbies, la paix sociale à court terme.

Il a préféré l’argent magique et la communication (« startup nation », « en même temps ») à l’intérêt national. Aujourd’hui, les agences de notation nous regardent comme la Grèce de 2010. Marc Touati a raison : 445 milliards ont disparu. Et si rien ne change, les prochains 445 milliards disparaîtront aussi.

La France n’est plus seulement endettée. Elle est vassalisée. Par sa propre faute. Par la faute d’un président qui, à chaque carrefour, a choisi la servitude volontaire plutôt que la souveraineté.

https://multipol360.com/bilan-macron-2017-2025-445-milliards-deuros-disparus-selon-marc-touati/


 

novembre 10, 2025

SEMAINE ANTICOMMUNISME, 2025 - DONALD J. TRUMP

Mesures présidentielles
 
 SEMAINE ANTICOMMUNISME, 2025 
PAR LE PRÉSIDENT DES ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE 
PROCLAMATION 
 

 
 
Cette semaine, notre nation observe la Semaine anticommuniste, une commémoration solennelle des ravages causés par l'une des idéologies les plus destructrices de l'histoire. À travers les continents et les générations, le communisme a semé la désolation parmi les nations et les âmes.  
 
Plus de 100 millions de vies ont été fauchées par des régimes qui cherchaient à éradiquer la foi, à supprimer la liberté et à détruire la prospérité acquise par le labeur, bafouant ainsi les droits et la dignité inaliénables des opprimés. En honorant leur mémoire, nous renouvelons notre engagement national à lutter fermement contre le communisme, à défendre la liberté et la dignité humaine, et à affirmer une fois de plus qu'aucun système de gouvernement ne saurait remplacer la volonté et la conscience d'un peuple libre.
 
Depuis plus d'un siècle, le communisme n'a apporté que ruine. Partout où il s'étend, il étouffe la dissidence, punit les convictions et exige que des générations se soumettent à l'État au lieu de défendre la liberté. Son histoire est faite de sang et de souffrance, un sombre rappel que le communisme n'est rien d'autre qu'un synonyme de servitude. 
 
Au cours des 34 années qui ont suivi la fin de la Guerre froide, le monde a été témoin à la fois du triomphe de la démocratie et de la persistance de la tyrannie sous de nouvelles formes. De nouvelles voix répètent aujourd'hui de vieux mensonges, les dissimulant sous le couvert de la « justice sociale » et du « socialisme démocratique », mais leur message reste le même : abandonnez votre liberté, placez votre confiance dans le pouvoir de l'État et troquez la promesse de prospérité contre le confort illusoire du contrôle. L'Amérique rejette cette doctrine perverse. 
 
Nous demeurons une nation fondée sur la vérité éternelle que la liberté et l'égalité des chances sont des droits inaliénables de chaque être humain, et qu'aucune idéologie, étrangère ou nationale, ne peut les anéantir. En cette Semaine anticommuniste, nous restons unis pour défendre les valeurs qui nous définissent en tant que peuple libre. Nous honorons les victimes de l'oppression en perpétuant leur combat et en veillant à ce que le communisme et tout système qui nie les droits à la vie, à la liberté et à la recherche du bonheur soient relégués, une fois pour toutes, aux oubliettes de l'histoire.
 
PAR CONSÉQUENT, moi, DONALD J. TRUMP, Président des États-Unis d'Amérique, en vertu des pouvoirs qui me sont conférés par la Constitution et les lois des États-Unis, proclame la semaine du 2 au 8 novembre 2025 Semaine anticommuniste. 
 
EN FOI DE QUOI, j'ai apposé ma signature ce septième jour de novembre de l'an de grâce deux mille vingt-cinq, et de l'indépendance des États-Unis d'Amérique le deux cent cinquantième. 
 
 DONALD J. TRUMP
 

This week, our Nation observes Anti-Communism Week, a solemn remembrance of the devastation caused by one of history’s most destructive ideologies.  Across continents and generations, communism has wrought devastation upon nations and souls.  More than 100 million lives have been taken by regimes that sought to erase faith, suppress freedom, and destroy prosperity earned through hard work, violating the God-given rights and dignity of those they oppressed.  As we honor their memory, we renew our national promise to stand firm against communism, to uphold the cause of liberty and human worth, and to affirm once more that no system of government can ever replace the will and conscience of a free people.

For more than a century, communism has brought nothing but ruin.  Wherever it spreads, it silences dissent, punishes beliefs, and demands that generations kneel before the power of the state instead of standing for freedom.  Its story is written in blood and sorrow, a grim reminder that communism is nothing more than another word for servitude.

In the 34 years since the end of the Cold War, the world has witnessed both the triumph of democracy and the persistence of tyranny in new forms.  New voices now repeat old lies, cloaking them in the language of “social justice” and “democratic socialism,” yet their message remains the same:  give up your freedom, place your trust in the power of the government, and trade the promise of prosperity for the empty comfort of control.  America rejects this evil doctrine.  We remain a Nation founded on the eternal truth that liberty and opportunity are the birthrights of every person, and that no ideology, whether foreign or domestic, can extinguish them.

As we mark Anti-Communism Week, we stand united in defense of the values that define us as a free people.  We honor the victims of oppression by keeping their cause alive and by ensuring that communism and every system that denies the rights to life, liberty, and the pursuit of happiness will find their place, once and for all, on the ash heap of history.

NOW, THEREFORE, I, DONALD J. TRUMP, President of the United States of America, by virtue of the authority vested in me by the Constitution and the laws of the United States, do hereby proclaim the week of November 2 through November 8, 2025, as Anti-Communism Week. 

IN WITNESS WHEREOF, I have hereunto set my hand this seventh day of November, in the year of our Lord two thousand twenty-five, and of the Independence of the United States of America the two hundred and fiftieth.

                             DONALD J. TRUMP

 
 




Communisme

Le communisme est un système théorique d'organisation sociale reposant sur la propriété commune des moyens de production. C'est également un mouvement politique qui prétend renverser le capitalisme pour instaurer une société sans classe. Sa réalité reste cependant très éloignée de sa théorie. 

Manifeste politique du communisme

Le communisme désigne également le système politique proposé par Karl Marx dont voici les 10 points-clés du Manifeste du Parti Communiste[1] :

  1. Expropriation de la propriété foncière et affectation de la rente foncière aux dépenses de l'État
  2. Impôt fortement progressif
  3. Abolition de l'héritage
  4. Confiscation des biens de tous les émigrés et rebelles
  5. Centralisation du crédit entre les mains de l'État, au moyen d'une banque nationale, dont le capital appartiendra à l'État et qui jouira d'un monopole exclusif
  6. Centralisation entre les mains de l'État de tous les moyens de transport
  7. Multiplication des manufactures nationales et des instruments de production ; défrichement des terrains incultes et amélioration des terres cultivées d'après un plan d'ensemble
  8. Travail obligatoire pour tous ; organisation d'armées industrielles, particulièrement pour l'agriculture
  9. Combinaison du travail agricole et du travail industriel ; mesures tendant à faire graduellement disparaître la distinction entre la ville et la campagne
  10. Éducation publique et gratuite de tous les enfants. Abolition du travail des enfants dans les fabriques tel qu'il est pratiqué aujourd'hui. Combinaison de l'éducation avec la production matérielle, etc.

On peut remarquer que la social-démocratie a réalisé au XXe siècle tous ces objectifs, en partie et à des degrés divers.

Le communisme, un système inéluctablement totalitaire ?

Si la théorie communiste promet un monde de liberté, sans classes, de nombreux auteurs ont montré que le communisme impliquait au contraire le totalitarisme. Parmi les théoriciens du communisme comme totalitarisme, Friedrich Hayek dans La Route de la servitude (1944) souligna que l'interventionnisme étatique était une pente glissante vers le totalitarisme, sur une « route de la servitude ». La planification économique est le contrôle des moyens par lesquels les hommes peuvent réaliser les fins qu'ils se fixent ainsi que le contrôle de ces fins. Un contrôle total de la vie économique signifie que les moyens et les fins humaines sont décidées par l'État et qu'ainsi la liberté est abolie. John Jewkes développa une thèse proche dans Ordeal by planning (1946)

Le philosophe Karl Popper dans La Société ouverte et ses ennemis range Karl Marx avec Friedrich Hegel et Platon dans la lignée des intellectuels responsables de la genèse des idées totalitaires.

Au socialisme proprement dit, qui est un collectivisme coercitif, le communisme, religion séculière selon Raymond Aron[2], rajoute une eschatologie, soit une perspective de fin des temps. Pour l'idéologie marxiste, un État libre et abondant, dans lequel sera terminée la lutte des classes, s'établira plus tard, après la dictature du prolétariat et la phase présumée transitoire de capitalisme d'État. Cet État utopique, le communisme, constituera une sorte de paradis terrestre, l'adage « à chacun selon ses besoins » sera réalisé. On conçoit aisément qu'au pays de Cocagne, où tous nos besoins sont satisfaits magiquement, le communisme soit facile à instaurer (n'importe qui est disposé à partager la surabondance), mais au nom de ce paradis terrestre sont morts au XXe siècle une centaine de millions d'êtres humains.

Un système économique qui ne peut pas fonctionner

La théorie communiste, dans sa version marxiste, se fonde sur un certain nombre de concepts dont la validité a été mise en pièces depuis bien longtemps. Ces points sont développés dans les articles concernés.

Le débat sur le calcul économique en régime socialiste avait dès les années 1920 - 1930 établi l'impossibilité d'une économie socialiste, en se fondant cette fois là sur l'impossibilité d'une économie sans prix. Les prix jouent en effet un rôle irremplaçable de transmission de l'information dans l'économie, pour permettre à chacun de ses acteurs de se coordonner avec les autres, sans une autorité centrale. Le communisme substitue à cela des autorités centrales omnipotentes, en charge d'orienter l'économie pour le bien de tous. Michael Polanyi dans La Logique de la liberté montra que cette planification voulue par le communisme ne peut pas fonctionner car les ordres monocentriques (dirigés d'en haut) sont incapables de gérer la masse d'information utilisée dans les sociétés polycentriques.

Des auteurs comme Oskar Lange ont tenté de définir un « socialisme de marché » pour dépasser ce problème essentiel du communisme. Dans ce système les prix, sans être libres, seraient fixés par l'État, par « essai et erreur », en mimant les mécanismes des acteurs du marché. Autrement formulé, la seule solution possible pour faire fonctionner la planification est que l'autorité centrale copie les acteurs du marché de façon moins efficiente. Friedrich Hayek fit une critique détaillée de ces thèses du socialisme de marché, en insistant sur le rôle de la connaissance et sur le vecteur d'information des prix dans un système de libre économie.

« De chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins »

L'utopie communiste de « chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins », apparemment généreuse, ne pourrait se réaliser que dans un monde idéal où la rareté serait éliminée. Cette idée fausse et largement discréditée y compris à gauche a pourtant laissé d'importantes traces dans les social-démocraties contemporaines : ainsi, les dirigeants de la Sécurité sociale française ne cachent pas que leur seule règle de gestion est « chacun cotise selon ses moyens, et reçoit selon ses besoins »[3]. En pratique, on obtient des déficits continuels et un accroissement ininterrompu de la dette publique.

Les dirigeants socialistes étant amenés très vite à constater que les besoins sont illimités alors que les moyens sont restreints, deux stratégies leur sont ouvertes :

Bilan du communisme

Les résultats des expériences communistes, anciennes comme récentes, ont tristement tous confirmé les analyses des théoriciens sur la nature intrinsèquement totalitaire du communisme. Dans leur ouvrage de référence Le Livre noir du communisme, un collectif d'historiens emmené par Stéphane Courtois arrivent à une estimation d'environ 80 millions de mort causés de manière directe par les régimes communistes du XXe siècle. Certains avancent même jusqu'à 100 millions de morts. Parmi les principales « contributions » à ce bilan macabre :

  • URSS : 15 millions de morts environ selon Nicolas Werth, entre goulags, holodomor, antisémitisme et autres outils répressifs tristement célèbres
  • Chine maoïste : de 45 à 72 millions de mort selon Jean-Louis Margolin, avec le « grand bond en avant ». En cause dans ce bilan massif, la tentative maoïste d'avoir voulu « rééduquer une société tout entière »[4]
  • Cambodge : entre 1,3 et 2,3 millions de personnes exterminées par les Khmers rouges de 1975 à 1979, soit jusqu'à 30 % de la population du pays
  • Amérique Latine : 150 000 morts selon Stéphane Courtois, à Cuba, au Nicaragua ou au Pérou (Sentier lumineux). Che Guevara, figure marketing du communisme, exécuta lui-même à la prison de la Cabana plus d'une centaine de policiers et militaires du régime précédent jugés coupables de crimes de guerre ou de compagnons de route trop « tièdes ».
  • Europe de l'Est (Pologne, pays baltes, coup de Prague, etc.)
  • Corée du Nord
  • Afrique (Angola, etc.)

De nombreux rapprochements sont effectués entre le communisme soviétique et le nazisme, les deux grands totalitarismes du XXe siècle, qui s'allièrent avec le Pacte Germano-Soviétique du 23 août 1939. Au delà de la ressemblance d'un triste bilan macabre (80-100 millions pour le communisme, 12 millions pour le nazisme), et de la différence dans les objectifs affichés, beaucoup soulignent que nazisme et communisme procèdent d'une même logique. Ernst Nolte est l'un des historiens qui a défendu avec le plus de véhémence les liens substantiels entre nazisme et communisme. Dans La Guerre civile européenne, publié en Allemagne en 1987, il affirme : « Ce qu'il y a dans le national-socialisme de plus essentiel, c'est son rapport au marxisme, au communisme particulièrement, dans la forme qu'il a prise grâce à la victoire des bolcheviks[5] ». Sa thèse est que les fascismes sont une double réaction à la fois contre la révolution bolchevique et le système démocratique libéral qui leur sont antérieures. Les fascismes empruntent une part importante de leur idéologie aux démocraties (le système de l'union du peuple avec le gouvernement, l'idée de « volonté générale ») et au communisme (système totalitaire, élimination des opposants, unification de la société). Partisan de la théorie du totalitarisme, Nolte établit un lien de causalité, un « nexus causal », entre le Goulag et Auschwitz : ce dernier serait pour une bonne part une adaptation nationale de l'original communiste et une réponse à ce dernier.

Le philosophe Jean-François Revel résumait cela de manière lapidaire : « Le communisme, c'est le nazisme, le mensonge en plus ».

Le communisme volontaire ?

Au plan politique, les libéraux sont opposés au communisme d'une part parce que celui-ci ne peut exister qu'avec la coercition et la violence, et d'autre part parce que l'idéal communiste est total et collectif et ne laisse aucune place à la liberté individuelle. Néanmoins, si des communautés veulent mettre en œuvre une espèce de communisme en leur sein par mise en commun de tous les biens de leurs membres, rien ne s'y oppose dans un régime libéral, tant que les droits de chacun sont respectés et que chacun a exprimé son consentement. C'est ainsi le cas pour certaines formes de coopération comme le mutualisme, ou dans certaines communautés religieuses monastiques ou laïques, adeptes d'une pauvreté volontaire (par exemple les huttérites).

Christian Michel résume ces remarques :

«  Le communisme est un bel idéal. Que les communistes s'organisent dans leurs communes et phalanstères, qu'ils affichent leur bonheur d'y vivre, et ils seront rejoints par des millions et des milliards de gens. [...] Ce qu'il faut combattre n'est pas le communisme, ni aucune autre idéologie, mais la traduction politique de cette idéologie. »

Il y a eu au moins une expérience de communisme volontaire : celle du kibboutz en Israël après l’indépendance de 1947. Elle s'est soldée par un échec et la disparition de quasiment tous les kibboutzim, transformés en entreprises privées[6].

La raison de l'échec de toute idéologie collectiviste telle que le communisme est que, dans un tel type d'organisation sociale, les personnes les plus capables ne voient pas leurs mérites reconnus et récompensés, et finissent par rejeter un collectif qui les exploite ; un système où la responsabilité est collective pousse chacun à vivre aux dépens des autres, comme l'ont montré dès le départ les premières expériences de « socialisme utopique » telles que celle du philanthrope Robert Owen au XIXe siècle. La pauvreté (faute de motivation à produire des biens et services) est ainsi le résultat inéluctable du communisme politique. L'autoritarisme, l'oppression et la dictature en constituent l'autre aspect : dans l'optique d'un Lénine, le prolétariat ignore ce qui est bon pour lui et doit donc être contraint par le parti.

Pays communistes aujourd'hui

Ces pays sont dirigés par un parti communiste (pas de liberté politique), mais pour la plupart sont passés à une économie de marché, à la suite de l'exemple chinois.

  • Corée du Nord, depuis 1948 (conserve une économie pour l'essentiel planifiée et étatisée, sans propriétés privées, mais autorise le petit commerce depuis quelques années)
  • Chine, depuis 1949 (sur le plan économique passée à l'économie de marché depuis 1990)
  • Viêt Nam, depuis 1976, ou 1954 pour le Nord Vietnam (sur le plan économique ouvert à l'économie de marché depuis 1991)
  • Laos, depuis 1975 (sur le plan économique passé à l'économie de marché depuis 1991)
  • Cuba, depuis 1959 (sur le plan économique passé à l'économie de marché depuis 2011)

Le communisme en France au XXIe siècle

La sortie du Livre noir du communisme en 1997 suscita une vague de réactions à l'extrême gauche et d'attaques violentes envers leurs auteurs, offrant une révélation de l'influence toujours majeure du communisme sur l'intelligentsia française au tournant du XXe siècle. Comme le formula Gérald Messadié dans 4000 ans de mystifications historiques (2011) :

« En 1997 paraissait un ouvrage dont il fut d’emblée évident qu’il ferait date : Le Livre noir du communisme : crimes, terreur, répression. Il dénonçait, quatre-vingts ans après la révolution d’Octobre, les crimes du communisme et, plus particulièrement, ceux du régime soviétique. Le bilan en était accablant : quatre-vingts millions de morts, douze fois celui des camps de la mort. [...] En réalité, la distorsion du regard requise pour les crimes du communisme tient à des raisons idéologiques ; elle procède du refus obstiné à admettre que le communisme était un totalitarisme. Elle est à peu près la même partout et, en France, elle équivaudrait à renier de vastes pans de l’histoire politique et idéologique, de la Révolution française à l’adoration professée par des écrivains, des penseurs et des artistes pour Joseph Staline. La liste en est longue. Et, pour plus d’un, inscrire Lénine, Staline et leurs sectateurs au tableau de ceux qui commirent des crimes contre l’humanité serait organiser l’office funèbre du socialisme. [...] La distorsion demeure donc. Le constat désabusé d’un historien respecté tel que François Furet dans Le Passé d’une illusion n’y a rien changé. »
    — Gérald Messadié, 4000 ans de mystifications historiques

Même aujourd'hui, certains philosophes du début du XXIe siècle, encore dans le sillage du marxisme, cultivent une sorte de nostalgie à l'égard du communisme, ou le voient toujours comme une utopie acceptable. Pour Alain Badiou, le communisme est « le nom générique d’une alternative au capitalisme »[7].

Slavoj Žižek critique le « manque de radicalisme » des dirigeants communistes du XXe siècle (qu'il s'agisse des maoïstes ou des Khmers Rouges) et affirme la valeur intrinsèque de la violence révolutionnaire ; proche d'un nihilisme subjectiviste, il évite soigneusement de décrire sa vision de ce que pourrait être un monde communiste[8].

De même, le philosophe et économiste souverainiste Frédéric Lordon prône un « soulèvement » contre les tenants du système, et dit publiquement qu'« il faut mettre les jetons » aux gens de la finance, sans expliquer quel type de société il envisage pour remplacer le système[9].

Des politiques ou universitaires peuvent aujourd'hui encore se réclamer ouvertement de l'URSS et remettre en cause la réalité des crimes de Joseph Staline et de Lénine (PRCF, Annie Lacroix-Riz).

Un certain nombre d'universitaires français restent fascinés par le côté romantique des révolutions et oublient volontairement tant les crimes communistes que l'effondrement économique qu'entraîne cette idéologie :

« Au lendemain de 1989, il sembla un temps que le programme communiste avait été défait, et que tout indiquait un rejet décisif des idées qui avaient réduit en esclavage les peuples d’Europe de l’Est depuis la guerre. Mais la machine à non-sens fut lancée pour détruire les jeunes pousses de l’argument rationnel, pour tout recouvrir d’un brouillard d’incertitude et pour relancer l’idée – déjà présente et toxique chez Lukács – que la vraie révolution était encore à venir, et que ce serait une révolution des mentalités, une libération intérieure, contre laquelle l’argument rationnel (qui est une simple « idéologie bourgeoise ») ne peut se défendre. Ainsi, le règne du non-sens coupa si radicalement la question de la révolution de toute possibilité d’enquête rationnelle que celle-ci ne pouvait plus être directement posée. »
    — Roger Scruton, L'Erreur et l'orgueil - Penseurs de la gauche moderne, L'Artilleur, 2015

On peut également parler d'un « marxisme de droite », typiquement français (Jean-Claude Michéa, Alain de Benoist). Le marxiste de droite déteste le libéralisme économique et approuve certaines idées marxistes relativement à l'économie, tout en étant lucide sur les dérives extrémistes de la gauche en matière sociétale. Il considère la France comme un pays beaucoup trop libéral et recommande par conséquent de le socialiser davantage. On trouve de même aux États-Unis des identitaires suprémacistes (par exemple Richard Spencer) qui approuvent le socialisme, pourvu qu'il soit régi par des Blancs et au bénéfice des Blancs.

Citations

Searchtool-80%.png Article détaillé : Citations sur le communisme.
  • « On ne peut bien vivre là où tout est en commun. Comment l'abondance de produits peut-elle se réaliser là où chacun essaye de se soustraire au travail, étant donné qu'il n'est point stimulé par la pensée de son propre profit et que la confiance dans le travail de l'autre le rend indolent ? » (Thomas More, Utopia, 1516)
  • « Communisme : rêve de quelques-uns, cauchemar de tous. » (Victor Hugo, Choses vues)
  • « Communistes : Votre ennemi c'est le mur mitoyen. Le mien, c'est le despotisme. J'aime mieux escalader les trônes que la haie du voisin. » (Victor Hugo, Choses vues)
  • « Tous les révolutionnaires proclament à leur tour que les révolutions précédentes ont fini par tromper le peuple ; c'est leur révolution seule qui est la vraie révolution. « Tous les mouvements historiques précédents », déclarait le Manifeste communiste de 1848, « étaient des mouvements de minorités ou dans l'intérêt de minorités. Le mouvement prolétarien est le mouvement conscient et indépendant de l'immense majorité, dans l'intérêt de l'immense majorité ». Malheureusement cette vraie révolution, qui doit apporter aux hommes un bonheur sans mélange, n'est qu'un mirage trompeur qui ne devient jamais une réalité. Elle est apparentée à l'âge d'or des millénaristes : toujours attendue, elle est toujours perdue dans les brumes du futur, échappant toujours à ses adeptes au moment où ils pensent la tenir. » (Vilfredo Pareto)
  • « En abolissant la propriété personnelle, le communisme ne fait que me rejeter plus profondément sous la dépendance d'autrui, autrui s'appelant désormais la généralité ou la communauté. Bien qu'il soit toujours en lutte ouverte contre l'État, le but que poursuit le communisme est un nouvel « État », un status, un ordre de choses destiné à paralyser la liberté de mes mouvements, un pouvoir souverain supérieur à moi. [...] Désormais toute distinction s'efface, tous étant des gueux, et la société communiste se résume dans ce qu'on peut appeler la « gueuserie » générale. » (Max Stirner)
  • « Si on n'est pas communiste à 20 ans, c'est qu'on a pas de cœur. Si on l'est toujours à 40 ans, c'est qu'on a pas de tête. » (Attribuée à George Bernard Shaw (hautement improbable), Clemenceau, Winston Churchill, probablement apocryphe pour tous)
  • « Le Parti n'a pas raison parce que la doctrine est vraie, la doctrine est vraie parce que le Parti a toujours raison. » (Étienne Gilson)
  • « Si les régimes communistes se sont effondrés, c'est parce qu'ils ont perdu leurs deux piliers : la foi et la peur. » (Václav Klaus, président tchèque)
  • « L’une des plus amères ironies du XXe siècle fut que le communisme, qui se voulait une doctrine égalitaire et accusait le capitalisme d’égoïsme et de sacrifier cruellement les autres pour son bonheur, est devenu une fois au pouvoir un système d’un égoïsme et d’une cruauté telle qu’elle rendait les péchés du capitalisme pâles en comparaison. »' (Thomas Sowell)
  • « Le communisme n'est ni un système économique ni un système politique. C'est une forme de folie, une aberration temporaire qui disparaîtra un jour de la surface de la Terre parce qu'elle est contraire à la nature humaine. » (Ronald Reagan)
  • « Communisme : système généreux, qui enrichit la population en l'appauvrissant, et rend l'homme plus libre en l'enfermant. » (Christian Millau, Dictionnaire d'un peu tout et n'importe quoi)
  • « Entre le communisme et le socialisme, il y a la différence entre l'assassinat et l'homicide par imprudence. » (Wilhelm Röpke)
  • « Le communisme veut le bonheur de l’humanité – mais à la condition que les méchants en aient été écartés au préalable. Comment peut-on encore croire à l’universalisme de la doctrine quand celle-ci affirme qu’elle repose sur la lutte, la violence, la révolution permanente, la haine, la dictature, la guerre ? La justification qu’elle se donne est que le prolétariat est la majorité, la bourgeoisie est une minorité, ce qui nous mène déjà loin de l’universalisme . » (Enzo Traverso, Le totalitarisme. Le XXe siècle en débat [10]

https://www.wikiberal.org/wiki/Communisme

 

 

octobre 31, 2025

Alexis de Tocqueville, voyageur et acteur des révolutions libérales.

 

Abbatiale de Saint-Maixent-l’Ecole, Deux-Sèvres.

Photographie : T. Guinhut.

 

 

Alexis de Tocqueville,

voyageur et acteur des révolutions libérales.

Par Françoise Mélonio, Michel Onfray

& Raymond Boudon.

 

 

Françoise Mélonio : Tocqueville, Gallimard, 2025, 624 p, 27 €.

 

Alexis de Tocqueville : De la Démocratie en Amérique, Œuvres II,

La Pléiade, Gallimard, 2001, 1232 p, 68,50 €.

 

Alexis de Tocqueville : Quinze jours au désert, Le Passager clandestin, 2011, 112 p, 16 €.

 

Michel Onfray : Tocqueville et les Apaches, Autrement, 2017, 208 p, 18 €.

 

Raymond Boudon : Tocqueville aujourd’hui, Odile Jacob, 2005 304 p, 29,90 €.

 

 

L’on croit connaître Tocqueville si l’on a dit qu’il est l’auteur de De la démocratie en Amérique, dans laquelle il fait l’éloge de la constitution et de la libre entreprise des Etats-Unis. Tout en s’interrogeant sur la passion démocratique de l’égalité qui peut conduire, via la tyrannie de la majorité et l’état tutélaire, à l’acceptation de la servitude. Mais qui est cet homme, comment est-il devenu le penseur et l’acteur des révolutions libérales que nous connaissons trop peu, par quelles enquêtes et voyages ? Opportunément, Françoise Mélonio nous livre une roborative biographie, quand, quoique l’on puisse trouver ce texte en Pléiade, un éditeur qui se veut « clandestin », ose mettre en avant les Quinze jours au désert américains de notre cher Tocqueville. Aussi verra-t-on comment, au milieu du XIX° siècle,  il considère avec une empathie diverses les Indiens américains, les noirs et les Algériens, ce qui suscite l’ire de Michel Onfray. Reste à considérer, à l’aide Raymond Boudon, l’héritage trop oublié d’un Tocqueville libéral que la France d’aujourd’hui méconnait absurdement.

Les biographies de Tocqueville ne manquent pas ni ne sont sans mérites, telles celles de Brigitte Krulic[1] ou d’Olivier Zunz[2]. Mais elles pâlissent devant l’apparition de celle de Françoise Mélonio, opus tout autant soigneusement documenté, foisonnant, qu’agréable à lire, tout entier en faveur de cet « éducateur de la démocratie ».

Lorsque l’on nait en 1805 dans une famille d’aristocrates normands, l’on a forcément derrière soi « un héritage d’échafaud », mais aussi, après 1815, lors de la Restauration, un père, Hervé, plusieurs fois préfet. Très vite, le jeune homme devient déiste, et au conservatisme de l’aristocratie légitimiste il préfère les valeurs issues des Lumières. Une fois acquis son diplôme de Droit, en 1826, il entame un grand tour en Italie, de Naples à la Sicile, où il est frappé par « le despotisme politique et social ». Nommé juge à Versailles, il se fait en ce milieu un ami de toute la vie : Gustave de Beaumont. Navré par l’étroit conservatisme de Charles X, puis la révolution de 1830, il accepte le régime de Louis-Philippe, tout en restant attaché au concept d’une monarchie parlementaire plus libérale.

 

C’est alors qu’il part, en 1831, avec son ami, en Amérique, sous couvert d’y étudier le système pénitentiaire, dont le taux de récidive et le coût sont plus faibles qu’en France.  Ce qui donnera lieu à une publication en 1833. Mais il s’agit surtout de savoir pourquoi « une vaste république est praticable ici, impraticable là ». Il découvre une démocratie égalitaire unique au monde, mue par la nécessité de faire de l’argent, « critère plus souple que la naissance », et traversée par des courants réformateurs « en faveur de l’abolition de l’esclavage, de l’humanisation des prisons, du droit des femmes et du développement de l’instruction publique ». Il explore les forêts lointaines, le Canada français, Boston, le Mississipi. Le voilà choqué par la pauvreté brutale, minée par l’alcool, des Indiens, par la déportation des tribus, par la ségrégation à l’encontre des Noirs.

C’est en deux parties que parut cet essai devenu classique du libéralisme et de la sociologie : De la Démocratie en Amérique, en 1835 puis 1840. Au-delà de la mission qui l’envoya observer le système pénitentiaire américain, Tocqueville élargit sa réflexion et prit de la hauteur pour offrir une pensée politique d’une étendue considérable. La première partie est essentiellement une analyse de la confédération, quand la seconde est plus critique, non sans proposer des comparaisons avec les modes de vie et les législations de l’ancienne Europe. Mue par la passion de la liberté, avertie des vexations imposées par l’Etat, depuis l’indépendance gagnée de haute lutte sur l’impérialisme anglais, les Etats-Unis d’Amérique usent du libéralisme politique et économique au service du progrès humain, à condition de ne pas souffrir avec excès de la différence entre le riche et le pauvre. L’égalité des conditions, civile et juridique, est un gage de démocratie, ce en quoi Tocqueville est fidèle à Benjamin Constant. Voilà la perspective proposée à l’Europe et à la France.

Mais cette passion de l’égalité, peut devenir dangereuse pour les libertés des citoyens, encourageant le conformisme et menaçant les différences et réussites individuelles. L’empire de la majorité fait mieux que les bûchers pour détruire les livres subversifs, « elle a ôté jusqu’à la pensée d’en publier ». Ce qui est une préfiguration des concepts d’autocensure et de l’intimidation par la masse.

Bientôt, Tocqueville en arriva au concept de « despotisme démocratique », étant donné l’emprise de la tyrannie de la majorité : « Je veux imaginer sous quels traits nouveaux le despotisme pourrait se produire (…) Au-dessus de ceux-là s’élève un pouvoir immense et tutélaire (…) il rend moins utile et plus rare l’emploi du libre-arbitre (…) le souverain étend ses bras sur la société tout entière ; il en couvre la surface d’un réseau de petites règles compliquées, minutieuses et uniformes, à travers lesquelles les esprits les plus originaux et les âmes les plus vigoureuses ne sauraient se faire jour pour dépasser la foule, il ne brise pas les volontés, mais il les amollit, les plie et les dirige ; il force rarement d’agir, mais il s’oppose sans cesse à ce qu’on agisse ; il ne détruit point, il empêche de naître ; il ne tyrannise point, il gêne, il comprime, il énerve, il éteint, il hébète (…) un pouvoir unique, tutélaire, tout puissant, mais élu par les citoyens[3] ».

 

Françoise Mélonio n’a pas tort de penser que notre philosophe et sociologue tire de l’Amérique, «  une vision exagérément irénique », du moins par contraste avec la France de son temps. Cependant l’on a compris que la démocratie recèle en son sein de dangereuses espérances…

Moins célèbre est L’Ancien régime et la révolution. Livre d’historien, certes, mais aussi d’analyse politique, qui « traque l’origine du penchant des Français pour les Bonaparte », soit pour les hommes providentiels, voire les tyrans…

Pour revenir à la savante biographie de Françoise Mélonio, grâce à elle l’on sait tout ou presque sur la famille de notre cher Alexis de Tocqueville, ses deux frères, moins brillants, sa carrière judiciaire déçue, son travail de parlementaire. Mais aussi sur sa maîtresse Marie, qu’il finira par épouser, alors que sa fidélité lui permettra de veiller – avec l’ami Beaumont – sur ses manuscrits et leur publication, après la mort précoce de notre sociologue et philosophe politique, en avril 1859, soit à l’âge encore tendre de 54 ans.

Et loin de n’être qu’une biographique narrative, il s’agit là d’une biographie intellectuelle et conceptuelle. C’est « éclairer, à travers un parcours individuel, l’Histoire politique et intellectuelle du XIX° siècle et celle, en amont, de la Révolution », mais plus encore permettre au libéralisme économique et politique de se voir justifiés par l’acuité de l’observation et de la pensée. Tocqueville ne fut romantique que dans sa passion des libertés et des grands espaces américains, mais plus exactement un héritier des Lumières, tant la liberté individuelle et de la presse devait être pour lui le pilier de la démocratie libérale.

Glissons vers des versants méconnus parmi l’œuvre de ce chantre du libéralisme.  Par exemple grâce aux éditions Le Passager clandestin de nous ouvrir des yeux curieux. Car ces Quinze jours au désert sont un précieux journal de voyage dans les profondeurs du Michigan, en 1831. L’auteur parcourt une nature qui le stupéfie par sa vide immensité, en une perspective digne du sublime romantique, où les colons font preuve d’une force physique et morale extraordinaire en vue d’y construire un pays neuf « qui marche à l’acquisition des richesses ». Mais admirant ces villages qui deviennent des villes, déplorant l’abattage des arbres, il est « en quête des sauvages et du désert ». Qui eût cru qu’un tel penseur allait faire preuve de tant d’empathie envers les Indiens, ce « peuple antique, le premier et légitime maître du continent », qu’il allait s’alarmer du comportement des blancs, de leur « égoïsme froid et implacable lorsqu’il s’agit des indigènes » ? Sa première rencontre est pourtant décevante : « Aux vices qu’ils tenaient de nous se mêlait quelque chose de barbare et d’incivilisé qui les rendait cent fois plus repoussants encore ». L’eau de vie qui dévaste leur santé permet aux nouveaux Américains de se déculpabiliser, bien qu’ils la leur vendent… Enfin, il est touché par leur « charme réel », leur fierté, leur bonté, leur attachement à la vie dans la nature, leur « indépendance barbare ». Sans céder au mythe du bon sauvage, Tocqueville, sociologue perspicace, est un humaniste attentif à la condition humaine, y compris des femmes des colons, des métis, ainsi qu’à la variété des religions chrétiennes qui n’empêchent malheureusement pas « le sort final réservé aux races sauvages », soit les massacres, l’exil vers de pauvres pâturages, des réserves arides…


Nous ne partagerons pas forcément les convictions de Tocqueville sur la colonisation de l’Algérie. Pourtant il ne faut en rien oublier que la prise d’Alger, en 1830, fut orchestrée pour mettre fin aux pirateries, pillages et réductions en esclavage par les navires barbaresques venus de ce même port. Ainsi cessèrent enfin ces violences séculaires. Est-ce à dire qu’il fallait compléter la chose par la colonisation de l’Algérie ? Une expédition guerrière coûteuse mobilise des effectifs militaires importants et des moyens financiers considérables. Parmi les personnalités politiques, certaines exigent le retrait des troupes françaises, d’autres préconisent une occupation limitée, d’autres enfin sont en faveur de l’extension de la domination et de la colonisation.

Rappelons-nous à cet égard que Jacques Marseille[4], pensant d’abord établir les bénéfices de la colonisation en faveur de la France, finit par s’apercevoir qu’au contraire, en exportant hommes, matériaux, capitaux et subventions, l’affaire fut largement déficitaire… L’on se doute que, malgré le travail scrupuleusement documenté de l’historien, une cohorte de bien-pensants gauchisants le vilipende à l’envi.

Pour revenir à notre Tocqueville, alors qu’il était déjà nanti d’une abondante documentation, il est nommé membre d’une commission extraordinaire attachée à l’Algérie. En 1841, puis 1846, son enquête soucieuse lui permet de découvrir villes, villages, de faire connaissance avec la population indigène, et d’abord « l’état social et politique des populations musulmanes et orientales : la polygamie, la séquestration des femmes, l’absence de toute vie publique, un gouvernement tyrannique et ombrageux[5] ». Découvrant également les acteurs français, et sans guère hésiter, Tocqueville approuve la colonisation, y compris avec le recours de tribunaux d’exception qui relèvent du droit de la guerre.


Le prolixe et bavard Michel Onfray, familier une fois de plus de l’emporte-pièce, n’hésite pas à déboulonner la tocquevillienne mémoire, usant du réquisitoire à l’envi. Tocqueville et les Apaches, sous-titré « Indiens, nègres, ouvriers, Arabes et autres hors-la-loi », permet de dévoiler un penseur de la démocratie et de la liberté qui justifie le massacre des Indiens d’Amérique, l’apartheid entre Noirs et Blancs, la violence coloniale en Algérie, le coup de feu contre les ouvriers quarante-huitards. Pour Michel Onfray, « si l’on est blanc, catholique, Européen, propriétaire, Tocqueville est le penseur ad hoc », trois qualificatifs fort exagérément dépréciatifs.

Tocqueville désapprouve moins « la grande plaie » de l’esclavage par empathie humaniste que pour cause d’une rentabilité économique bien moins efficace que la liberté et le salariat. Mais Michel Onfray omet de faire allusion à des pages plus clémentes, plaidant la cause des Noirs du Nord des Etats-Unis : « Ainsi le Nègre est libre, mais il ne peut partager ni les droits, ni les travaux, ni les douleurs, ni même le tombeau de celui dont il a été déclaré l’égal[6] ».

Il est, pour Michel Onfray, celui qui justifie et légitime « ce que l’on nomme aujourd’hui ethnocide ou crime de guerre », en particulier dans le cas de l’Algérie. En effet Tocqueville ne se lasse pas de démonter « que le droit de la guerre nous autorise à ravager le pays » que « des voyages meurtriers [lui] paraissent quelquefois indispensables[7] ». Certes Michel Onfray n’a pas tort de dénoncer un « manuel de guerre coloniale », mais c’est négliger la dangerosité de l’islam et des conquêtes arabes, quoiqu’il écrivit un volume brouillon pas toujours cohérent, néanmoins passablement informé, peu amène envers son objet d’étude, intitulé Penser l’islam[8].

C’est pourtant exiger de Tocqueville qu’en dépit de son inscription dans son siècle il soit en tout parfait et conforme à quelque notion du bien absolu qu’un Onfray ne peut représenter péremptoirement, à l’instar du modeste critique qui joue sur son clavier pour produire cette lecture et cette réflexion.

Le sociologue Raymond Boudon est à juste titre beaucoup plus sensible à la pensée de notre Alexis. Dans Tocqueville aujourd’hui, il se pose les indispensables questions suivantes. « Pourquoi est-il si difficile de réformer l’État français ? Pourquoi y a-t-il beaucoup plus de fonctionnaires en France qu’en Allemagne ? Pourquoi les Américains sont-ils beaucoup plus religieux que les Anglais ou les Français ? Pourquoi le culte de l’égalité prend-il le pas sur celui de la liberté ? » Tocqueville prédisait et expliquait l’apparition du culte des droits de l’homme, l’éclatement des religions, le succès de la littérature facile, les effets pervers de l’État-providence, les résistances au libéralisme. Ce dernier avait vu juste tant les choses ont empirées en notre XXI° siècle. Aussi Raymond Boudon accuse-t-il les intellectuels et gouvernants français de ne pas lire Tocqueville, tant le marxisme et l’étatisme centralisateur obèrent la liberté et la croissance françaises.

Pauvre Tocqueville, si tu revenais parmi nous… Voulant assurer « le mirage de la justice sociale » – selon la formule de Friedrich August Hayek[9] – l’égalité économique, écrêter les riches pour donner aux pauvres assistés et autres immigrés importés par flottilles, notre Etat dévoyé, notoirement incompétent, dévore ses enfants et n’en rejette que les os, à force de se dévouer à une obèse sociale redistributive, non seulement dispendieuse, mais contreproductive, car ruineuse, tant sur le plan de la dette appauvrissante que sur le plan civilisationnel. Voici fleurir, sous nos yeux pour le moins inquiets, pour revenir à notre Tocqueville, « les périls que l’égalité fait courir à l’indépendance humaine[10] ». Reste à longuement méditer sa distinction entre la centralisation administrative, liberticide, et la centralisation politique, indispensable pour la sécurité nationale. Et combien « le résultat général de toutes ces entreprises individuelles dépasse de beaucoup ce qu’aucune administration ne pourrait entreprendre. […] Le plus grand soin d’un gouvernement devrait être d’habituer peu à peu les peuples à se passer de lui[11] ». Nous en sommes bien loin, hélas…

Thierry Guinhut

 La partie sur Quinze jours au désert fut publié

dans Le Matricule des Anges, juin 2011

Une vie d'écriture et de photographie


[1] Brigitte Krulic : Tocqueville, Folio 2016.

[2] Olivier Zunz : Tocqueville. L’homme qui comprit la démocratie, Fayard, 2022.

[3] Alexis de Tocqueville : De la Démocratie en Amérique, II, IV, VI, Œuvres II, Pléiade, 2001, p 836-838.

[4] Jacques Marseille : Empire colonial et capitalisme français, Points, 1989.   

[5] Alexis de Tocqueville : Notes du voyage en Algérie de 1841, Œuvres I, La Pléiade, 2001, p 660.

[6] Alexis de Tocqueville : De la Démocratie en Amérique, II, IV, VI, Œuvres II, Pléiade, 2001, p 398.

[7] Alexis de Tocqueville : Notes du voyage en Algérie de 1841, Œuvres I, La Pléiade, 2001, p 706.

[8] Michel Onfray : Penser l’islam, Grasset, 2016.

[9] Friedrich August Hayek : Droit, législation et liberté, II, PUF, 2013.

[10] Alexis de Tocqueville : De la Démocratie en Amérique, II, IV, VI, Œuvres II, Pléiade, 2001, p 849.

[11] Alexis de Tocqueville : Voyage en Amérique. Cahier non alphabétiques 2 et 3, Œuvres I, Pléiade, 2001, p 66

 

 

Photographie : T. Guinhut.


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